23/03/00

Procès Velasco vs Alessandri

ATTESTATION


J'ai eu à connaître des textes divers concernant une vague d'observations de phénomènes lumineux dans le ciel ayant attiré l'attention de nombreux observateurs, le 5 novembre 1990 en début de soirée. Sans avoir moi-même observé le phénomène, il est clair a priori qu'il convient, dans ce genre d'observations, de faire preuve de la plus élémentaire circonspection, et, si l'on veut ou si l'on doit se prononcer, il convient de ne le faire qu'après une description précise des observations (aspect, position, temps, durée du phénomène), et après un calcul correct de l'orbite de l'engin responsable (si cette notion est adaptée au cas en question), calcul effectué à partir des observations, et d'une connaissance sérieuse de la mécanique des trajectoires, applicable notamment aux satellites artificiels, et donc après un calcul de toutes les caractéristiques orbitales (inclinaison sur l'équateur terrestre, demi-grand axe, excentricité, ascension droite du noeud ascendant, notamment), - ce qui est loin d'être une opération instantanée.

Il est clair qu'un organisme comme le SEPRA, qui est dans une certaine mesure une émanation du CNES, se doit de fournir au public des informations précises et contrôlées sur ces deux points. Il me paraît clair que tel n'a pas été le cas en l'occurrence. Le SEPRA a été, à mon avis, léger dans ses conclusions, qui étaient loin de prendre en compte toutes les informations pertinentes. Et les critiques de M. Alessandri me semblent judicieuses et bien argumentées, sur le fond du problème.

C'est le devoir du SEPRA que de collecter les données relatives à ce type d'observations, et d'en fournir à la presse, donc au public, l'interprétation. Je crois comprendre que le SEPRA est réduit à une seule personne, M. Velasco. Sans accabler qui que ce soit, je me permets de penser que cette structure devrait être confiée à une équipe compétente en astronomie de position, en mécanique des orbites de satellites artificiels, et en quelques autres domaines (géophysique et météorologie, arts militaires, aéronautique, astronautique, dysfonctionnements cognitifs, etc.) Il est impensable que M. Velasco seul puisse réunir toutes ces compétences; il doit donc s'informer, et cela exige des efforts, et une compétence étendue, et de ne pas s'engager sur des interprétations contestables ou prématurées (le 22 novembre, il publiait dans Paris-Match, si j'ai bien lu, des interprétations qui me semblent assez fantaisistes, en tout cas fortement sujettes à caution). Ce faisant, il pourrait donner au public une image faussée du CNES, dont les scientifiques au contraire apprécient l'oeuvre admirable, et la rigueur. Une équipe véritablement multidisciplinaire aurait pu étudier la question, et apporter une réponse pertinente... Je ne sais pas si M. Velasco a consulté des scientifiques compétents dans les domaines concernés; les textes publiés ne m'en donnent pas l'impression.

À la lecture de toute cette documentation, après son examen, et bien que je ne me sois pas moi-même penché sur le détail de l'analyse ( ce qui m'aurait pris trop de temps !...), je pense que M. Alessandri a raison, sur le fond du problème, dans le débat qui l'oppose à M. Velasco. J'ajoute que tous ceux des spécialistes avec qui j'ai pu échanger des impressions à ce sujet sont d'accord avec M. Alessandri.


Jean-Claude Pecker
Membre de l'Institut (Académie des sciences),
Professeur honoraire au Collège de France (Astrophysique théorique)