Les paramètres orbitaux d'un satellite
(27/03/2003)
Vous pouvez traduire ce texte dans la langue de votre choix :
Nous allons apprendre quels sont les paramètres permettant de calculer
à tout moment la position d'un satellite autour de la Terre, et comment
ils sont présentés sous forme standardisée par le NORAD
et la NASA.
Comme chacun le sait, si on néglige tous les éléments
externes, un satellite décrit une orbite elliptique autour de sa planète
ou « corps central ». En réalité, l'un et l'autre
tournent autour du centre de gravité de l'ensemble, mais nous ne nous
occuperons ici que des cas où la masse du satellite est négligeable
par rapport à celle du corps central (la Terre en l'occurrence). Les
paramètres permettant de définir entièrement l'orbite
sont appelés « éléments orbitaux », ou « képlériens »
du nom de l'astronome Johannes Kepler qui a constaté le premier que
les planètes décrivaient des orbites elliptiques autour du
Soleil.
Forme de l'orbite
On doit d'abord connaître la forme de l'ellipse, qui peut être
décrite par deux paramètres. On serait tenté de choisir
la longueur et la largeur, mais puisque la Terre occupe un des foyers de
l'ellipse, et non le centre, on facilite les calculs orbitaux en choisissant
des paramètres faisant intervenir les distances par rapport au foyer
occupé.
On parle de foyers d'une ellipse parce qu'un rayon de lumière partant
d'un foyer, dans n'importe quelle direction, serait réfléchi
vers le second. Une autre de leurs particularités est que la somme
des distances des deux foyers à un point quelconque de l'ellipse est
invariable, égale à la longueur de l'ellipse (grand axe).
Le point de l'orbite correspondant à la distance minimale du corps
central est appelé périastre, et celui correspondant à
la distance maximale apoastre. Lorsque le corps central est la Terre, on
parle de périgée et d'apogée (périhélie
et aphélie dans le cas du Soleil). Ces deux points sont alignés
sur le grand axe de l'ellipse, appelé ligne des apsides (on réserve
le terme de grand axe à la longueur correspondante).
La longueur de l'ellipse, son grand axe donc, égale à
la somme des distances du périastre et de l'apoastre, suffit à
calculer la durée de révolution du satellite sur son orbite.
C'est encore Kepler qui avait remarqué dans le cas des planètes
que le carré du temps de révolution est proportionnel au cube
du grand axe de l'orbite. Cela a été expliqué plus tard
par Newton en appliquant sa théorie de la gravitation. La loi liant
la durée de révolution au grand axe de l'orbite est, pour un
corps central quelconque :
T2 = π2Ga3/2MG
G est la constante de gravitation universelle, Ga le grand axe de l'orbite,
M la masse du corps central et T la durée de l'orbite. Il est bien
sûr nécessaire d'exprimer le tout dans un système cohérent
d'unités, de préférence le système international
dans lequel les masses s'expriment en kilogrammes, les distances en mètres
et les durées en secondes.
G est alors à peu près égal à 6,67.10-11N.m2.kg-2
(ou m3.kg-1.s-2, le newton désignant des kg.m/s2. Pour ceux qui ne sont pas
familiarisés avec les puissances de dix — ou exposants —, 106 vaut
un million, 109 un milliard, et 1012 un million de millions ou mille milliards ;
quand l'exposant est négatif, il faut au contraire diviser :
10-6 vaut un millionième. De même, on peut écrire indifféremment
m/s2 ou m.s-2). On ne connaît
pas la valeur de G avec une grande précision, mais on connaît par
contre très bien le produit MG du Soleil et de toutes les planètes,
justement parce qu'on le déduit de la durée de l'orbite. Pour la Terre, ce produit vaut
398,6.1012 m3/s2, et pour le Soleil 132,7.1018 m3/s2.
Vous pouvez ainsi vérifier que la Terre,
dont le grand axe de l'orbite vaut 299,2 millions de kilomètres (299,2.109 m),
tourne bien autour du Soleil en 365 jours un quart (précisément
en 31 556 926 secondes). Et vous pouvez aussi calculer à quelle distance du centre de la Terre
devrait se trouver un satellite pour tourner à la même vitesse
que la Terre sur elle-même, soit en 23 h 56 mn (c'est la vitesse de
rotation par rapport à la sphère céleste, un peu inférieure
à une journée puisqu'en un an, la Terre tourne une fois de
plus par rapport aux étoiles que par rapport au Soleil).
On a donc tout intérêt à choisir le grand axe pour exprimer
la première valeur définissant une ellipse. Et puisque le grand
axe détermine la durée de l'orbite, on peut aussi bien utiliser
cette valeur. Et pour avoir une unité plus « parlante »,
on préfère indiquer le nombre de tours d'orbite qu'effectue
un satellite en 24 h, que l'on appelle le « mouvement moyen » (mean
motion en anglais). La plupart des logiciels d'orbitographie permettent d'indiquer
indifféremment le mouvement moyen ou le grand axe (ou plutôt le demi-grand axe, en anglais
SMA), les deux étant
liés par une relation simple que vous pouvez retrouver sans mal d'après
ce que vous savez déjà : MM2 = 602970.109/Ga3, en exprimant
le grand axe en kilomètres.
Quant à la seconde information, ce pourrait être
la distance du périastre ou de l'apoastre, mais on simplifie certains
calculs en choisissant une valeur que l'on appelle l'excentricité,
égale au rapport de la distance entre les foyers sur le grand axe.
Et puisque la distance entre les foyers est égale à la différence
entre apoastre et périastre et le grand axe à leur somme, l'excentricité
sera égale à (A-P)/(A+P).
L'excentricité est donc nulle dans le cas d'un cercle (les deux
foyers sont confondus, et les distances du périastre et de
l'apoastre sont identiques). Elle varie entre 0 et 1 dans le cas d'une
ellipse, cette dernière
valeur étant atteinte avec la parabole (une ellipse infiniment
allongée :
le second foyer, et donc l'apoastre, se trouve à une distance
infinie,
ce qui explique que les rayons lumineux émis au foyer d'une
parabole
sont réfléchis en un faisceau parallèle,
« focalisés
à l'infini », et inversement). Une excentricité
supérieure
à 1 caractérise une hyperbole, la courbe suivie par un
objet
provenant de l'extérieur du système et approchant
à
une vitesse non nulle (une hyperbole a bien deux foyers, mais le second
est
situé « derrière » elle, ainsi que la seconde
moitié
de la courbe, que le satellite ne suivra jamais puisqu'elle se trouve
en
quelque sorte « au delà de l'infini » ; la distance de
l'apogée,
ou pour être précis du second sommet, doit être
considérée
comme négative).
Puisque nous nous intéressons ici aux orbites des satellites, l'excentricité sera comprise entre 0 et 1.
Orientation dans l'espace
Avec le grand axe et l'excentricité, nous savons à quoi ressemble
notre ellipse. Il reste maintenant à la positionner.
Une première information est l'inclinaison par rapport au plan de l'équateur.
Par convention, l'inclinaison est prise lorsque le satellite passe du sud
au nord. Elle sera donc comprise entre 0°, pour un satellite tournant
dans le plan de l'équateur et vers l'est (le sens de rotation de la
Terre sur elle-même), et 180°, pour un satellite tournant dans
le même plan mais dans le sens opposé (dit rétrograde).
On doit encore définir dans quelle direction se trouve le plan de
l'orbite. La ligne d'intersection de l'orbite avec le plan de l'équateur
est appelée « ligne des noeuds » :
Le noeud ascendant est le point de l'orbite où le satellite passe du sud
au nord, et le noeud descendant est le point où il passe du
nord au sud.
En astronomie, la direction dans laquelle se trouve une étoile sur
la sphère céleste est appelée l'ascension droite ; elle
est prise par rapport à la direction du soleil au moment de l'équinoxe
du printemps, que l'on appelle le point vernal ou encore point gamma. Ce
point n'est pas réellement fixe par rapport aux étoiles puisque
l'axe de la Terre décrit lentement (un tour en 25779 ans) un cône
dans l'espace (dans quelques siècles, l'étoile polaire sera
assez éloignée de la direction du pôle) ; c'est le phénomène
de « précession des équinoxes », qui pose tant de
problèmes aux astrologues ! Aussi, les indications sur la position
des étoiles figurant dans les atlas d'astronomie sont valables pour
une date de référence (en général 2000 pour les atlas récents), et les logiciels d'astronomie font les
corrections nécessaires.
Notre quatrième paramètre sera donc l'ascension droite du noeud ascendant
(RAAN en anglais),
l'angle que forme ce point par rapport au point vernal.
Bien qu'étant un angle, on a l'habitude d'exprimer l'ascension droite
en heures/minutes/secondes en astronomie, afin de lui ajouter facilement
le mouvement des étoiles sur la sphère céleste au cours
de la journée. Mais en ce qui concerne les satellites et l'orbitographie,
on exprime tout naturellement l'ascension droite en degrés.
Le plan de l'orbite est maintenant défini, mais il reste à
savoir dans quelle direction pointe le grand axe de l'orbite. Pourt cela,
on définit l'angle du périgée par rapport au noeud ascendant,
que l'on appelle « argument du périgée ».
Position du satellite
Nous voici capables de décrire parfaitement l'orbite du satellite,
mais nous ne savons pas encore où se trouve le satellite lui-même.
Pour cela, il nous faut définir un instant de référence,
que l'on appelle epoch en anglais, et le point de l'orbite
où se trouve le satellite à cet instant précis.
Ce point pourrait être encore défini comme un angle par rapport
au noeud ascendant, mais pour simplifier les calculs, la vitesse du satellite
variant en fonction de sa distance à la planète (elle est maximale
au périgée, minimale à l'apogée), on a tout intérêt
à repérer plutôt sa position par rapport au périgée.
L'angle correspondant est « l'anomalie vraie ».
Mais, toujours pour simplifier certains calculs, on préfère
exprimer le temps écoulé par rapport à la durée
totale de l'orbite. C'est l'anomalie moyenne. Et puisqu'une autre découverte
de Kepler était que le « rayon vecteur » (la droite joignant
le satellite au centre de la planète) du satellite balaie des aires
égales en des temps égaux, cette anomalie moyenne représentera
en fait la portion de surface de l'ellipse parcourue par le rayon vecteur
au moment choisi :
Si par exemple cette surface S représente le cinquième de
la surface totale de l'ellipse, cela signifiera que le satellite aura passé
le périgée depuis un temps égal au cinquième de
sa durée de révolution sur son orbite. L'anomalie moyenne indique
donc la portion de surface balayée par le rayon vecteur depuis le
périgée, et pour calculer la position du satellite on doit en
déduire l'anomalie vraie, qui est l'angle balayé par ce rayon,
ainsi que la longueur de ce rayon. Cela ne pose pas de grosses difficultés
en considérant qu'une ellipse est un cercle que l'on a « aplati »,
diminuant toutes les dimensions d'un facteur constant dans le sens du petit
axe sans les modifier dans le sens du grand axe, mais les calculs sont tout
de même assez complexes et les logiciels d'orbitographie sont là
pour ça.
L'anomalie moyenne n'est donc pas un angle, c'est une fraction de la période
orbitale, et on l'exprime souvent en 256e... Mais sur les éléments
orbitaux standardisés que nous détaillerons plus loin, on l'assimile
à un angle en l'exprimant en degrés... Disons qu'il s'agit
de 360e
de durée d'orbite, ou de surface balayée. Ainsi exprimée, l'anomalie
moyenne est égale à l'anomalie vraie lorsque l'orbite est circulaire.
Perturbations
Dans le cas idéal d'une Terre parfaitement sphérique, isolée dans l'espace avec son satellite,
les sept paramètres que nous avons passés en revue permettraient
de connaître à tout moment la position du satellite sur une orbite invariable.
Mais le satellite subit des perturbations, notamment de la Lune et du
Soleil. Ces perturbations sont toutefois négligeables sur une courte
durée, et les paramètres orbitaux des satellites sont remis
à jour très souvent grâce aux radars de suivi des satellites
(en particulier ceux du NORAD). Les logiciels d'orbitographie tiennent tout de même généralement
compte de ces perturbations.
Un source de perturbations bien plus importante provient du fait que la Terre
n'est pas sphérique, mais renflée au niveau de l'équateur.
Les lois de Kepler, où deux corps isolés en orbite l'un autour
de l'autre suivent perpétuellement les mêmes orbites elliptiques,
ne sont rigoureusement exactes (et encore, il faudrait aussi faire intervenir
la relativité, mais pour les calculs orbitographiques courants ses
effets sont négligeables) que si les deux corps présentent
une distribution de masse parfaitement sphérique. On n'a aucun mal
à comprendre qu'un satellite orbitant très près d'un
corps central en forme d'haltère ne se comportera pas de la même
manière qu'autour d'une planète bien ronde !
La Terre n'a certes pas une forme d'haltère, mais le fait
qu'elle soit un
peu renflée au niveau de l'équateur a pour effet
principal de faire tourner
peu à peu le plan de l'orbite dans l'espace : la
« ligne
des noeuds » tourne lentement, effectuant un mouvement de
« précession »
(la précession des équinoxes, dont nous avons
déjà
parlé, s'explique aussi par le renflement équatorial de
la
Terre), dans le sens opposé à celui de la rotation du
satellite ;
cet effet est nul pour les satellites à l'orbite inclinée
de
90°, puisque le satellite ne se déplace ni vers l'est ni
vers
l'ouest.
Il serait trop long d'expliquer cet effet, mais il dépend de l'inclinaison et des dimensions de l'orbite (grand axe et excentricité). Il ne nécessite
donc pas l'introduction de nouvelles données, et tous les logiciels
d'orbitographie en tiennent compte. La formulation est du reste simple :
P = -2,06474.1014*SMA-3,5*cos(inc)*√(1-exc2)
SMA (= Ga/2) doit être exprimé en kilomètres, et le résultat est en degrés par jour ; une valeur négative indique un mouvement dans le sens des aiguilles d'une montre.
Par exemple, l'orbite de la station spatiale internationale, inclinée
de 51°, effectue un mouvement de précession en deux mois environ (71 jours),
ce qui explique que les périodes de visibilité de cette station
dans une région particulière reviennent avec la même
périodicité (pour être visible, un satellite doit être
éclairé par le Soleil alors que l'observateur doit se trouver
dans la nuit ; pour un satellite en orbite basse, cette condition n'est remplie que peu après le coucher du
soleil ou avant son lever ; les périodes de visibilité se produisent
donc lorsque l'orbite du satellite passe au-dessus de la région concernée,
dans un sens ou dans l'autre, à ces périodes particulières
de la journée).
Cet effet peut être mis à profit pour que l'orbite d'un satellite
conserve toujours la même direction par rapport au Soleil : on parle d'orbites
héliosynchrones. C'est particulièrement utile pour les satellites
d'observation ou de météorologie, puisque le satellite survolera
le sol toujours dans les mêmes conditions d'éclairement ; et
pour peu qu'il effectue un nombre entier de tours en 24 h, il survolera en
outre toujours la même région à la même heure.
Pour cela, il faut que le mouvement de précession se fasse en un an
dans le sens de rotation de la Terre, et donc que le satellite tourne dans
le sens inverse. Pour les orbites basses, le résultat est obtenu avec
une inclinaison d'environ 98°, que l'on retrouve de fait pour de nombreux
satellites.
Le renflement équatorial de la Terre provoque aussi une rotation
de la ligne des apsides, mais comme la plupart des satellites sont placés
en orbite circulaire (en particulier lorsqu'ils effectuent leur rentrée)
cela a rarement de l'importance. Les logiciels d'orbitographie calculent
aussi ce mouvement.
Freinage atmosphérique
Mais la perturbation la plus importante pour les satellites en orbite
basse, c'est l'atmosphère. Il n'y a pas de limite fixe à l'atmosphère,
dont la densité décroît de façon exponentielle
avec l'altitude. Ainsi, à 200 km, un satellite tombera en quelques
jours, ce qui ne présente aucun intérêt. À 400 km,
l'altitude de la station internationale, la rentrée aurait lieu
après un peu plus d'un an ; pour éviter cela, la station doit
être rehaussée sur son orbite plusieurs fois par an, ce qui
nécessite des ravitaillements en carburant. À 800 km, la durée
de vie « naturelle » d'un satellite se chiffre en dizaines d'années :
on ne parle plus d'orbite basse. À 1500 km et plus, la durée
dépasse 10 000 ans et on peut considérer que l'atmosphère
n'influe plus du tout à une échelle de temps humaine : on parle d'orbite haute.
Le freinage atmosphérique est la donnée la plus aléatoire,
du fait que la densité de l'atmosphère à haute altitude
varie énormément en fonction du moment de la journée,
de la saison et de l'activité solaire. Cette complexité interdit
notamment de prévoir précisément où s'effectuera
la rentrée d'un satellite : même à quelques heures
de la rentrée, la marge d'incertitude sera de plusieurs milliers de
kilomètres. Mais il est tout de même possible d'évaluer
grossièrement, sur une période de temps brève, l'évolution
de l'orbite en fonction de l'atmosphère, et les catalogues d'éléments
orbitaux incluent quelques données essentielles pour cela.
La première façon d'évaluer l'influence de l'atmosphère
est de connaître le « coefficient balistique » du satellite.
Il indique la sensibilité du satellite au freinage atmosphérique,
quelle que soit la densité de l'atmosphère. Il est égal au rapport surface/masse du satellite multiplié par de son coefficient de traînée
(appelé Cd, c'est l'équivalent du « Cx » pour les
objets au sol, et il vaut environ 2,5 pour un objet de forme quelconque). La surface à considérer est la « section transversale », surface de la « silhouette » du satellite vu dans la direction du déplacement ; bien sûr, dans le cas très général d'un satellite en rotation, il s'agira d'une valeur moyenne. Mais un satellite n'est pas livré avec une étiquette mentionnant son coefficient
balistique, et on doit donc l'évaluer d'après l'évolution
des paramètres orbitaux. Dans la forme standardisée des éléments
orbitaux, ce coefficient est appelé BSTAR. Il est exprimé dans des unités assez spéciales qu'il serait trop long d'expliquer, disons simplement que pour obtenir le coefficient balistique en unités standard (m2/kg) il faut multiplier le BSTAR par 13.
Une autre manière d'appréhender le freinage atmosphérique
est de mesurer la variation du mouvement moyen (nombre de tours par jour)
au cours du temps. Un résultat surprenant de la mécanique orbitale
est que lorsqu'un satellite est freiné, il accélère !
En fait, ce qui diminue n'est pas la vitesse, mais le moment angulaire (plus
précisément le moment cinétique), produit de la vitesse
par le rayon : la vitesse augmente, mais le rayon de l'orbite diminue plus
rapidement. Et donc, lorsque le satellite est freiné par l'atmosphère,
le nombre de tours par jour (proportionnel au rapport de la vitesse sur le
rayon) augmente au cours du temps. On parle de dérivée du mouvement
moyen : c'est donc le nombre de tours par jour gagné par le satellite
chaque jour (nombre de tours/jours2).
On peut aller plus loin en évaluant l'augmentation au cours du temps
de cette augmentation... Il s'agit de la dérivée seconde
du mouvement moyen, ou nombre de tours/jour3.
Avec ces valeurs, les logiciels d'orbitographie font de leur mieux pour
évaluer l'évolution de l'orbite d'un satellite. Il existe pour
cela des modèles de calculs à suivre, le plus couramment utilisé
étant désigné sous le nom de SGP4.
TLE
Pour introduire facilement ces données dans les logiciels d'orbitographie,
on a établi des standards. Il en existe plusieurs, mais nous ne nous
intéresserons qu'à celui retenu par
le NORAD. Il s'agit des « two lines elements sets », en abrégé
TLE.
En fait, ces données comportent trois lignes, mais seules les deux
dernières sont standardisées. La première ligne contient
le nom courant du satellite, et certains organismes y ajoutent diverses informations
sur sa taille, sa luminosité, sa vitesse de rotation, les fréquences
radio qu'il utilise, etc... Tout dépend de qui doit utiliser
ces données (« chasseurs » de satellites, radio-amateurs,
etc.)
Les deux lignes suivantes contiennent 69 caractères chacune (une limite
remontant au temps des cartes perforées) dont la signification est
standardisée. Prenons donc en exemple les derniers éléments
orbitaux mesurés du fameux troisième étage de fusée retombé
le 5 novembre 1990, et récapitulons la signification des divers paramètres
présents dans les deux lignes standardisées.
Définitions sommaires (les termes soulignés
renvoient à l'explication détaillée) :
Ligne 1
1 : Numéro de la ligne : 1 donc ! 3-7 : Référence Norad : il s'agit simplement du numéro
affecté au satellite, dans l'ordre de détection, par cet organisme
(cet objet était donc le 20925e repéré par
le Norad). 8 : Catégorie de classification : la position de certains
satellites d'observation militaires est tenue secrète par le Norad,
qui les classe dans la catégorie C pour « classified » ou
S pour « secret » ; vous ne trouverez donc en général
que des TLE portant la lettre U, pour « unclassified ». 10-17 : Désignation internationale (ID) : cette désignation fait double emploi avec la classification du Norad,
mais elle est plus claire : les deux premiers caractères désignent
l'année du lancement (puisqu'il n'y a pas eu de lancement avant 1957,
le Norad a décidé de conserver une numérotation sur
deux chiffres : l'année 2003 est donc codée 03) ; les trois
suivants indiquent le rang du lancement au cours de cette année (le
lancement de Gorizont 21 a donc été le 94e
de l'année 1990) ; les lancements ratés sont désignés
par « F01 », « F02 », etc (« F » pour « failure »,
échec) ; enfin, le ou les derniers caractères sont des lettres
différenciant les différents objets résultant d'un même
lancement ; en général, la ou les premières lettres
de l'alphabet désignent le ou les satellites, et les lettres suivantes
désignent les différents objets satellisés (étages
de fusée, inter-étages, etc) dans l'ordre dans lequel ils sont
abandonnés. S'il y a plus de 24 objets relatifs à un lancement
(les lettres O et I ne sont pas utilisées pour éviter les
confusions avec des chiffres, comme sur les plaques minéralogiques),
on utilise une deuxième lettre, voire une troisième (cette multiplicité
d'objets résulte en général de l'explosion d'un objet
initial en une multitude de fragments). 19-32 : Instant de référence (Epoch) : 90309.49691663 signifie
que ces paramètres orbitaux ont été mesurés le 309e
jour de l'année 90, qui était bien le 5 novembre. Pour
calculer l'heure, on multiplie la partie décimale par 24, puis on
multiplie la partie décimale par 60 pour avoir les minutes, et on
recommence pour les secondes. Ça nous donne ici 11h 55' 33" (TU bien sûr),
environ 6 h avant la rentrée. 34-43 : Dérivée du mouvement moyen (MMR) :
augmentation
en un jour du nombre de tours d'orbites par jour. La valeur indiquée
sur les TLE est la moitié de cette valeur. Une valeur négative
indiquerait que l'orbite du satellite a été rehaussée,
ce qui nécessite un apport d'énergie et donc une propulsion...
bref quelque chose de pas naturel, que l'on ne peut pas prendre en compte
pour le calcul d'évolution de l'orbite. Ici, l'augmentation serait
de 0,15 tours par jour en 12 h, soit environ 0,075 en 6 h. Cela ferait descendre l'altitude du
satellite de 148 km (demi-grand axe calculé d'après le mouvement
moyen moins rayon de l'orbite terrestre, 6378 km à l'équateur)
à 128 km. C'est insuffisant pour provoquer la rentrée, mais
en fait le gain de vitesse accélère lui-même, d'où l'utilité
de l'indication suivante. 45-52 : Dérivée seconde du mouvement moyen (MMRR) :
augmentation
du MMR en un jour. La valeur indiquée est le sixième de
cette valeur, et donc le tiers de l'augmentation en un jour du MMR figurant
sur les TLE (moitié du MMR réel). Ici, 61501-4 signifie
en abrégé 0,61501.10-4, ou encore 0,000061501 : le premier
caractère est encore le signe (bien qu'il puisse difficilement être
négatif), la virgule est sous-entendue et le dernier chiffre, après
un signe -, est l'exposant, ou encore le nombre de zéros après
la virgule et avant les cinq chiffres significatifs. 54-61 : BSTAR : coefficient balistique du satellite, représenté avec l'exposant comme pour la donnée précédente. 63 : Type d'éphéméride (ET) :
ce chiffre désigne
la méthode par laquelle les données précédentes
ont été calculées ; en général, c'est toujours 0.
Les autres types utilisés entraînent quelques variations
dans la signification des termes relatifs au freinage atmosphérique. 65-68 : Numéro des éléments orbitaux : le Norad remet
à jour les éléments orbitaux de tous les satellites
plusieurs fois par semaine (durée variable selon l'intérêt
du satellite, sa sensibilité au freinage atmosphérique, l'imminence
de sa rentrée, les risques de collision, etc.), et incrémente
donc d'une unité à chaque fois ce numéro ; du moins,
en général ! 69 : Somme de contrôle (checksum) : permet de vérifier qu'il
n'y a pas d'erreur. Pour l'obtenir, additionnez tous les chiffres contenus
dans la ligne, sans tenir compte des autres caractères à l'exception
des « - » auxquels vous donnerez la valeur 1 ; ne retenez que le
chiffre des unités du nombre obtenu.
Ligne 2
1 : Numéro de ligne : ici 2. 3-7 : Référence NORAD : répétition de celle de la ligne 1. 9-16 : Inclinaison : inclinaison de l'orbite par rapport au plan de l'équateur. 18-25 : Ascension droite du noeud ascendant (RAAN) :
direction de la ligne des apsides par rapport aux étoiles. 27-33 : Excentricité : l'excentricité d'une ellipse étant comprise
entre 0 (cercle) et 1 (parabole), la virgule est sous-entendue : l'excentricité
est égale dans notre exemple à 0,0000922. 35-42 : Argument du périgée (AP) :
angle du périgée par rapport au noeud ascendant. 44-51 : Anomalie moyenne (MA) :
ça n'est pas vraiment un angle, mais le déplacement correspondant à ce nombre de 360e de la durée d'une orbite. 53-63 : Mouvement moyen (MM) : nombre de tours d'orbite par jour. 64-68 : Numéro de l'orbite : normalement, ce nombre est incrémenté
d'une unité à chaque fois que le satellite passe par le noeud
ascendant, et l'orbite qui précède le premier passage au noeud
ascendant porte le numéro 0 ; toutefois, cette règle n'est pas
respectée de façon très rigoureuse par le Norad, et
on ne peut pas toujours se fier au numéro exact indiqué. 69 : Somme de contrôle : mêmes règles que pour la ligne 1.