LE CNES EST-IL ENCORE CRÉDIBLE ?


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SEPRA, c'est quoi ?

Le CNES, Centre National d'Études Spatiales, est le principal organisme français de recherches spatiales. Ses activités sont multiples, mais il existe au sein de cet organisme une structure censée étudier les «phénomènes aérospatiaux non identifiés», autrement dit les ovnis, aussi bien que les rentrées atmosphériques (météores, satellites)... Bien que son rôle soit tout à fait mineur au sein du CNES, cette structure est bien connue du public et les médias font largement appel à son directeur à chaque fois que l'on parle d'ovnis, de météorites, de pollution spatiale, etc. Or, nous allons voir que ce service est parfaitement inapte à remplir sa mission et discrédite complètement l'organisme qui le chapeaute.

Le SEPRA, Service d'expertise des phénomènes de rentrées atmosphériques, a été créé en novembre 1988 pour succéder au GEPAN (Groupe d'étude des phénomènes aériens non identifiés). Son responsable est Jean-Jacques Velasco, qui dirigeait déjà le GEPAN depuis 1983.

Ce service a pour fonction première, si l'on en croit la plaquette qu'il édite et le livre coécrit par son directeur [1, p.38], le suivi et la prévision des rentrées dans l'atmosphère des objets artificiels (satellites, débris de fusée).

On est donc en droit de penser que le SEPRA, service spécialisé dans ce domaine au sein du CNES, est l'interlocuteur privilégié en matière de rentrées atmosphériques.

Flûte, une rentrée atmosphérique !

Tout allait bien pour le SEPRA et son directeur jusqu'à ce soir maudit du 5 novembre 1990, quand a eu lieu un de ces phénomènes qu'il était supposé expertiser, une rentrée atmosphérique, très spectaculaire de surcroît : les témoignages relatifs à un immense ensemble de lumières qui a traversé la France d'ouest en est se comptent par milliers.

Un authentique spécialiste du suivi des satellites, Pierre Neirinck, a identifié dès le lendemain l'objet responsable, un troisième étage de fusée russe Proton, et en a immédiatement informé le SEPRA... Mais notre grand spécialiste du CNES, Monsieur Velasco, n'a pas voulu le croire, tout ignorant qu'il était de l'aspect de ces phénomènes !

Ainsi, le 8 novembre, il répondait au présentateur du journal télévisé qui lui demandait si un satellite suffirait à expliquer le phénomène : Non, il ne pourrait pas à lui seul expliquer le phénomène, il pourrait tout au plus expliquer pendant quelques secondes une forte lueur, mais il ne pourrait pas expliquer la longue durée de l'observation, qui a duré plusieurs minutes.

Or, à l'inverse de ce qui se passe avec les météorites, les rentrées de satellites, objets qui se déplacent presque horizontalement et à une vitesse relativement faible (de l'ordre de 500 kilomètres par minute avant d'être freinés par l'atmosphère), durent pratiquement TOUJOURS plusieurs minutes et sont souvent visibles sur une grande partie de leur trajectoire.

Voilà qui montre déjà que depuis deux ans, Monsieur Velasco qui devait être l'expert national en matière de rentrées atmosphériques ignorait absolument tout de ces phénomènes...

Il a sans doute un peu appris depuis, et dès le lendemain de cette déclaration il confirmait l'identification de la rentrée de l'étage de fusée, après avoir reçu un télex de la NASA.

Sur ce télex figuraient les coordonnées de l'objet en question lors des cinq derniers repérages par les radars de l'USSpaceCom, peu avant la rentrée [cf 2, p.14]... Avec ces indications, n'importe quel lycéen un peu matheux serait capable de tracer autour du globe terrestre un grand cercle passant par ces points, en tenant compte de la rotation de la Terre, et d'extrapoler la trajectoire au-dessus de la France, laquelle passait un peu au nord de l'axe Bordeaux-Strasbourg... Le CNES dispose bien sûr de moyens informatiques très performants pour effectuer de tels calculs avec une grande précision... à condition que l'on sache s'en servir !

Ça n'était pas le cas de Jean-Jacques Velasco, qui annonçait dans une dépêche AFP une trajectoire proche d'un axe Pau-Strasbourg (notez que Pau est une ville bien moins importante que Bordeaux)... Une erreur loin d'être négligeable, comme le montre le graphique ci-contre...

Il va sans dire que les témoignages, que le SEPRA avait reçus par centaines, étaient en désaccord complet avec la trajectoire fantaisiste annoncée par notre expert national en matière de rentrées atmosphériques, comme ils étaient en désaccord avec les notions que Velasco diffusait concernant ces phénomènes.

Ainsi a-t-il toujours nié l'ampleur du phénomène, qui s'expliquait pourtant par l'explosion de l'étage de fusée lors de sa rentrée dans l'atmosphère. Il n'est pas rare qu'il reste une bonne quantité de propergols dans un étage de fusée, et leur explosion dans la haute atmosphère disperse les débris sur plusieurs dizaines de kilomètres, l'ensemble occupant alors une grande portion du ciel des régions survolées. Cette explosion au-dessus du Golfe de Gascogne, la plupart des témoins situés sur la côte atlantique l'ont observée, et le SEPRA a reçu des quantités de rapports la mentionnant... Il s'agit de la clé de l'aspect particulièrement spectaculaire de cette rentrée atmosphérique, et Monsieur Velasco est passé complètement à côté : il cherchait désespérément à expliquer la multitude de lumières par la présence de plusieurs éléments annexes genre jupe inter-étage, équipement divers [lettre du SEPRA aux témoins, reproduite en 3, pp.474-478]... Une explication d'autant plus fantaisiste que les deuxième, troisième et quatrième étages des lanceurs Proton ont le même diamètre et qu'il n'y a donc pas de «jupe inter-étage» !

Alors, lorsque les témoins refusaient de croire à l'explication par la rentrée atmosphérique en raison de l'immensité du phénomène qu'ils avaient observé, il estimait que ces centaines de personnes qui décrivaient la même chose étaient toutes abusées par la «psychologie de la perception» !

Il a poussé la farce jusqu'à mettre en doute les capacités d'observateur d'un spationaute du CNES, Jean-Pierre Haigneré, qui avait lui-même observé le phénomène... Voici en effet ce qu'il écrit dans son livre après avoir mentionné cette observation [1, p.42] :

Celui-ci nous déclara qu'il avait observé le phénomène dans la région parisienne et qu'il était très étonné par son étrangeté. Il affirma par ailleurs qu'il ne pouvait pas s'agir d'une rentrée atmosphérique.

Or les observateurs, nous allons le voir, commettaient des erreurs. Je dois préciser ici que je ne crois guère, par expérience, à l'infaillibilité des observateurs «qualifiés».

Certes, Jean-Pierre Haigneré rejetait l'explication par une rentrée atmosphérique, mais il ne s'est jamais présenté comme expert dans ce domaine. C'est la fiabilité de son observation que Velasco met en doute. On ose croire pourtant que le CNES fait preuve de plus de sérieux dans le choix de ses spationautes, qui doivent au moins être capables de décrire correctement ce qu'ils observent, que dans celui de ses «experts» ! Non seulement Velasco discrédite le CNES par des affirmations complètement erronées concernant les phénomènes qu'il est censé expertiser, mais il dénigre injustement du personnel du CNES bien plus qualifié que lui !

Bien sûr, les «chasseurs d'ovnis» n'ont pas manqué de noter toutes les incohérences de l'explication du SEPRA, et ont érigé le phénomène du 5 novembre 1990 en véritable culte dont on continue de parler abondamment... Il en a été largement question par exemple dans l'émission que la chaîne Arte a consacrée au phénomène OVNI en 1996...

Depuis le phénomène, un de ces «ufologues» distribue partout des tracts, et plus tard un gros livre de 500 pages, affirmant que «LE CNES A MENTI AU PUBLIC» [3], et Monsieur Velasco n'a jamais rien fait pour répondre à son argumentation... Ce «Culte du 5 novembre 90», on peut dire que c'est Jean-Jacques Velasco et lui seul qui l'a créé !

Lui-même s'est d'ailleurs rendu compte que la thèse qu'il avait présentée au public n'était pas compatible avec une majorité des témoignages, puisque plusieurs mois après le phénomène, il aurait avoué à l'astronome Pierre Guérin et au météorolgiste Christian Perrin de Brichambaut que la majorité des rapports collectés par la Gendarmerie ne pouvaient pas s'expliquer par le troisième étage de la fusée Proton [4].

Quand les âneries du CNES se répandent

Le plus grave, c'est sans doute que cet expert de pacotille a entraîné d'authentiques scientifiques dans ses concepts totalement erronés.

C'est notamment le cas du psychologue Manuel Jimenez, qui a été le psychologue attitré du GEPAN puis consultant pour le SEPRA. Jimenez a fait sa thèse sur l'étude psychologique des témoignages d'ovnis, et il s'en est ensuite servi pour illustrer son livre sur la psychologie de la perception [5].

Voici ce que l'on peut y lire :

L'auteur a analysé un échantillon de mille deux cent vingt-cinq témoignages d'ovi [objets volants identifiés], constitué de cas de témoignages multiples consignés dans le fichier de la gendarmerie nationale. Il s'agit de dix-huit rentrées atmosphériques qui se sont produites entre 1974 et 1990.
[p.96].

Les rentrées de météores, de débris de satellites, de fusées se déroulent dans les hautes couches de l'atmosphère [...]. Vues de la terre, ces rentrées atmosphériques se présentent comme des taches lumineuses, rondes ou allongées, d'une taille angulaire comparable à la pleine lune. Les couleurs sont en général multiples, et la durée très courte, en général de quelques secondes à peine. Ils constituent donc, pour un psychologue expérimentaliste, des stimuli fugaces et vagues.

Les travaux statistiques décrivant les témoignages d'ovi décèlent une grande variabilité des caractéristiques rapportées, souvent très différentes de celles des phénomènes connus après expertise. [...] Dans certains cas, les autres caractéristiques rapportées du phénomène sont fortement différentes des caractéristiques qu'on aurait dû normalement percevoir. Deux procès-verbaux d'observation rapportant de façon très différente une même rentrée atmosphérique sont reproduits en annexe.
[pp.91-92].

Ces deux procès-verbaux concernent justement le phénomène du 5 novembre 90, que les deux témoins ont en fait très correctement décrit ! Il n'est pas difficile de comprendre qui a renseigné Jimenez sur les «caractéristiques qu'on aurait dû normalement percevoir» (selon lui, des phénomènes fugitifs ayant la taille apparente de la pleine lune, et présentant un aspect invariable) !

Bien sûr, Jimenez n'est pas innocent dans cette affaire : s'il avait réellement consulté et étudié statistiquement, comme il le prétend, plus de mille témoignages relatifs à dix-huit rentrées atmosphériques tant naturelles qu'artificielles, il aurait constaté que la plupart des témoins décrivaient bien des phénomènes fugitifs et de petite dimension dans le cas des météores, et des phénomènes beaucoup plus durables dans le cas de rentrées de débris spatiaux, atteignant en outre dans certains cas comme celui du 5 novembre 90 des dimensions gigantesques ! Mais enfin, le pauvre homme pouvait difficilement savoir qu'en travaillant pour le Service d'expertise des phénomènes de rentrées atmosphériques, il se trouvait sûrement au service du CNES où l'on en savait le moins sur ces phénomènes !

Voici donc un livre qui nous explique à partir de notions complètement fallacieuses que des centaines de témoins observant un phénomène vague pendant quelques secondes le décrivent comme un immense ensemble de lumières qui traverse le ciel en une minute ou plus... Et ce livre est édité dans une collection très prisée des universitaires, recommandé comme «ouvrage de synthèse remarquable» par des revues de vulgarisation scientifique telles que Science & Vie [6], et je ne doute pas que les cours de Manuel Jimenez à l'université de Montpellier soient très appréciés des étudiants... Voilà à partir de quelles sottises on forme les psychologues de demain !

Et les ovnis, dans tout ça ?

Avec la vague du 5 novembre 1990, le SEPRA a démontré son incompétence totale en matière de rentrées atmosphériques, et il a encore accumulé les erreurs lors de la rentrée atmosphérique du 31 mars 1993 [2, pp.167-171].

Mais il est vrai que le SEPRA, malgré sa dénomination, n'étudie pas que les rentrées atmosphériques... Héritier du GEPAN qui avait été créé pour étudier les «phénomènes aérospatiaux non identifiés», autrement dit les ovnis, il continue à collecter les témoignages dans ce domaine, et il est aussi censé les étudier... Selon le livre co-signé par son responsable [1, p.38], le SEPRA a pour seconde fonction la collecte, analyse et expertise des informations relatives aux phénomènes aérospatiaux non identifiés, que nous désignerons plus commodément par «OVNI».

Quelles enquêtes a donc effectuées cet organisme depuis sa création ? Aucune ! Les seules enquêtes un peu fouillées dont Jean-Jacques Velasco parle, ce sont celles qui remontent au temps du GEPAN, en particulier au sujet du fameux cas de Trans-en-Provence, où un témoignage était accompagné d'une trace au sol et de perturbations des végétaux.

Signalons au sujet de ce cas que le premier télex transmis au GEPAN par la gendarmerie indiquait que la trace évoquait un «ripage de pneumatique»... Mais ce dernier mot a purement et simplement été occulté dans le rapport du GEPAN [7] ! Ce sont des enquêteurs privés qui ont retouvé ce détail gênant, et qui ont mis en évidence les graves lacunes de l'enquête du GEPAN sur ce cas [8]... On comprend dès lors que Jean-Jacques Velasco s'efforce désormais d'empêcher les enquêteurs privés d'accéder aux rapports de gendarmerie !

Notons que Velasco n'était pas encore directeur du GEPAN, mais c'était lui qui avait effectué l'enquête sur place et rédigé le rapport...

On a l'impression que le GEPAN n'était absolument pas préparé à traiter une enquête importante, et qu'il a été dissous peu après par crainte d'être dépassé... Quant au SEPRA, il ne fait plus rien que récolter des témoignages, et n'a produit aucun travail digne de ce nom depuis sa création...

Expertises photographiques

Le SEPRA serait-il plus performant dans les analyses de photographies que dans les enquêtes sur le terrain ? Les témoins sont en tout cas fortement incités à confier leurs photographies aux gendarmeries qui les transmettent au SEPRA... Et ensuite, personne ne les revoit jamais, et aucune conclusion n'est rendue ! On ne compte pas les braves témoins qui ont été ainsi abusés, confiant leurs précieux clichés aux «scientifiques» du SEPRA en espérant qu'on leur fournirait une explication, et qui n'ont ensuite jamais rien reçu malgré leurs réclamations. Il y a tout de même quelques rares photographies au sujet desquelles Jean-Jacques Velasco s'est exprimé. L'une d'elles concerne justement la rentrée atmosphérique du 5 novembre 90, dont un photographe de l'agence Magnum, Philippe Ughetto, aurait pris trois clichés, publiés dans le magazine Paris-Match [9]. Voici un détail représentant l'objet :

Jean-Jacques Velasco commentait ainsi cette photographie :

Sur ces photos, exceptionnel outil d'étude, les couleurs correspondent aux différences de densité des métaux et à leur température de fusion. La couleur rouge : 1500 degrés; la blanche : 3000. Les clignotements viennent du fait que l'épave de l'espace tournait sur elle-même.

Outre le fait que les témoins ne décrivaient rien de tel, cette interprétation est absurde : pour expliquer la régularité et le synchronisme des lumières blanches, il aurait fallu que deux débris de la rentrée atmosphérique tournent à la même vitesse, et s'échauffent à chaque tour jusqu'à une température de 3000 degrés avant de refroidir instantanément !

Tous les amateurs de photographie ou d'astronomie avaient compris quant à eux qu'il s'agissait en fait d'une photographie à longue pose des lumières clignotantes d'un avion ! Monsieur Velasco en avait d'ailleurs été informé, mais il persistait dans son «expertise» de cet «exceptionnel outil d'étude»...

Tout récemment, le 10 septembre 97, notre expert a présenté au journal de 13 h sur TF1 la vidéo d'un «OVNI» filmé le 7 septembre à Metz, se donnant deux mois pour conclure... Le gendarme qui a pris cette vidéo, pour sa part, n'a mis que deux jours pour comprendre qu'il avait filmé la lune bas sur l'horizon [10]... Il suffisait de consulter les éphémérides astronomiques pour se rendre compte que la lune se trouvait dans la direction de l'«ovni», clairement indiquée dans le rapport ! Eric Maillot du CNEGU [Groupe privé très sérieux, 11], qui m'a aimablement transmis cette information, avait immédiatement reconnu la lune, comme beaucoup d'astronomes amateurs...

La science de Monsieur Velasco

Alors, le directeur du SEPRA aurait-il de bonnes connaissances scientifiques dans d'autres domaines en rapport avec ses fonctions ? Peut-être l'astronomie, la physique ? Ça n'est apparemment pas le cas, à en juger par ce que Velasco déclarait à un journaliste [12, article encore transmis par des membres du CNEGU] :

De très nombreuses d'observations d'Ovnis ont été réalisées sur Terre après la Deuxième guerre mondiale. C'est à cette époque qu'ont eu lieu plusieurs essais thermo-nucléaires, dans des sites désertiques, qui ont provoqué des rayons gamma. Or, les rayons gamma n'existent pas à l'état naturel. De quoi étonner une intelligence extra-terrestre qui observe la Terre depuis longtemps, et l'inciter à venir voir sur place.

Eh bien non, tout étudiant en physique sait que les rayons gamma sont produits par des désintégrations radioactives naturelles, et n'importe quel amateur d'astronomie a entendu parler des «sursauts gamma», qui intriguent les astronomes depuis vingt-cinq ans ! Depuis que l'on connaît ces phénomènes, observés par des satellites spécialisés au rythme de plusieurs par jour, les spécialistes du SETI n'espèrent guère pouvoir différencier au milieu de tout ça des explosions nucléaires d'origine artificielle... Enfin, Velasco confond les bombes atomiques, dont les essais ont commencé à la fin de la guerre, et les bombes thermo-nucléaires, dont la première n'a explosé qu'en 1952, bien après les premières manifestations massives de «soucoupes volantes».

Les compétences d'un expert du CNES

Mais au fait, quelle a été la formation de Monsieur Velasco ?

On peut trouver la réponse dans un article de la revue Ciel et Espace écrit d'après ses indications [13, p.32] : Le service emploie alors jusqu'à sept personnes, dont trois ingénieurs et un technicien supérieur diplômé d'optique, Jean-Jacques Velasco. En 1989, le Gépan devient le Sepra, avec pour directeur J.-J. Velasco, promu ingénieur.

Ainsi donc, il s'agirait d'un «ingénieur-maison» n'ayant pas fait la moindre école d'ingénieur, et promu à ce grade simplement parce que ses titres réels paraissaient bien maigres pour le poste qui lui était affecté (Une pratique courante, le titre d'ingénieur n'étant pas protégé... C'est un peu comme les «marabouts» africains, très vite promus «professeurs») !

Avec ses études d'optique, Jean-Jacques Velasco se déclare volontiers «spécialiste de l'optique atmosphérique»... Une prétention qui fait rire lorsqu'on lit un passage de son livre [1, p.58] :

Parmi les phénomènes de perception étranges, celui de la lune, qui apparaît beaucoup plus grosse qu'elle n'est lorsqu'elle est basse sur l'horizon, est sans doute le plus fréquent et celui qui suscite les plus importantes réactions d'étonnement. Ces fréquentes erreurs d'interprétation ont été étudiées depuis longtemps. Déjà Ptolémée au IIe siècle réfléchissait au paradoxe de la pleine lune. Ce paradoxe, rappelons-le, est dû à un simple effet de réfraction atmosphérique.

Ce phénomène est en effet bien connu, et on peut trouver dans bien des livres de vulgarisation scientifique pour enfants qu'il s'agit d'une impression purement psychologique ! Aucun astronome amateur, aucune personne ayant la moindre notion d'optique, aucun esprit curieux ayant simplement fait l'essai avec un appareil photographique, ne peut ignorer que la réfraction atmosphérique n'a rien à y voir (tout au contraire, elle explique un léger aplatissement de la lune ou du soleil près de l'horizon) !

Les actes de Monsieur Velasco

Avec tous ses talents, qu'a donc fait Velasco ? Au GEPAN, il a commencé par exploiter ses compétences en optique pour participer à la conception du «SIMOVNI», un appareil permettant de mesurer les caractéristiques d'un OVNI, dont «on va vite constater les limites» selon les propres mots de Velasco [propos recueillis par Robert Roussel, 14, p.187].

Ensuite, il a écrit un livre... Et comme il craignait que son nom ne soit pas assez porteur pour lui assurer un grand succès, il s'est associé le concours de Jean-Claude Bourret [1]... Ce dernier, toujours en quête d'argent facile, était ravi de toucher des droits d'auteur sur un livre dont il n'avait écrit qu'une vingtaine de pages [il a fait pire depuis, en appelant un «nouveau livre» une compilation de ses anciens livres : 15].

Ce livre, c'est donc pour l'essentiel Jean-Jacques Velasco qui l'a écrit, et il ne s'en cache pas...

Qu'y trouve-t-on ?

Que le SEPRA signifie «Service d'études des phénomènes de rentrée dans l'atmosphère»... Ça n'est certes pas loin de la signification exacte, mais on attendrait du directeur d'un service du CNES qu'il connaisse précisément la signification du sigle de l'organisme qu'il dirige !

Dans le domaine des ovnis, il nous expose quelques cas d'identifications d'une banalité consternante, et les trois cas étudiés il y a bien longtemps par le GEPAN et considérés comme inexpliqués...

Puis, Velasco nous donne quelques «opinions personnelles», qui ne sont que des reprises d'autres auteurs :

Toujours aussi inspiré, le directeur du SEPRA a recopié quelques extraits du manuscrit que lui avait confié le journaliste Robert Roussel sur les recherches effectuées par les militaires et les scientifiques au sujet des ovnis [14] (ne cherchez pas ces passages dans l'excellent livre de Robert Roussel : son livre ayant finalement été publié après celui de Velasco/Bourret, il a préféré les modifier afin que ses lecteurs ne puissent pas penser qu'il avait copié Velasco !)

En bref, un livre dénué du moindre intérêt, et dont le titre relève de la farce : Ovnis, la Science avance ! Quelle image que Jean-Jacques Velasco donne de la science française !

Voyons ce qu'en dit un chercheur russe [19] :

La conduite du [...] directeur du Service d'Expertise des Phénomènes de Rentrées Atmosphériques Jean-Jacques Velasco, pendant les événements du 5 novembre 1990, illustre un amateurisme sorti d'un dictionnaire : «Amateurisme. /Pej./ Caractère d'un travail d'amateur (négligé, non fini, incomplet, etc.)»

Mais à qui profite le SEPRA ?

Quant au SEPRA, que fait-il, avec son budget annuel d'un million de francs payés par le contribuable ? Apparemment, rien ! Pas un seul compte-rendu du ses activités «scientifiques» n'en est sorti depuis sa création... Il recueille des témoignages, mais personne n'y a accès, en tout cas personne qui travaille pour le public ou pour la communauté scientifique (il n'y a guère que le psychologue de service, Manuel Jimenez, qui ait quelque peu exploité les fichiers du SEPRA, et on a vu le résultat !)... Sous ses aspects de service public largement médiatisés par Velasco, le SEPRA n'est apparemment rien de plus qu'un outil de collecte de témoignages au service exclusif des autorités militaires.

Si le SEPRA est devenu au fil des ans le service du CNES le plus connu du public, il est pratiquement inconnu au sein du CNES... Il suffit pour s'en convaincre de lire le gros ouvrage publié par ce centre sur son histoire [20] : on n'y trouve pas la moindre mention du SEPRA, ni d'ailleurs du GEPAN pourtant bien plus important !

La signification du sigle n'est même pas connue des principaux responsables du CNES... En 1990, Jack Muller, directeur de l'Établissement de Toulouse dont dépend le SEPRA, indiquait dans une lettre très officielle qu'il s'agit du «Service d'Expertise pour les Retombées Atmosphériques» ! Voilà qui ne fait pas très sérieux, pour une lettre portant l'en-tête du CNES et largement diffusée dans le public [introduction à la lettre adressée aux témoins, reproduite en 3] !

Quand la «justice» s'en mêle

Tout ce que j'ai écrit est parfaitement avéré, mais ne le répétez surtout pas si vous ne voulez pas que Monsieur Velasco vous traîne en justice ! C'est ce qu'il a fait lorsque j'ai dénoncé son incompétence dans un article consacré à la «vague d'ovnis» du 5 novembre 1990, dans une revue que j'édite moi-même à titre purement bénévole, dans le cadre d'une association sans but lucratif [21].

Monsieur Velasco a déposé une plainte pour diffamation auprès du Tribunal de Grande Instance [22], n'hésitant pas à réclamer 110 000 F de dommages et intérêts pour cet article d'une revue tirée à 1000 exemplaires, réalisée bénévolement sur un vieil ordinateur Atari, non distribuée en kiosque et largement déficitaire (tout cela est clairement indiqué dans l'éditorial).

Bien entendu, ce monsieur me reproche d'avoir employé des termes excessifs, mais n'attaque aucun des nombreux arguments que j'ai développés. N'importe quel scientifique véritable aurait fait le contraire !

J'estime pour ma part que les termes que j'ai employés, s'ils sont évidemment déplaisants, conviennent parfaitement aux circonstances... J'ai par exemple traité Monsieur Velasco de «fumiste», mot défini par les dictionnaires courants comme «familièrement, personne peu sérieuse, sur qui on ne peut compter»... Dire que Monsieur Velasco est «peu sérieux», ça n'est pas un excès de langage, mais un euphémisme !

Mais je ne me fais guère d'illusions sur l'issue de cette plainte, puisqu'il m'est interdit de me défendre ! On a en effet obligation pour se défendre auprès du Tribunal de Grande Instance d'être représenté par un avocat, je n'ai pas les moyens d'en payer un et je n'ai pas droit à l'aide judiciaire, étant attaqué en tant que représentant d'une association (laquelle n'a pas plus les moyens que moi-même de payer un avocat) et directeur d'une publication (fût-elle bénévole et largement déficitaire, cela ne change rien aux yeux de la loi !) Je serai donc jugé uniquement sur les pièces fournies par Monsieur Velasco, sans même être entendu... C'est ainsi que fonctionne la «justice» en France !

Je suis allé voir le président du Tribunal de grande instance qui doit traiter cette affaire, Monsieur Guichard, qui m'a gentiment expliqué qu'il ne faisait pas les lois et que je n'avais qu'à faire une quête pour pouvoir payer un avocat... Ça n'est nullement mon intention : si l'on doit faire une quête pour avoir le droit de seulement se défendre quand on est accusé de délits assez graves, je ne vois vraiment rien là-dedans qui mérite le nom de justice !

Je me fiche donc d'être condamné par une telle «justice», et je suis beaucoup plus curieux de connaître les réactions du public et de la communauté scientifique sur les «expertises» et les méthodes de Monsieur Velasco. C'est pourquoi je vous demande encore de diffuser ce texte, et d'y réagir... Prenez ça comme une «chaîne», une de ces lettres qu'on vous demande de photocopier en dix exemplaires pour assurer leur diffusion, mais en plus honnête : il n'y a rien à gagner et votre maison ne brûlera pas si vous ne le faites pas, mais vous aurez contribué à faire avancer la science, quand d'autres sont grassement payés pour la faire reculer !

Un expert comme ça, on y tient !

J'ai enfin été surpris par la réaction du CNES... Étant passionné par l'espace, j'ai toujours eu beaucoup de respect pour l'agence spatiale française, et je prenais soin de mettre en cause le SEPRA et non le CNES dans son ensemble... Pour moi, il était clair, et je l'ai écrit plusieurs fois y compris dans l'article incriminé, que ce service pratiquement ignoré au sein de l'agence spatiale lui était imposé pour des raisons politico-militaires. J'ai donc été surpris de recevoir en décembre 97 une lettre du directeur de l'établissement de Toulouse, Yves Trempat, prenant la défense de Monsieur Velasco et me menaçant à son tour de poursuites judiciaires en cas de récidive. Monsieur Trempat trouve intolérable que je mette en cause la renommée et la compétence du CNES, mais également celle d'un de ses agents en la personne de Monsieur Velasco... Bien entendu, lui non plus ne parle nullement des arguments que j'ai développés, considérant qu'à lui seul, le caractère outrancier de mes écrits suffit à jeter le discrédit sur ma publication.

Ainsi donc, au plus haut niveau, le CNES considère son «expert» en rentrées atmosphériques comme quelqu'un de très valable et son digne représentant (et par contre, il n'est pas choqué de lire sous la plume de cet «expert» qu'un de ses spationautes est un piètre observateur)... Les affirmations de Jean-Jacques Velasco concernant les rentrées atmosphériques et d'autres domaines relevant des compétences du SEPRA engagent donc le CNES dans son ensemble, et pas seulement un petit groupuscule complètement ignoré en son sein...

La rentrée atmosphérique de novembre 90 a traversé la France selon un axe Pau-Strasbourg, la photographie de Monsieur Ughetto représente bien ce phénomène et pas un vulgaire avion, l'exagération de la taille de la lune vue bas sur l'horizon est due à la réferaction atmosphérique, les rayonnements gamma n'existent pas dans la nature... Il s'agit là de positions officielles du CNES... Peut-être m'étais-je fait des idées sur le sérieux de l'agence spatiale française !

Robert Alessandri, amateur de sciences

Références :
  1. J.-C. Bourret et J.-J. Velasco : Ovnis, La Science avance.
    Robert Laffont, 1993.
  2. Robert Alessandri : 5 novembre 1990 : le Creux de la vague.
    I.N.H. Évidence (adresse de l'auteur), 1995.
  3. Franck Marie : OVNI Contact.
    S.R.E.S. Diffusion (B.P.41, 92224 Bagneux Cedex), 1993.
  4. Jean Sider : OVNI, le Secret des Aliens.
    Éditions Ramuel, 1998.
  5. Manuel Jimenez : La Psychologie de la perception.
    Flammarion, collection Dominos n°129, 1997.
  6. Science & Vie spécial «50 ans d'ovnis», juin 1997, p.121.
  7. GEPAN : Note technique numéro 16.
    CNES (18, av. Edouard Belin, 31400 Toulouse).
  8. L'Affaire de Trans-en-Provence.
    SERPAN (La Roche, 71520 Dompierre-les-Ormes).
  9. Paris-Match du 21 novembre 1990,
    repris en partie dans le numéro du 13 février 1997.
  10. Le Républicain Lorrain du 18 septembre 1997.
  11. CNEGU : 9 rue des Templiers, 21121 Fontaine-les-Dijon;
    revue Les Mystères de l'Est.
  12. L'Ardennais du 7 octobre 1994.
  13. Ciel et Espace, avril 1992.
  14. Robert Roussel : OVNI, les vérités cachées de l'enquête officielle.
    Albin Michel, 1994.
  15. Jean-Claude Bourret : OVNIS, 1999 le contact ?
    Michel Lafon, 1997.
  16. Jean-Claude Ribes et Guy Monnet : La Vie extraterrestre.
    Larousse, 1990.
  17. Renaud Marhic : Ces extraterrestres qui venaient du froid.
    SOS-OVNI (B.P.324, 13611 Aix Cedex 1).
  18. Vague d'ovnis sur la Belgique.
    SOBEPS (Avenue Paul Jansen 74, 1070 Bruxelles, Belgique), 1991.
  19. Boris Chourinov : OVNIS en Russie, les Deux faces de l'ufologie russe.
    Guy Trédaniel, 1995.
  20. Les trente premières années du CNES.
    La Documentation française, 1994.
  21. Univers OVNI numéro 2, octobre 1997.
    Association I.N.H. Évidence (adresse de l'auteur).
  22. Tribunal de Grande Instance de Marseille,
    1ère Chambre, M. Guichard, R.G. n°9800449.