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Plus de dix ans ont passé depuis que le chef du Sepra a écrit son premier livre, signé
Jean-Claude Bourret et
Jean-Jacques Velasco... Pour le second, il s'est encore associé le concours d'un journaliste, mais la couverture annonce
Jean-Jacques Velasco avec Nicolas Montigiani...
On ne sait trop si c'est parce que Velasco s'estime suffisamment
populaire pour ne plus avoir besoin d'une « locomotive
médiatique », comme il définissait Jean-Claude
Bourret, ou parce qu'il n'a pas trouvé cette fois une
« locomotive » plus puissante que Nicolas Montigiani, que
l'on ne connaît guère que pour un livre assez original
consacré aux crop-circles.
La couverture nous annonce :
Un seul homme, en France, pouvait répondre à cette question : les ovnis existent-ils ? [...]
Sa
réponse, attendue depuis des années, est sans
ambiguïté : oui, les ovnis existent. Les preuves en sont
scientifiquement établies.
Montigiani, qui semble n'avoir écrit que l'introduction (comme Bourret en son temps), y explique :
Nous ne voulons pas échafauder une théorie. Pas compiler
près de quatre-vingt-dix ans de témoignages. Mais tout
simplement tirer des dossiers personnels et officiels de Jean-Jacques
Velasco les conclusions objectives qui s'imposent : les ovnis — ou les
PAN, selon le curieux vocabulaire officiel — sont des objets, ils
volent et, oui, ils sont identifiables à des véhicules
spatiaux guidés par une intelligence.
Ces conclusions, Jean-Jacques
Velasco les a élaborées au-delà de son travail
professionnel au Sepra. Il n'est donc le porte-parole de personne,
sinon de lui-même.
Ainsi donc, si Velasco ne donne que son opinion personnelle, il est
cette fois affirmatif : les ovnis sont des véhicules
extraterrestres, et il en apporte les preuves scientifiques... C'est en
tout cas ce qu'il ne cessera de répéter tout au long de
l'ouvrage.
Le premier chapitre, sous le titre
Définition d'un phénomène : des PAN aux ovnis
est consacré à l'histoire du Sepra et de ses
prédécesseurs à la tête de cet organisme, et
à la mise en place de la « méthodologie
scientifique » à laquelle il prétend se conformer...
Le chapitre 2 s'intitule
J'ouvre mes dossiers...
Quelle formidable nouvelle ! Mais il la tempère aussitôt,
en nous expliquant qu'il ne peut pas ouvrir ses classeurs à
quiconque se présenterait au Cnes, en raison d'une loi sur la
protection de la vie privée des témoins. Et il ajoute en
note qu'il
déplore que des
fureteurs non patentés n'hésitent pas à trahir le
secret professionnel qui garantit la vie privée des
témoins. C'est ce qu'il répète partout
depuis longtemps pour discréditer les ufologues
« amateurs », mais il serait bien incapable de citer un
exemple, sinon mensonger, où un ufologue aurait
révélé l'identité d'un témoin sans
son accord.
Pourquoi ne communique-t-il jamais des dossiers dont il aurait
simplement effacé les identités et adresses des
témoins, si la protection de la vie privée est le seul
problème que cela pose ? Il nous explique :
Mais
qu'un chercheur, un scientifique, un sociologue, un historien, bref un
professionnel dûment identifié qui justifie de travaux ou
d'enquêtes sérieux souhaite consulter cette documentation
unique, c'est bien volontiers que le comité de pilotage en
examinera la possibilité.
C'est pourtant ce que demande avec insistance, et vainement, le chef du
laboratoire de zététique, que Velasco a eu le culot
d'accuser en public de ne pas vouloir consulter les dossiers du Sepra (
voyez le courrier échangé à cette occasion pour vous rendre compte de la mauvaise foi dont fait preuve Velasco) !
Il est patent que Velasco et son « comité de
pilotage » ne veulent surtout pas que les enquêtes puissent
être contrôlées par des enquêteurs
sérieux qui pourraient en démontrer la faiblesse !
Ça n'est donc certainement pas pour cacher au public des
dossiers explosifs qui prouveraient l'origine extraterrestre des ovnis
qu'il refuse d'ouvrir ses archives : s'il possédait de telles
preuves, il ne passerait pas son temps à en fabriquer de
fausses, comme on va en trouver des quantités dans la suite du
livre, à commencer par le chapitre suivant.
Le titre est sans ambiguïté :
USA-France : les chiffres clés qui prouvent l'existence des ovnis.
Il s'agit d'une comparaison statistique du nombre de cas classés
non identifiés par le Sepra et par un rapport américain
des années 50... Du fait que le Sepra admet 13,5 % de rapports
non identifiés et le rapport de l'institut Battelle 21,5 %,
les statistiques françaises et américaines se recoupent !, et ça prouve la réalité des ovnis... J'avoue n'avoir pas très bien compris.
Après cette première « preuve statistique », le
chapitre 4 est censé nous apporter les premières preuves
testimoniales, sous le titre :
D comme doute : des cas inédits.
Parmi ces « cas inédits » : Cussac, Socorro,
Valensole... Bref des cas des annés 60, très
intéressants mais dont on a parlé abondamment dans des
centaines de livres !
Il est vrai que Velasco tempère ce titre :
Ces
phénomènes non identifiés exceptionnels
— 4 ou 5 % des cas —, ont été
chroniqués de
droite et de gauche, repris sur des sites Internet. Mais à part
l'affaire de Cussac, exposée déjà dans Ovnis, la science avance
(op. cit.
),
personne n'en a jamais eu vraiment connaissance en direct, hormis les
enquêteurs du Gepan/Sepra et quelques ufologues amateurs.
Voilà donc ce qu'il appelle un cas inédit : un cas dont
lui-même n'a pas déjà parlé dans son
précédent livre ! Et lui-seul est bien sûr capable
de nous faire partager « en direct », par un
résumé de trois pages, le cas de Socorro, au
Nouveau-Mexique, auquel des enquêteurs américains ont
consacré des centaines de pages !
Le chapitre se termine par un
cas inédit tiré des dossiers du Sepra, lequel
réunit tous les critères propres à le classer parmi les objets volants non identifiés. Il rapporte une observation d'un
objet ovale, rouge, entouré de flammes blanches,
accompagné d'un fort grondement, ayant provoqué
l'extinction de l'éclairage public de la petite ville de
Gujan-Mestras, à côté d'Arcachon. Velasco nous
explique que lorsque les cellules « photos
électriques » (
sic !) qui contrôlent l'éclairage public captent une
lumière qui dépasse le seuil de dix mégawatts au
mètre carré (il s'agit en fait de dix milliwatts !),
elles coupent l'alimentation des lampadaires. Connaissant le seuil de
luminosité déclenchant ce système, et sachant que
les analyses situèrent la distance des cellules au PAN D
[précisons que dans la classification du Sepra qui trouvait que
le terme d'ovni manquait de rigueur, un PAN D est un
Phénomène Aérospatial non identifié de
type D, D voulant dire... qu'il n'est pas identifié. Et vous
aurez donc compris qu'un PAN A est un phénomène
aérospatial non identifié parfaitement identifié !]
entre cent trente cinq et quatre cent quatre-vingts mètres
(il faudra qu'on m'explique comment « l'analyse » du Sepra
est parvenue à cette conclusion), on peut calculer
l'énergie minimale émise par l'Ovni...
On a donc mesuré l'énergie d'un ovni, c'est formidable !
Mais outre le fait que ce cas « inédit » a
été exposé bien plus en détail par Jacques
Vallée dans
Confrontations
(Robert Laffont, 1991) et plus récemment dans le rapport
Sturrock, il évoque irrésistiblement un gros
météore qui aurait pénétré
profondément dans l'atmosphère... Le rayonnement
mesuré serait tout à fait compatible avec un corps de
quelques dizaines de kilogrammes parvenant à quelques
kilomètres d'altitude... Ça n'est pas fréquent,
mais pas particulièrement exceptionnel non plus, et quelqu'un
qui s'est présenté pendant douze ans comme expert en
rentrées atmosphériques devrait savoir reconnaître
un tel phénomène !
Le chapitre suivant parle des
Trois cas français classés ovnis.
Le premier est bien évidemment celui de Trans-en-Provence, le
cas « exemplaire » d'étude scientifique de trace
d'ovni par lequel le Gepan (ancêtre du Sepra) s'est fait
connaître.
Aussi bien pour Velasco qui a réalisé l'enquête que
pour les ufologues « traditionnels », c'est donc le cas qu'il
ne faut pas attaquer... Et pour ceux qui ne croient pas aux ovnis,
c'est comme le dit Velasco en annexe le cas français
« à abattre » et non à
« débattre »... Si ce n'est que ceux qui refusent le
débat, ce sont les défenseurs de ce cas et non les
sceptiques, et ces derniers gagnent donc peu à peu du terrain.
On se rend compte que l'enquête a caché bien des
détails gênants pour la crédibilité de ce
cas, que le témoignage considéré isolément
n'est guère convaincant, que la trace évoquait des
pneumatiques plus qu'autre chose, et que les analyses sont très
criticables (quoique pas autant que certains le prétendent).
Velasco, pour répondre ou plutôt éviter de répondre à ces critiques, explique :
L'ensemble de ces
éléments ne laisse aucun doute sur la présence
d'un ovni, au sens précis du sigle, ce jour-là, à
Trans-en-Provence. Qu'on le veuille ou non.
Car les détracteurs
n'ont pas manqué. On a critiqué les analyses biochimiques
du professeur Bounias et, dans une moindre mesure, on s'en est pris
à la personnalité de Renato Nicolaï.
Dans les deux cas, les
détracteurs ne semblent pas de bonne foi. Michel Bounias a
appliqué les procédures élaborées et
approuvées par le conseil scientifique du Gepan
. Or, elles
reposent sur la méthode expérimentale « en double
aveugle ».
C'est lui qui EST ici de mauvaise foi : le conseil scientifique ne
se
réunissait plus lorsque ce cas est survenu, et les
procédures de prélèvement des échantillons
qu'il avait élaborées n'ont absolument pas
été respectées, pas plus que la méthode de
« double aveugle » (Bounias savait parfaitement quand il a
fait ses analyses où chacun des prélèvements
avaient été faits, et il ne l'a jamais caché). Et
en prétendant que les critiques
ont porté uniquement sur les analyses du professeur Bounias
(décédé récemment, et dont
l'honnêteté n'a été mise en doute par
personne contrairement à ce que Velasco prétend à
la fin de son livre) et sur la crédibilité du
témoin, il évite de répondre aux critiques qui ont
été formulées à son encontre (pourquoi
a-t-il par exemple occulté, et continue-t-il à le faire,
le fait que le premier télex envoyé par les gendarmes
ayant visité le site indiquait que les traces ressemblaient
à un « ripage de pneumatique ? »)
Bref s'il serait abusif de dire que le cas de Trans-en-Provence n'est
pas un élément important du dossier OVNI, le fait est que
sa présentation par Velasco est dépourvue de toute
objectivité et qu'il élude toutes les questions qu'on lui
pose.
La seconde « preuve testimoniale » est le cas de
« l'amarante déshydratée », que l'on peut
passer rapidement tant il ressemble à celui de Trans-en-Provence
en moins convaincant : il est aussi venu fort à propos au moment
où l'existence du Sepra était menacée, il
confirmait tout aussi à propos des « effets
physiques » particuliers dont le Sepra avait débattu
quelques mois auparavant (ici les effets d'un champ électrique
intense sur l'herbe), mais les analyses végétales ont
été très limitées en raison d'une mauvaise
procédure de conservation, et le témoin n'a jamais voulu
avoir un autre interlocuteur que Velasco.
Le troisième « véritable ovni » du Sepra, qui a
succédé à celui de Trans-en-Provence pour la
promotion de cet organisme depuis 1997, est l'observation
« confirmée par radar » d'un « immense
objet » par l'équipage d'un Airbus le 28 janvier 1994.
Velasco oublie simplement comme toujours de préciser que la
trace radar et l'observation visuelle sont totalement inconciliables,
que prises séparément elles n'apparaissent pas
franchement inexplicables, et que ce cas ressorti trois ans
après les faits n'avait pas été jugé
suffisamment étrange pour faire l'objet d'une enquête, ni
par le Sepra ni par l'armée de l'Air qui avait
repéré l'écho non identifié.
Ce « cas radar/visuel » français nous amène tout naturellement dans le chapitre 6 aux
Cas aéronautiques : les preuves par le radar.
Velasco y reprend sans aucune étude critique la plupart des
affaires choisies dans le rapport Cometa : quelques cas
étrangers dont on a déjà beaucoup parlé, et
quelques cas français plus ou moins intéressants
tirés des archives du Sepra. Notons au sujet de ces derniers que
Velasco est toujours incapable de reconnaître un
météore tout à fait typique, comme celui qu'a vu
le colonel Bosc le 3 mars 1976 (une « boule de feu » verte
très rapide suivie d'une traînée lumineuse).
Le chapitre devient un peu plus original avec les statistiques « radar/visuel » :
Nous
disposons actuellement d'une base de données et d'un catalogue
de mille cinq cents observations d'ovnis par des pilotes et
équipages d'avions civils et militaires qui couvrent l'ensemble
du globe. Plus loin, il nous parle de cette base de
données recueillie par Dominique Weinstein, qui « recense
plus de mille quatre cents cas officiels ». Déjà,
ça baisse... Et en réalité, cette base de
données recense mille trois cents cas, comme son titre l'indique
(on peut la trouver
sur Internet)...
Notons que cette base de données recense les cas provenant de
sources variées et considérés par ces sources plus
ou moins sérieuses comme des ovnis... Il s'agit d'un outil
précieux pour ceux qui voudraient approfondir certaines de ces
observations, mais il est clair qu'un grand nombre d'entre elles
s'expliquent par des météores ou d'autres
phénomènes naturels auxquels les pilotes ne sont pas
habitués.
Velasco reparlera de cette base de données, mais il ne
s'intéresse dans ce chapitre qu'aux cas où l'observation
des pilotes était corroborée par des mesures radar, soit
deux cents cas (15 %),
ce qui est à peu près correct. Mais il précise qu'en
appliquant « une série de filtres destinés à
ne retenir que les cas les plus crédibles »,
l'ingénieur français Gérard Gonin a réduit
ce nombre à 147 cas, et il ajoute en note que
ces
« filtres » sont destinés à écarter les
cas ne comportant pas de corrélation visuelle/radar, mais aussi
ceux dont les rapports omettent l'heure, l'altitude et la vitesse de la
cible radar. Ou encore les cas dépourvus de distance et de
durée, alors qu'ils ont noté l'altitude et la vitesse.
Cette affirmation est totalement mensongère, comme on peut s'en
rendre compte en examinant les graphiques de la page suivante (107) :
on y voit que sur ces 147 cas, la vitesse n'est donnée que dans
31 cas, l'altitude dans 20 cas, la durée dans 18 cas et la
distance dans 13 cas seulement ! Ça montre bien le manque de
détails de la majorité des cas recensés dans le
catalogue Weinstein, et le ridicule qu'il y a à prétendre
tirer des « invariants » à partir
d'échantillons aussi réduits : classer les observations
dans quatre plages de distances dans lesquelles on retrouve entre deux
et six cas et annoncer des pourcentages précis, ça n'est
pas sérieux !
On trouve aussi sur ces tableaux une deuxième série de
chiffres, étroitement corrélés avec les
premiers. Aucune explication n'est donnée, mais on comprend
facilement qu'il s'agit d'effectuer les mêmes
« classements » à partir d'un échantillon
réduit à soixante-cinq cas par un nouveau
« filtre ». Et ce filtre, quel qu'il soit, n'élimine
que très peu de cas sur lesquels on a des données
chiffrées. On retrouve donc presque exactement les mêmes
graphiques, et en les comparant avec ceux de l'échantillon
complet (147 cas), on trouve naturellement un coefficient de
corrélation extrême. Ces corrélations
relèvent purement et simplement de la farce !
Mais c'est dans un tableau de la page 108 représentant
« l'évolution des cas radar/visuel recensés depuis
1945 » que Velasco donne toute la mesure de ses compétences
en statistiques :
Si vous regardez attentivement la
courbe, vous constaterez que certaines années manquent... Vous
pourrez aussi remarquer qu'il y a très souvent une ou deux
observations rapportées pour une année, mais jamais
zéro... Et il suffit de se reporter au catalogue de Dominique
Weinstein pour comprendre que les années
« manquantes » sont celles sans observations : pour Velasco,
une année présentant zéro observations n'a rien
à faire dans la « courbe d'évolution »... Il
est vrai que l'humanité a mis beaucoup de temps à inventer le
zéro, il semble que certains n'ont pas encore bien
assimilé cette notion ! Vous me direz qu'une fois qu'on le sait,
il suffit de rajouter mentalement les années qui manquent avec
une valeur nulle... Mais puisque seule une année sur deux est
numérotée dans le tableau, on ne sait pas toujours
à quelle année correspond une valeur non nulle (par
exemple, est-ce que c'est en 1991, 92 ou 93 que trois cas ont
été recensés ?)
Étant toujours prêt à rendre service, je vous donne en exclusivité la courbe corrigée :
Vous n'avez plus qu'à l'imprimer et à la coller en page
108 du livre pour avoir un ouvrage un peu moins inexact.
J'espère juste que Velasco ne me remerciera pas en me faisant un
procès pour avoir reproduit sans autorisation sa courbe bidon !
Au fait, ne suis-je pas en train d'attribuer à Velasco des
sottises de Gonin ? Pas du tout, puisqu'on trouvait le même
syndrome « d'années manquantes » et jamais nulles dans
le tableau des cas terrestres recensés par le Sepra
présenté en page 36, et qu'on le retrouvera dans toutes
les autres courbes de ce livre... À commencer par celle de la
page 148, recensant les cas aéronautiques recueillis par le
Sepra :
Et voici encore la courbe véritable :
En bref, toutes les statistiques présentées dans ce
chapitre ne démontrent absolument rien, sinon la nullité
absolue du chef du Sepra en matière de statistiques !
Cette incompétence va atteindre des sommets dans le chapitre suivant, intitulé pompeusement :
La découverte : des ovnis et des bombes.
Cette découverte qui constitue la révélation
fracassante du livre, c'est que les extraterrestres nous visitent parce
que nous faisons exploser des bombes atomiques ! L'idée n'est
pas nouvelle, mais Velasco prétend l'avoir prouvée
statistiquement (avec ses notions exclusives de statistiques,
préparez vous à rire). Il nous prévient :
les
éléments sur lesquels je fonde mon raisonnement sont
strictement authentiques
. Il n'y a de ma part aucune envie de
sensationnalisme. Nous voilà rassurés.
À la fin du chapitre, il ajoutera modestement, au sujet d'un
scientifique qui suggérait la même idée en 1949 :
Autrement dit, le docteur G. E. Walley considère que la bombe
atomique peut déclencher une éventuelle visite
d'extraterrestres tout en invitant d'autres scientifiques à
réaliser ce travail de vérification entre les dates des
explosions et la présence d'ovnis...
Je lui réponds
aujourd'hui en confirmant que d'autres ont réalisé ce
travail, en témoignent les schémas exclusifs qui
illustrent ce chapitre.
Voilà donc en quoi consiste ce travail exclusif, cette grande
découverte, l'apothéose de son travail de chercheur au
Cnes : établir une corrélation entre les explosions
nucléaires et les observations d'ovnis.
Et Velasco nous assure encore, comme pour s'en convaincre
lui-même, de la grande objectivité de sa démarche :
Pour minimiser les critiques de ceux
qui me traiteront d'ufologue avide de sensationnel (certains ont
déjà avancé cette idée), je souligne que
l'originalité de ma démarche repose sur un filtrage
radical : je ne retiens qu'une seule forme de données pour
étayer ma démonstration, les cas d'observations
aéronautiques d'ovni visuel/radar. Et encore : sur mille
quatre
cents cas aéronautiques mondiaux, nous n'en conserverons que
cent quarante, tirés de la base de Laurent Gonin (lire
chapitre 6). Ceux qui ont fait l'objet de mesures radar
simultanément
à l'observation visuelle.
Et il superpose donc la courbe de ces cas radar/visuel à celle
des essais nucléaires souterrains ou atmosphériques :
Mais examinons d'un peu plus près la courbe des observations
censées être tirées des statistiques de Gonin :
nous avons déjà vu cette courbe, et ça n'est pas
tout à fait la même ! En fait, cette courbe ne
représente pas comme le prétend Velasco les 147 cas des
statistiques Gonin, mais les 204 cas radar/visuel apparaissant dans le
catalogue de Weinstein, dont Gonin a écarté les moins
crédibles. Vous me direz qu'une cinquantaine de cas en moins
ça ne doit pas changer grand-chose, et c'est vrai si ce n'est
que Gonin n'a retenu aucun cas postérieur à 1995, ce qui
n'arrangeait pas Velasco dans ses conclusions !
Notez en outre que cette courbe est décalée d'un an (la
principale « vague » de 1952 figure pour l'année 1953)
sauf pour la première et dernière année (il y a
bien quatre cas en 1945 et aucun en 1944, et un en 2000), que la
superposition avec le graphisme par barres représentant les
essais nucléaires est ambiguë et que ça n'a pas
l'air innocent (on peut avoir l'impression que les « pics »
d'observations de 1957 et 1967 — et non 1958 et 1968 — correspondent
à des pics d'essais nucléaires, alors qu'ils
correspondent à des creux ! Pour vous représenter une
superposition correcte des deux courbes, décalez la courbe
d'observations radar/visuel d'une demi-année vers la gauche, et
l'échelle des années d'une demi-année vers la
droite), que dans les légendes les essais
nucléaires souterrains et atmosphériques sont
inversés, bref que tout ça n'est pas très
sérieux. Il est vrai que le graphique est signé Sophie
Montigiani, mais puisque Velasco en tire sa révélation
fumeuse on peut espérer qu'il l'a contrôlé !
On peut aussi s'interroger sur ce que sont devenues les
« années nulles », que Velasco élimine systématiquement de ses statistiques... Ici, il
est bien forcé de les rétablir, puisqu'aucune
année n'est dépourvue simultanément de cas
radar/visuel et d'essais nucléaires... Alors, aura-t-il remis
les valeurs nulles qu'il avait fait disparaître ? Pas du
tout :
observez bien, vous verrez que la courbe ne présente jamais une
valeur nulle. Et pourtant, en consultant le catalogue Weinstein, on
trouve quelques années où aucun cas radar/visuel n'est
consigné : par exemple 1992 et 93. Et ça
nous permet de constater la méthode employée par Velasco
pour restituer les « années manquantes » : il a
recopié pour les années 92 et 93 la valeur de 1991, de
quatre cas ! Velasco est décidément aussi
doué
pour les statistiques que pour l'expertise des rentrées
atmosphériques !
Bref, voici la courbe réelle d'évolution des cas
radar/visuel enregistrés dans le catalogue Weinstein (outre la
restitution correcte des « années nulles », il y a
quelques petites différences par rapport à la courbe
présentée par Velasco, dues sans doute à des
erreurs de décompte) :
Ça ne change pas grand-chose à la démonstration,
mais ça donne une idée de la façon dont Velasco
fait de la science !
Voyons maintenant ses conclusions :
Premier constat : le signal effectif
représenté en ordonnée par le nombre d'essais
nucléaires dans l'atmosphère et celui des cas
radar/visuel démarre quasiment à la même époque.
C'est ici qu'on comprend pourquoi Velasco a choisi de ne parler que des
« cas radar/visuel », alors que le catalogue Weinstein
rapporte des observations de pilotes depuis 1916 (et si on ne se
limitait pas aux pilotes, il serait nécessaire de tenir compte
des centaines d'observations « d'airships » en 1896/97, voire
de remonter encore plus loin). En faisant intervenir le radar, on
impose une limite temporelle : inventé en 1935, cet instrument
n'a commencé à se développer que pendant la
guerre... Et donc, Velasco a juste apporté la preuve statistique
que le développement de la bombe atomique et du radar ont
découlé d'un même événement, qui est
la seconde guerre mondiale : félicitons-le pour cette magnifique
démonstration !
Le profil des deux courbes est en outre assez similaire.
Même visuellement, on ne voit pas grand-chose de commun entre les
deux courbes (moins encore lorsqu'on utilise la courbe corrigée
des cas radar/visuel), et c'est confirmé par la statistique : il
n'y a pas la moindre corrélation significative. Même les
défendeurs de l'isocélie et autres chimères de
l'ufologie faisaient preuve de bien plus de sérieux que Velasco
dans le maniement des statistiques.
En 1998, la fin des essais nucléaires souterrains marque l'arrêt des cas radar/visuel.
On a vu comment Velasco avait triché pour que les cas
radar/visuel ne s'arrêtent pas en 1995 comme dans les
statistiques Gonin qu'il prétend avoir utilisées... Mais
les cas Weinstein ne s'arrêtent pas non plus en 1998, puisqu'il
reste un cas répertorié pour chacune des années
1999 et 2000 (autant qu'en 1997 et 1998). Et s'il n'y a aucun cas
postérieur à 2000, c'est simplement parce que Weinstein a
arrêté son travail cette année-là !
Le chapitre se termine par une discussion sur les statistiques
menées en Amérique par l'institut Battelle dans les
années 50, qui montrent une certaine prédilection des
ovnis pour les bases militaires... Les conclusions
présentées par Velasco en étudiant uniquement le
pourcentage de cas inexpliqués ne valent encore pas grand-chose,
mais la prédominance d'apparitions au-dessus de certaines zones
sensibles est loin d'être une nouveauté, et a
été largement discutée : on s'est demandé
notamment, ce que Velasco ne fait pas, si cela n'est pas dû
simplement au fait que ces zones sont très surveillées,
et par des observateurs qui sont un peu plus capables que l'homme moyen
d'identifier certaines sources de méprises courantes.
Dans le chapitre suivant,
Les ovnis existent, les politiques le nient,
Velasco explique les raisons pour lesquelles les ovnis doivent
être pris au sérieux et méritent d'être
étudiés par les scientifiques... Je l'approuve
entièrement sur le fond, et c'est pourquoi je n'accepte pas
qu'on discrédite l'ufologie en présentant comme un
travail scientifique un livre truffé d'erreurs, de mensonges et
de sottises. Si de véritables scientifiques le lisent en
espérant trouver dans ce texte du « monsieur Ovni »
officiel français des raisons de se pencher sérieusement
sur l'étude du phénomène, ils en seront définitivement dissuadés !
Le dernier chapitre pose la question
Sommes-nous une espèce sous surveillance ?
Après une discussion très banale sur le programe Seti et
l'exobiologie, Velasco répond par l'affirmative, et donne sa
« conviction scientifique » :
oui, les ovnis existent et leur origine extraterrestre est scientifiquement fondée. Pauvre science !
Deux annexes terminent ce monument d'antiscience : dans la
première, il se livre à des attaques mensongères
portant sur ceux qu'il appelle des
« ufologues-zététiciens » qui cherchent
à démonter ses enquêtes (il n'y a pas que des
zététiciens qui se sont rendu compte de leur manque total
de sérieux), sans répondre à aucune critique mais
en cherchant à les repousser sur d'autres : si on veut critiquer
les enquêtes du Sepra qui ont été conduites par
lui-même, il faut s'adresser à Hubert Curien, ancien
président du Cnes, qui est censé les avoir
« validées » ! Autant dire que toutes les
âneries qui marquent ses
douze années « d'expertises de rentrées atmosphériques »
sont à reprocher à André Lebeau, qui était président du Cnes
alors que le Sepra signifiait encore
Service d'expertise des phénomènes de rentrées atmosphériques
et qui estime que le Cnes a ainsi « acquis une renommée
mondiale dans le domaine des rentrées
atmosphériques » !
La deuxième nous donne une nouvelle démonstration du
travail « scientifique » mené au Sepra. Velasco nous
parle des travaux qui ont été faits pour
« copier » les ovnis, en mêlant les recherches
sérieuses aux pires absurdités : à
côté de la mhd, censée propulser l'appareil en
« diminuant la pression devant lui et en l'augmentant à
l'arrière » (une sottise empruntée à Claude
Poher, le fondateur du Gepan, lui aussi faux scientifique et auteur
d'une
théorie délirante
sur la propulsion des ovnis que Velasco définit comme « la
première approche capable d'intégrer des principes
physiques complexes confrontés à des données
expérimentales indubitables » !), on trouve les
délires sur l'antigravitation du docteur Marcel Pagès,
annoncé comme « ingénieur physicien » alors
qu'il était docteur en... psychiatrie ! Et le Sepra y ajoute sa
petite touche, en ayant encadré le « travail » de deux
élèves ingénieurs en aéronautique qui ont
modélisé le comportement aérodynamique d'une
« soucoupe volante » pour montrer que la forme n'était
pas adaptée au vol hypersonique. La forme utilisée donne
une idée du sérieux de cette étude :
Tant qu'ils y étaient, ils auraient pu utiliser une
« soucoupe volante » en forme de chapeau canotier, le
résultat aurait été encore plus
« probant » ! Je propose à ces « brillants
élèves » (
dixit
Velasco), qui ont la prudence de rester anonymes, d'essayer avec cette
autre forme, et de prouver ainsi que les missiles hypersoniques ne
peuvent pas exister :
Que des étudiants en aéronautique s'amusent avec les
moyens du bord à simuler sur ordinateur le comportement
aérodynamique d'une forme simplifiée et bien peu
réaliste de « soucoupe volante », ça n'est pas
criticable. Mais que le directeur d'un service du Cnes présente
ça comme une étude scientifique comparable aux recherches
de Jean-Pierre Petit en MHD, c'est se moquer du monde.
Et c'est ce que fait Velasco du début à la fin de ce livre...