L'ovni géant qui a stationné pendant trois heures au-dessus de Montréal !
(29/12/2016)


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Mise à jour (06/01/2017)

Mise à jour (31/12/2018)


Le 7 novembre 1990, deux jours à peine après que la France eut connu l'une de ses plus formidables vagues d'ovnis, des centaines de personnes ont observé à Montréal un grand objet métallique émettant des faisceaux lumineux, qui est resté stationnaire au-dessus de la ville pendant trois heures ! Des policiers ont constaté les faits, un photographe de presse a pris une photo, un expert de la Nasa a conclu après examen qu'il y avait bien un objet circulaire solide, en trois dimensions, dont le diamètre était d'au moins cinq cents mètres et peut-être beaucoup plus ! Le lendemain de l'observation, deux agents du Norad ont confisqué les rapports de police et de gendarmerie émis sur ce phénomène sans précédent, et l'enquête s'est arrêtée là...

C'est ainsi que la plupart des sites ufologiques continuent à nous présenter cette observation... Mais il y a comme d'habitude beaucoup de mythe derrière ce récit, et le mystère est éclairci depuis longtemps : à défaut de soucoupe volante extraterrestre, cette observation va nous faire découvrir un phénomène fascinant et peu connu de la nature.


Les faits

Tout a commencé ce soir du 7 novembre 1990 sur le toit-terrasse situé au 17e étage d'un grand immeuble abritant l'hôtel Hilton-Bonaventure, un hôtel de luxe réputé notamment pour sa piscine chauffée en plein air dans laquelle on peut se baigner toute l'année.

Ce sont justement deux nageurs qui ont vu les premiers, vers 19 h 15, un étrange phénomène lumineux composé de plusieurs faisceaux semblant émaner d'un « objet » circulaire invisible stationnant juste au-dessus de l'hôtel, le tout couvrant une bonne partie du ciel.

Les nageurs ont averti la surveillante de la piscine, Line Saint-Pierre, qui a elle-même averti l'agent de sécurité de l'hôtel, Albert Sterling... Celui-ci a appelé la police, et peu après ce sont des agents à la fois de la police de la Communauté urbaine, puis de la Gendarmerie royale du Canada, qui sont arrivés pour tenter d'éclaircir cette affaire. L'histoire s'ébruitant, d'une douzaine de témoins au départ, la terrasse a accueilli jusqu'à quarante à soixante-dix personnes, alors que le phénomène était de plus en plus lumineux.

Vers 21 h, un journaliste du journal la Presse, Marcel Laroche, est aussi arrivé, et il a pu photographier les lumières en plaçant son appareil photo dirigé vers le ciel en pause manuelle d'une trentaine de secondes, alors que la luminosité de l'objet avait nettement baissé :

Photo de l'objet, avec cinq lumières en demi-cercle et des faisceaux lumineux divergents

Une deuxième photo prise dans des conditions similaires ne montre que les trois lumières principales, très atténuées... Toutes les autres tentatives de photographier ou filmer ce phénomène ont échoué en raison de sa faible luminosité. Marcel Laroche lui-même avait pris une dizaine de photos en pose automatique d'un soixantième de seconde, qui n'ont rien donné. Le photographe attitré de la Presse et celui de la police de la Communauté urbaine sont arrivés plus tard, et ont aussi tenté sans succès de photographier le phénomène.

Peu après, certaines personnes pensant que ces mystérieuses lumières pouvaient être des reflets dans les nuages de projecteurs situés sur le chantier d'une grosse tour en construction à côté de l'hôtel, les policiers ont contacté le contremaître du chantier pour lui demander d'éteindre ces lumières, et le phénomène était toujours présent.

Un avion privé de type Cessna est passé à proximité des faisceaux lumineux, et les policiers en ont déduit que l'objet se trouvait beaucoup plus haut. Le journaliste Marcel Laroche estimait que l'altitude de cet avion était de l'ordre de 370 mètres. Un pilote d'Air Canada présent sur le toit de l'hôtel estimait pour sa part l'altitude de l'objet entre 2500 et 3000 mètres, ce qui lui aurait conféré des dimensions gigantesques !

L'objet s'est ensuite peu à peu fondu dans la couche de plus en plus dense de nuages, pour disparaître complètement vers 22 h 15, après trois heures de présence !

Dans les jours qui ont suivi, l'affaire ayant été largement médiatisée, d'autres témoins se sont manifestés, indiquant que des phénomènes lumineux similaires avaient été vus ce soir-là dans toute la ville.

La presse de l'époque

Dès le lendemain de l'observation, le quotidien canadien La Presse, dont trois des journalistes avaient assisté au phénomène, a publié l'article suivant :

Un OVNI dans le ciel de Montréal ?

Il était accompagné de la principale photo (en noir et blanc et de mauvaise définition) prise par le journaliste Marcel Laroche.

La station Radio Canada diffusait pour sa part le même jour une émission d'une quinzaine de minutes consacrée au phénomène, que l'on peut écouter ici. On y trouve plusieurs témoignages, intéressants du fait qu'ils sont « tout frais ». J'en retranscris les extraits concernant les caractéristiques du phénomène.

Le premier est celui de la surveillante de la piscine, Line Saint-Pierre, qui a été une des premières personnes à voir l'objet :

Hier soir, des nageurs de la piscine m'ont demandé de sortir pour constater de visu qu'est-ce qu'il y avait dans le ciel. Il y avait des lumières qui étaient... C'était haut, plus haut que tous les édifices dans le centre-ville qu'on peut avoir, peu importe où on se trouvait sur le bord de la piscine on l'avait toujours au-dessus de la tête, alors c'était assez gros.

C'était ni plus ni moins que des lumières, les lumières étaient... Le système de lumières était ovale, il y avait des lumières oranges qui décrivaient le cercle... pas le cercle mais l'ovale, ces lumières-là étaient orange, puis à partir de ce cercle-là il y avait comme, je sais pas c'est difficile à expliquer... Comme un faisceau de lumières qui étaient plus blanches mais qui diffusaient en entonnoir, à la verticale... Ça avait l'air plus... On dirait que c'était un plafonnier, la lumière ne pouvait pas venir d'en bas, ou en tout cas je ne voyais pas d'où elle pouvait venir, c'était tellement en haut de toute façon.

Vers sept heures les gens m'ont prévenue, puis vers neuf heures quand je suis partie c'était encore là, on le voyait moins bien à cause des nuages mais les lumières étaient encore là. Ça bougeait absolument pas.


Autre témoignage, celui d'un congressiste qui se trouvait à l'hôtel :

En arrivant par taxi hier de l'aéroport, je m'avançais déjà, le portier me dit « regarde, on a une soucoupe volante qui est au-dessus de nous », j'ai regardé j'ai dit « voyons donc, ça se peut pas ». Parce que y a un édifice en construction à côté, tout ça... De nouveau il m'a répété « regarde, elle descend », et puis on l'a vue, véridiquement, c'était une soucoupe volante... C'était un objet rond qui avait quatre grosses lumières en dessous et une lumière qui s'éclairait autour, un peu comme on a vu si vous voulez dans, à la télévision, souvent dans les films où on nous montre une soucoupe volante qui nous vient du futur si vous voulez, c'était très semblable à ça, et puis elle était très stable, elle a été là pendant deux heures de temps, c'était extraordinaire à voir, elle est descendue et elle est remontée, et puis là il y a eu des nuages, qui ont si vous voulez baissé la lueur de la lumière, mais la lumière était quand même très forte. Et là est-ce que ça aurait pu être autre chose que ça, je l'ai pas touchée, je vous dis ce que j'ai vu.

Et celui d'une dame, à qui on demande si ce qu'elle a vu correspond en tout point à ce que le monsieur vient de dire :

Exactement, oui, j'étais très ?? j'imagine que j'ai pas voulu sortir au début, j'étais en train de souper avec ma fille, ma fille est allée voir et puis elle est revenue me dire « effectivement c'est vrai viens voir »... Alors on est sorties, et puis les gens de l'hôtel, le personnel, tout le monde était là finalement, c'est vrai c'est ça, même les policiers étaient un peu incrédules, mais ils l'ont vu aussi ; il y avait deux policiers qui étaient en haut du ?? et puis c'est ça c'était exactement comme M. ?? a dit, je l'aurais pas cru je l'aurais pas vu moi...

Écoute tu appelles ça soucoupe volante, objet volant, comme tu veux là mais je sais que c'était pas un avion qui reste stable pendant deux heures de temps à peu près au même point, qui monte un peu, qui descend, ?? des ?? des nuages. Effectivement c'était un objet comme il le décrit et puis ensuite peut-être ce qu'il a omis M. ?? c'est qu'il y avait aussi comme des faisceaux de lumière qui partaient de cet objet-là qui traversaient les nuages et qui s'en allaient... Effectivement c'est resté pendant deux heures et puis c'était effectivement un objet volant, oui, voilà.

J'étais avec ma fille, et puis il y avait tous les gens du personnel au restaurant la Bourgade ici, à la place Bonaventure, il y avait aussi d'autres gens qui étaient à une noce juive je pense qu'il y avait hier au soir, parce qu'ils étaient en robe de bal, et puis, oui il y avait quand même... On se relayait, finalement moi je mangeais ma soupe, je suis sortie pour voir ce qui se passait, je suis revenue manger un bout de salade, je ressortais, j'ai mangé mon repas en quatre ou cinq étapes parce que voulais voir si ça bougeait, si ça redescendait ou quoi là, et à neuf heures et demie ben je suis allée dans ma chambre, parce que si tu veux fallait pas que je passe la nuit à regarder si ça redescendait ou si ça remontait, tout simplement. Deux heures de temps je trouvais ça assez intéressant mais c'est jusqu'à ce que t'attrapes un mal de cou, hein, t'es dehors, malgré quoi que la piscine est chauffée mais t'es quand même dehors. Non je pense c'était très intéressant, et puis, mais moi ce qui m'a surpris c'est que les gens justement comme toi, puis les gens peut-être qui se connaissent plus, si t'es pas là, sur le coup je sais que le maître d'hôtel a essayé à plusieurs reprises de communiquer avec Dorval, Mirabel
et cetera là, c'était un peu négatif comme histoire mais c'était quoi là, à moins que ce soit une grosse farce, quelqu'un, mais ça me surprendrait quand même... Non effectivement je pourrai dire que j'ai vu quelque chose moi qui ai toujours été Saint Thomas, dans ce sens-là...

Le journaliste indique ensuite :

Nous avons essayé d'avoir des confirmations de certaines autorités... D'abord il y a un rapport de la police de la CUM qui confirme ce que ces gens-là nous disent, qui mentionnent que des policiers ont vu la même chose et transmis l'information aux forces canadiennes et à la G.R.C. qui a maintenant en main le dossier mais tout ce qu'on a nous dit-on à la G.R.C. ce matin c'est le dossier de la CUM. [...] Évidemment à Dorval la tour de contrôle n'a rien vu sur les écrans de radar, comme on en a l'habitude avec ce genre de phénomènes.

Enfin, il interroge un professeur d'astronomie de l'université de Montréal, Robert Lamontagne, dont je résume les explications :

Les gens ont vu quelque chose, ils ont vu un ovni, maintenant le mot ovni c'est « objet volant non identifié », ils ont donc vu quelque chose dans le ciel qu'ils ne peuvent pas identifier. Ils ont vu un phénomène, maintenant il reste à trouver une explication. [...] On n'a pas encore eu le temps d'en trouver une, ça prend un certain temps, il faut avoir des observations, il faut colliger toute une série de renseignements ensemble, jusqu'à présent la plupart des enquêtes qui se penchent sur le phénomène ovni prennent souvent plusieurs jours avant de trouver une explication. Depuis des dizaines d'années qu'on a affaire à des phénomènes ovni, non seulement au Québec mais un peu partout dans le monde, jusqu'à présent aucun de ces phénomènes ovni-là n'a trouvé sa source dans la présence de vaisseaux spatiaux qui viennent d'autres planètes. Tous les phénomènes ovni ont trouvé leur explication dans des phénomènes naturels d'origine météorologique, ou de type aurores boréales, ou bien des phénomènes artificiels...

Le reste n'a que peu d'intérêt, tout ce qu'il en ressort c'est qu'à ce moment-là le professeur Lamontagne n'a aucune idée de l'explication mais ne doute pas qu'il y en aura une.

Dans le journal La Presse du 9 novembre, deux jours après l'observation, on était devenu beaucoup plus sceptique :

Un ovni au centre-ville : probablement un faisceau lumineux très... montréalais

PIERRE GINGRAS

Illusion, canular, phares d'avion, vaisseau spatial, extraterrestres ? Les questions fusaient hier au sujet de l'objet lumineux aperçu mercredi soir au-dessus du centre-ville de Montréal.

Mais quand Marc Gélinas a vu la photo publiée par
La Presse, il n'y eut plus de doute dans son esprit : il s'agissait, fort probablement, d'un ou de plusieurs faisceaux lumineux en provenance du centre-ville, réfléchis par les nuages très denses situés à basse altitude au moment où le phénomène a été signalé.

Marc Gélinas est météorologue au service de la météorologie d'Environnement Canada à Dorval. Il est aussi le secrétaire de la Société d'astronomie de Montréal. « Cela ressemble à un phénomène observé à maintes occasions, notamment lorsque l'on fait des travaux avec des projecteurs parfois utilisés en météorologie, explique-t-il. La lumière est réfléchie par les cristaux de glace ou les gouttelettes d'eau contenus dans le nuage. Selon la densité du nuage, le faisceau pourra mesurer plusieurs centaines de mètres d'épaisseur et être visible à très grande distance. »

D'où provenaient ces rayons lumineux ? Peut-être tout simplement d'une automobile dont les phares étaient braqués par hasard vers le ciel ou encore, réfléchis vers le ciel par les vitres d'un édifice, dit-il. 11 n'est pas impossible par ailleurs que des projecteurs utilisés sur le sommet d'édifices durant des travaux, ou encore, les faisceaux lumineux qui proviennent parfois de centres commerciaux ou des concessionnaires d'automobiles lors de promotions, peuvent aussi être en cause.

11 exclut la possibilité d'aurores boréales, en raison des nuages. Le météorologue rappelle que les faisceaux lumineux rotatifs émis par la Place Ville-Marie, peuvent être visibles à plus de 50 kilomètres du centre-ville quand il y a des nuages. Mercredi soir, entre 19 h et 23 h, l'altitude des nuages a varié de 800 à 1200 mètres (2500 à 5000 pieds).

Selon M. Gélinas, certains autres phénomènes lumineux comme les éclairs provoqués par les soudeurs ou par les lignes électriques à haute tension sont parfois réfléchis dans les nuages. « Ces phénomènes souvent considérés comme bizarres sont toujours explicables scientifiquement, comme l'ont démontré certaines enquêtes réalisées aux États-Unis », fait-il valoir. Il y a quelques années le public a cru à un ovni dont les phares clignotaient alors qu'il s'agissait simplement des planètes Jupiter et Vénus masquées alternativement par des nuages. Jusqu'à maintenant, les cas d'ovnis les plus spectaculaires se sont toujours révélés être des canulars, affirme l'expert.

Le scepticisme est de mise.

Hier matin, à la tour de contrôle de Dorval, on confirmait qu'aucun objet volant non identifié n'avait été signalé par le système de radars de l'aéroport. Le contrôleur interrogé sur le sujet signale que depuis les vingt ans qu'il travaille à la tour de contrôle, on n'a jamais signalé un ovni. Selon lui, le phénomène rapporté mercredi a été provoqué par un rayon lumineux.

À la G.R.C., l'enquête est close, a-t-on expliqué. En réalité la G.R.C. ne mène pas d'enquête. Elle se contente de colliger certains témoignages et de les communiquer au Département des sciences planétaires du Conseil national des recherches du Canada, à Ottawa.

Hier au conseil, on semblait un peu gêné par les questions sur les ovnis. « Le sujet est sans fondement scientifique. II n'existe pas de section de recherches dans ce domaine », nous a-t-on dit. Mais les rapports de la G.R.C. ? « Certains de nos chercheurs recherchent des fragments de météorites », a-t-on répondu en faisant le lien entre les ovnis et les gros météorites.

Le même scepticisme régnait aussi parmi les 200 membres du groupe
Les Sceptiques du Québec. Dominic Larose, président de cette société, rappelle qu'un certain nombre de personnes sont devenues membres du groupe justement après avoir perdu leurs illusions sur les objets volants non identifiés. « Voilà une quarantaine d'années que l'on parle des ovnis et jamais on n'a eu la moindre preuve scientifique à ce sujet. On en est au même point que dans les années 50. Il y a de quoi être sceptique », lance-t-il.

Depuis deux ans,
Les sceptiques du Québec offrent toujours 100 000 $ à celui qui pourra fournir une preuve tangible d'un phénomène paranormal. Hier, le président du groupe se disait prêt à offrir la même somme à celui qui lui apporterait un morceau d'ovni ou une preuve de son existence. 11 va sans dire, l'offre tient aussi pour toute entrevue avec un extra-terrestre. M. Larose attend une réponse. Mais il demeure sceptique...

Le principal concurrent de la Presse, le Journal de Montréal, publiait de son côté le même jour l'article suivant :

Etait-ce un OVNI ?

On voit que l'astronome Robert Lamontagne, qui avait dit la veille sur Radio Canada qu'on n'avait pas encore d'explication, estimait à l'antenne d'une autre radio, sans doute plus tard, en avoir une : une aurore boréale... Cette hypothèse sera effectivement beaucoup évoquée, notamment par des astronomes, et c'est vrai que le phénomène y ressemblait beaucoup par certains aspects ; on en reparlera...

Les rapports de police

Je retranscris ici le rapport de police de la communauté urbaine, rédigé par l'officier François Lippé :

Rapport du S.P.C.U.M... Rapport d'un événement de type Objet non identifié à l'hôtel Hilton Bonaventure, survenu le 07/11/90 entre 20 h 07 et 22 h 20, rapporté à 19 h 42. [On ne sait pas trop à quoi correspondent les 19 h 42, puisque l'agent Lippé a été appelé à 20 h 07... D'après le rapport Haines-Guénette c'est à 19 h 38 que M. Sterling a appelé la C.U.M., ça n'est pas loin... Donc vers 19 h 40 la C.U.M. reçoit un appel de l'agent de sécurité de l'hôtel, et le temps de discuter et de décider quoi faire à 20 h 07 elle demande à l'agent Lippé de se rendre sur place].

1) Faits :

J'ai reçu un appel à 20 h 07 concernant un objet bizarre au-dessus de la piscine extérieure de l'hôtel Hilton de la place Bonaventure. Arrivé sur les lieux à 20 h 11 j'ai rencontré M. Sterling qui m'amena à la piscine extérieure et me montra une forme lumineuse au-dessus de l'hôtel. On me mentionna que l'objet s'était déplacé de l'hôtel de la Bourse jusqu'au-dessus de l'hôtel Bonaventure.

J'ai vu trois lumières rondes jaunâtres d'où partaient trois faisceaux.

Cercles avec faisceaux dans des directions diverses

On pouvait dénoter une source lumineuse de forme circulaire. Cet objet lumineux était fixe et immobile.

Mme Saint-Pierre mentionne avoir été avisée par deux baigneurs. A vu une forme ovale lumineuse de couleur jaunâtre — Et qu'elle s'est déplacée au-dessus de l'hôtel Bonaventure.

8 lumières et 6 faisceaux vers l'extérieur

2) Suite :

La forme de l'objet lumineux selon la version de la témoin — L'objet peut ressembler à ce qu'on a pu voir dans le film la Rencontre du troisième type.

?? s'est rendu à la piscine et a vu une forme ou objet lumineux avec 7 points d'où partaient des faisceaux — Dessin annexe.

Il croyait que c'était quelque chose qui exploserait.

3) Démarches effectuées :

A) J'ai contacté le Sgt Robert Masson (25-85) à 20 h 20. Arrivé sur les lieux à 20 h 30.

B) J'ai contacté l'aéroport de Dorval tél : 633-3105. M. ?? me réfère à la tour de contrôle à 20 h 48.

C) J'ai contacté la tour de contrôle de l'aéroport de Dorval. M. ?? à 20 h 52.

Il me mentionne que ce n'est pas la première appel qu'il reçoit à ce sujet, qu'il n'a rien à signaler sur le radar et qu'il se peut que ce soit des jeux de lumière mais qu'habituellement on doit les aviser.

D) J'ai contacté la Défense nationale. La téléphoniste qui n'a pas voulu s'identifier m'a référé à la police militaire, tél : 462-7011.

J'ai discuté avec l'agt Tardif de la Police militaire après l'avoir avisé de la situation. Me dit qu'il ne peut rien faire dans cette situation qu'il ne peut me référer à aucune personne et qu'il avisera ses supérieurs plus tard.

E) Le directeur de service a été avisé par le sgt Masson et est arrivé sur les lieux à 21 h 05.

F) Rencontre de la remplaçante du Directeur général de l'hôtel ?? à 21 h 15.

G) 21 h 30 : Rencontre de l'Agt Morin section Enquêtes fédérales GRC 4225 Dorchester O. Westmount H32-IV5 tél : 939-8307

H) 21 h 45 : Demande via Lt Proulx D25 pour caméra vidéo de la surveillance.

I ) 21 h 45 : Arrivé de l'agt O'Connor (1264) de l'Identité pour prise de photos.

J) 22 h 20 Sgt Michel Côté de la Surveillance sur les lieux. Service non-requis (ciel couvert).

4) Conclusions :

Nous avons quitté les lieux vers 22 h 30. L'objet lumineux n'était plus visible, couvert par les nuages — Selon la version des témoins l'objet a été très visible au début de l'observation car le ciel était clair et dégagé. Plus le ciel se couvrait moins l'objet était visible — Après mon arrivée un avion de type Cessna a passé tout près des faisceaux lumineux et on pouvait remarquer que l'objet ou les lumières étaient beaucoup plus haut. Ce phénomène est inexpliqué à ce moment mais il y a plusieurs personnes qui ont observé et vu cet objet ou source lumineuse.

Transmis pour votre information, merci.

N. B. Croyant qu'il pourrait s'agir des faisceaux lumineux qui pourraient provenir du chantier de construction du 1000 de la Gauchetière (gare STRSM)

Réf : grue illuminé par de gros projecteurs. Nous avons fait éteindre ces projecteurs — Après que tout soit éteint — on pouvait encore remarquer deux faisceaux lumineux au même endroit que l'objet observée.

07/11/90, agt F. Lippé, 3258 D.25

Le rapport de la Gendarmerie royale du Canada est resté longtemps introuvable sur Internet, il a maintenant été publié par Christian Page. et par Philippe-Emmanel Faure.

On y trouve le déroulement des événements... C'est à 20 h 44 que le sergent Masson de la S.P.C.U.M. a appelé la G.R.C., laquelle a confié l'enquête au gendarme Luc Morin. C'est lui qui a rédigé le rapport d'enquête le 13 novembre :

I. HISTORIQUE

L'implication de la GRC dans cette enquête fait suite à une demande d'assistance du service de police de la CUM.

II. RÉSUMÉ DE L'ENQUÊTE

LE 90-11-07 À 21 h 05, M. Denis PARÉ, directeur du district du SPCUM requiert l'assistance de la GRC dans le but d'évaluer la pertinence d'une enquête plus approfondie en rapport avec l'observation, par des citoyens, d'un objet lumineux au-dessus de l'Hôtel Bonaventure à Montréal.

À mon arrivée sur les lieux à 21 h 30, j'ai pu observer une forme lumineuse projetant deux faisceaux lumineux vers le sol.

Au cours des quarante-cinq minutes pendant lesquelles je suis demeuré sur les lieux, cette forme s'est légèrement déplacée du sud vers le nord pour être finalement complètement cachée par les nuages.

J'ai aussi noté les détails suivants :

1. Deux témoins ont observé une forme jaunâtre lumineuse projetant sept faisceaux lumineux. Selon un témoin, l'objet pourrait ressembler à un aéronef tel qu'observé dans le film « Rencontre du troisième type ».

2. L'objet fut observé le 90-11-07, entre 19 h 30 et 22 h 00, au-dessus du quadrilatère occupé par les rues Mansfield, University, La Gauchetière et Saint-Antoine et plus spécifiquement au-dessus de la piscine de l'Hôtel Bonaventure.

3. L'auteur de cette note a observé une forme lumineuse projetant deux faisceaux lumineux.

4. Témoins sur les lieux : .../... Sgt R. Masson, S.P.C.U.M. Poste 25.

5. Les conditions météo étaient les suivantes :

Clair avec quelques nuages vers 19 h 30, ennuagement graduel ensuite. Selon l'aéroport de Dorval, le plafond de visibilité était de 3500 pieds vers 21 h 30.

6. Vers 21 h 00, le major THOMPSON (514-464-7220), responsable des opérations militaires à la base de St-Hubert, informe l'auteur qu'aucune activité militaire ne se déroule dans ce secteur.
    Vers 21 h 40, un pilote d'Air Canada présent sur les lieux opine que la source lumineuse n'est pas un hélicoptère et que selon lui, elle serait entre 8 000 et 10 000 pieds.
    Des photos furent prises par l'agent O'CONNOR mat. 1264 de l'identité judiciaire de le police de la CUM. Ces photos peuvent être disponibles sur demande.

Conformément aux politiques contenues à I.3.E.9. du Manuel des opérations, le Conseil National de Recherches du Canada fut informé des événements ci-haut.

III. CONCLUSION

Étant donné la nature même de l'événement et conformément aux directives opérationnelles nous considérons ce dossier comme conclu ici.


On y trouve aussi un intéressant rapport du sergent Le Tendre :

901107 21 h 00 :

Appel reçu de XTE 3105, STO Montréal à l'effet que le SPCUM aurait un OVNI en observation au-dessus de l'Hôtel de Ville de Montréal.

Vérifications faites avec la tour de contrôle — négatif aux radars /

21 h 58 :

Le Gend. Luc Morin S.L.F. Montréal, m'appelle de l'Hôtel Bonaventure (tél : 818-2332, ent. 616) et nous demande notre assistance dans le but d'éclaircir ce mystère. Apparemment, au centre ville, on peut apercevoir deux (2) formes rondes et lumineuses, fixes, au-dessus maintenant de l'Hôtel Bonaventure. Ce dernier est sur les lieux : il m'informe que l'insp. R. Minkoff, off. de service, est au courant.

J'appelle l'insp. Minkoff (630-7305) et effectivement, il me confirme l'incident.

Je me rends à la tour de contrôle où on m'informe des plafonds limites pour la soirée :
à 20 h 00 : 5200 pi.
à 21 h 00 : 4200 pi.
à 22 h 00 : 3600 pi.

Effectivement, les radars ne rendent aucune image des objets V.N.I.

Je contacte Environnement Canada à 636-3284, où on m'informe qu'aucun orage magnétique n'est rapporté pour la soirée ni pour la région, et que le plafond de nuages a près de 4 à 5000 pieds d'épaisseur et qu'il s'agit de nuages de neige, donc très opaques.

L'expérience des contrôleurs voudrait qu'il s'agisse tout simplement de réflexions de faisceaux lumineux puissants ou au Laser, le fait que les ronds aient changé de place s'expliquerait par le mouvement à la baisse du plafond, soit de 5200 à 3600 pieds et par le jeu des angles qui en résulterait.

Le Cd Morin et l'insp. Minkoff sont informés de la situation.

Affaire conclue.

Le rapport Haines-Guénette

Parmi les témoins, il y avait Bernard Guénette, un expert en graphisme informatique et enquêteur au MUFON (Mutual UFO Network), une des principales associations ufologiques aux États-Unis.

Ce soir-là, Guénette ne se trouvait pas sur le toit de l'hôtel Bonaventure comme la plupart des autres témoins, mais à près d'un kilomètre de là vers le nord-nord-est, accompagné d'un ami :

À 19 h 30 un des auteurs, âgé de 34 ans (B. G.) et un certain M. P. Lachapelle, âgé de 30 ans, étaient dans le Vieux Montréal, marchant près de l'angle des rues Saint-Sulpice et de Brésoles à une dizaine de pâtés de maisons à l'ESE du HB. Ils remarquèrent de nombreux camions de pompiers, voitures de police, et d'autres véhicules d'urgence ainsi que de l'agitation à proximité qui bloquaient partiellement la route ; un exercice d'alerte incendie était en cours. Guénette a porté son regard directement en haut et a vu un petit phénomène verdâtre de type aurore boréale avec de longues flammèches s'étendant vers l'extérieur ; cela ne bougea pas durant les 30 à 60 secondes qu'il regarda. Les deux hommes ont estimé que le phénomène était à très haute altitude.

Apprenant ensuite le tapage médiatique qu'avait provoqué l'observation d'un phénomène semblable à la même heure à l'hôtel, et l'existence de photographies, Guénette a commencé à enquêter, et a contacté Richard Haines pour étudier les photographies.

Haines est un ufologue respecté, il a longtemps travaillé au centre Ames de la Nasa et il est directeur scientifique du NARCAP (National Aviation Reporting Center on Anomalous Phenomena... Notons que Haines en a démissionné le premier janvier 2017, soit deux jours après que j'ai publié ce texte, mais je doute qu'il y ait un rapport ; en approchant de 80 ans il voulait surtout se reposer un peu), une association ufologique spécialisée dans la collecte et l'étude des observations d'ovnis dans le milieu aéronautique. Il s'était en outre déjà fait connaître dans l'étude de photographies d'ovnis.

Et c'est ainsi qu'un peu plus d'un an après l'observation, les deux hommes ont publié un rapport de 25 pages qui constitue la principale référence sur cette affaire.

Ce rapport a été très peu diffusé à l'époque, mais on peut en télécharger une copie sur le site du Garpan. Il a aussi été intégré dans une version un peu incomplète à l'ouvrage de Timothy Good Alien Update (1993), traduit en français (de façon assez désastreuse) sous le titre E. T. Connection (Presses de la Cité, 1994). Étant donné son intérêt, j'en ai fait une traduction française personnelle (en essayant de respecter au mieux le texte original, mais c'est sans garantie... Si vous trouvez des erreurs merci de me les signaler).

Le rapport est particulièrement intéressant en ce qui concerne le déroulement des faits et le recueil de témoignages. Il contient aussi des renseignements très précis sur la météorologie de ce soir-là :

Le temps était globalement clair à 19 h 30 dans la région de Montréal le soir de l'événement avec une mince couche de nuages épars à 2050 mètres au-dessus du niveau du sol. La visibilité était de 25 kilomètres. À 20 h 00 la température de l'air était de -1° C près du sol et le vent était de 4 km/h venant de l'ouest. Alors que la température n'a diminué que d'un degré durant les deux heures suivantes, le vent est monté à 9 km/h venant du NO (variable). Un front froid, causant un étroit couloir de neige, approchait de Montréal par l'ouest. Ce système météorologique a traversé Montréal pendant la nuit et s'est déplacé rapidement vers l'est. La pression atmosphérique est restée à 101,53 kilopascals entre 20 h 00 et 22 h 00. À 20 h 30 il y avait une couche de nuages épars à 900 mètres et une couche épaisse à 1400 mètres. À 21 h 30 le plafond nuageux s'était abaissé à 1040 mètres et s'est maintenu ainsi avec des variations mineures jusqu'à 23 h 00. Il n'avait pas plu à l'aéroport de Dorval depuis midi le jour précédent (une pluviométrie totale de 21 mm : le sol était encore détrempé le sept). Une neige fine a commencé à tomber à 22 h 21 et a continué pendant plusieurs heures à l'aéroport de Dorval.

Les auteurs notent que le phénomène n'a donné lieu à aucune détection radar, mais ils ont aussi recherché s'il y avait eu des perturbations électromagnétiques ce soir-là :

Une panne de courant s'est produite le 7 novembre 1990 entre 23 h 08 et 23 h 50 à la base militaire de Longue-Pointe (B.M.L.P.) La base est alimentée par une ligne de 12 000 volts provenant de la centrale Hydro-Québec de Longue-Pointe. C'est la seule à être tombée en panne.

Un contrôle des dossiers d'exploitation des réseaux de communications, opérateurs radioamateurs, et circuits téléphoniques lors de la soirée du 7 novembre 1990 n'a montré aucune quantité inhabituelle de dysfonctionnements.


En note :

La B.M.L.P., qui fait partie des bases des Forces Canadiennes de Montréal, abrite trois écoles militaires et les plus grandes installations d'approvisionnement et de réparation militaires au Canada (le 25e Dépôt d'approvisionnement et le 202e Dépôt d'ateliers). Les installations de la B.M.L.P. comprennent 11 entrepôts (77 000 mètres cubes chacun) et 8 emplacements de stockage extérieur couvrant l'équivalent de 30 terrains de football. Personne à la base n'a pu être trouvé qui ait vu l'objet aérien du 7 novembre.

En bref, alors que plus aucun objet n'était observé (l'objet de la place Bonaventure n'était plus du tout visible à 22 h 30, et la dernière observation mentionnée par Guénette est celle de Pierre Caumartin entre 22 h 30 et 23 h), il y a eu une panne de courant localisée à une base militaire. C'est tout ce que Haines et Guénette ont trouvé comme perturbations physiques : c'est un peu maigre pour qu'on puisse le lier à la présence du phénomène, et d'ailleurs les auteurs ne le font pas...

Tout cela est très intéressant et les recherches ont été faites sérieusement, mais ça se gâte lorsque le rapport aborde l'expertise de la photographie par Haines, laquelle a rendu le cas célèbre. On apprécie la mention de nombreuses données techniques sur le film et l'appareil photos utilisés, par contre les conclusions de Haines manquent totalement de sérieux et reposent sur des erreurs grossières. Nous détaillerons tout cela plus loin.

Il faut préciser que si Richard Haines est bien un éminent scientifique ayant travaillé longtemps à la Nasa, ça n'est pas en tant que spécialiste d'optique mais psychologue, chargé notamment d'étudier l'ergonomie des stations spatiales et l'interaction homme-machine ! Eh oui, il est docteur en psychologie, très compétent dans le domaine de la perception visuelle, mais pas du tout dans celui de l'expertise photographique... Il s'y est essayé dans le cas d'observations d'ovnis, avec plus ou moins de sérieux, mais le fait est que dans ce rapport il a accumulé les pires énormités !

Le rapport conclut :

La preuve de l'existence d'un grand objet hautement inhabituel, en vol stationnaire, silencieux, est incontestable comme elle l'est dans d'autres cas similaires (ex. Anon en 1991). La présente preuve inclut les témoignages de plus de dix témoins oculaires adultes et fiables et deux photographies en couleur. Un des croquis représente un objet de forme ronde avec au moins six petites lumières rondes autour de son périmètre. La plupart des autres croquis montrent un arc globalement circulaire avec trois ou plus petites lumières réparties sur sa longueur. Quel type d'objet physique pourrait produire ce type d'image avec des rayons de lumière linéaires ?

S'ensuit une tentative fumeuse d'explication de la forme des lumières sur la photographie, par la réfraction des lumières situées tout autour de l'objet supposé à travers les gouttelettes d'eau formant les nuages. Inutile de s'attarder là-dessus puisque nous verrons qu'il y a une explication naturelle bien plus cohérente à la forme des lumières.

Nous reviendrons sur les différents éléments qui ont poussé Haines à affirmer la présence d'un objet solide et immense...

Peu après la publication de se rapport, le premier mai 1992, le journal la Presse lui a consacré un long article en revenant sur le phénomène de 1990. Je le retranscris intégralement :

Un rapport accrédite la thèse d'un ovni au-dessus de Montréal en 1990

Carole Thibaudeau


On voudrait tellement y croire, aux visiteurs du cosmos ! À ces êtres intelligents, un peu Spock, un peu E.T., techniquement si avancés que leurs vaisseaux se déplacent silencieux, rapides, précis, puis demeurent suspendus au-dessus de nos têtes, par exemple au-dessus de la Place Bonaventure.

C'était le 7 novembre 1990. Deux journalistes de
La Presse, Marcel Laroche et Jules Béliveau, de même que plus de 40 autres personnes, ont vu ce soir là, du haut du toit de l'hôtel Hilton-Bonaventure, deux lumières qui brillaient au milieu des nuages.

Apparition ou... ovni ?!!!, de s'interroger respectivement le chroniqueur religieux et le chroniqueur judiciaire du quotidien de la rue Saint-Jacques.

Un an et demi plus tard, Bernard Guénette, président d'une petite entreprise Montréalaise de simulation par ordinateur, et Richard Foster Haines, brillant spécialiste de l'interaction homme-machine au Centre de recherche Nasa-Ames, en Californie, signent conjointement un rapport détaillé sur le mystérieux phénomène qui a illuminé le ciel du centre-ville pendant deux heures trente.

Les deux auteurs ont tous les deux une rigoureuse formation scientifique : le premier en psychologie et physiologie, le second en philosophie et en aménagement urbain. Outre leur intérêt professionnel pour la simulation visuelle par ordinateur, tous deux se passionnent pour les objets volants non identifiés.

Du rapport en question, dont
La Presse a obtenu copie, M. Guénette affirme qu'il démontre clairement que les lumières observées le 7 novembre, du toit de l'hôtel Hilton de la Place Bonaventure, proviennent d'un « objet » et que l'hypothèse d'un phénomène optique (comme le reflet de projecteurs sur des nuages) est ainsi balayée.

Il s'appuie essentiellement sur deux éléments : les photographies prises par le journaliste Marcel Laroche, qui ont été analysées par divers programmes ordinateur, ainsi que les témoignages concordants des nombreux témoins.

« Tout dépend de la définition que l'on donne au mot objet, argüe M. Claude Lafleur, mathématicien et porte-parole des Sceptiques du Québec, un regroupement qui se charge de passer au peigne fin de l'esprit critique toute information à caractère merveilleux et inexpliqué. Un nuage, c'est un objet. »

Photo sous analyse

Le négatif de la photographie a été digitalisé sur ordinateur au moyen du programme « Perceptics Nu Vision image scanner ». L'image digitalisée est reproduite ci-contre. Elle vise essentiellement à faire ressortir les différences de brillance entre les points de la photo.

Représentation des différences de couleur en 3D

Voici l'image digitalisée de la photographie prise par Marcel Laroche le 7 novembre 1990.
À droite, un disque pâle est entouré d'un ovale foncé. La partie foncée représente la zone la plus lumineuse.
« La densité optique ne constitue pas une preuve de la présence d'un objet matériel », soutient Claude Lafleur.

On a tiré un graphique de cette photo, pour mettre en évidence la densité lumineuse de l'ovale entourant le disque. « Ce tracé, lit-on dans le rapport, représente le changement de densité optique produit par un objet aérien... Cet objet est si brillant qu'il a saturé le film sur une grande moitié du diamètre. »

L'esprit ouvert mais critique, on remarque tout de suite que le rapport parle de « densité optique » et non de « densité matérielle », fait valoir Claude Lafleur.

De plus, le fait de saturer une pellicule photographique ne dépend pas seulement de la brillance d'un objet, mais aussi de la sensibilité du film et de la durée de l'exposition.

Il est difficile de mettre en doute la crédibilité de Richard Haines, hautement réputé pour sa rigueur intellectuelle et sa compétence, après trente ans d'une carrière fructueuse à la NASA.

« Dick continue à travailler ici à contrat, pratiquement à demi-temps, affirme M. Allen Fernquift », directeur du
Spacecraft data system research branch du NASA-Ames research center, à Moffet-Field en Californie. « C'est un très bon mentor pour les jeunes scientifiques. Il est très connu internationalement et entretient des relations avec des scientifiques du monde entier. »

Le travail de M. Haines a porté surtout sur les facteurs humains du développement des engins spatiaux : la convivialité de l'humain, pilote ou ingénieur, avec les instruments, par exemple. Il a été aussi appelé à faire l'analyse des accidents d'avion. Il a également participé à l'élaboration de la coupole vitrée prévue pour la station orbitale Freedom.

Indépendamment de sa carrière à la NASA, Richard Foster Haines s'est passionné pour les ovnis, au point de devenir une autorité en la matière. Il s'est fait l'interprète de nombreux événements mystérieux, et a écrit quelques livres tentant d'éclairer le phénomène des ovnis :
UFO Phenomena and Behavioral Scientists (1979, Scarecrow Press), Observing UFOs (1980, Nelson Hall), Advanced Aerial Devices Reported During the Korean War, (1990, éditeur LDA Press), et The Melbourne Episode, Key-Study of a Missing Pilot, (1987, LDA Press).

C'est à ce personnage éminent que M. Guénette décida de faire appel pour analyser les éléments de son dossier.

M. Guénette a pris contact avec des entreprises comme Bell Canada, Hydro-Québec et l'Association de radio-amateurs du Québec, afin de savoir si des perturbations inhabituelles avaient été enregistrées au moment de l'événement. Seule une panne d'électricité a été rapportée à la base militaire de Longue-Pointe, dans l'est de Montréal, au moment même où l'objet la survolait.

M. Guénette vient d'accepter la présidence de la toute nouvelle branche québécoise de la société MUFON (pour Mutual UFO Network), un regroupement international de gens intéressés aux ovnis. Les personnes intéressées à témoigner d'un phénomène du genre ovni peuvent lui écrire à MUFON Québec, Boîte Postale 756, Station B, Montréal, H3B 3K3.


Notons d'emblée que si les remarques du sceptique Claude Lafleur sont pertinentes, il y a bien d'autres choses à reprocher à « l'expertise » de Haines. Au fait, est-ce que tous les sceptiques du Québec ont des noms de fleurs, ou ce sont des pseudonymes ? On a déjà eu les commentaires de Dominic Larose dans le journal la Presse, maintenant c'est au tour de Claude Lafleur !

La reconstitution par Canal D

En 2007, la chaîne de télévision Canal D a fait une reconstitution du phénomène, dans la série « Dossiers mystère », et a réinterrogé bon nombre de témoins. La plupart des sites ufologiques qui rapportent l'affaire s'inspirent uniquement de ce reportage, que l'on peut trouver sur You tube.

La reconstitution vaut ce qu'elle vaut, c'est-à-dire pas grand-chose...

Objet circulaire entouré de 3 lumières jaune, verte et rouge

On y voit des figurants qui font semblant de regarder à une trentaine de degrés au-dessus de l'horizon vers l'est-nord-est et on nous explique « qu'une trentaine de personnes sont là, les yeux rivés sur un étrange objet volant immobile au-dessus de leur tête ». On nous dit que « l'engin ressemble à une sphère aplatie, faite d'un métal sombre et poli... Tout autour, des lumières ambre jettent des reflets verts et jaunes à travers les nuages. »... Mais on ne trouve rien dans les témoignages d'origine qui évoque une sphère de métal ! On voit le photographe qui « place son appareil photo sur un point d'appui et tire quelques clichés »... Ça c'est intéressant parce que c'est bien Marcel Laroche qui est présent, et il place son appareil photo à plat sur le dos, tourné vers le zénith.

On visualise ensuite l'information télévisée du lendemain de l'observation, où la présentatrice expliquait :

Un phénomène plutôt étrange a été observé hier soir dans le ciel de Montréal. La police de la CUM et la G.R.C. sont même venues sur les lieux à la demande de plusieurs témoins qui se trouvaient à la piscine du toit de l'hôtel Bonaventure. Voici ce qui s'est passé : selon le rapport rédigé par la G.R.C., entre deux et cinq lumières et un faisceau lumineux quasi-stationnaire ont été aperçus dans le ciel à compter de vingt heures.

Suit le témoignage de Robert Masson, commandant du S.P.C.U.M. 47e district :

Je suis convaincu que j'ai vu quelque chose qui est pas, qui est pas faite par des terriens, ou qui est pas faite par quelqu'un de la Terre, c'est sûr et certain que ça venait de l'extérieur de la Terre, puis après quinze ans j'en suis encore aussi convaincu que je l'étais à ce moment-là.

Viennent de nouvelles explications : Ce soir-là, vers dix-neuf heures, les usagers de la piscine de l'hôtel Hilton-Bonaventure remarquent la présence d'un grand objet volant entouré de sept ou huit lumières ambre. L'objet est tout à fait silencieux et se déplace très lentement de l'édifice de la Bourse vers l'hôtel. Pour certains, l'apparition rappelle ces ovnis dépeints dans le classique Rencontres du troisième type de Steven Spielberg.

On nous dit que les témoins ayant informé la direction de l'hôtel, la terrasse grouille bientôt d'une agitation particulière, et que la police de la CUM, prévenue, envoie une patrouille avec l'agent François Lippé. « Comme tous les témoins qui sont présents, il ne peut que confirmer la présence de l'objet. Ce dernier, à présent tout à fait immobile, est visible depuis maintenant près d'une heure ».

Robert Masson poursuit : Vers 19 h 30 un des policiers de mon groupe m'a appelé à mon poste pour me demander de me rendre sur les lieux parce que eux ils pensaient que c'était un événement assez spécial qu'ils étaient en train de vivre, lui il s'en allait de prendre un rapport de plainte quelconque mais il s'est aperçu qu'il y avait quelque chose qui était assez inusité. Moi quand j'étais arrivé sur les lieux j'ai constaté la même chose que mon policier m'avait donné au téléphone comme information.

L'agent Lippé contacte les aéroports de Dorval et Mirabel, mais la réponse est qu'il n'y a rien aux radars.

Robert Masson : ?? ça allait être difficile d'évaluer la hauteur. On savait que c'était quelque mille pieds, à l'œil, mais on savait pas non plus exactement. Puis au téléphone le contrôleur m'informe que sur le radar actuellement il y avait un cargo numéro XXX qui passait au-dessus du centre-ville, et puis effectivement moi j'étais à l'extérieur avec le téléphone sans fil et je voyais l'avion passer, mais l'avion passait sous l'objet. Ben j'ai demandé j'ai dit « à quelle hauteur qu'elle est ton avion ? », Ils me disent « à peu près six mille quatre cent pieds »... OK, mais j'ai dit « c'est quoi qu'il y a au-dessus ? » Lui il me dit « mais j'ai rien », lui y avait aucune apparence sur son radar comme quoi y avait quelque chose plus haut que l'avion qui passait.

Il téléphone alors à la base militaire de Saint-Hubert. « Au terme de leur entretien, l'agent Masson a la conviction que le contrôleur lui a caché certaines informations. »

Suit le témoignage d'un employé de l'hôtel :

À ce moment-là y avait le 1000 de la Gauchetière qui était en construction, qui avait déjà ?? cette tour puis tout le système de grues pour monter les marchandises. Puis y avait beaucoup de grosses lumières blanches pour éclairer le chantier de construction.

L'agent Masson a alors appelé pour faire éteindre ces puissants projecteurs :

Les grosses lumières se sont éteintes, et puis l'objet est resté identique, c'était pas un reflet, j'étais encore de plus en plus sûr que c'était vraiment quelque chose de métallique qui était là au milieu, c'était très gros. Là j'ai eu l'idée d'appeler à un moment donné au bureau de la Gendarmerie royale du Canada.

Un agent fédéral est donc arrivé à son tour et explique, en anglais :

J'ai contacté les aéroports et les militaires, j'ai parlé avec le colonel en charge des opérations à la base de Saint-Hubert, on m'a assuré qu'il n'y avait aucune opération militaire en cours. J'ai également vérifié avec les tours de Mirabel et de Dorval pour voir s'ils avaient quelque chose sur leur radar, là encore la réponse a été négative.

Robert Masson complète : Lui il a appelé l'armée, et lui il avait pas le même code d'accès je sais pas quoi mais lui était écouté comme fou et puis vous direz à peu près le temps d'un F-16 ou un F-18 là, qu'il parte de Bagotville là, qu'il passe au-dessus de la place Bonaventure, peut-être 14, 15, 16 minutes, on l'a entendu, on l'a pas vu mais on l'entendait très bien passer et lui il m'informait que là il prenait des photos.

Note : l'aéroport de Bagotville est à 370 km de Montréal, et les F-16 ou F-18 volent à 2000 km/h, donc le temps indiqué par Robert Masson est crédible. Mais on peut tout de même douter fortement de cet épisode, sachant que Robert Masson a tendance à enjoliver son récit avec le temps... Rappelons que c'est quinze ans après l'observation qu'il a été interrogé, et qu'aucun des témoins interrogés le jour-même ou le lendemain de l'observation par Christian Page ou François Bourbeau, ni plus tard par Bernard Guénette, ne mentionne le passage de cet avion de l'Armée. Et il n'en est pas question non plus dans les deux rapports de police, alors que c'est Luc Morin, qui a rédigé celui de la G.R.C., qui est censé avoir communiqué avec l'armée au sujet de cet avion. Et Luc Morin lui-même n'a aucun souvenir d'avoir eu une telle conversation. Pourtant, un témoin interrogé récemment par Philippe-Emmanuel Faure du Mufon-Québec affirme qu'il a bien entendu un avion de l'armée effectuer deux ou trois passages, mais ce témoin semble avoir beaucoup mélangé sa propre observation avec ce qu'il a entendu plus tard notamment en voyant ce reportage de Canal D.

On nous explique ensuite que les services météo ayant été contactés, on sait que « l'épaisse couverture nuageuse à travers laquelle on peut voir l'engin fait entre 1000 et 1500 m d'épaisseur. »

Robert Masson commente : C'était immense, parce que l'évaluation de la hauteur était entre 8000 et 10000 pieds, c'était énorme au-dessus de nous autres, puis c'était très haut, et puis juste pour un peu situer les téléspectateurs là-dedans, si exemple ça avait eu à atterrir sur la Terre, son par exemple stationnement comme le stationnement de la place Versailles, je sais pas s'il y aurait eu assez de place, pour que ça atterrisse, pour que ça s'installe, ou que ça se stationne sur la Terre. C'était immense.

Note : la place Versailles à Montréal abrite un grand centre commercial et mesure à peu près 600 m sur 300.

Le commentateur poursuit : Vers 22 h 30, l'objet se déplace vers l'est de la ville. Revenant chez lui vers 23 h, Pierre Caumartin va lui aussi apercevoir l'objet.

En anglais : J'ai vu un objet étrange, juste au-dessus de la tour illuminée du stade olympique. L'objet se déplaçait dans le même sens que moi en direction est. Il paraissait très gros, et je suis sûr que ce n'était pas un dirigeable. Je ne sais pas ce que c'était, je n'ai jamais rien vu de pareil.

Il pense à un engin promotionnel bordé de puissants projecteurs : Les lumières étaient très puissantes, très grosses. C'est à partir d'ici que j'ai commencé à entendre le bruit que faisait l'objet. C'était comme une modulation, c'était très rythmé. L'objet se déplaçait aussi de façon très étrange, il demeurait immobile un instant, puis glissait d'un seul coup un peu plus bas.

Le reportage se conclut inévitablement par l'analyse du « Docteur Richard Haines, spécialiste en optique pour le laboratoire Ames de la Nasa. »

Suite à l'analyse des négatifs de Laroche, le Docteur Haines conclut que les lumières ne sont pas des reflets lumineux mais émanent bien d'un objet physique à trois dimensions. Il en ressort aussi que l'appareil évoluait à une altitude variant entre 2000 et 2700 mètres et que son diamètre était d'environ 540 mètres, soit l'étendue de cinq terrains de football. L'étude réfute donc l'hypothèse de l'aurore boréale ou d'un quelconque phénomène astronomique. Il est malheureusement impossible à ce jour de connaître le résultat des vols de reconnaissance des appareils F-18 de l'Armée canadienne. De plus, tous les rapports d'observation de l'appareil, rédigés par les policiers municipaux et par ceux de la G.R.C., sont devenus dès le lendemain officiellement inaccessibles. En effet, le 8 novembre, deux agents du Norad, organisme voué à la protection du territoire nord-américain, ont eu le mandat de rapatrier tous les rapports disponibles concernant cette apparition dans le ciel montréalais. C'est sans plus d'explication que prit fin pour les Montréalais une des plus impressionnantes observations d'ovnis en sol canadien.

Ce sont bien sûr ces conclusions qui sont reprises par tous les sites et livres ufologiques qui font de cette affaire un événement exceptionnel... Notons au sujet des « agents du Norad » qui auraient confisqué les rapports de police qu'on peut être surpris de voir dans le documentaire même une image d'un de ces rapports :

Partie du rapport de police

Quant à Christian Page, scénariste du documentaire, il présente une page sur son site consacrée à cette affaire, laquelle reprend l'essentiel de son scénario... Mais pas cette histoire de rapports de police disparus ! En fait, ça n'est pas lui qui a décidé d'ajouter cette information qu'il jugeait peu crédible... Elle provenait encore d'une « confidence » de l'agent Robert Masson de la police de la CUM, lequel semble décidément avoir pas mal fabulé après quinze ans.

Haines et Guénette ont de leur côté précisé qu'ils s'étaient procuré sans difficulté les deux rapports de police, et regrettaient au contraire dans leur rapport que le Norad se soit complètement désintéressé de cette affaire ! Le rapport de la CUM peut d'ailleurs être trouvé sur Internet, et aussi dans le livre de Christian Page Dossiers mystère tome 1, qui complète les émissions du même nom. Bref, cette histoire de rapports confisqués par le Norad est une pure invention.

Descriptions et dessins des témoins

Les dessins les plus immédiats après l'observation se trouvent dans les rapports de police. Plus tard, entre avril et novembre 1991 (soit 6 mois à un an après l'observation), Bernard Guénette a interrogé un certain nombre de témoins.

Le rapport de la S.P.C.U.M., la police de Montréal, contient le dessin de l'officier Lippé, qui a observé le phénomène à partir de 20 h 11 :

Cercles avec faisceaux dans des directions diverses

J'ai vu trois lumières rondes jaunâtres d'où partaient trois faisceaux. On pouvait dénoter une source lumineuse de forme circulaire.

On y trouve aussi le dessin et la description de ce qu'a vu Mme Saint-Pierre, la surveillante de la piscine qui a été une des premières à voir l'objet :

7 lumières et 6 faisceaux vers l'extérieur

Une forme ovale lumineuse de couleur jaunâtre. L'objet peut ressembler à ce qu'on a pu voir dans le film Rencontres du troisième type.

On ne sait pas vraiment si c'est ce témoin qui a fait le dessin, mais il ressemble beaucoup à celui qu'il a fait un an plus tard, le 29 novembre 1991, devant l'enquêteur Guénette, en décrivant les lumières d'un blanc intense « comme un arc de soudage » :

7 lumières avec faisceaux

Dans le rapport de la gendarmerie, son dessin fait le lendemain de l'observation était le suivant :

4 lummières en demi-cercle avec des faisceaux en haut, 8 lumières en cercle avec 2 faisceaux en bas


Accompagné de la légende :

Un jet toutes les 2 lumières — dizaine de lumières — Forme ovale — Lumières sphériques — Jaunâtre.

On ne sait pas trop s'il s'agit de deux dessins différents ou de deux parties de l'objet (faisceaux centraux et externes ?).

Mme Saint-Pierre disait d'autre part à Radio-Canada le lendemain de l'observation :

C'était ni plus ni moins que des lumières, les lumières étaient... Le système de lumières était ovale, il y avait des lumières orange qui décrivaient le cercle... pas le cercle mais l'ovale, ces lumières-là étaient orange, puis à partir de ce cercle-là il y avait comme, je sais pas c'est difficile à expliquer... Comme un faisceau de lumières qui étaient plus blanches mais qui diffusaient en entonnoir, à la verticale... Ça avait l'air plus... On dirait que c'était un plafonnier, la lumière ne pouvait pas venir d'en bas, ou en tout cas je ne voyais pas d'où elle pouvait venir, c'était tellement en haut de toute façon.

Et à François Bourbeau, le même jour :

Combien j'ai vu de lumières ? C'est, peut-être une dizaine, c'était vraiment symétrique, c'était bien fait, c'était... C'était bizarre, c'était bien fait mais comme un plafonnier, la lumière venait pas d'en bas mais d'en haut .../... Les lumières jaunes c'était mat, mais les lumières blanches c'était du genre des lumières d'avion, ça éclairait autant que des lumières halogène, tu sais les lumières d'avion, à l'avant de l'avion comme un jet qui projette la lumière en entonnoir, c'est le même principe, c'était des lumières assez puissantes .../... Les jaunes étaient dans la forme ovale, puis à l'extérieur de ça, la lumière projetée était d'un blanc... un blanc.

Le rapport de gendarmerie contient enfin le dessin de l'agent de sécurité Albert Sterling, fait au lendemain de l'observation :

8 lumières et faisceaux vers l'extérieur

Il est précisé que les lumières étaient blanc/jaune... Et dans le rapport de police, sa description est résumée ainsi : Une forme ou objet lumineux avec 7 points d'où partaient des faisceaux. Il croyait que c'était quelque chose qui exploserait.

Interrogé par François Bourbeau au lendemain de l'observation, il décrivait : Quand je suis allé vers la piscine le plus au nord la sauveteur a dit voilà la lumière, moi je vois la lumière là, je regarde 7 à 9 lumières allumées... Il y en a trois côté droite, et quatre côté gauche, avec des ridelles là... Des jets de lumière.

Et le 29 octobre 1991, il dessinait de mémoire :

7 lumières avec faisceaux dans un objet ovale

Guénette ajoute : Notez la différence dans le nombre de sources de lumière. Il a estimé qu'il y avait de six à neuf sources de lumière distinctes, d'un blanc intense autour du bord de l'objet, chacune émettant un pinceau de lumière. Ces rayons lumineux n'étaient pas orientés verticalement mais semblaient être dirigés horizontalement vers l'extérieur depuis l'objet. Il a également émis l'opinion que l'objet était « quelque chose de fabriqué, c'était quelque chose d'artificiel, pas humain. »

Dans le rapport de la gendarmerie (GRC), on trouve un dessin non signé qui doit avoir été fait par l'officier Luc Morin :

7 lumières et 6 faisceaux

Mais il a fait un dessin très différent le 11 juin 1991, dans un rapport au MUFON :

3 lumières de côté dans un objet ovale

Il y indique que l'objet était ovale et portait trois sources de lumière mais il n'en mentionnait même que deux dans le rapport de gendarmerie : À mon arrivée sur les lieux à 21 h 30, j'ai pu observer une forme lumineuse projetant deux faisceaux lumineux vers le sol. Luc Morin étant arrivé assez tard, il n'a assisté qu'à la dernière phase du phénomène, alors que l'objet commençait à disparaître comme s'il était absorbé par les nuages.

De son côté, le journaliste qui a pris les photographies, Marcel Laroche, a fait le croquis suivant le 23 mai 1991 :

objet circulaire avec 6 lumières rayonnant autour

Il y indique que l'objet avait la taille d'une lune, et paraissait rond, blanc avec six ou plus petites lumières rondes de couleur orange ou couleur d'un coucher de soleil.

Enfin, l'autre journaliste, Jules Béliveau, arrivé tard sur les lieux, a fait ce croquis le 22 avril 1991 :

3 lumières

Le dessin n'est pas très clair, mais il précise que l'objet était rond avec au moins six lumières blanches ou jaunâtres et rondes sur les bords.

Si on tente de faire une synthèse de tous ces témoignages, il y avait environ huit sources de lumière disposées à peu près circulairement et accompagnées de faisceaux divergeant depuis le centre du cercle... D'autre part, les lumières d'un côté sont souvent décrites plus grosses et d'une couleur différente de celles de l'autre côté.

J'ai dessiné en comparaison les différentes lumières visibles sur la photographie :

schéma des 10 lumières visibles

Les lumières b à f forment à peu près un demi-cercle et ont une teinte orangée, b, c et d sont très lumineuses. La lumière a est un peu différente, plus large et peu lumineuse. Les lumières g, h et i sont assez semblables, larges, d'intensité constante et d'une teinte blanchâtre, j est plus fine...

À noter quelques différences avec le schéma proposé par Haines : je ne vois pas ce qu'il appelle la lumière a censée compléter le contour d'un objet à peu près circulaire délimité par les autres lumières du centre, et j'ai rajouté la lumières a qui me semble bien visible (dans la première version de ce texte, j'avais ajouté un autre faisceau qui me paraissait visible sur la photographie que j'ai utilisée, mais il ne l'est pas du tout sur celle qui a été diffusée récemment par Christian Page... J'ai donc considéré qu'il s'agissait d'un artefact au développement).

C'est en tout cas assez en accord avec les témoignages.

Un objet imaginaire

Richard Haines se donne beaucoup de mal pour nous persuader qu'il y avait un objet solide à l'origine des lumières, et prétend même le prouver...

Pourtant, ce qui ressort des témoignages est que ce sont des lumières, et rien d'autre, qui ont été vues... Il est remarquable que sur les premiers dessins des témoins (ceux que l'on trouve dans les rapports de gendarmerie et de police), on ne trouve aucun contour d'objet, seulement des cercles lumineux et des faisceaux... Et par contre ces contours apparaissent quelquefois dans leurs dessins tardifs, faits après un an ou plus ! C'est le cas chez M. Sterling, chez l'officier Luc Morin et chez le photographe Marcel Laroche.

Parmi les témoignages, il n'y a guère que celui du sergent Robert Masson pour le reportage Canal D en 2007 qui évoque un objet métallique :

On pouvait même distinguer que c'était en métal. Oui, peut-être que c'était quelque chose de métallique, il y avait une brillance, la même chose qu'un matériel métallique.

...

J'étais encore de plus en plus sûr que c'était vraiment quelque chose de métallique qui était là au milieu, c'était très gros.


Mais cette certitude est venue juste après qu'il eut fait éteindre les lumières du chantier de la tour en construction à côté pour être sûr qu'elles n'étaient pas à l'origine du phénomène observé en se reflétant sur les nuages... Il semble donc que la présence de « l'objet métallique » ne lui apparaissait pas aussi flagrante qu'il le dit quinze ans plus tard !

D'autres témoins se souviennent par contre parfaitement que ce qu'ils avaient vu à l'époque n'était que des lumières... On trouve par exemple en 2014 dans les commentaires d'une conférence de François Bourbeau sur You Tube :

Patricia Vial il y a 1 an

Le 7 novembre 90 je suis allée me baigner à la piscine sur le toit de la Place Bonaventure avec un ami et, quand nous sommes arrivés il y avait pas mal de monde autour de la piscine dont un ou des gardes de sécurité. Dans le ciel au dessus de nous il y avait des lueurs de couleur ambrée virant sur l'orangé, c'était beau et mystérieux, mais ça ne ressemblait pas aux soucoupes volantes qu'on voit dans les films...

Ces lueurs étaient statiques et il n'y avait rien de métallique...


Et concernant les lumières apparaissant sur la photographie, il faut rappeler qu'elles ont été obtenues avec un temps de pause d'environ 30 secondes... C'est d'ailleurs pour cette raison qu'on n'a que les deux photos de Marcel Laroche, dont une très sous-exposée, malgré la présence de l'objet pendant trois heures devant des dizaines de témoins ! Laroche a lui-même pris une dizaine de photographies en mode automatique avec pause de 1/ 60e de seconde, qui ne montrent absolument rien, avant d'essayer sur les conseils d'un collègue photographe (lui-même ne l'était pas) le mode manuel en pause longue.

Pour comparaison, avec un matériel identique, le temps de pause conseillé pour photographier la pleine lune est de 1/1600e de seconde !

Avec sensibilité 100 ASA, ouverture 1,8, temps de pose indicatif 1/166 s

Même si d'après les témoignages les lumières étaient beaucoup plus visibles une heure avant que ces photos ne soient prises, il est clair qu'elles n'étaient pas très lumineuses !

Voyons maintenant comment Haines se persuade de la présence d'un objet, en interprétant les lumières visibles sur la photographie :

Schéma des lumières et de la forme circulaire de l'objet

Il commence bizarrement par éliminer les rayons les plus éloignés du centre, les considérant comme des reflets dans l'objectif :

Les rayons lumineux radiaux, faibles, sont clairement des lens flares (réflexions) produits à l'interface air-verre des lentilles de l'objectif.

Une interprétation qui fera bondir tous les amateurs de photographie tant elle est absurde ! Les reflets dans l'objectif sont visibles lorsqu'on photographie des lumières très intenses (le soleil, des lampadaires de nuit...), ce qui n'est clairement pas le cas ici... Haines nous dit d'ailleurs plus loin que « les trois lens flares brillants sur le côté gauche ont environ le 10e de la luminosité de la zone centrale ». Fort heureusement pour l'art de la photographie, de tels reflets parasites ont bien moins que le dixième de la luminosité des lumières d'origine, surtout avec des optiques de qualité ! En outre, une optique de photographie a une symétrie de révolution, ce qui implique que d'éventuels reflets présentent toujours une symétrie des lumières d'origine par rapport à l'axe optique, qui correspond en général au centre de la photo (c'est toujours le cas avec les appareils de qualité)... Or, là, il n'y a pas de relation entre les prétendus reflets et leur supposée origine, et les différents rayons convergent vers un point qui n'est pas le centre de la photo.

Haines n'a d'ailleurs même pas cherché à matérialiser ce centre, ce qui est pourtant la première chose à faire quand on croit avoir affaire à un reflet dans l'objectif : par exemple ici un reflet du soleil très « soucoupique » sur une photo prise par Harry Perton aux Pays-Bas.

Une soucoupe volante opposée au soleil par rapport au centre de la photo

En éliminant ces prétendues réflexions, qui correspondent pourtant très bien aux témoignages, Haines cherche à démontrer que le véritable objet se trouve entouré par les lumières orangées visibles au centre, lesquelles seraient émises sur son pourtour... Et pour mieux s'en convaincre, il ajoute une sixième lumière a aux cinq qui forment à peu près un demi-cercle... J'ai poussé le contraste et modifié les couleurs de la photo pour faire ressortir les lumières, et décidément je vois bien celles de son schéma, et même d'autres, mais pas la lumière a !

Photo du rapport de Haines

En fait, il semble que cette lumière complétant le cercle provienne d'un artefact du scanner utilisé par Haines pour la photo qu'il publie dans son rapport :

3 lumières

On voit qu'il y a des bandes horizontales parasites de luminosité variable, et c'est la présence d'une bande sombre qui donne l'impression qu'il y a une tache lumineuse au-dessous...

Rien en tout cas qui montrerait la présence d'un « objet » délimité par ces lumières.

Ensuite, Haines fait appel au traitement informatique pour prouver la présence de l'objet solide... Il compare pour cela la courbe de densité optique (autrement dit, la luminosité) de deux droites sur la photo passant par l'objet et sur le fond du ciel.

Courbes densitométriques à travers l'objet et sur le fond du ciel

Illustration 11 : Balayages densitométriques à travers le fond du ciel et en passant par l'objet

Le profil de la densité optique a été déterminé pour la première photo prise par M. Laroche le long de deux lignes droites parallèles. L'une passe à travers le fond du ciel à gauche des trois zones lumineuses présentées dans l'illustration 8A. La densité optique résultante de ce « fond de ciel » est représentée par le tracé le plus bas de l'illustration 11. On notera que la densité du ciel varie entre 0,6 et 0,75 quand la densité est comprise entre 0 (noir maximal) et 1 (luminosité maximale), et est relativement plate indiquant que la luminance du ciel était presque constante. C'est ce que l'on peut attendre de lumières du sol se reflétant sur le brouillard et les nuages. Le second balayage passe à travers les trois zones lumineuses sur la figure 8A. Ce tracé représente la variation de densité optique produite par l'objet aérien, qui est représentée par la zone ombrée dans l'illustration 11. On peut voir que l'objet est si brillant qu'il sature le film sur près de la moitié de son diamètre.

Donc, il fait passer une des droites par « les trois zones lumineuses » de la photo, ça doit être à peu près la ligne rouge que j'ai tracée sur sa reproduction... La ligne bleue, « témoin» », passe un peu à gauche, ça pourrait être à peu près n'importe où loin des lumières...

Ligne tangente à l'objet pour la courbe de densitométrie

J'ai aussi tracé en pointillés le contour supposé de « l'objet »... Comme on le voit, la ligne rouge ne passe pas du tout sur l'objet... Prétendre mettre en évidence « l'objet OVNI » par ces courbes est purement mensonger !

Haines nous gratifie aussi d'une image traitée par son logiciel, avec les différences de contraste amplifiées et mises en évidence par une représentation en 3D... C'est de cette photo qu'un journaliste n'ayant rien compris a déduit dans le documentaire Canal D que « le Docteur Haines conclut que les lumières ne sont pas des reflets lumineux mais émanent bien d'un objet physique à trois dimensions »...

Représentation des différences de couleur en 3D

Illustration 10 : Amélioration par ordinateur du cliché n°13 pour souligner les faibles différences
de luminosité de l'image en utilisant un tableau en trois dimensions de la luminance.


L'illustration 10 est une photographie en fausses couleurs qui amplifie les faibles différences de luminosité de l'image en utilisant deux couleurs primaires (vert pour la luminosité de fond et rouge pour la luminance relative à l'objet). Elle montre clairement que les trois lens flares brillants sur le côté gauche ont environ le 10e de la luminosité de la zone centrale. Un objectif Nikon 50 mm (f/1.1) contient neuf lentilles de verre différentes qui peuvent donner de nombreuses réflexions internes (Neblette, 1965, p. 106). La zone centrale de luminance maximale est sur la droite sous la forme d'un ovale autour de l'image du disque.

Mais là encore, cette grosse tache rouge que fait magnifiquement ressortir ce traitement en 3D ne représente en aucune façon l'objet, mais toujours les trois lumières censées être émises sur son pourtour supposé... Pour le montrer, j'ai repris la photo originale de l'objet avec les contrastes améliorés, rajouté un disque grisé représentant l'objet délimité par les cinq lumières centrales, et à l'aide d'une rotation et d'un redimensionnement j'ai reproduit la perspective utilisée par Haines avec son logiciel. On retrouve bien tous les détails visibles sur l'image retraitée par Haines, et on voit que la tache entourée par un « ovale lumineux » est complètement à côté du prétendu objet.

Reproduction du schéma de Haines avec position de l'objet

Bref, tout ce que Haines a montré par ces traitements élaborés, c'est que les lumières visibles sur la photographie sont plus lumineuses que le fond du ciel, ce dont on se doutait un peu ! Quant à « l'objet solide » qui fait tant fantasmer les ufologues, il n'a jamais existé que dans son imagination.

Dimensions de l'objet

Connaissant les caractéristiques de l'appareil photo, il est possible de déduire l'écart angulaire des différentes lumières présentes sur la photo... Tout cela figure sur le rapport de Haines : l'appareil photo utilisé était un Nikon utilisant des films de 35 mm et équipé d'un objectif de 50 mm de focale. Le format de photo sur la pellicule est en 24 × 36 mm, et avec une focale de 50 mm on trouve que le champ angulaire en largeur est égal à 2 × arc tangente (36/(2 × 50)), soit 40°.

Malheureusement, toutes les photos que l'on pouvait trouver sur Internet étaient  recadrées, ne montrant pas la totalité de la photo d'origine. Les photographies issues du format argentique habituel 24 × 36 mm présentent un rapport 3/2, et Haines précise d'ailleurs qu'il a scanné le négatif des deux photos en les reproduisant au format 8 × 12 pouces. Quant à la reproduction que j'ai utilisée, elle est au format 700 × 1000 pixels, l'image complète devait donc faire au minimum 700 x 1050 pixels.

Et on trouve à peu près la même proportion, et un cadrage identique, dans l'article de presse :

Photo publiée dans la Presse

Et une autre avec un cadrage assez différent sur le site du GARPAN :

Photo beaucoup moins haute que large

En remarquant que le coin inférieur droit de cette photo est un peu coupé et blanc, j'avais supposé que le modèle avait été placé un peu de travers sur le scanner, et donc que cette partie droite arrivait au bord de la photo d'origine... Et cette partie s'étendait juste un peu plus loin sur la droite que la photo que j'ai utilisée...

Mais peu après la parution de ce texte, François Bourbeau, que je remercie, m'a enfin communiqué une reproduction non recadrée de la photo d'origine, à un format un peu faible de 738 × 480 points... C'est effectivement très proche du format 3/2. Depuis, Christian Page a publié ce qui est visiblement la même reproduction mais à une résolution un peu meilleure, de 900 × 585 points :

Photo non recadrée

En superposant au mieux cette photographie avec celle que j'ai utilisée, on trouve que cette dernière devait avoir un format original d'environ 1120 × 728 points, au lieu de 1000 × 700. Elle était en outre légèrement inclinée (moins d'un degré). J'ai aussi matérialisé le centre de la photo, permettant de constater qu'il est très proche du centre de convergence des faisceaux (moins de deux degrés d'écart).

Photos superposées

Haines présente pour sa part une image recadrée encore plus restreinte, de même que pour la deuxième photo :

duxième photo, 3 lumières visibles

Avec la légende suivante :

La deuxième photo prise par M. Laroche est présentée dans l'illustration 9 à partir du négatif couleur original. Elle a été prise à environ 21 h 12, toujours avec l'obturateur de l'appareil photo ouvert manuellement pendant un peu moins de 30 secondes. Elle montre clairement les trois sources lumineuses sur le même côté de l'objet et avec la même luminosité relative comme le montre l'illustration 4 mais sans les gros lens flare.

Il indique ensuite les calculs angulaires qu'il a effectués :

Les clichés 13 et 14 ont été agrandis au format 8 × 12 pouces. La distance entre les deux zones lumineuses les plus éloignées l'une de l'autre sur l'image = 0,370 pouces et 0,384 pouces, respectivement, suggérant soit que l'objet a diminué d'altitude, soit qu'il a modifié son inclinaison, soit qu'il a physiquement changé de taille entre les moments où les deux photos ont été prises. Pour une longueur focale de 50 mm, la largeur angulaire du cadre = 40 degrés (Neblette, 1065, p. 13). Ainsi, la distance angulaire entre les deux sources de lumière les plus éloignées sur l'objet = 1 degré 14' d'arc sur le cliché n° 13 et 1 degré 17' sur le cliché n° 14.

Ça n'est pas très clair puisqu'on ne sait pas ce qu'il appelle « les deux zones lumineuses les plus éloignées l'une de l'autre », mais puisqu'on ne voit que trois lumières sur la deuxième photo il doit s'agir des deux lumières extrêmes parmi ces trois particulièrement lumineuses.

Sur la photo que j'ai utilisée, je mesure pour ma part 37 pixels entre ces deux lumières. Si ces 37 pixels correspondent bien à 0,37 pouces sur une photo de 12 pouces de largeur, la dimension de la photo en pixels doit être de 37 × 12 / 0,37 = 1200 pixels. C'est proche des 1120 pixels trouvés par comparaison avec la photo complète.

À partir de là, on peut mesurer la taille angulaire du supposé objet émettant les lumières :

— si on suppose que l'objet serait compris entre la naissance des rayons les plus écartés, que j'ai notés g et j, on obtient une dimension angulaire de 13,5° ;

— si on suppose plutôt comme Haines que les lumières externes sont des parasites et que l'objet est délimité par les lumières orangées disposées en demi-cercle, on trouve un diamètre de 48 pixels sur la photo complète de 900 pixels de largeur, correspondant pour une distance focale de 50 mm à une dimension angulaire de 2,2°.

Quant aux témoins, Haines a résumé leurs estimations de la taille apparente de l'objet dans un tableau, dont j'élimine pour l'instant les observations faites à l'extérieur de la terrasse de l'hôtel (nous verrons plus loin pourquoi elles doivent être traitées séparément).

Estimations de la dimension angulaire
du corps ovale de l'objet
Nom du
témoin
Date de l'estimation
Heures
d'observation
Estimation
taille/distance pour
déterminer l'angle
Angle visuel
calculé (deg. min.)
L. S. P.
(1)
24/09/91
19 h 30 — 21 h 30
« 45 cm
à bout de bras » (2)
45/45 = 1,0
45°
Laroche
(1)
09/91
20 h 00 — 22 h 00
« 25 cm
à bout de bras »
25/47,5 = 0,526
27°45'
Sterling 23/08/91
20 h 00 — 22 h 00 (3)
«  à peu près 45 cm
à bout de bras »
45/47,5 = 0,947
43°28'

24/09/91
20 h 00 — 22 h 00 (4)
« 25 cm
à bout de bras »
25/47,5 = 0,526
27°45'

29/10/91
20 h 00 — 22 h 00
« 45 cm
à bout de bras »
45/47,5 = 0,947
43°28'
Lippé
(5)
15/10/91
20 h 12 — 22 h 30
« 30 cm
à bout de bras »
30/47,5 = 0,632
32°19'

(1) Les deux témoins ont estimé que la distance totale d'un bout d'un rayon lumineux à l'extrémité du rayon lumineux opposé était de 1,4 à 1,5 mètres à bout de bras ce qui équivaut à 112 degrés 40' d'arc !

(2) En considérant que la longueur du bras = 47,5 cm (hommes) ; 45 cm (femmes).

(3) En considérant que l'estimation de l'angle a été faite à 20 h 00.

(4) Il a estimé que la distance totale d'un bout d'un rayon lumineux à l'extrémité du rayon lumineux opposé était de 1,4 à 1,5 mètres à bout de bras ce qui équivaut à 112 degrés 40' d'arc.

(5) L'angle visuel équivalent de l'ensemble du phénomène lumineux (de la pointe d'un rayon à la pointe de l'autre) était d'environ 90 cm à bout de bras ce qui équivaut à un angle de 87 degrés d'arc !


En fait, Haines se trompe dans ses calculs : il considère que α = arc tangente (d/b) au lieu de α = 2 × arc tangente (d/2b) (avec α = taille angulaire de l'objet, d = dimension à bout de bras et b = longueur du bras)... Ça ne change pas grand-chose pour les objets de faible taille angulaire, mais ça n'est pas vraiment le cas ici, et il trouverait qu'un objet de dimension infinie serait vu sous un angle de 90° au lieu de 180 ! En outre, il paraît assez inutile de préciser l'angle en degrés et minutes pour une simple estimation visuelle ! Les angles réels sont donc 53° pour Line Saint-Pierre, 29° pour Marcel Laroche, 51°, 29° et 51° pour Albert Sterling dans ses estimations successives, et 35° pour l'officier Lippé. Ça nous donne une exagération d'un facteur 13 à 23 par rapport à la valeur mesurée sur la photographie (2,2°), si les témoins parlent bien de la dimension du « corps ovale » délimité par les lumières centrales. Ça paraît beaucoup comme exagération, aussi je ne serais pas étonné qu'ils parlent plutôt de la dimension entre les faisceaux les plus lointains, qui est de 13,5° sur la photographie... L'exagération serait alors d'un facteur 2 à 4, très courante.

Bizarrement, c'est par contre la bonne formule de calcul qu'utilise Haines dans les notes... Mais on s'étonne que trois des quatre témoins ayant donné une estimation de la longueur à bout de bras d'une extrémité d'un rayon à celle du rayon opposé indiquent précisément la même longueur (1,4 à 1,5 m) ! Notons que la valeur mesurée sur la photo est de l'ordre de 24,5°, on retrouve à peu près la même exagération par les témoins qui l'estiment à 87 à 113°.

À noter que sur son croquis fait le 23 mai 1991, le photographe Marcel Laroche indique pour la taille de « l'objet » délimité par les lumières la « taille d'une lune », soit seulement 0,5°... Il est vrai que la dimension angulaire de la lune est souvent très exagérée par les témoins, mais d'un facteur 50 ça n'est quand même pas courant ! On peut supposer que sur ce dessin Laroche évoquait vraiment les lumières centrales, dont l'écart réel est de 2,2°...

Haines indique à propos de ce tableau des estimations angulaires :

Étant donné que ces estimations sont toutes faites de mémoire elles sont probablement fausses d'un facteur inconnu mais variable. Certaines sont probablement surestimées et d'autres sous. Elles indiquent, cependant, l'apparence relativement grande de l'objet aérien silencieux.

Là, on en vient à se demander si Richard Haines a jamais enquêté sur des observations d'ovnis, parce que ceux qui l'ont fait savent bien que les dimensions angulaires sont pratiquement toujours surestimées, et souvent d'un facteur important. On aura bien du mal à trouver un témoin non averti qui estimera la taille apparente de la lune à 5 mm à bout de bras, qui est pourtant la valeur réelle, et par contre on en trouvera beaucoup qui lui prêteront une taille dix voire vingt fois supérieure !

Les grandes différences dans les estimations d'angle ne sont pas rares dans des cas d'observation tels que celui-ci et résultent des émotions de chacun à l'époque, de la formation et expériences préalables pour faire de telles estimations, et des erreurs dans l'exécution de la procédure d'estimation. Néanmoins, on peut considérer qu'une limite inférieure raisonnable pour la taille angulaire du « corps ovale » central de l'objet vu depuis la terrasse du HB est de 27 degrés d'arc.

J'ai du mal à comprendre : Richard Haines a mesuré sur les photographies que ce « corps ovale central », dont il prétend avoir prouvé le caractère solide, a un diamètre angulaire de 2,2°. C'est une mesure physique, vérifiable, incontestable... Mais après ça, il se sert de l'estimation des témoins, en ignorant le fait connu de tout enquêteur qu'ils ont très généralement tendance à exagérer largement cette valeur (et en outre leur estimation ne se rapporte vraisemblablement pas à la dimension du « corps ovale central »), pour décider d'une « limite inférieure raisonnable » de 27 degrés, soit douze fois plus !

Et c'est à partir de ce choix aberrant que Haines estime la taille de son « objet solide » à un minimum de 500 mètres :

Si le corps principal de l'objet présentait une largeur angulaire de 27 degrés et se trouvait à une altitude de 1050 mètres, il serait large de 535 mètres ! S'il était à 2750 mètres d'altitude lorsque le pilote d'Air Canada l'a vu à 21 h 00 il aurait été large de 1400 mètres, cependant, les nuages étaient de plus en plus épais et bas et auraient probablement empêché de le voir à une altitude aussi élevée.
(Avec la même erreur de calcul que dans le tableau... Les valeurs correctes sont respectivement 505 mètres et 1320 mètres ; même si ça ne change pas grand-chose c'est quand même surprenant que Haines se trompe dans les formules les plus élémentaires en optique !)

Note : le pilote d'Air Canada était avec les autres témoins sur le toit de l'hôtel Bonaventure, et il a donné une estimation de l'altitude tout à fait personnelle :

Était également présent sur la terrasse à 21 h 40 un client du HB, pilote à Air Canada. Il a fait remarquer qu'il avait estimé l'altitude de l'objet entre 2500 et 3000 mètres alors que le plafond nuageux était alors à environ 1000 mètres.

Pour ce qui est de l'altitude, rappelons aussi que notre perception du relief ne permet pas d'estimer objectivement une distance supérieure à quelques dizaines de mètres, ou au maximum 600 mètres si l'objet se détache sur un fond beaucoup plus lointain et bien détaillé, ce qui n'est pas le cas ici... Que l'on soit pilote d'avion n'y change rien, on n'est pas équipé pour ça !

Mais il y a aussi le fait qu'un avion serait passé « devant l'objet »...

D'après le rapport de police :

Un avion de type Cessna a passé tout près des faisceaux lumineux et on pouvait remarquer que l'objet ou les lumières étaient beaucoup plus haut.

Et dans le rapport Haines-Guénette, il est précisé :

L'officier Lippé, M. Laroche, et Mme L. S. P. ont tous vu un petit avion privé (« de type Cessna ») voler en ligne droite sous les nuages et loin au-dessous de l'objet. L'officier Lippé estima que l'objet était « ... beaucoup plus élevé que l'avion » et M. Laroche estima que l'avion était à une altitude de 370 mètres au-dessus du sol. Mme L. S. P. et M. Laroche indiquent que l'avion était « minuscule » comparé à l'objet aérien.

Précision en note :

Les avions privés non réguliers doivent maintenir une distance de sécurité d'au moins 300 mètres au-dessus de l'obstacle le plus élevé dans un rayon de 600 mètres. Le mont Royal est le point le plus élevé à proximité du centre-ville de Montréal (altitude 365 mètres) et se situe à 2 km au NO du HB. Il a des antennes radio à son sommet si bien que l'altitude minimale de vol autorisée est de 370 mètres au-dessus du sol. En outre, les avions privés ne peuvent pas voler au-dessus de 670 mètres d'altitude, sauf si l'avion est équipé en conformité aux règles de vol aux instruments (IFR) et le pilote autorisé à voler dans les conditions météorologiques de vol aux instruments (IMC) en raison du risque d'interférence avec le trafic aérien de et vers l'aéroport de Dorval. La plupart des pilotes privés volent entre 450 et 550 mètres.

Et dans la reconstitution de Canal D, Le commandant Robert Masson explique :

Ça allait être difficile d'évaluer la hauteur. On savait que c'était quelque mille pieds, à l'œil, mais on savait pas non plus exactement. Puis au téléphone le contrôleur m'informe que sur le radar actuellement il y avait un cargo numéro XXX qui passait au-dessus du centre ville, et puis effectivement j'étais à l'extérieur avec le téléphone sans fil et je voyais l'avion passer, mais l'avion passait sous l'objet. Ben j'ai demandé j'ai dit « à quelle hauteur qu'elle est ton avion ? », ils me disent « à peu près six mille quatre cent pieds »... OK, mais j'ai dit « c'est quoi qu'il y a au-dessus ? » Lui il me dit « mais j'ai rien », lui il avait aucune apparence sur son radar comme quoi y avait quelque chose plus haut que l'avion qui passait.

On a l'impression que Masson, qui est sans doute le témoin le plus « ufo-enthousiaste » dans ce documentaire, a quelque peu amplifié son récit dans cette interview tardive... D'une part, il parle d'un avion-cargo alors que le rapport de police et Guénette mentionnent un petit avion de type Cessna, comme tous les témoins qui ont été interrogés rapidement, et d'autre part l'altitude indiquée est bien plus grande... C'est d'autant plus invraisemblable que 6400 pieds, ça correspond à 2000 m, et on sait qu'il y avait une couche nuageuse à partir de 1600 m à 19 h, et 1280 m à 21 h.

Notons qu'un avion Cessna a une longueur de l'ordre de 10 m, et à 1200 pieds d'altitude sa dimension angulaire est de l'ordre de 1,6°... à 2000 pieds, 1°, et à 6400 pieds, 0,3°.

Dire que l'avion était passé « sous l'objet », cela suppose qu'il y avait bien un objet solide dans le ciel à l'origine des lumières, et que cet objet avait un diamètre angulaire de 27° comme l'estimaient les témoins et pas 2,2° comme l'indiquent les photographies ! S'il n'y avait que des lumières réfléchies par des nuages, les témoins ne pouvaient absolument pas indiquer si l'avion était plus ou moins loin que ces lumières... Même s'il était passé devant un des « faisceaux », étant donné la faible luminosité de ceux-ci et la petitesse de l'avion, la différence entre un passage devant ou derrière n'aurait pas été sensible... Et du reste, d'après le rapport de police, l'avion est juste passé « tout près des faisceaux lumineux. »

En bref, l'estimation de la dimension de l'objet par Haines ne repose absolument sur rien : même s'il y avait eu un objet réel à l'origine des faisceaux lumineux, il aurait pu être à seulement 100 m d'altitude, et avec un diamètre angulaire mesuré de 2,2° ça lui donnerait une dimension de 4 mètres : on est bien loin des 500 ! Même à l'altitude des nuages, la dimension n'excèderait pas celle d'un dirigeable publicitaire Goodyear (60 m).

L'objet s'est-il déplacé ?

Voilà un autre grand sujet de discorde au sujet de cet ovni... Dans l'article de la Presse, il est écrit :

La chose, répétait-t-on, s'était déplacée très lentement du sud au nord.

C'était ce que disait l'officier Luc Morin dans le rapport de la G.R.C. :

À mon arrivée sur les lieux à 21 h 30, j'ai pu observer une forme lumineuse projetant deux faisceaux vers le sol.

Au cours des quarante-cinq minutes pendant lesquelles je suis demeuré sur les lieux, cette forme s'est légèrement déplacée du sud vers le nord pour être finalement complètement cachée par les nuages.

Mais dans une interview par Christian Page, après 26 ans il est vrai, il dit :

Les trois lumières sont restées à peu près à la même distance l'une de l'autre et se sont dirigées vers l'est.

Et dans le rapport de la police de la CUM, l'officier Lippé indique pour sa part :

On me mentionna que l'objet s'était déplacé de l'hôtel de la Bourse jusqu'au-dessus de l'hôtel Bonaventure.

L'hôtel Delta centre-ville ou hôtel de la Bourse se trouve à l'est-nord-est du Bonaventure ! Et lorsque Lippé lui-même parle de ce qu'il a observé, il dit :

Cet objet lumineux était fixe et immobile.

Il écrit aussi que d'après Mme Saint-Pierre la forme « s'est déplacée au-dessus de l'hôtel Bonaventure ».

Mais celle-ci disait le lendemain à la station Radio Canada :

C'était haut, plus haut que tous les édifices dans le centre-ville qu'on peut avoir, peu importe où on se trouvait sur le bord de la piscine on l'avait toujours au-dessus de la tête, alors c'était assez gros.

...

Vers sept heures les gens m'ont prévenue, puis vers neuf heures quand je suis partie c'était encore là, on le voyait moins bien à cause des nuages mais les lumières étaient encore là. Ça bougeait absolument pas.

Au moment de l'arrivée de
la Presse sur les lieux, il y avait bel et bien dans le ciel, tout droit au-dessus de l'hôtel, deux « lumières » brillant à travers les nuages.

Et dans le journal la Presse : La lumière ne pouvait pas venir d'en bas, ou en tout cas je ne voyais pas d'où elle pouvait venir, c'était tellement en haut de toute façon.

Et elle disait aussi à François Bourbeau qui l'a interrogée au lendemain de l'observation :

Moi je pense qu'il était constamment fixe parce que vous voyez la surface de la piscine, peu importe où ça se trouvait je l'avais au-dessus de la tête. Alors j'ai l'impression que ça n'a pas bougé, que c'était juste le fait que c'était très haut qu'on avait l'impression que ça bougeait...

Claude Lafleur écrivait pour sa part dans le Québec sceptique n°18 :

J'ai interrogé les deux principaux témoins, sur place, vingt-quatre heures à peine après « l'apparition ». Il s'agit d'Albert Sterling, adjoint à la sécurité, et de Line Saint-Pierre, surveillante de la piscine.

Tous deux rapportent avoir eu amplement le temps de voir l'objet lumineux durant près de trois heures. Or, Mlle Saint-Pierre affirme que « l'ovni » est plus ou moins demeuré fixe au zénith tout au long de la soirée, alors que M. Sterling est formel sur le fait que, en début de soirée (vers 19 heures) « l'ovni » se trouvait plutôt au niveau de l'horizon pour grimper graduellement et atteindre le zénith vers 21 heures. Tous deux déclarent que « l'objet » ne s'est pas envolé, mais qu'il s'est perdu vers 22 heures dans la couche nuageuse qui devenait de plus en plus dense. Soulignons que ni l'un ni l'autre ne parlent de « soucoupe volante ».


Notons que Sterling n'est arrivé qu'aux environs de 19 h 30 et n'a donc pas été parmi les premiers à voir l'objet. Et d'autre part, dans son entretien avec Bernard Guénette, le même Sterling disait « qu'aux environs de 22 h 00 l'objet s'était déplacé jusqu'à une position au-dessus du coin nord-ouest de la piscine. », alors qu'au début de l'observation il le situait « au-dessus de l'angle sud-est de la piscine ».

Haines note à ce propos dans son rapport :

L'estimation de M. Sterling de la taille apparente (angulaire) du corps de l'objet (voir tableau 1) est incompatible avec sa déclaration que l'objet se serait déplacé de l'angle SE à l'angle NO de la piscine au cours de la durée totale d'observation. Si l'objet était à une altitude de 900 mètres et vu sous un angle de 20 degrés il aurait eu 318 mètres de diamètre. Un mouvement horizontal d'un aussi grand objet sur seulement 20 mètres, la dimension diagonale de la piscine, représenterait seulement six pour cent de la largeur de l'objet. Ce très petit mouvement étendu uniformément sur une période de 2,5 heures serait très probablement imperceptible. Il est plus probable que son estimation de la position de l'objet était erronée et influencée par l'endroit où il se trouvait quand il a fait ces suppositions.

On sait du reste que Sterling est arrivé sur les lieux par le côté nord de la piscine, pour rejoindre le groupe principal de témoins qui se trouvait vers le sud... Si l'objet stationnait exactement au-dessus de la piscine, il était logique que Sterling imagine qu'il se déplaçait en sens inverse de son déplacement à lui...

En bref, les quelques indications d'un déplacement sont donc très douteuses et incohérentes : l'objet se serait déplacé du sud au nord, ou du sud-est au nord-ouest, ou de l'est-nord-est à l'ouest-sud-ouest, ou encore de l'ouest à l'est ! Il est vrai qu'à Montréal et au Québec en général on a l'habitude d'indiquer les directions en considérant que le fleuve Saint-Laurent se déplace de l'ouest vers l'est, alors que c'est plutôt ici du sud-sud-ouest à l'est-nord-est, si bien que ce qu'on appelle l'est est en fait le nord-nord-est ! Mais ça n'explique en rien la grande diversité des directions de « déplacement » indiquées, d'autant que pratiquement tout le monde applique cette convention, et c'est le cas des témoins de cette observation à chaque fois qu'on peut le vérifier...

Certains veulent aussi prouver que l'ovni s'est déplacé en s'appuyant sur les observations loin de la place Bonaventure, mais il faut remarquer que certaines de ces observations ont été faites simultanément à la présence de l'objet au-dessus de l'hôtel. Ainsi, Bernard Guénette a observé « son » ovni juste au-dessus de lui à 19 h 30 à un kilomètre de l'hôtel, et deux automobilistes étaient pour leur part à sept kilomètres quand ils ont vu un objet lumineux vers 20 h 15. Rappelons que l'objet était vu par de nombreux témoins au-dessus de l'hôtel entre 19 h 15 et 22 h 15... Il semble en fait que beaucoup de témoins aient vu des phénomènes lumineux ce soir-là dans toute la ville, bien que seuls quelques-uns aient été interrogés par Guénette. Il fallait donc qu'il y ait soit plusieurs « ovnis » simultanément, soit un seul visible de très loin, et dans les deux cas ça n'implique pas un déplacement.

Et tout le reste semble au contraire indiquer que l'objet est resté stationnaire précisément à la verticale de l'hôtel.

Malgré la présence d'un certain nombre de personnes sur le toit de l'hôtel, personne n'a vu l'objet arriver, il a tout de suite été vu au-dessus de l'hôtel et c'est une baigneuse qui a vu la première « l'étrange objet éclairé dans le ciel nocturne juste au-dessus de sa tête », d'après le rapport Haines-Guénette. La terrasse sur laquelle tout le monde se trouvait étant entourée de bâtiments, si l'objet était arrivé au loin, les baigneurs auraient été les moins bien placés pour le voir, ayant la tête deux mètres plus bas que celle des personnes debout... Par contre, pour peu qu'ils aient de temps en temps nagé sur le dos, ils étaient les mieux placés pour voir un objet apparaître peu à peu au zénith !

Le journaliste qui a pris la photographie indique qu'il a demandé à un ami photographe comment saisir ces lumières très faibles, qui lui a conseillé de poser l'appareil photo sur un support fixe et d'actionner la pause manuelle. L'appareil photo était donc bien tourné vers le ciel à la verticale ou peu s'en faut, et dans la reconstitution pour Canal D à laquelle il a participé, on voit effectivement Marcel Laroche poser l'appareil photo bien à plat sur un support horizontal :

Marcel Laroche posant l'appareil photo à plat

François Bourbeau qui a interrogé Marcel Laroche au lendemain de l'observation m'a du reste précisé qu'il avait simplement posé l'appareil photo à plat au bord de la piscine.

Et on sait, maintenant que nous avons une photo non recadrée, que le centre de convergence des faisceaux se trouve très proche du centre de la photo, à moins de deux degrés... L'objet se trouvait donc très près du zénith lorsque la photo a été prise, à 21 h 15.

Marcel Laroche précise d'ailleurs, lorsque François Bourbeau lui demande s'il croit que c'était un ovni :

C'est difficile à dire parce que si ç'avait été un ovni tout ce qu'on rapporte dans les journaux habituellement c'est que les gens en Europe ou un peu partout ont vu des choses, mais des faisceaux lumineux avec des traînées de fumée tout ça, moi ça n'a jamais bougé. Ça n'a jamais bougé. Alors qu'est-ce que c'était exactement ? On a éliminé la tour, la grue, on a éliminé les plateaux de tournage, les... C'est toujours là, alors qu'est-ce que ça pouvait être ? Je l'ai tout de même examiné pendant une heure trente, ça a toujours été au même endroit...

Ça nous permet de douter de l'appréciation de Luc Morin, arrivé après la prise de la photographie, qui lui a vu l'objet se déplacer légèrement du sud au nord... Il était au zénith à 21 h 15, et puis il serait allé vers le sud puis vers le nord, sans que personne ne mentionne un changement de direction ?

Et la photo prise sur place par un autre photographe de la Presse montrant l'agent Sterling, responsable de la sécurité, en train d'observer l'objet, se passe de commentaires :

agent sterling regardant le ciel tout au-desus de lui

Cette photo a été prise peu avant la disparition de l'objet, vers 22 h, le photographe n'étant pas là avant. On a vu qu'Albert Sterling disait que l'objet s'était déplacé du coin sud-est au coin nord-ouest de la piscine, mais ce qui est sûr c'est qu'à la fin il n'était pas loin du zénith !

Ça nous rappelle le témoignage d'une cliente du restaurant qui se levait de table de temps en temps pour observer le phénomène, mais n'a pas attendu sa disparition pour aller se coucher : Deux heures de temps je trouvais ça assez intéressant mais c'est jusqu'à ce que t'attrapes un mal de cou...

Haines et Guénette indiquent de leur côté, à propos de l'idée que l'objet aurait pu être un reflet des lumières de la grue d'un immeuble en construction :

De même, l'angle calculé (verticalement) depuis le haut du HB jusqu'au haut du 45e étage de l'immeuble commercial était de l'ordre de 60 degrés ce qui était beaucoup plus bas que l'objet.

C'était donc vraiment très haut dans le ciel.


Beaucoup plus haut que 60° ça ne peut pas être loin du zénith !

Et selon tous les témoins entendus, l'objet ne s'est pas éloigné, mais s'est peu à peu fondu dans les nuages qui devenaient de plus en plus épais. Il semble donc qu'il ne se soit pas du tout déplacé pendant les trois heures d'observation... Plusieurs témoins mentionnent par contre qu'il s'est peu à peu élevé.

C'est le cas d'un congressiste qui a déclaré sur Radio Canada :

C'était un objet rond qui avait quatre grosses lumières en dessous et une lumière qui s'éclairait autour, un peu comme on a vu si vous voulez dans, à la télévision, souvent dans les films où on nous montre une soucoupe volante qui nous vient du futur si vous voulez, c'était très semblable à ça, et puis elle était très stable, elle a été là pendant deux heures de temps, c'était extraordinaire à voir, elle est descendue et elle est remontée, et puis là il y a eu des nuages, qui ont si vous voulez baissé la lueur de la lumière, mais la lumière était quand même très forte.

Et un autre témoin sur la même radio :

Écoute tu appelles ça soucoupe volante, objet volant, comme tu veux là mais je sais que c'était pas un avion qui reste stable pendant deux heures de temps à peu près au même point, qui monte un peu, qui descend, ?? des ?? des nuages.

Ce que confirme Richard Haines qui trouve un écart des lumières légèrement différent sur les deux photos prises par Marcel Laroche à quelques minutes d'intervalle. L'augmentation de taille est d'environ 5% entre les deux images, ce qui voudrait dire que l'objet se serait rapproché d'autant..

Bref, tout indique que l'objet se trouvait bien à la verticale de l'hôtel pendant toute la durée de l'observation, et qu'il ne s'est pratiquement pas déplacé sinon en altitude. C'est ce que disent la majorité des témoins, et ceux qui disent le contraire donnent des directions de déplacement toutes différentes, ou même se contredisent dans leurs témoignages successifs !

Quant aux témoignages en dehors de l'hôtel, on en reparlera, et nous verrons pourquoi il faut les étudier indépendamment de ceux de l'hôtel.

Dix-huit ans après, un Belge identifie le phénomène

Pendant longtemps, le rapport de Haines-Guénette est resté la référence incontournable concernant cette observation, considérée comme un des cas majeurs de l'histoire de l'ufologie. Les sceptiques considéraient que le cas se résumait à des lumières projetées sur les nuages, ce que beaucoup de témoins avaient d'ailleurs pensé... On a vu aussi que dès le surlendemain de l'observation, le journal la Presse avait interrogé un spécialiste de météorologie qui expliquait :

Cela ressemble à un phénomène observé à maintes occasions, notamment lorsque l'on fait des travaux avec des projecteurs parfois utilisés en météorologie, explique-t-il. La lumière est réfléchie par les cristaux de glace ou les gouttelettes d'eau contenus dans le nuage. Selon la densité du nuage, le faisceau pourra mesurer plusieurs centaines de mètres d'épaisseur et être visible à très grande distance.

Mais l'explication n'apparaissait guère convaincante, et on n'avait pas identifié les lumières qui seraient à l'origine de ces mystérieux reflets.

D'autres avaient évoqué des aurores boréales, idée séduisante si ce n'est qu'on n'avait pas enregistré d'activité solaire inhabituelle et que le phénomène était encore bien visible alors qu'il y avait une couche de nuages épaisse.

C'est en 2008 qu'un passionné belge de phénomènes atmosphériques, Wim van Utrecht, a proposé une explication jusqu'alors méconnue sur son site Caelestia, en anglais.

C'est en voyant dans le reportage de Canal D le survol de l'hôtel par un hélicoptère qu'il a remarqué que la disposition des lumières éclairant la piscine de l'hôtel, sensiblement en demi-cercle, était assez similaire à celle des lumières centrales de la photo...

vue d'hélicoptère de la piscine

Et cela l'a mis sur la piste des « piliers de lumière » (light pillars), un phénomène dû à des réflexions sur des cristaux de glace, et plus précisément ici des piliers de lumière zénithaux. Il ne s'agit pas de lumières éclairant les nuages, mais de lumières réfléchies par des cristaux de glace horizontaux, qui se comportent comme un ensemble de minuscules miroirs et reproduisent le schéma des lumières au sol.

Ça n'était pas inconnu puisqu'on a vu que le météorologue interrogé par la Presse avait mentionné la réflexion par des cristaux de glace (en croyant à tort qu'une telle réflexion nécessitait de puissants projecteurs dirigés vers le ciel), mais en l'absence d'une explication détaillée on n'y avait pas trop prêté attention (y compris le météorologue en question qui avait finalement opté pour une aurore boréale)... Haines et Guénette, notamment, sont totalement passés à côté et continuent d'ailleurs à l'ignorer.

Le site Caelestia a dans la foulée consacré un gros dossier à ce type de phénomènes.

Bref, cette fois on tenait l'explication... Pour autant, il restait des points de détail à éclaircir, et le site Caelestia est en anglais, alors ne nous privons pas d'approfondir un peu pour apporter la lumière aux francophones !

Dans la famille halos, les piliers de lumière

À des températures suffisamment basses, la vapeur contenue dans l'atmosphère gèle, formant de petits cristaux de glace... Ces cristaux peuvent prendre soit la forme d'hexagones plats, semblables à des tomettes provençales, soit de colonnes hexagonales, comme des crayons sans pointe :

différentes formes de cristaux

À haute altitude, ces cristaux forment les cirrus et les cirrostratus, des nuages peu denses, et aussi les traînées d'avions.

Du fait de leur forme hexagonale, tous ces cristaux formant des prismes sont responsables de la plupart des halos autour du soleil ou de la lune :

halo circulaire autour du soleil

La lumière passant par un prisme de glace à 60° est déviée d'environ 22°, et c'est bien l'angle formé par le petit halo autour du soleil.

réfraction dans un prisme hexagonal

La lumière est un peu décomposée comme dans un arc en ciel (lequel s'explique aussi par la réfraction de la lumière du soleil, cette fois dans les gouttes d'eau sphériques qui forment la pluie), mais c'est moins visible. Il y a d'autres formes de halos, résumées dans ce tableau tiré du site Luxorion, qui s'expliquent toutes par des réfractions ou réflexions dans de tels cristaux :

nom et disposition des différents halos

Le « grand halo » à 46°, que l'on voit plus rarement, est dû de la même manière à la lumière réfractée par les facettes qui se coupent à 90° (les bouts des colonnes ou les côtés des « tomettes »). Les autres halos, non circulaires, se forment lorsque les cristaux ne sont pas orientés aléatoirement : s'ils sont suffisamment gros, ils chutent, et leur orientation est déterminée par le frottement de l'air. De manière générale, un corps présentant de multiples symétries, comme ces cristaux, a tendance à s'orienter dans sa chute en offrant sa plus grande résistance à l'air : les cristaux en colonne tombent couchés, et les cristaux plats à l'horizontale.

C'est encore la réfraction des rayons du soleil dans les cristaux plats horizontaux qui forme les parhélies ou « faux soleils », situées à 22° de part et d'autre du soleil lorsqu'il est bas sur l'horizon, alors que l'arc parhélique qui forme un cercle horizontal est dû à la réflexion sur les côtés de ces mêmes cristaux.

Et enfin, la lumière réfléchie par les faces de ces cristaux forme les « piliers solaires », qui vont nous amener à notre sujet.

Quand ils se forment près du sol, dans les régions froides, les cristaux forment ce qu'on appelle poudrin de glace... En anglais, on lui donne le nom beaucoup plus poétique de diamond dust ou « poussière de diamant » : du fait que ces cristaux à l'orientation aléatoire et fluctuante se comportent comme de petits miroirs qui réfléchissent la lumière du soleil, on voit de tout petits éclairs de lumière qui scintillent tout autour de soi.

Si l'humidité est élevée, les cristaux grossissent et se transforment en cristaux de neige, qui ont toujours une forme générale hexagonale mais arborescente, et atteignent plusieurs millimètres de diamètre (souvent, ils s'agrègent, formant les flocons)...

Les conditions de formation des différents types de cristaux sont résumées dans ce tableau emprunté à l'excellent site snowcrystals.com, qui détaille tout ce qui concerne les cristaux de glace et flocons de neige :

forme des cristaux en fonction de la température et de l'humidité

Ce qui va nous intéresser, ce sont les cristaux hexagonaux plats, qui agissent comme de véritables petits miroirs. S'ils ont plus d'un dixième de millimètre de diamètre, ils tombent en s'orientant de façon à peu près horizontale, et ils forment donc des millions de minuscules petits miroirs horizontaux dans le ciel... Et bien sûr, ils peuvent réfléchir non seulement le soleil ou la lune, mais aussi toute source de lumière artificielle, formant ce qu'on appelle les piliers de lumière :

reflexion des rayons sur les cristaux

Pour l'observateur, ces colonnes de lumière floues (du fait que les cristaux ne tombent pas exactement à l'horizontale, ils oscillent un peu) paraissent se situer précisément au-dessus de la source de lumière. En voici un exemple très spectaculaire :

piliers rouges et bleus

Photo de Adam Kraft, 11 décembre 2013 à Spring Arbor, Michigan

Si la nappe de cristaux n'atteint pas le sol, ces piliers sont séparés de leur source, et paraissent flotter dans le ciel :

piliers verts et bleus flottant dans le ciel

Photo Valeriya Terpugova, Moscou, 25 décembre 2014

Les piliers zénithaux

Lorsque la source lumineuse se trouve près de l'observateur, les piliers sont haut dans le ciel, et s'il y a plusieurs sources de lumières, ils vont converger vers le zénith :

Rayons de 2 sources de lumière reflétés vers le ciel

Plus la source de lumière est proche de l'observateur, plus le faisceau se rapproche du zénith, moins il est étendu en longueur et plus sa lumière est concentrée. Un exemple particulièrement spectaculaire d'un tel phénomène a été photographié à Ath (Belgique) le 20 novembre 2006, par l'astronome amateur Joël Bavais :

piliers convergeant vers le zénith

On observe bien la convergence des faisceaux, et on voit que chaque faisceau est accentué à ses extrémités, indiquant qu'il y avait deux nappes de cristaux de glace séparées par une zone relativement vide.

Autre exemple tout récent : le 12 janvier 2016, une passionnée d'astronomie a pris des photos exceptionnelles de piliers de lumière zénithaux à Eura, en Finlande, qui en réfléchissant les éclairages des rues dessinent parfaitement la carte de la ville !

Les rues de la ville se reflètent sur le ciel

On peut voir la photo en plus haute définition, avec d'autres et les détails de l'observation, sur le site de la photographe (mais en finnois).

Sur cette image gif animée, j'ai superposé graduellement l'image en miroir de la photo à la carte Google maps de la ville :

photo superposée à la carte

En cherchant le point de convergence des faisceaux de lumière, on peut trouver à quelques mètres près l'endroit d'où a été prise la photo !

On voit aussi les étoiles sur la photo, ce qui permet avec Stellarium de superposer la carte du ciel... L'heure indiquée par la photographe est à peu près 21 h 45, mais les données exif de son appareil photo indiquent 22 h 46' 55". On peut supposer qu'il était réglé sur l'heure d'été, et s'il était par ailleurs bien réglé ça nous donnerait une heure exacte de 21 h 46' 55", ou 19 h 46' 55" TU.

Si on veut que la comparaison soit bonne, il faut que Stellarium utilise la même méthode de projection que la photo. Une photographie projette la sphère céleste sur un plan à partir du centre, en cartographie on appelle ça une projection gnomonique. Stellarium peut le faire, et il faut en plus que la projection ne soit pas centrée sur le zénith mais sur la région du ciel correspondant au centre de la photo. Pour cela, j'ai orienté la photo selon un axe zénith-centre. Voilà ce que cela donne, en superposant par transparence la photo convenablement dimensionnée à la carte du ciel :

carte du ciel

Il y a un léger décalage sur les bords, où les étoiles sont dédoublées, mais vers le zénith la superposition est parfaite, et on voit que le centre de convergence des faisceaux se trouve précisément au zénith, indiquant que les cristaux de glace sont bien horizontaux.

On peut aussi avec cette photo calculer l'altitude des cristaux... Les deux étoiles assez brillantes près du zénith sont alpha et bêta de la Girafe (Camelopardalis). Elles sont séparées d'une distance angulaire de 5,18°. On aurait pu aussi déterminer l'angle entre deux points par rapport à l'angle de champ de la photo, mais il faut encore le connaître avec certitude... Avec les étoiles, on est sûr de ne pas se tromper !

Voyons maintenant à quelle distance ces deux points correspondent sur la carte du sol :

les points sur la carte correspondant aux deux étoiles

420 mètres... Et pour voir une distance de 420 mètres sous un angle de 5,18°, il faut se trouver à 4700 m... La nappe de cristaux, faisant office de miroir, se trouvait donc à la moitié de cette distance, soit 2350 mètres. Il s'agit de la limite supérieure de la nappe, correspondant à la naissance des faisceaux lumineux... en comparant la longueur de ces derniers à leur distance du centre, on trouve que la limite inférieure devait se trouver à environ 2000 mètres.

Bref, une photo pleine d'enseignements, qui pourra nous inspirer pour le cas qui nous intéresse !

Il y a piliers et piliers

Notons au passage que beaucoup de sites « ésotériques » appellent quelquefois piliers, ou colonnes, de lumière tout autre chose, par exemple ici derrière la pyramide de Kukulkan à Chichen Itza :

montreal/pilier_pyramide.jpg

Je doute du reste que la photo soit authentique, on en trouve plusieurs versions et le photographe aurait eu une chance extraordinaire, mais le « faisceau d'énergie » sur fond de ciel est sûrement réel et illustre en tout cas parfaitement de quoi il s'agit...

En fait, c'est un artefact photographique dû au fait que les capteurs des appareils numériques lisent souvent les données colonne par colonne de points... S'il y a un flash très bref pendant ce processus, il y aura une colonne surexposée sur la photo... Ici, c'est un éclair qui a brièvement illuminé le ciel derrière la pyramide, et ça n'est donc que le ciel qui est surexposé sur une partie de sa largeur...

Des explications détaillées, avec de nombreux exemples, se trouvent sur le site Metabunk.

Une interprétation qui pose des problèmes

Les faisceaux convergents au zénith sont donc la caractéristique principale des piliers de lumière zénithaux, et c'est bien ce que l'on observe sur la photo du phénomène de la place Bonaventure... En outre, les lumières du centre de la photo évoquent la disposition de celles de la piscine de l'hôtel, en demi-cercle.

Les cristaux de glace plats, responsables de l'apparition de piliers de lumière, se forment généralement à des températures comprises entre 0 et -4° C, ou entre -10 et -20° C. C'est conforme aux conditions météorologiques indiquées par Haines et Guénette : À 20 h 00 la température de l'air était de -1° C près du sol et le vent était de 4 km/h venant de l'ouest. Alors que la température n'a diminué que d'un degré durant les deux heures suivantes, le vent est monté à 9 km/h venant du nord-ouest (variable).

Ça fait déjà beaucoup d'éléments qui valident cette explication... Wim van Utrecht avance aussi que l'altitude déduite de la nappe de cristaux correspondrait bien à la base des nuages :

Restons-en aux preuves physiques et faisons à nouveau des calculs avec la première des deux photos prises par LAROCHE. Selon H & G, la largeur linéaire de l'axe le plus long du corps central mesure 0,370'' sur un agrandissement de 8'' × 12''. Cela signifie que la largeur linéaire de l'image sur le négatif de 35 mm était de 1,079 mm. Cette valeur permet d'obtenir la taille réelle du phénomène pour toute valeur supposée de la distance, en utilisant la formule indiquant que la taille de l'objet photographié est égale à la taille de l'image de l'objet sur le négatif divisée par la distance focale (50 mm) et multipliée par la distance entre l'appareil photo et l'objet (dans notre cas, la distance de la base des nuages qui, à notre avis, a fait office de couche réfléchissante). Selon les données météorologiques recueillies à partir des registres de l'aéroport international Dorval, il y avait une couche de nuages à 4500 pieds à 20 h 30 qui avait baissé à 4200 pieds à 21 h 00 et à 3500 pieds à 21 h 30. On peut donc supposer que, lorsque M. LAROCHE a pris sa première image, à 21 h 10, la base des nuages était comprise entre 3500 et 4200 pieds (1148 m et 1377 m). Puisque les photos ont été prises du toit de l'hôtel, nous devons soustraire 65 m (la hauteur moyenne d'un bâtiment de 17 étages) de ces altitudes. Cela donne 1083 m pour le minimum et 1312 m pour la distance maximale entre l'appareil photo et le phénomène. Pour obtenir la taille du phénomène, nous devons multiplier ces distances par 1,079 et diviser le résultat par 50. On obtient 23,4 et 28,3 m. En d'autres termes, pas si loin (comparé à 585 et 1505 m) de la longueur moyenne d'une piscine (la piscine de l'hôtel Hilton étant « d'environ 15 mètres de long », selon l'avis d'un voyageur sur Tripadvisor.

Malheureusement, il commet plusieurs erreurs :

D'abord, la dimension des photos sur un film 35 mm est de 24 × 36 mm, donc l'objet mesure 1,11 mm sur le film et pas 1,079 mm. Ensuite, nous avons vu que l'angle calculé par Haines ne correspond pas au diamètre de « l'objet », et donc à la longueur de la piscine, mais à la distance couverte par les trois lumières les plus visibles, qui n'est que de 8 mètres reportée aux lumières de la piscine. Et enfin, la distance apparente de l'image de la piscine est égale au double de celle de la couche de cristaux dans laquelle elle se reflète. Ces corrections faites, on trouve que l'image de la piscine se trouve à 360 m au-dessus de celle-ci, et donc que la couche de cristaux se trouve 180 m au-dessus des témoins, ou à  245 m du sol. On est loin des nuages à 1200 m d'altitude !

Il s'agit en outre de la limite supérieure de la nappe de cristaux. Son épaisseur peut être calculée d'après le rapport entre la longueur des rayons externes et leur éloignement du centre de convergence... Ce rapport, égal à 0,44, est égal au rapport de l'épaisseur de la nappe de cristaux sur son altitude maximale (par rapport au photographe, donc 180 m)... L'épaisseur est donc de l'ordre de 80 m, soit une altitude de 165 m par rapport au sol. C'est du reste une épaisseur normale pour une nappe de poudrin de glace, qui va de quelques dizaines de mètres à environ 300 mètres.

Mais est-ce que ça remet en cause l'hypothèse ? Pas du tout, parce que c'est aussi une erreur d'identifier la nappe de cristaux aux nuages !

Les cristaux de glace ne forment pas de nuages, ou plutôt ils forment des nuages très ténus, les cristaux étant beaucoup moins nombreux que les particules d'eau dans les nuages visibles dans le ciel... Quand on se trouve à l'intérieur d'une nappe de « poussière de diamant » (je préfère décidément ce terme), on n'a pas du tout l'impression d'être dans du brouillard, la visibilité étant en général assez peu réduite.

C'est d'ailleurs ce qu'indique le rapport Haines-Guénette : Mais une humidité relative élevée d'environ 95 pour-cent près du sol s'est progressivement transformée en une fine brume s'étendant du sol jusqu'à une altitude de plusieurs milliers de pieds. Il n'y avait que quelques nuages épars présents entre 1500 et 2500 mètres.

Et plus loin : À 20 h 30 il y avait une couche de nuages épars à 900 mètres et une couche épaisse à 1400 mètres.

De plus, les cristaux responsables des piliers de lumière ont une taille suffisamment importante pour tomber, ce qui leur confère leur position horizontale, ils tombent donc au-dessous du nuage dans lequel ils se sont formés, tout comme la pluie ou la neige.

Bref, la couche de cristaux n'avait rien à voir avec la couche nuageuse enregistrée par les stations météo, qui a plus tard dans la soirée apporté de la neige. Rien d'étonnant donc à ce que la nappe de cristaux responsable des réflexions dans le ciel soit à une altitude très inférieure à la base des nuages.

Les témoins disent que « l'objet » se trouvait au niveau des nuages, et qu'il a peu à peu disparu dans les nuages, mais il faut rappeler que l'appréciation de la distance d'un objet inconnu est tout à fait hasardeuse au-delà de quelques dizaines de mètres, puisqu'on n'a physiologiquement aucun moyen de la connaître. L'objet se présentait sous forme de faisceaux de lumière d'apparence floue, il était normal de penser qu'ils se trouvaient à l'intérieur des nuages, ou qu'il s'agissait de lumières projetées sur les nuages... Et lorsque les conditions météo sont devenues défavorables à la formation de cristaux, que ceux-ci ont peu à peu disparu et l'objet avec, il était tout aussi naturel de penser qu'il était graduellement occulté par les nuages de plus en plus bas et denses.

On peut tout de même estimer la distance d'un objet fixe lorsqu'on se déplace, ce que certains témoins ont peut-être fait, mais ça n'est pas précis en l'absence de repères, et il faut répéter que les piliers de lumière zénithaux sont la réflexion de lumières au sol par des cristaux de glace, et semblent donc se trouver au double de la distance de la nappe de cristaux... Ça nous rapproche des nuages.

Rien d'anormal donc dans tout ça, mais il n'empêche que Wim van Utrecht y perd un de ses principaux arguments... Ça n'est pas vraiment important étant donné que la ressemblance de la photo avec d'autres photos de piliers de lumière zénithaux est déjà une évidence en soi, mais on peut approfondir en comparant les positions des différentes lumières sur la photo avec les lumières au sol, dont elles doivent être l'image inversée.

On ne peut pas s'attendre à une corrélation parfaite du fait qu'on ne sait pas vraiment quelles étaient toutes les lumières présentes sur le toit de l'hôtel ce soir-là. La vue d'hélicoptère dans le reportage de Canal D nous donne tout de même quelques indications sur les lumières que l'on peut trouver sur le toit de l'hôtel, outre celles de la piscine :

vue d'hélicoptère la nuit du toit de l'hôtel

Maintenant, on peut superposer en transparence les lumières apparaissant sur la photo avec celles de la piscine repérées sur Google Maps, et voir ce que cela donne avec l'ensemble des lumières :

superposition des lumières de la photo avec celles de la piscine

On voit que les lumières b à f se superposent parfaitement avec cinq des lumières de la piscine (situées à peu près par des points jaunes). Il en manque une, mais elle pouvait être occultée par un baigneur, ou être simplement en panne, comme cela arrive fréquemment : on trouve sur Trip advisor plusieurs photos de la piscine avec des lumières éclairées et d'autres éteintes, par exemple celle-ci :

vue de la piscine avec une des lumières éteintes

La lumière a pourrait quant à elle correspondre à la fenêtre d'un local technique, mais par contre aucune des autres lumières sur la photo ne correspond à une des lumières présentes sur le toit de l'hôtel ni à quoi que ce soit qui pourrait être source de lumière !

Nous y reviendrons, mais parlons d'abord de la dernière difficulté : le point de convergence des différents rayons, qui doit correspondre au sol à la position de l'appareil photo, se trouve... dans la piscine, à plus de deux mètres du bord !

Dans la première version de ce texte, j'avais suggéré pour résoudre le problème que l'orientation moyenne des cristaux de glace pourrait dévier un peu de l'horizontale en raison du vent et du relief : il suffirait que cette orientation varie d'un demi-degré localement entre le haut et le bas de la nappe de cristaux pour que la position de prise de la photo diffère de deux mètres du centre de convergence apparent... Et à deux mètres du point correspondant au centre de convergence, il y a un angle rentrant de la piscine, qui serait une bonne place pour tenir facilement les gens à distance pendant les trente secondes de la prise de vue. La possibilité d'une telle déviation restait à discuter, et ça reste une question intéressante, mais nous allons voir que ça n'est plus nécessaire.

Et concernant l'absence de sources de lumière plausibles à la position des faisceaux externes visibles sur la photo, j'avais suggéré qu'il pouvait y avoir deux nappes de cristaux à des altitudes différentes, la plus haute étant trop ténue pour réfléchir de façon visible les lumières de la piscine, et la plus basse réfléchissant les lumières les plus éloignées hors de champ de la photographie.

Il se trouvait qu'en agrandissant l'échelle, deux des lumières externes que j'avais relevées correspondaient parfaitement à deux lumières puissantes au sol, boulevard Bourassa, visibles depuis une vue d'hélicoptère dans le dernier reportage que Christian Page avait consacré à cette observation, en novembre 2016... Il n'est pas du tout certain que ces deux lumières étaient déjà présentes en 1990, mais la coïncidence était intéressante. Cela supposait une seconde nappe de cristaux entre 400 et 610 mètres au-dessus du sol.

Une troisième lumière pourrait quant à elle correspondre au chantier de la tour en construction au 1000 la Gauchetière, dont les lumières n'ont été éteintes qu'après la prise de la photographie.

Superposition des faisceaux g à k avec les lumières visibles à l'extérieur

Malheureusement, il s'est avéré que le faisceau noté ici j, correspondant à une des deux lumières du boulevard Bourassa, n'était qu'un artefact de la photogaphie que j'avais considérée... Il n'est pas du tout visible sur la reproduction diffusée récemment par Christian Page, et n'avait pas été relevé par Richard Haines qui a eu en mains les tirages originaux.

En bref, pour faire correspondre les lumières de la piscine avec les faisceaux de la photographie, il fallait faire appel à accumulation d'hypothèses un peu tirées par les cheveux, et je notai en conclusion :

Bien sûr, je n'ai fait que chercher une explication raisonnable aux difficultés posées par l'explication par des piliers de lumières, mais je ne suis pas spécialiste de ces phénomènes, et il serait intéressant qu'un météorologue connaissant bien le sujet nous dise ce qu'il en pense... Il y a sans doute des erreurs dans mes suppositions, et aussi des choses auxquelles je n'ai pas pensé. En attendant, tout ça me paraît plausible.

Et si la piscine était hors de cause ?

Devant ces difficultés, je m'étais demandé si l'on n'avait pas fait fausse route en suspectant les lumières de la piscine, mais j'avais tourné la photo dans tous les sens et changé son échelle pour essayer de trouver une relation avec d'autres lumières possibles, en vain. On ne peut du reste pas trop agrandir l'échelle parce que cela suppose une augmentation de l'altitude de la nappe de cristaux et qu'elle ne pouvait de toute façon pas dépasser celle du plafond nuageux, lequel s'est abaissé jusqu'à moins de mille mètres dans la soirée.

Mais voilà qu'en novembre 2018, François Bourbeau a mis en ligne une vidéo tournée sur le toit de l'hôtel au lendemain de l'observation, contenant l'interview des témoins Line Saint-Pierre et Albert Sterling. Les interviews en elles-mêmes n'apportent pas grand-chose, ces deux témoins ayant dit à peu près les mêmes choses ailleurs, mais ce qui est intéressant c'est que le cameraman filme depuis plusieurs angles, si bien qu'on voit à peu près l'agencement précis de toute la terrasse à l'époque de l'observation... Et j'ai remarqué un détail bigrement intéressant :

Des boules blanches sur deux arbres

Que sont ces boules blanches visibles sur les deux arbres numérotés 1 et 2 de droite à gauche ? Il y a des alignements de boules espacées régulièrement, comme si elles étaient reliées par un câble... De quoi pourrait-il s'agir sinon d'ampoules de guirlandes lumineuses ?

Et un peu plus loin sur la vidéo, vers la gauche, on voit deux autres arbres pareillement décorés (en réalité, deux arbres se partagent des guirlandes à l'emplacement noté 3) :

Encore des boules blanches sur deux arbres

Et encore plus loin et toujours vers la gauche, on voit un dernier arbre, dépourvu de feuilles mais pas de boules !

Un cinquième arbre portant des boules blanches

Et il y a assez de repères dans la vidéo pour que l'on puisse positionner assez précisément ces cinq sources de lumière potentielles :

Position des cinq arbres, formant à peu près un demi-cercle !

Voilà qui évoque encore beaucoup la disposition des lumières sur la photo ! Certes, on ne sait pas si ces supposées lumières étaient éclairées, et personne n'a mentionné des arbres illuminés... Mais je ne vois vraiment pas ce que ces boules blanches pourraient être sinon des guirlandes lumineuses, et si on met des guirlandes lumineuses sur des arbres c'est bien pour les éclairer le soir, surtout quand un groupe de clients fête un mariage ! Et ces lumières devaient être bien plus lumineuses que celles des spots qui éclairent le fond de la piscine : il doit y en avoir une centaine sur chaque arbre, s'il s'agit d'ampoules de 15 W ça fait plus de 1000 W d'éclairage par arbre !

J'ai donc encore superposé les faisceaux visibles sur la photo avec la position des arbres sur la vue Google maps :

Les différentes lumières de la photographie, les cinq centrales superposées à la position des arbres

Sans être parfaite, la superposition me semble convaincante : n'oublions pas qu'on ne connaît pas précisément la répartition des ampoules sur les arbres, qui pouvait être assez irrégulière vue du ciel, et d'autre part une nappe de cristaux n'est pas quelque chose de parfaitement homogène : elle peut fluctuer en altitude, en épaisseur et en densité.

Quant aux lumières externes, il est difficile de savoir 28 ans après à quoi elles correspondent, mais elles ne sont pas à des positions surprenantes. a se trouve sur le toit clair de la gare et sous des fenêtres de l'hôtel, g et h sont dans un jardin aussi sous des fenêtres (on voit un groupe de lumières précisément à l'emplacement de g sur la vue nocturne d'hélicoptère de la vidéo de Canal D), et i et j se trouvent sur la chaussée : i pourrait correspondre à des automobiles arrêtées à l'entrée de l'hôtel, peut-être pour observer le phénomène de l'extérieur, et j peut-être à des automobiles arrêtées au feu rouge du carrefour.

On s'étonne de ne pas trouver de faisceaux à l'emplacement du chantier de la tour en construction en bas à gauche, puisque ces lumières puissantes suspectées par certains d'avoir été à l'origine du phénomène n'étaient pas encore éteintes lorsque Marcel Laroche a pris la photo. Mais d'après les témoins ces lumières n'étaient pas tournées vers le ciel, elles éclairaient le chantier... On devrait donc voir une zone éclairée plutôt que des lumières ponctuelles, et la zone du chantier correspond bien à une zone claire sur la photo :

Sur la photo aux contrastes améliorés, la position du chantier correspond à une zone un peu lumineuse

Enfin, le centre de convergence des faisceaux correspondrait à la zone où beaucoup de témoins étaient regroupés, et celle où se trouvait Marcel Laroche dans la reconstitution pour Canal D, c'est donc un emplacement assez plausible pour la prise de photo.

Voyons à quelle altitude serait la nappe de cristaux... L'écart entre les deux arbres illuminés les plus distants est de 37 mètres. L'angle entre les deux lumières correspondantes sur la photo est de 2,2°. La distance à laquelle est vu « l'objet » est donc égale à 37/tangente(2,2) = 960 mètres... Le haut de la nappe de cristaux est donc à la moitié de cette distance, soit 480 m, ou à 545 m du sol. Et son épaisseur doit être de 0,44 × 480 = 210 m, ce qui place le bas de cette nappe à 335 m du sol. On reste encore assez loin de la couche nuageuse, mais les témoins pouvaient avoir objectivement l'impression que l'objet se trouvait dans les nuages, puisque sa distance apparente était bien au double de celle de la nappe de cristaux : en toute objectivité, les faisceaux lumineux semblaient sortir d'un objet semi-circulaire de 37 mètres de diamètre stationnant à environ 1000 mètres du sol !

On peut enfin se demander si les lumières de la piscine n'ont pas tout de même joué un rôle... Elles ne sont pas visibles sur la photo de Marcel Laroche, mais il est bien possible qu'elles l'aient été visuellement, surtout avant la prise de cette photo alors que le phénomène était beaucoup plus lumineux. J'ai reproduit à peu près ce qui serait alors apparu aux témoins, d'après la disposition des 5 lumières des arbres et des 6 de la piscine :

Un demi-cercle de 5 lumières orangées pour les arbres à droite, et un demi-cercle plus petit de 6 lumières bleutées pour la piscineà gauche, avec le nord en haut et le sud à droite

Et ça évoque beaucoup les dessins des témoins, notamment celui d'Albert Sterling au lendemain de l'observation :

8 lumières et faisceaux vers l'extérieur

Il y avait selon ses dires 7 à 9 lumières, trois sur le côté droit et quatre sur le côté gauche... On n'est pas loin des 11 de la réalité, et ce sont bien celles côté droit, vers l'ouest donc, qui sont les plus grosses et les moins nombreuses. Dans son témoignage à Bernard Guénette un an plus tard, il a aussi mentionné que ces deux types de lumières avaient des couleurs différentes : oranges d'un côté, presque blanches de l'autre (les oranges seraient côté gauche, mais après un an il a pu inverser).

Et la plupart des témoins parlent d'un « cercle » ou « ovale » de lumières, mais distinguent bien deux côtés avec des lumières de taille différente. Les faisceaux externes sont aussi mentionnés par certains, notamment Line Saint-Pierre qui parle de lumières en entonnoir projetées à l'extérieur de « l'ovale », mais ils ne sont pas considérés comme faisant partie de l'objet.

Concernant l'altitude de la nappe de cristaux, on peut aussi mentionner le témoignage de Christian Page... Ce journaliste participe à de nombreuses émissions de radio et télévision consacrées au paranormal, et on lui doit en grande partie les deux principaux reportages sur ce phénomène. Il avait été alerté et s'était rendu sur place le soir-même, un peu tard pour assister au spectacle dont il n'a vu que les dernières lueurs, mais c'est justement ce qui rend son témoignage intéressant :

Le phénomène observé n'était pas à la verticale de la piscine, mais concentré, un peu plus vers le nord (vers la Place Ville-Marie), selon un angle de 70° (je le sais, j'y étais... Je suis arrivé vers 22 h 30. À ce moment-là le phénomène n'était plus qu'un faible halo dans les nuages, mais toujours visible).

Puisque Christian Page n'a vu qu'un faible halo localisé alors que les témoins présents plus tôt décrivent un ensemble de faisceaux lumineux couvrant une grande partie du ciel, on peut supposer qu'il ne restait plus que la lumière la plus visible, laquelle se situerait donc en direction de la place Ville-Marie au nord (le nord « montréalais », correspondant à l'ouest-nord-ouest pour le commun des mortels). Peut-être d'ailleurs est-ce la persistance de cette dernière lueur qui a fait dire à certains témoins que le phénomène s'était déplacé vers le nord à la fin.

Ce qui est intéressant, c'est que la place Ville-Marie abrite une haute tour (188 m) surmontée d'une des plus puissantes sources de lumière de la ville, que l'on appelle communément le « gyrophare de Montréal »... Il s'agit d'un ensemble de quatre projecteurs de 2500 watts chacun, émettant quatre faisceaux de lumière formant une croix horizontale ; l'ensemble est monté sur un plateau tournant effectuant un tour en 26 secondes, si bien que les faisceaux reviennent cycliquement tour à tour en moins de 7 secondes. Ce « phare » visible à des dizaines de kilomètres n'a pas d'utilité pratique, il symbolise le rayonnement de la Banque royale du Canada à laquelle il appartient.

Un phare dans la nuit

Les faisceaux eux-mêmes ne devaient pas interférer avec les cristaux qui se situaient nettement au-dessus, mais vus d'en haut, ces gros projecteurs doivent constituer une source de lumière bien visible, sans doute même la plus intense au voisinage de l'hôtel Bonaventure.

Le gyrophare se situe à 370 m de distance horizontale de la piscine de l'hôtel... Calculons donc à quelle hauteur angulaire serait vue sa réflexion sur une nappe de cristaux comprise entre 335 et 545 m d'altitude :

Schéma du pilier dû au gyrophare : 48 à 66° de hauteur angulaire

J'ai tout représenté à l'échelle. À gauche, la tour Ville-Marie avec le gyrophare au sommet, à droite l'hôtel avec l'observateur sur la terrasse ; en bleu, la nappe de cristaux réfléchissants, et tout en haut en gris la couche de nuages à 1040 m d'altitude.

Pour toute altitude a à laquelle se fera la réflexion, la hauteur angulaire sera égale à arc tangente ((2a−65−190)/370). On trouve que le pilier de lumière est visible entre 48 et 66° de hauteur angulaire, ce qui est bien proche des 70° indiqués par Page. Notons que le phénomène s'étant dissipé peu à peu, il est vraisemblable que la nappe de cristaux était de moins en moins épaisse, si bien que la lueur vue par Christian Page ne devait pas être très étendue en hauteur... Par contre, cette nouvelle lumière devait participer au phénomène vu durant la soirée, mais sortait du cadre de la photographie... Le phénomène devait être bien plus étendu que ce qu'on en voit sur la photo ! Il y a du reste d'autres projecteurs très lumineux sur la tour de la Bourse, qui se situe à peu près à la même distance et altitude que celle de la place Ville-Marie mais vers le nord-nord-est (le vrai !)

Notons que Christian Page rejette cette explication :

J'exclus toutefois (comme source) le gyrophare de la place Ville-Marie, même si, de la piscine de l'hôtel Hilton, le phénomène était plus ou moins dans cette direction. Le gyrophare de la Place Ville-Marie est composé de quatre grosses lumières (disposées en croix) qui fait un tour complet en un peu moins de 30 secondes (ce qui signifie qu'un de ces faisceaux balaie le ciel toutes les 7 secondes). Or le phénomène n'était pas affecté par ce balayage que je pouvais voir sur les nuages. Le phénomène était (de mon point d'observation) statique et tout à fait stable. Au fil des minutes, il a fini par être « avalé » par les nuages.

Vu d'une perspective de 60°, je ne suis pas sûr que la luminosité globale de ce phare varie beaucoup... Ce ne sont pas directement les faisceaux qui sont vus, mais la lumière diffusée par l'optique des projecteurs ou réfléchie par le toit de l'immeuble... Et puisqu'il y a quatre projecteurs émettant à angle droit, il y en a toujours deux qui sont vus en même temps et dont la luminosité globale doit rester à peu près constante (pendant la rotation, celle de l'un augmente pendant que celle de l'autre diminue) ; le tout largement « flouté » par la réflexion sur une multitude de cristaux à l'orientation variable, et avec une luminosité qu'on distinguait alors à peine sur le fond nuageux, je doute que la variation de lumière ait été sensible... En outre, l'apparition des faisceaux éclairant le ciel au même rythme, dans la même direction mais une trentaine de degrés plus bas, devait perturber la perception de la lumière... Bref vu la coïncidence de la direction et de la hauteur angulaire de la lueur vue par Christian Page, je persiste à penser que ce gyrophare géant en était l'origine.

Pour en terminer avec l'analyse de la photo de Marcel Laroche, je me suis demandé si par hasard on n'y voyait pas aussi des étoiles, ce qui serait plein d'enseignement... Même s'il est dit qu'il y avait un plafond nuageux à 21 h, il ne couvrait peut-être pas l'ensemble du ciel, et la photo semble bien montrer que la couverture nuageuse n'était pas uniforme...

Sur la reproduction diffusée par le Garpan, on voit bien quelques points blancs qui pourraient correspondre à des étoiles, et ceux qui sont situés à droite évoquent assez bien la constellation de Cassiopée, laquelle se trouverait dans cette direction si les lumières étaient celles de la piscine !

Photo du GARPAN, avec trois points blancs sur la droite

Mais on ne retrouve pas ces points sur l'autre photo que j'ai utilisée, et inversement une tache qui a l'air assez ponctuelle sur cette dernière photo ne se retrouve pas sur celle du Garpan... Malheureusement, ces reproductions sont de très mauvaise qualité et définition, en plus d'être comme on l'a vu recadrées. Nous avons maintenant une photo non recadrée, mais elle contient de nombreux points blancs ou noirs qui sont manifestement dus à des poussières sur le négatif.

Essayons tout de même de voir si l'un de ces points ne pourrait pas correspondre à une étoile... On peut noter qu'une étoile n'est pas fixe dans le ciel : elle effectue un tour en presque 24 heures, soit un déplacement de 15° par heure ou un quart de degré par minute... Le temps de pose étant d'une demi-minute, les étoiles se sont déplacées d'un huitième de degré sur la photo, ce qui doit correspondre à environ deux pixels au niveau du zénith. Un point lumineux laissé par une étoile serait donc légèrement étiré, dans la direction de la rotation de la voûte céleste.

Pour rechercher ces éventuelles traces d'étoiles, on peut utiliser le logiciel Stellarium... On se place à la position et à l'heure de Montréal (UTC-5, 21 h 10 à Montréal correspond donc à 2 h 10 TU le 8 novembre). On choisit de représenter le ciel en projection gnomonique (dite aussi « perspective » dans les options d'affichage), afin de reproduire la perspective d'un appareil photographique, centrée sur le zénith puisque l'appareil photo était dirigé à peu près vers le zénith. On affiche la grille aziumtale qui nous permettra de mettre la photo à l'échelle, et la grille équatoriale qui permet de visualiser le sens de déplacement des étoiles (dans le sens des parallèles de cette grille représentée en bleu). Ensuite, on fait pivoter le ciel pour que le nord soit orienté dans la direction correspondante sur la photographie, selon la position des lumières au sol. Il ne reste plus qu'à superposer cette carte du ciel avec la photographie, en plaçant le centre de convergence des faisceaux au zénith et en ajustant la largeur de la photographie, dont le champ est de 40°, pour être égale à celle du cercle de hauteur angulaire de 70° (20° de part et d'autre du zénith).

Voyons d'abord ce que cela donne en considérant que les lumières de la photo correspondent à celles de la piscine :

Photo superposée à la carte du ciel

J'ai bien cherché, et je n'ai rien trouvé à proximité des principales étoiles visibles...

Par contre, il y a une possibilité si on considère que les lumières sont celles des arbres :

Photo superposée à la carte du ciel, il y a une petite tache allongée à proximité de l'étoile Navi

On voit une petite tache allongée dans le bon sens (flèche bleue) juste un peu au-dessus et à droite de l'étoile Navi (gamma Cassiopée, qui n'a rien à voir avec les extraterrestres d'Avatar), et dans la portion du ciel qui semble un peu épargnée par les nuages... Mais on ne retrouve pas cette petite tache sur les autres reproductions de la photo de Marcel Laroche, et en l'absence de toute autre relation ça n'est pas probant. Peut-être qu'une reproduction de meilleure qualité permettrait d'en avoir le coeur net, mais il faut rappeler qu'en 1990 les scanners commençaient tout juste à se développer et n'étaient pas très performants : la station de traitement d'image dédiée utilisée par Richard Haines coûtait à l'époque de l'ordre de 20 000 $, pour traiter des images de seulement un mégapixels et avec comme on l'a vu tout de même des défauts. Quant au World Wide Web qui a popularisé Internet, il naissait tout juste, avec de grandes difficultés !

Comment une cinquantaine de témoins ont pu être abusés pendant trois heures ?

On peut s'étonner que tous les témoins présents sur la terrasse de l'hôtel aient pu être ainsi abusés aussi longtemps par un simple effet de réflexion...

Mais au fond, on n'en sait rien ! On ne connaît que quelques témoignages, et on sait que certains observateurs ont pensé à une réflexion de lumières sur les nuages puisqu'un policier a fait éteindre les projecteurs d'un chantier pour s'assurer qu'ils n'étaient pas en cause... Quant aux autres lumières extérieures à l'hôtel qui pourraient être responsables de réflexions, elles n'étaient pas visibles depuis l'hôtel.

Et le phénomène de piliers de lumière n'était pas très connu, à voir le temps qu'il a fallu pour que l'explication soit proposée. Des piliers de lumière doivent être assez fréquents dans des régions où il fait souvent froid, sans que tous ceux qui les voient connaissent l'explication, mais les piliers de lumière zénithaux, convergents, semblent très rares et mal connus, et même maintenant que tout le monde a des appareils photo sur soi et qu'Internet s'est développé on n'en trouve que quelques photographies... Cela, c'est d'une part parce qu'il faut se trouver à proximité d'une source de lumière intense pour les voir, et d'autre part parce que la plupart des gens portent rarement leur regard au zénith !

On connaît mieux les nuages éclairés par des faisceaux lumineux, en particulier depuis que les discothèques, notamment, utilisent les « sky trackers » pour attirer les clients de loin : des projecteurs à faisceaux multiples et souvent mouvants, qui peuvent dessiner diverses formes géométriques. Ils se sont multipliés justement dans les années 90, et ont été à l'origine de nombreuses observations d'ovnis allégués (certains ufologues n'ont pas manqué même d'imaginer des cas de « mimétisme » avec d'authentiques soucoupes volantes qui imiteraient les projections de sky trackers !) C'est donc naturellement à cela que les témoins pensaient, mais les piliers de lumière sont très différents : d'une part, la présence de nuages n'est pas nécessaire et n'augmente pas l'intensité du phénomène (on verra d'ailleurs que Richard Haines persiste avec la plus grande mauvaise foi à nier l'explication par des piliers de lumière en les assimilant à des réflexions dans des nuages, qui auraient dû s'intensifier au lieu de disparaître alors que la couche de nuages devenait plus dense et plus basse) ; et d'autre part, alors que les sky trackers forment des figures planes, comme des images projetées sur un écran, les piliers de lumière sont bien des figures en trois dimensions, dont la perspective se modifie lorsqu'on se déplace... En fait, tout se passe exactement comme s'il y avait un ensemble de tubes de lumière tronqués parfaitement verticaux, situés chacun précisément au-dessus de la lumière source.

Et enfin, toujours en comparaison avec les sky trackers, on pense intuitivement que pour que des lumières apparaissent dans les nuages, il faut des faisceaux dirigés vers le ciel... C'est pour ça que certains ont pensé que ces lueurs pouvaient s'expliquer par des projecteurs sur le chantier d'à côté, et que personne n'a imaginé que les lumières des arbres ou celles de la piscine pouvaient être responsables... Il s'agit encore d'une caractéristique propre aux piliers de lumière, qui sont des réflexions de lumières au sol par des nuages fins, et non des nuages épais éclairés par les lumières.

On peut alors se demander comment personne ne s'est rendu compte que ces faisceaux lumineux représentaient dans le ciel l'image des lumières de la piscine ou des arbres illuminés. Mais il faut rappeler que ces lumières centrales ne représentaient qu'une partie du phénomène : elles occupaient moins de trois degrés dans le ciel alors que l'ensemble du phénomène avait une dimension au moins dix fois plus importante, avec des sources de lumière qui n'étaient pas visibles depuis la terrasse de l'hôtel. On s'est simplement focalisé sur les lumières centrales parce que leur disposition particulière en demi-cercle suggérait le contour d'un objet... Mais il n'est pas du tout évident quand on est sur la terrasse de se rendre compte de cette disposition particulière des lumières, et d'ailleurs autant que je sache personne n'a remarqué cette similitude de disposition avant que sorte le reportage de Canal D, dix-sept ans après les faits, où on voit l'hôtel et sa piscine la nuit depuis un hélicoptère... Quant aux arbres, on les découvre à peine maintenant ! C'est un peu comme les pistes de Nazca, il faut les voir du ciel pour se rendre compte qu'elles forment des dessins !

Et s'il s'agissait de guirlandes lumineuses dans les arbres, on peut aussi s'étonner qu'on n'ait pas pensé à les faire éteindre : même s'il était difficile de penser que ces lumières diffuses pouvaient être à l'origine du phénomène en se reflétant dans le ciel, il devait paraître évident qu'en les éteignant on verrait mieux le phénomène ! Mais rappelons ce que dit Luc Morin, le policier de la G.R.C. : Ma première préoccupation était la sécurité du public. On avait un nombre inhabituel de personnes rassemblées sur la terrasse de l'hôtel, à côté d'une piscine, on comprend qu'éteindre les principales lumières éclairant la terrasse n'aurait pas été très bon justement pour la sécurité du public !

Ce qui me paraît plus difficile à admettre, c'est qu'avec une cinquantaine de personnes observant le phénomène pendant trois heures, aucune apparemment n'a eu l'idée de braquer le faisceau d'une lampe torche vers lui, peut-être même dans l'espoir d'obtenir une réponse des occupants de l'engin ! Quiconque aurait fait cela n'aurait pas manqué de constater qu'en pointant sa torche précisément à la verticale, vers le centre du phénomène, un nouveau point lumineux apparaissait dans le ciel, ce qui l'aurait au moins mis sur la voie de l'explication. Mais aussi surprenant que cela paraisse, le fait est que personne n'évoque une telle expérience... Pas un mot à ce sujet en particulier dans les rapports des policiers ni dans leurs témoignages ultérieurs, et pourtant on imagine que les policiers américains en service la nuit, que ce soit aux États-Unis ou au Canada, sont généralement équipés d'une traditionnelle Maglite !

Il y a donc de quoi être surpris, mais n'oublions pas que c'est toujours en raison de circonstances particulières qu'un phénomène rare peut devenir un ovni très médiatisé... Si les témoins avaient été un peu plus malins, le phénomène de la place Bonaventure serait devenu un OVI parmi bien d'autres !

Des ovnis dans tout Montréal

Il n'y a plus guère de doutes concernant l'objet vu sur la terrasse de l'hôtel Bonaventure, mais qu'en est-il des autres observations rapportées un peu partout dans Montréal ? Les lumières de la piscine ou des arbres étaient-elles suffisamment lumineuses pour avoir été vues par exemple par Pierre Caumartin à une douzaine de kilomètres de l'hôtel ?

Bien évidemment non ! Et je ne doute pas que certains ufologues pas très imaginatifs (parce que non, imaginer tout et n'importe quoi ça n'est pas faire preuve d'imagination !) n'hésiteront pas à penser que des tas d'authentiques ovnis ont profité de la présence du phénomène bien identifié au-dessus de l'hôtel Bonaventure pour se manifester sans trop se faire remarquer, en « parasitant » voire en « mimant » des piliers de lumière !

Mais il faut comprendre que les lumières de la terrasse de l'hôtel, qu'il s'agisse des spots de la piscine ou de guirlandes lumineuses dans les arbres, n'avaient rien de remarquable, et ne constituaient pas en elles-mêmes le phénomène à l'origine de l'ovni... Le phénomène, c'était la présence d'une nappe de cristaux de glace horizontaux, et il n'y a aucune raison qu'elle ait été localisée très précisément au-dessus de l'hôtel... Elle s'étendait sûrement sur tout Montréal, et même au-delà.

Et donc, toute personne située à proximité de lumières assez intenses devait assister à un phénomène similaire à l'ovni vu au-dessus de l'hôtel Bonaventure, pourvu qu'elle ait eu l'idée de lever la tête vers le ciel ! Et les sources de lumière ne manquent pas à Montréal, une des régions au monde où on consomme le plus d'électricité par habitant (plus du triple qu'en France) et où on ne s'en prive pas puisqu'elle est fournie en abondance par de l'énergie renouvelable (en particulier hydroélectrique)...

Passons donc en revue les témoignages ne provenant pas de la terrasse du Hilton Bonaventure... Un courrier du Centre national de recherche du Canada, s'appuyant sur le rapport de la G.R.C., indique :

L'objet fut observé le 90-11-07 entre 19 h 30 et 22 h au-dessus du quadrilatère occupé par les rues Mansfield, University, la Gauchetière et Saint-Antoine et plus spécifiquement au-dessus de la piscine de l'hôtel Bonaventure.

Ça semble indiquer que l'objet était visible en-dehors de l'hôtel, les quatre rues citées étant celles qui entourent directement l'hôtel (la rue University a depuis été renommée boulevard Robert Bourassa).

On connaît déjà par l'émission de Radio Canada un témoin qui dit avoir vu l'objet, prévenu par le portier à son arrivée, à l'entrée de l'hôtel :

En arrivant par taxi hier de l'aéroport, je m'avançais déjà, le portier me dit « regarde, on a une soucoupe volante qui est au-dessus de nous », j'ai regardé j'ai dit « voyons donc, ça n'existe pas ». Parce que y a un édifice en construction à côté, tout ça... De nouveau il m'a répété « regarde, elle descend », et puis on l'a vue, véridiquement, c'était une soucoupe volante...

Ensuite, il a rejoint les autres témoins sur le toit de l'hôtel. L'entrée de l'hôtel se trouve rue Mansfield, juste en face du chantier en construction qui devait être beaucoup plus éclairé que la terrasse de l'hôtel, mais c'est sans doute la disposition des lumières sur cette terrasse, donnant l'impression de faisceaux émis par un objet central à peu près circulaire, qui ont attiré l'attention de tout le monde sur les réflexions visibles juste au-dessus de l'hôtel.

Un autre témoin a été trouvé après vingt ans par Yann Vadnais du GARPAN... Je retranscris le début de cette interview réalisée le 23 août 2012, qu'on peut écouter ici.

Voici comment ça s'est produit... C'est que en compagnie de quelques amis, en soirée du 7 novembre 1990, nous arrivions de l'ouest, secteur du métro Georges-Vanier, dans la Petite Bourgogne de Montréal, et puis forcément on arrivait par la rue Saint-Antoine. C'était avec quelques personnes, quelques amis ensemble, qui allions prendre un verre ensemble, au centre-ville de Montréal.

Et puis à partir d'un certain moment on est arrivés au point de... enfin de la station de métro Place Bonaventure, on allait vers le nord, forcément, on allait sur l'avenue Sainte-Catherine, et puis avec des amis, on a commencé à bifurquer parce que on a aperçu des lumières qui scintillaient, de très grosses lumières qui scintillaient, au-dessus de la place Bonaventure. Entre... Interpellés un peu par les lumières, et puis parce que ça avait l'air quand même d'un événement assez disparate, on est revenus sur nos pas sur la rue de la Gauchetière, et puis forcément en allant vers l'est un peu, en marchant du côté du trottoir nord, parce qu'on avait voulu monter vers le sud sur la rue de la Cathédrale, on a commencé à marcher sur le trottoir nord évidemment de la rue de la Gauchetière, et forcément vu d'un peu plus proche, enfin de manière un peu plus visible les lumières qui scintillaient au-dessus de la place Bonaventure. Ça semblait quand même assez élevé, mais pas assez élevé évidemment pour que ça soit par exemple hors d'atteinte.

Y avait quand même quelques témoins qui se promenaient, flânaient, qui pointaient du doigt vers, au-dessus de la place Bonaventure, forcément, dans le ciel, et puis ça nous avait interpellés, et puis mais il semblait y avoir beaucoup d'incrédulité chez les témoins, beaucoup de... enfin de désarroi, parce que ça avait l'air d'être un événement qui était… enfin ce que je veux dire c'est que personne ne riait de ça. Alors qu'on sait que dans la foule généralement il peut y avoir beaucoup de dérision face à certains événements, beaucoup de... enfin de, de moquerie, mais là les gens pointaient du doigt au-dessus de la place Bonaventure, et puis c'est là qu'on a vu plus précisément, enfin ce qu'on pouvait voir dans le ciel c'était des lumières qui scintillaient. Et c'est resté sur place, ça ne bougeait pas.

Forcément, la question à se poser c'était est-ce que c'était des réflecteurs de la place Bonaventure, ou de la place Ville Marie qui est pas tellement loin, mais ça collait pas. Ça ne collait pas, et puis on est, on a continué à marcher, mais moi avec les amis avec lesquels j'étais, forcément c'est que les gens voulaient pas nécessairement s'attarder, et puis on a continué à marcher pendant un certain temps, pendant une minute ou deux, y avait des gens qui passaient qui ont été vers le même endroit. Moi ça m'a rappelé les images du Moyen-Âge par exemple en Europe particulièrement, les gens, des fresques sur certains bâtiments au Moyen-Âge évidemment, où ce que des gens montraient dans le ciel, pointaient vers le ciel, on a continué à marcher et puis ça continuait à scintiller et comme j'ai dit ça restait sur place, ça ne bougeait pas, et moi rentré chez moi le soir...

YV : D'abord, vous étiez combien votre groupe ? Quelle était la réaction des gens dans le groupe ?

Ben on était quand même, on était éparpillés, parce qu'on était quand même une vingtaine de personnes qui se sont donné rendez-vous, évidemment pour aller passer une petite soirée dans un bar, prendre un verre, je me souviens que c'était même l'anniversaire d'un ami, c'est peut-être pour ça qu'on était nombreux.

Et la réaction des gens avec qui j'étais comme j'ai dit était une réaction de mélange de consternation et de blocage : « ça ne peut pas être ça ». Le 1000 la Gauchetière, c'est ça évidemment était à ce moment-là en construction. Donc évidemment c'était pas l'idée de regarder les gens pointer vers l'édifice en construction quand même, fallait pas être naïf : non, les gens pointaient au-dessus de la place Bonaventure. Et moi ce que je savais pas c'était pas clair c'est qu'il y avait quand même une piscine, et moi j'étais revenu à la maison ce soir-là en fin de soirée, j'avais lu les nouvelles de fin de soirée — en 1990 LCM et R?? ça n'existait pas, alors c'est les canaux traditionnels qu'on avait, Réseau Canada, ou en anglais Fox News etcetera — , puis ce que j'avais appris par la suite c'est que l'objet lui-même s'était déplacé vers l'est de l'île de Montréal, c'est-à-dire centre-sud jusqu'à la maison ??, et par la suite avait bifurqué. Mais ça je l'ai pas vu personnellement, mais moi ce que je peux confirmer c'est simplement ce que j'ai vu au-dessus de la place Bonaventure, et puis lorsqu'on est arrivés nous à l'endroit où on allait par la suite sur la rue Sainte Catherine, ça a parlé un peu, mais avec une gêne énorme, vraiment énorme. Un peu comme si les gens avaient été... On était pas des gens excessivement vieux, et y en avait même un peu plus jeunes avec nous, dix-huit ans et tout, puis comme je l'ai dit il y avait quand même une gêne, une espèce de malaise, chez les garçons et les filles, évidemment, ce qui faisait que les gens n'étaient pas enclins à vouloir en parler ouvertement, à penser de poser la question, donc on est pas restés plus de trois à quatre minutes.

Suit un long passage où le témoin s'appesantit sur le « blocage » de ses amis... Ça nous permet de remarquer que ce sont souvent les personnes particulièrement sensibilisés aux ovnis qui témoignent... Ici, le témoin dit avoir lu beaucoup de livres sur la question, par exemple ceux de von Däniken qui est persuadé que les extraterrestres nous visitent depuis des millénaires... Et il s'étonne que les autres témoins du groupe n'ont pas eu envie de parler de « ça » (sous entendu, du vaisseau extraterrestre, puisqu'il est clair que pour lui il ne pouvait pas s'agir d'autre chose), ne trouvaient pas utile de rester plus de quelques minutes, et que plus tard l'un d'eux ne garde aucun souvenir de son observation... Alors, bien sûr, on peut imaginer un blocage induit télépathiquement par le phénomène... Ou bien, que pour la plupart des témoins il n'y avait pas de vaisseau extraterrestre, mais juste un phénomène lumineux dû à une réflexion de lumières sur les nuages ou quelque chose dans ce genre, même s'ils n'avaient pas l'explication exacte ça les intriguait mais sans plus, et ça ne les amenait pas à s'interroger sur des visites extraterrestres !

Le témoignage est accompagné de ce dessin :

Cercle avec trois rayons à l'intérieur, légende : Fluctuation irrégulière aléatoire ?

Ça ne nous éclaire pas beaucoup sur l'aspect du phénomène, évoqué de façon très vague dans le témoignage, mais de toute façon on ne peut guère se fier à une description faite après plus de vingt ans... Intéressons-nous plutôt au déplacement du groupe, indiqué précisément :

Déplacement des témoins sur le plan

Les témoins ont aperçu l'objet alors qu'ils passaient au niveau de la station de métro Bonaventure, donc juste derrière le chantier de la tour en construction... Ils se dirigeaient vers la rue Sainte Catherine, mais ont fait demi-tour pour mieux observer le phénomène qui restait fixe au-dessus de la place Bonaventure, et ont suivi la rue de la Gauchetière.

Il semble donc qu'il y ait eu un grand nombre de témoins aux abords de la place Bonaventure, sans doute du fait du rassemblement de témoins sur le toit et de la rumeur qui s'est répandue jusqu'à l'extérieur. Que les lumières présentes sur le toit de l'hôtel aient été les seules responsables de toutes ces observations reste discutable, mais avec plusieurs milliers de watts de guirlandes lumineuses c'est plus plausible qu'avec les simples spots éclairant le fond de la piscine !

Ailleurs, tout le monde n'a pas eu l'idée de lever la tête vers le ciel, mais certains l'ont fait, par exemple Bernard Guénette qui est à l'origine de la principale enquête. Relisons son témoignage :

À 19 h 30 un des auteurs, âgé de 34 ans (B. G.) et un certain M. P. Lachapelle, âgé de 30 ans, étaient dans le Vieux Montréal, marchant près de l'angle des rues Saint-Sulpice et de Brésoles à une dizaine de pâtés de maisons à l'ESE du HB. Ils remarquèrent de nombreux camions de pompiers, voitures de police, et d'autres véhicules d'urgence ainsi que de l'agitation à proximité qui bloquaient partiellement la route ; un exercice d'alerte incendie était en cours. Guénette a porté son regard directement en haut et a vu un petit phénomène verdâtre de type aurore boréale avec de longues flammèches s'étendant vers l'extérieur ; cela ne bougea pas durant les 30 à 60 secondes qu'il regarda. Les deux hommes ont estimé que le phénomène était à très haute altitude.

En fait, ce lieu se situe à 950 m au nord-est de l'hôtel, et pas à l'est-sud-est... Haines et Guénette ont visiblement adopté la convention traditionnelle concernant l'orientation de la ville à Montréal : ce qu'on appelle l'est est en fait le nord-nord-est, par référence au cours du fleuve Saint-Laurent considéré comme allant de l'ouest vers l'est ; il apparaît que la plupart des témoins font de même, mais dans un rapport à diffusion internationale et en langue étrangère à la région il aurait été bon de le préciser.

Ça n'étaient certainement pas les lumières de la piscine ou des arbres que MM. Guénette et Lachapelle voyaient se refléter dans la couche de cristaux, ni d'autres lumières émanant de la place Bonaventure, mais plutôt bien sûr celles des « nombreux camions de pompiers, voitures de police, et d'autres véhicules d'urgence » qui participaient à un exercice d'alerte incendie juste à côté d'eux ! Et tout comme à l'hôtel Bonaventure, cela se traduisait par un phénomène parfaitement immobile « directement en haut » formant des « flammèches s'étendant vers l'extérieur » ! Avec des lumières bleues, orange et jaunes, le mélange devait paraître à peu près vert, outre le fait qu'au Québec des gyrophares verts peuvent être utilisés sur les véhicules d'urgence destinés à servir de poste de commandement et de coordination des interventions.

Guénette a estimé la dimension du phénomène à un ou deux centimètres à bout de bras... Avec une nappe de cristaux débutant à à 335 m du sol, cela correspond à une dimension au sol de douze à vingt-cinq mètres, guère supérieure à la taille du carrefour : contrairement à la plupart des témoins, Guénette, graphiste et habitué à collecter des témoignages d'ovnis, n'a pas exagéré les dimensions de ce qu'il a observé !

Un autre témoignage intéressant se trouve dans le rapport de la G.R.C. :

Le témoin a appelé le lendemain de son observation :

Elle dit que la veille vers 20 h 15 elle circulait sur le Boul. Champlain et ensuite devant le terrain de l'hôpital Douglas. Elle était accompagnée de sa fille.

Elle a vu deux gros phares blancs dans le ciel à travers le brouillard qui ne semblaient pas trop avancer, pensant que c'était un avion. Cette affaire-là ne faisait aucun bruit. Lorsqu'elles furent rendues au niveau de l'hôpital, elle a vu de petites lumières dans le ciel. Elle ne se rappelle pas de quelles couleurs elles étaient.


Le lieu d'observation est à 7 km au sud-sud-ouest du HB, et même presque au sud...

Cette fois, on peut douter qu'il s'agisse d'un pilier de lumière zénithal, puisqu'il est tout à fait impossible de voir un objet proche du zénith en conduisant une automobile ! Mais rappelons-nous que les piliers de lumière sont vus bien plus fréquemment bas sur l'horizon, d'où d'ailleurs leur nom. Et il ne s'agit pas d'accumuler les coïncidences, puisque ce sont les mêmes nappes de cristaux de glace qui peuvent selon les circonstances de l'observation refléter des lumières au zénith ou près de l'horizon. Deux gros points lumineux blancs et plus tard un certain nombre de lumières plus petites qui restaient immobiles, ça pourrait bien évoquer différentes lumières de la ville se reflétant dans les cristaux : la nappe de cristaux n'atteignait pas le sol, les piliers de lumière étaient donc détachés des lumières source, lesquelles n'étaient vraisemblablement pas visibles, masquées par les bâtiments de la ville.

Le cas est encore plus évident avec cet autre  témoignage du rapport :

Un certain Pierre Caumartin, 31 ans, dit qu'alors qu'il rentrait chez lui en voiture en revenant du travail entre 22 h 30 et 23 h 00, il a vu des « lumières très bizarres, un étrange objet lumineux en forme de boomerang, ... bas dans le ciel, ... à peu près au niveau des nuages ». Ces lumières étaient « très grandes et fortes ». Il pensait que cela pouvait avoir illuminé l'intérieur de sa voiture. En arrivant près de son domicile dans la partie est de Montréal, non loin de la base militaire de Longue-Pointe, il vit l'objet en vol stationnaire à proximité de la centrale électrique Hydro-Québec de Longue-Pointe, qui reçoit 120 000 volts. Quand il est sorti de sa voiture il a entendu un bruit de « ronronnement » et a pensé que l'objet était un dirigeable dont seule la gondole (nacelle) était visible sous la base des nuages. Son observation totale a duré de dix à quinze minutes.

Et il a fait ces deux dessins correspondant aux deux phases de son observation :

objet (lumières) se déplaçant lentement vers l'est

faisceaux lumineux et objet dans les nuages

Caumartin se trouvait à la fin de son observation à l'angle de l'avenue Saint-Donat et du boulevard du Roi René, à 12 km au NNE de l'hôtel Bonaventure (ou à l'ENE, comme écrit dans le rapport HG, selon les conventions montréalaises). À noter que la centrale électrique dont il est question est celle qui a subi une panne un peu plus tard dans la nuit (après 23 h). D'autre part, il précise à Guénette que l'objet avait une dimension apparente de 8 à 10 cm à bout de bras, soit un angle d'environ 11°.

Et dans le documentaire Canal D :

Revenant chez lui vers 23 h, Pierre Caumartin va lui aussi apercevoir l'objet.

Traduit de l'anglais : « j'ai vu un objet étrange, juste au-dessus de la tour illuminée du stade olympique. L'objet se déplaçait dans le même sens que moi en direction est. Il paraissait très gros, et je suis sûr que ce n'était pas un dirigeable. Je ne sais pas ce que c'était, je n'ai jamais rien vu de pareil. »

Caumartin croit avoir affaire à un engin promotionnel bordé de puissants projecteurs.

« Les lumières étaient très puissantes, très grosses. C'est à partir d'ici que j'ai commencé à entendre le bruit que faisait l'objet. C'était comme une modulation, c'était très rythmé. L'objet se déplaçait aussi de façon très étrange, il demeurait immobile un instant, puis glissait d'un seul coup un peu plus bas.
 »

Et encore plus tard, en 2017, il a été interviewé par Philippe-Emmanuel Faure du Mufon-Québec :

Et donc l'objet à ce moment-là s'est mis à se déplacer... Lentement... C'est pas parti en fou, apparemment les témoins ils disent l'objet s'est mis à se déplacer à une vitesse assez lente, et moi où j'ai aperçu l'objet c'est carrément en arrivant... enfin presque arrivé à l'intersection boulevard Pie IX et Notre-Dame. Je me dirige toujours vers l'est. Alors j'ai pu apercevoir l'objet à travers les bâtiments parce qu'on voit le mât du stade, et de par la perspective qui m'était offerte j'ai dit « ouille, c'est gros ça, c'est pas petit... C'est gros ça ». C'était énorme parce que c'était presque aussi gros que le stade... De mon point de perspective, bon c'était peut-être une illusion d'optique, peu importe. Et non ça n'est pas une aurore boréale comme le type de... Environnement Canada... J'ai vu des aurores boréales, ce n'était pas une aurore boréale, c'était un objet en déplacement, silencieux jusque là, parce qu'à un moment donné je vais apprendre plus tard que, y a eu du bruit à un moment donné, mais silencieux pour les gens de l'hôtel Bonaventure et silencieux pour d'autres témoins à mi-course, parce que là bien sûr j'arrive à ladite intersection Pie IX et Notre-Dame, et tout le monde est sorti de ses véhicules... Les gens n'avaient pas de panique, y avait pas, y avait personne qui disait « wow, un ovni »... Mais tout le monde est sorti de son véhicule, bon en stationnement, et puis on a même échangé, alors les types qui allaient vers l'ouest, moi vers l'est, des gens qui coupaient vers le sud... « C'est quoi ça ? » Et là on est tous arrivés à un consensus, c'était énorme, c'était quelque chose de gros. Et moi je travaille dans le cinéma, et la lumière, si vous connaissez un peu les lumières, mais la lumière qui émanait de l'objet en tant que tel, ça me faisait beaucoup penser à des daylight, de chez HMI [projecteurs puissants]. Même que la première chose qui m'est passée à l'esprit « bon, c'est quoi ce truc ? », parce que encore une fois je pensais pas aux ovnis, j'ai dit « ah, ça doit être un immense blimp [dirigeable], et ils ont mis des ?? tout le tour, et puis »... Mais la forme n'était pas particulièrement facile... Imaginez un puissant projecteur de cinéma, qui projette une lumière bleutée, mais très loin et très brillante, alors j'ai dit « c'est peut-être ça c'est peut-être un blimp sur un truc de tournage », je sais pas, j'avais aucune idée, mais alors en repartant, j'ai fait signe à tout le monde, « bonne soirée, bonne soirée tout le monde », en repartant ben là je vois que l'objet continuait à se diriger vers l'est et là, pouvait être parfaitement statique, ce qui déjà au départ est très louche, tu sais un objet de cette forme-là... Ben voyez du point de vue où je suis je vois pas très bien parce que je suis de côté, je vois pas l'objet, mais je dénote qu'en dessous il y a de l'activité lumineuse, mais c'est surtout sur les côtés que je vois des points bleus, des lumières qui projettent quand même assez loin, alors je continue de suivre et puis je me rends compte qu'effectivement l'objet se déplace pas comme un dirigeable le fait, mais l'objet changeait de plan en l'air mais comme ça... Autrement dit il pouvait être parfaitement fixe, pas de son, allô, c'était déjà une question 1, question 2, oui il changeait de palier mais sans sortir des nuages, je me rendais compte très bien qu'il remontait un peu plus haut, mais toujours rectiligne... Bon... J'ai pas pris d'alcool, j'ai pas fumé de drogue... De ma position je juge que l'objet était environ au niveau de la base militaire de Longue-Pointe. Qui d'ailleurs y a un effet assez intéressant qui est à souligner à cet effet-là... Alors j'imagine qu'il est là, et là l'objet est stationnaire, mais là il se met comme à piquer du nez mais changer d'angle, puis il monte puis il revient ??... Alors je me rends compte que l'objet plus je le regarde au plus je me rends compte que c'est probablement quelque chose de presque triangulaire si vous voyez ce que je veux dire, mais gros, et toujours ces éclairages-là surtout c'est quand il piquait du nez un petit peu et là je les percevais très bien à travers les nuages. Et l'objet restait stationnaire là en bougeant un peu et à ce moment-là j'ai entendu un ronronnement. Comment le décrire, c'est un ronronnement avec, c'est un rip, rrr rrr rrr rrrr, ça faisait ça... Et puis j'avais jamais rien entendu avant. Et là ma cigarette était terminée puis je me suis dit « ben voyons donc » ! Bon, et... c'est tout ! Y a rien qui se passait, et puis à un moment donné hop il se déplaçait un peu plus à la gauche, un peu plus droite là, gauche là, mais toujours dans les nuages, un espèce de position, comme si je sais pas, comme si quelqu'un cherchait à et surtout quand je l'ai vu au-dessus du stade olympique, c'était... Gros, c'était vraiment hors proportion de tout ce que je connaissais, j'ai jamais vu rien de tel.

Essayons de remettre un peu d'ordre dans ce témoignage, en gardant à l'esprit qu'il a été fait après un an pour le rapport Haines-Guénette, après seize ans dans le cas du documentaire, et après vingt-sept ans dans l'interview du Mufon ! On verra d'ailleurs qu'il y a pas mal d'incohérences dans les déclarations successives de Pierre Caumartin, et il ne faut pas s'en étonner. Il est intéressant de voir l'évolution de sa perception de l'objet : à Guénette, il dit qu'il « a pensé que l'objet était un dirigeable dont seule la gondole (nacelle) était visible sous la base des nuages »... À Christian Page quinze ans plus tard, il dit « je suis sûr que ce n'était pas un dirigeable. Je ne sais pas ce que c'était, je n'ai jamais rien vu de pareil. », et au Mufon encore une dizaine d'années plus tard : « d'avoir vu ça ça rend ouvert l'esprit large comme ça, parce que je me dis, allô, et j'ai vu aucun véhicule volant capable de faire les prouesses que j'ai vues ce soir. ».  Et dans cette dernière interview il fait le lien entre son observation et celle de l'hôtel Bonaventure où « les témoins disent que l'objet s'est mis à se déplacer à une vitesse assez lente », ce qui est on l'a vu très contestable... Bref après avoir parlé avec Guénette, vu tous les documentaires sur cette observation, il est persuadé qu'il y a une véritable continuité entre l'observation collective à l'hôtel Bonaventure et la sienne, six kilomètres plus loin vers « l'est montréalais » : pour lui, il s'agit du même objet qui s'est déplacé d'un point à un autre, alors que tout indique le contraire.

Voyons quel a été le déplacement de Pierre Caumartin en rentrant chez lui, et où se situent les deux phases de son observation :

positions successives du témoin, du stade olympique et de la centrale électrique

Lors de la première, au carrefour du Boulevard Pie-IX et de la rue Notre-Dame Est, il a vu « un objet étrange, juste au-dessus de la tour illuminée du Stade olympique »... Tour qui est elle-même visible depuis ce carrefour... Voici de quoi il s'agit :

le stade olympique la nuit

Crédit : Norbert Tissier, photographe

stade olympique la nuit vu du ciel

Cette tour de 165 mètres de hauteur, la plus haute tour inclinée au monde, est une des fiertés de Montréal. Sa plate-forme longue d'une quarantaine de mètres est entourée d'un « diadème » de lumières, une cinquantaine de lampes éclairées dès que la nuit tombe, qui en fait une des sources de lumières les plus puissantes de la ville... Voilà de quoi faire un ensemble de piliers de lumière très spectaculaire « juste au-dessus » !

Rappelons que Caumartin a vu un objet en forme de boomerang ou de triangle, complètement entouré d'une multitude de projecteurs... Ça évoque plutôt bien la forme de ce « diadème » lumineux, même en l'imaginant sous une perspective très inclinée :

Répartition des projecteurs, formant un triangle, au sommet de la tour

À une distance de 1,9 km, cet ensemble de lumières était vu sous une largeur apparente de 1,2 cm à bout de bras, soit deux fois et demie le diamètre le la lune, pour une longueur des faisceaux sans doute encore supérieure, dépendant de l'épaisseur de la couche de cristaux de glace. Caumartin estime pour sa part la dimension de l'objet à 8 ou 10 cm à bout de bras, ça reste une exagération courante. De même, la hauteur angulaire du phénomène lumineux dépend de l'altitude de cette couche de cristaux... Si elle était de 550 m, « l'objet » se trouvait à une trentaine de degrés au-dessus des lumières de la tour.

Pour tenter de reproduire les piliers lumineux que pourraient produire ce diadème, j'ai isolé les lumières de cette image sous forme de points blancs sur fond noir, fait pivoter l'image de 90° pour avoir à peu près la direction de vision depuis le carrefour, appliqué une symétrie verticale et comprimé l'image en hauteur pour avoir une vue en miroir et sous une perspective très inclinée, et appliqué un flou de mouvement vertical important... Voilà le résultat :

Ensemble serré de piliers lumineux

Ça n'est bien sûr qu'une reconstitution très approximative des piliers de lumière, mais elle donne une idée du spectacle formé par un tel ensemble. Caumartin décrit de son côté des faisceaux émis vers le bas par des points lumineux. Ça rappelle un peu le principal faisceau sur la photographie de Marcel Laroche, et cela pourrait trahir une concentration de cristaux plus importante en haut du pilier. Cela peut se produire, comme ici :

Piliers de lumière présentant un renflement en haut

Photo de Tatu Räti sur 500px.com

La seule anomalie est le fait que Caumartin ait dessiné les « faisceaux » en éventail sous l'objet deviné, et non tous verticaux, mais pour un témoignage fait après un an ça n'est pas surprenant. Il a d'ailleurs pu être influencé par les témoignages de l'hôtel qui eux se rapportaient à des piliers de lumière zénithaux, donc convergents.

Sur une reconstitution de l'observation faite par le Mufon-Québec en 2017, on voit même des faisceaux partir de tous les côtés :

Vaisseau triangulaire avec une grosse lumière rouge au centre et des faisceaux s'écartant tout autour, avec la tour du stade olympique dessous

Mais là on s'éloigne beaucoup de ce que Caumartin lui-même avait dessiné un an après son observation dans le rapport Haines-Guénette, et il semble surtout qu'on ait voulu mélanger la description de Caumartin avec celles de l'hôtel Bonaventure, mâtinées d'une bonne dose de « triangle belge » qui était à la mode à l'époque ! La seule chose conforme aux dires du témoin c'est que l'objet se trouvait juste au-dessus de la tour du Stade olympique... Il peut d'ailleurs paraître étonnant que Pierre Caumartin n'ait pas compris que ce qu'il voyait était l'image des lumières de la tour du stade, mais cette tour n'est visible que très furtivement en passant dans le carrefour :

On aperçoit la tour seulement dans le carrefour

Ça suffisait pour voir que l'objet lumineux était juste au-dessus, mais une trentaine de degrés plus haut tout de même, il n'était pas évident de lier les deux...

On ne sait pas trop si Caumartin s'est arrêté dans ce carrefour... Il l'affirme dans son interview 27 ans après l'observation, disant même que tout le monde s'était arrêté et discutait du phénomène, mais bizarrement il ne le mentionnait pas du tout cela ni dans son entretien avec Bernard Guénette, ni dans celui avec Christian Page... Cet épisode de papotage entre témoins serait du reste difficilement conciliable avec la durée totale de l'observation de dix à quinze minutes indiquée dans le rapport Haines-Guénette, alors qu'il fallait déjà une dizaine de minutes pour que Caumartin effectue le trajet de ce carrefour à chez lui, où il a continué à observer l'objet pendant la durée d'une cigarette ! Et du reste alors que de nombreux témoins de la terrasse de l'hôtel Bonaventure se sont manifestés depuis, il n'y en a eu aucun parmi ceux qui auraient observé l'objet depuis ce carrefour. J'ai donc tendance à penser qu'il s'agit là d'un embellissement tardif du récit de Caumartin, et que ce dernier a aperçu l'objet pour la première fois en passant dans ce carrefour sans s'arrêter.

Ce qui apparaît en tout cas, c'est que l'objet se déplaçait en même temps que lui, en direction est... Ça évoque assez la classique illusion de « boule suiveuse », lorsqu'un objet immobile paraît se déplacer en même temps que soi parce qu'on le croit beaucoup plus proche qu'il ne l'est en réalité. Caumartin pensait sans doute que ce qu'il observait était bien plus proche que les 2 km de la tour du stade olympique, et donc il le croyait en déplacement : L'objet se déplaçait aussi de façon très étrange, il demeurait immobile un instant, puis glissait d'un seul coup un peu plus bas. Caumartin insiste sur ces changements de palier, qui évoquent tout à fait les changements d'altitude de l'objet observé à l'hôtel Bonaventure : une nappe de cristaux n'est pas uniforme et se déplace avec le vent, il en résulte donc des variations de l'altitude et de la densité de la couche réfléchissante, si bien que « l'objet » semble monter et descendre tout en restant rigoureusement dans la direction de la source.

Ça n'est qu'arrivé près de chez lui, à l'angle de l'avenue Daunat et du boulevard Roi René, qu'il a revu l'objet ; il s'est alors arrêté et est sorti de sa voiture le temps de fumer une cigarette. L'objet était alors lui aussi immobile, dans la direction de la station électrique qui est encore à peu près celle du stade olympique. C'étaient donc sans doute toujours des piliers de lumière associés à la tour qu'il voyait... La tour était alors distante de 5 km, le phénomène devait présenter en largeur le diamètre de la lune, et plus en hauteur. Notons que dans sa toute récente émission sur Radio x-files, dont je parlerai à la fin, Christian Page dit que Caumartin a continué à observer le phénomène depuis chez lui : « Donc il est monté dans son appartement il regarde par la fenêtre et voit cet objet qui s'éloigne légèrement et puis il va disparaître à se vue ». Mais je n'ai rien trouvé de tel dans aucune de ses déclarations, et c'est surtout incompatible avec les indications du rapport Haines-Guénette : En arrivant près de son domicile dans la partie est de Montréal, non loin de la base militaire de Longue-Pointe, il vit l'objet en vol stationnaire à proximité de la centrale électrique Hydro-Québec de Longue-Pointe, qui reçoit 120 000 volts. Quand il est sorti de sa voiture il a entendu un bruit de « ronronnement » et a pensé que l'objet était un dirigeable dont seule la gondole (nacelle) était visible sous la base des nuages. Son observation totale a duré de dix à quinze minutes.

Quand au bruit de ronronnement rythmé que Caumartin a entendu à ce moment-là, c'est vraisemblablement un bruit quelconque associé par erreur à l'objet... Ce dernier n'a pas bougé pendant cette phase de l'observation, il n'a pas disparu, c'est le témoin qui est parti après avoir fini sa cigarette, il n'y a donc rien qui permette de dire que le bruit « suivait » l'objet, il provenait juste à peu près de la même direction fixe.

Dans son interview par le Mufon, Pierre Caumartin réfute catégoriquement l'hypothèse des piliers de lumière :

— Et vous étiez certain que c'était solide, c'était physique ?

— Oui. Oh oui oui, c'est clair et net, c'était une structure sur laquelle il y avait des multi projecteurs d'éclairage. Et c'était quelque chose de solide, c'était pas une aurore boréale.

— Avez-vous déjà entendu parler d'un phénomène qui s'appelle des piliers lumineux ou des piliers lumineux zénithaux ? J'aimerais que vous regardiez ces photos...

— Ah, oui j'ai déjà vu des photos comme ça, et non ça a rien à voir avec...

À propos de photos de piliers de lumières normaux, près de l'horizon :

— Alors ça, c'est bien entendu, ça a rien à voir avec ce que j'ai vu, ça fait très aurore boréale, ça doit être un phénomène de diffraction ou de... Bon...

Puis en voyant la pilier zénithal de Belgique :

— Puis ça bon c'est ce qui ressemble le plus à mettons un vaisseau en déplacement... Non c'est pas ça que j'ai vu, non. C'est plus carrément, comme si les projecteurs avaient des lentilles. Ça ça a l'air... Avoir vu ça j'aurais dit ça c'est un phénomène physique, chimique ou lumineux quelconque... Je réfute. Non sérieux je réfute, et d'ailleurs tous ceux qui l'ont vu vous diraient probablement la même chose, à moins que... Là il montre la photo de l'hôtel Bonaventure... Ceux qui avaient ce point de vue-là, de la place Bonaventure, moi à regarder ça
[la photo de Belgique] je peux faire le lien facilement, quand je prends votre photo ben oui...

— C'est ce que les Français et Belges ont dû faire.

— Ben vous direz à vos Français et à vos Belges que ce n'est pas ça... Il fallait être là, il fallait être là, non sérieusement il fallait être là, et puis j'y étais. J'ai vu, et puis si les gens autour du rond-point Pie IX et Notre-Dame étaient présents dans la salle ici ils vous diraient à tous les deux non, c'était un objet, on l'a tous vu... C'est clair et net. Y a vraiment pas de possibilité d'arnaque, aurore boréale... J'ai vu des aurores boréales dans ma vie, et puis oui, la lumière peut jouer des drôles de tours, et puis même chose avec les nuages, même chose... Mais ça non, c'était vraiment... Eh bien écoutez même mon patron pense que je suis un malade mental quand je parle de ça, lui dans sa tête c'est... Ben non. Les gens sont comme ça, c'est la nature humaine, mais d'avoir vu ça ça rend ouvert l'esprit large comme ça, parce que je me dis, allô, et j'ai vu aucun véhicule volant capable de faire les prouesses que j'ai vues ce soir.


Bon, il est prêt à admettre que les témoins de l'Hôtel Bonaventure ont vu des piliers de lumière zénithaux, parce qu'il ne peut que constater la similitude d'un tel phénomène avec la photo qui a été prise, mais lui c'est sûr ce qu'il a vu ça n'est pas des piliers de lumière... Dame, depuis près de 30 ans il est persuadé d'avoir observé quelque chose d'extraordinaire... Mais les Français et les Belges trouvent tout de même remarquable que l'objet vu par Pierre Caumartin se soit trouvé juste au-dessus de la source de lumière la plus intense que pouvait voir le témoin et dont la forme est aussi très remarquable... Coïncidence sans doute.

Il y a aussi au moins un pilote d'avion qui a vu « l'objet », d'après le rapport Haines-Guénette :

M. Jules Béliveau, 48 ans, le deuxième journaliste de La Presse qui était présent sur le toit du HB le 7 novembre, a reçu une lettre datée du 8 novembre 1990, d'un certain M. François Chevrefils qui disait que son ami (M. Jean ___) avait vu l'objet à un moment entre 19 h 30 et 20 h 00 depuis son petit avion. Bien qu'il ait rempli un formulaire d'observation du MUFON il a refusé toute interview et n'est peut-être pas le pilote du petit avion qui a été vu.

Un témoignage très indirect donc, on ne sait pas vraiment ce qui a été vu, et le rapport d'observation du MUFON est autant que je sache introuvable... Mais dans tous les cas il y avait des nappes de cristaux réfléchissants dans le ciel, rien d'étonnant à ce qu'un pilote d'avion ait vu lui aussi un phénomène lumineux.

On a un autre témoignage de pilote (à moins qu'il ne s'agisse du même) mentionné par Claude Lafleur dans le Québec sceptique n° 18 :

En outre, un pilote d'avion qui réalisait un atterrissage à Dorval au cours de la soirée du 7 novembre prétend avoir aperçu l'objet et estime l'altitude de celui-ci à quelque 8 000 pieds (app. 2,5 kilomètres).

On aimerait connaître la hauteur angulaire et la direction de l'objet plutôt que l'altitude estimée qui a toutes les chances d'être complètement fausse, que le témoin soit pilote ou pas ! Vu que l'avion était en train d'atterrir, il était proche du sol et donc sous la couche de cristaux, le pilote a sûrement vu lui aussi des piliers de lumière classiques près de l'horizon, les sources de lumière ne manquant pas à Montréal.

En tout cas ce genre de phénomène n'est sans doute pas vraiment inconnu de l'aviation civile, puisqu'on peut lire dans le rapport de police de l'officier Lippé :

J'ai contacté la Tour de contrôle de l'aéroport de Dorval, M. ?? à 20 h 52.

Il me mentionne que ce n'est pas le premier appel qu'il reçoit à ce sujet, qu'il n'a rien à signaler sur le radar et qu'il se peut que ce soit des jeux de lumières mais qu'habituellement on doit les aviser.

Il est clair que beaucoup de gens à Montréal ont vu ce soir-là des phénomènes lumineux dans le ciel, et d'autres témoins se sont manifestés bien plus tard... C'est le cas de Benoît Lauzon, qui a envoyé un mail (pardon, un courriel) à Caelestia dont je traduis un extrait :

Je me souviens avoir assisté à un cours d'informatique à Montréal ce soir-là, et notre professeur nous avait raconté cette histoire (elle se déroulait à cette époque, probablement a-t-elle été mentionnée sur une émission de radio ou de télévision en direct). Quand je suis retourné chez moi (Ville de Lorraine à l'époque, sur la rive nord), alors que j'étais sur le chemin de la Grande-Côte en direction ouest (il devait être à peu près 22 h), le ciel sur ma gauche (direction de Montréal) s'illumina très vivement à deux reprises d'une teinte bleue (il y avait une pause de quelques secondes entre les flashes). Au début, j'ai pensé qu'un transformateur électrique avait sauté dans une rue voisine, mais il n'y avait pas de son. Quand le deuxième éclair s'est produit, j'ai remarqué que la lumière bleue s'étendait assez largement et ne semblait pas localisée. Ça ressemblait beaucoup plus à la foudre, juste plus bleu, et chaque flash a duré quelques secondes.

Un témoignage rapporté après près de vingt ans n'est a priori pas très fiable... On peut d'ailleurs douter que le professeur de ce témoin ait parlé du phénomène le soir-même où il avait été observé, et avant que le témoin lui-même fasse sa propre observation, mais ça n'est pas vraiment impossible puisque les observations à Montréal, sur le toit de l'hôtel Bonaventure ou ailleurs, ont démarré peu après 19 h.

Concernant l'idée d'un transformateur électrique qui aurait explosé, Wim van Utrecht évoque dans sa réponse la panne de courant qui s'est produite à la base militaire de Longue-Pointe à 23 h 08, mais compte tenu de la distance (20 km) lui et le témoin estiment peu probable que ces flashes aient été vus aussi loin sans susciter d'autres témoignages à Montréal même.

Le témoin lui-même pense aussi à des éclairs entre les nuages, van Utrecht estime cela peu probable puisqu'aucun coup de foudre n'a été enregistré dans la région par les services météorologiques.

Il est à noter que la Lune s'est levée ce soir-là à 21 h 07, un peu plus qu'à moitié pleine, et se trouvait à 22 h à une hauteur angulaire de 8° et un azimut de 68° (est-nord-est). C'est assez loin de la direction indiquée par le témoin (vers Montréal, au sud-est), mais il n'est pas impossible qu'alors que le témoin roulait, la lune bas sur l'horizon se soit dévoilée par moments pour éclairer le paysage. Le témoin précise bien que les éclairs n'étaient pas localisés, et dans un message suivant il précise :

Concernant l'étendue de la lumière dans le ciel alors que je conduisais sur la rive nord, je dirais au moins 40-45 degrés. Peut-être même plus : le ciel est devenu très lumineux bien au-dessus des maisons et des arbres à ma gauche, et très lumineux même devant moi dans la partie supérieure gauche du pare-brise. Ça évoquait plutôt un coup de foudre très important éclatant à plusieurs kilomètres de distance.

Notons que 40-45 degrés, c'est précisément le diamètre du principal halo circulaire qui peut être vu autour du soleil ou de la lune lorsque le ciel est chargé de cristaux de glace ! C'est encore une autre possibilité, mais peu compatible avec la brièveté des flashes... On peut penser aussi à un pilier de lumière ayant pour origine la lune, ou encore une parasélène (une « fausse lune » visible à 22° de part et d'autre de la lune proche de l'horizon, toujours en raison de la présence de cristaux plats horizontaux)...

Une autre possibilité serait le « gyrophare » très lumineux de la place Ville-Marie, dont nous avons déjà parlé... À 20 km, il était sans doute masqué par des bâtiments, mais son faisceau pouvait très bien être réfléchi par la nappe de cristaux de glace, et visible sous la forme d'un flash très bref se répétant toutes les sept secondes !

Mais il est très possible aussi que ces deux flashes vus par le témoin soient le fait d'un événement tout à fait banal sans relation avec les autres observations de ce soir-là, si ce n'est qu'ils ont pu être amplifiés par l'atmosphère très particulière notée par le témoin.

Un autre extrait du témoignage est intéressant :

Le lendemain matin, ma mère m'a réveillé et m'a dit d'allumer ma radio. Il y avait des discussions en direct et plusieurs personnes décrivant ce dont ils avaient été témoins depuis plusieurs zones sur et autour de l'île (principalement des lumières dans le ciel nuageux). L'une des collègues de ma mère a pour sa part mentionné que son jeune garçon l'avait interrogée sur un « vaisseau spatial dans le ciel » alors qu'elle conduisait près du stade olympique ce soir-là. Elle a dit qu'elle avait cru qu'il parlait du stade lui-même (qui pour moi ressemble plutôt à un siège de toilettes), aussi elle n'a pas pris la peine de regarder.

Ce dernier témoignage est intéressant parce qu'il est à rapprocher de celui de Pierre Caumartin qui voyait lui-même un objet illuminé au-dessus du stade olympique. Caumartin a sans doute vu des piliers lumineux formés par les lumières du stade bas sur l'horizon, alors que le jeune garçon qui se trouvait tout près du stade et a vu le vaisseau « au-dessus » a sans doute vu des piliers de lumière zénithaux en mettant sa tête contre la vitre.

Le témoin confirme en tout cas qu'un grand nombre de gens à Montréal et aussi aux alentours ont vu des choses étranges ce soir-là, et qu'il s'agissait pour l'essentiel de « lumières dans le ciel nuageux ». Et il dit aussi que son frère et sa soeur ont observé en une autre occasion des piliers de lumières (pas zénithaux) un jour d'été, ça ne doit pas être franchement exceptionnel au Canada.

Récemment, un autre témoin s'est manifesté auprès de Philippe-Emmanuel Faure du Mufon-Québec... Il avait 11 ans à l'époque et se trouvait avec son frère et des amis dans le parc Hochelaga... Il est le seul à témoigner après 26 ans, et il avait complètement oublié son observation avant qu'il ne voie le reportage de Canal D, après donc au moins quinze ans... C'est donc un témoignage à prendre avec des pincettes, mais on peut tout de même noter que le lieu d'observation se trouve à quelque 5 km au nord-nord-est de l'hôtel Bonaventure... et à 2 km au sud-sud-est du stade olympique, à peu près à la même distance que Pierre Caumartin lors de sa première observation... Je ne serais donc pas étonné que ce soient encore les lumières de la tour du stade olympique qui aient été en cause. On ne connaît malheureusement pas la direction de l'observation, quant à la description, elle est très vague : « c'était énorme, au moins six lumières, bien plus haut que les bâtiments ». Les seuls bâtiments autour de ce parc sont des maisons de trois étages, et dans la direction du stade olympique elles sont situées à 70 mètres de distance... Ça nous donne une hauteur angulaire d'une dizaine de degrés, effectivement donc très au-dessous des piliers lumineux qui devaient culminer à une trentaine de degrés, mais ça suffisait par contre pour masquer la tour du stade, interdisant de faire la relation.

J'ai l'impression que cette tour du stade olympique, qui regroupe dans une surface très réduite un grand nombre de lumières blanches très puissantes disposées régulièrement, a suscité beaucoup d'observations cette nuit-là ! En fait, comme pour l'hôtel Bonaventure, ça n'est pas tant la présence d'un phénomène lumineux dans le ciel qui a attiré l'attention, que la disposition des lumières, suggérant la présence d'un objet.

Dans les cas où il n'y avait pas de forme aussi remarquable à l'origine des lumières, les témoins ne parlent jamais d'objet...

Il en va ainsi d'un témoignage qui m'a été signalé par Wim van Utrecht, qui le tenait lui-même d'une Mme France Saint-Laurent qui se passionne pour les lumières sismiques. Le témoin, Lise Boursier, a observé de chez elle, à Châteauguay, à 19 h 25, ce qu'elle a représenté sur ce schéma quelques jours seulement après son observation :

Une dizaine de filets lumineux blancs verticaux, et un arc de cercle dirigé vers le bas à environ 60° de hauteur sur l'horizon

Elle n'a vu le phénomène que pendant quelques secondes. Châteauguay se trouve à une vingtaine de kilomètres au sud-ouest de la place Bonaventure, et elle voyait les « filets lumineux » qui s'étendaient depuis l'horizon en direction de Montréal... Ça évoque tout à fait des piliers de lumière, causés sans doute justement par les lumières du centre de Montréal. Wim n'a aucune idée de ce que pourrait être le halo lumineux en arc de cercle, la lune n'étant pas encore levée, et moi non plus... Compte tenu de la brièveté de l'observation, ça pourrait juste être une illusion due à une configuration particulière de nuages.

Un autre témoignage a été signalé dans le Québec astronomique, bulletin de la Société d'Astronomie de Montréal, de mars-avril 1991, qui m'a aussi été communiqué par Wim van Utrecht :

Mercredi 7 novembre 1990, 18 h 30. Michel Sirois, de l'observatoire météorologique de Montréal/Dorval, effectue une observation météorologique de contrôle. En plus de noter une visibilité sans restriction, malgré la présence de stratocumulus épars à 2 000 m, M. Sirois remarque des colonnes de lumière qui s'étalent assez bas au sud jusqu'à près du zénith. Le phénomène est de couleur verdâtre, mais il remarque aussi du bleu. M. Sirois reconnaît une aurore boréale mais lui trouve quand même un aspect inhabituel. Ayant d'autres tâches plus urgentes que d'admirer ce phénomène, il retourne à la station.

La station de météorologie de l'aéroport de Montréal/Dorval se trouve à 15 km à l'ouest de la place Bonaventure. Et la revue continue en citant d'autres témoignages :

Entre 19 h et 20 h, des témoins indépendants, à Châteauguay, à Ville-Mercier et à Pointe-Claire [toutes des villes de la banlieue de Montréal] rapporteront l'observation d'un phénomène semblable. On peut résumer les témoignages comme suit : une source lumineuse accompagnée de larges rayons, de couleur neutre ou légèrement teintée. Cela semblait immobile ou en déplacement très lent, car le phénomène a été observé pendant plusieurs dizaines de minutes, parfois jusqu'à deux heures.

Ville de Mercier est toute proche de Châteauguay, donc au sud-ouest de Montréal, et Pointe-Claire se trouve aussi à une vingtaine de kilomètres de Montréal mais à l'ouest.

Tout cela nous donne une idée de l'étendue du phénomène... Rappelons tout de même que les cristaux réfléchissants qui forment les piliers de lumière se trouvent à mi-distance de la source de lumière et de l'observateur. Si le phénomène est vu depuis un lieu situé à 20 km du centre de Montréal et dans la direction de la ville, comme on a vu que c'était le cas à Châteauguay, il est possible que la nappe de cristaux de glace ne se soit étendue que dans un rayon de dix kilomètres. Ça devait être en fait un peu plus, de l'ordre d'une quinzaine de kilomètres autour du centre-ville.

Il y a d'ailleurs une raison qui justifie que cette nappe de cristaux se soit cantonnée à la ville et ses environs immédiats : les cristaux commencent à se former autour de noyaux de condensation, des impuretés de l'atmosphère qui peuvent être des particules fines de pollution. C'est d'ailleurs ce qui explique les traînées des avions. Dans une atmosphère très pure exempte de telles particules, ces cristaux ne peuvent se former qu'à température extrêmement basse, de l'ordre de -40°.

Enfin, lors de sa toute récente émission radio consacrée à ce phénomène, à laquelle nous reviendrons, Christian Page a mentionné un témoin qui se trouvait nettement plus loin, à 35 km au nord-nord-ouest de la place Bonaventure, mais on ne sait pas trop si cette observation est à rattacher aux autres... Le témoin roulait en voiture avec un ami, vers 19 heures, entre Mascouche et la Plaine, suivant le boulevard Laurier qui file tout droit vers le nord-ouest... C'est un peu avant la Plaine qu'ils ont vu l'objet :

... avant d'arriver dans le village, y a des champs, et à ma gauche il y a un grand champ, on roulait à peu près à 70 km/h et puis y a quelque chose qui est passé à ma gauche, qui nous a dépassés, et qui allait à une bonne vitesse, ça nous a dépassés, mais c'était vraiment pas haut donc euh c'était immense, comme je t'ai expliqué cette semaine c'était vraiment immense, c'était plus gros qu'un avion de ligne, y avait un jeu de lumières après ça c'était vraiment hallucinant, comme un jeu de lumières j'avais vraiment rien vu de tel, aucun bruit, et quand c'est arrivé au-dessus du village ça a pris de l'altitude, parce que c'était vraiment bas, je peux pas dire à peu près la hauteur mais c'était peut-être 30 40 pieds dans les arbres, ça a viré, ça a pris de l'altitude, ça a viré et l'accélération de cet objet-là j'ai jamais rien vu de tel dans ma vie, pourtant j'ai voyagé beaucoup en avion, j'ai jamais rien vu de tel, ça a accéléré, ça a disparu... Nous c'est sûr que le phénomène ça a duré peut-être une dizaine de secondes je pourrais dire, mais ça a pris une direction, je pourrais dire nord-est.

Le nord-est « montréalais », donc plutôt le nord, la direction opposée à Montréal... Eux-mêmes avaient la ville presque dans le dos, il ne s'agissait donc pas cette fois des lumières de la ville qui se reflétaient dans le ciel... Ça pourrait être celles du village de Saint-Jérôme qui se trouve à l'ouest-nord-ouest de leur position, donc à leur avant-gauche. Le « jeu de lumières » pourrait bien évoquer un phénomène de piliers lumineux...

La grosse anomalie c'est que le phénomène les a dépassés. Un pilier de lumière est fixe au-dessus de la lumière source, et si on peut croire qu'il nous accompagne dans le cas où on le croit beaucoup plus proche qu'il ne l'est, cet effet de « boule suiveuse » ne peut en aucun cas donner l'impression qu'il nous dépasse. Un virage peut éventuellement donner cette impression, mais cette route est parfaitement rectiligne. Donc à moins que de dépassement ne soit un faux souvenir, il faudrait que la source de lumière soit elle-même en déplacement. Il n'y a pas de route parallèle à gauche, à moins que le témoin se trompe et qu'ils arrivaient de Mascouche par le petit chemin du Curé Barrette et rue Émile Roy (où il y a des virages), auquel cas le source pouvait être un camion circulant justement sur la voie principale.

On peut aussi penser que l'objet était un avion volant à basse altitude... Des confusions avec des avions, il y en a tous les jours un peu partout dans le monde, et beaucoup ne sont pas rapportées... Et peut-être aussi que la réflexion des lumières de cet avion sur des cristaux de glace lui conférait un aspect étrange et immense, expliquant justement la confusion.

Dans tous les cas, une accélération finale très rapide est souvent mentionnée dans des cas de confusion avérés (avions, satellites, lanternes thaï...), et résulte de la mésinterprétation d'une baisse rapide de la luminosité du phénomène... Ici, il se pourrait que la limite de la nappe de cristaux ait été atteinte.

Bref il est difficile de conclure au sujet de ce cas, peu convaincant du fait de la tardiveté du témoignage. Le témoin est sûr de la date de son observation parce qu'il avait eu connaissance de l'observation de la place Bonaventure deux jours plus tard par la presse, mais il n'a pas parlé de son observation pendant plus de vingt-cinq ans et son ami ne veut toujours pas en parler... Difficile après autant de temps de décider si l'observation est à lier aux piliers de lumière, ou s'il s'agit de tout autre chose (avion, véritable soucoupe volante ?) dont on n'aurait jamais entendu parler s'il n'y avait pas eu l'observation de la place Bonaventure.

Dans le premier cas, ça signifierait que la nappe de cristaux s'étendait jusqu'à 35 km au nord de Montréal, bien au-delà de ce que tous les autres témoignages suggèrent.

Et pourquoi pas une aurore boréale ?

Toujours dans ce numéro du Québec astronomique, un autre témoignage intéressant provient de Saint-Eustache, à 25 km à l'ouest du centre de Montréal :

Peu avant 20 h, le soir du 7 novembre, à Saint-Eustache, Yves Laroche, astronome amateur expérimenté, lève le nez vers le ciel. Il aperçoit les lumières et se dit : « Quelle belle aurore boréale ! » Pour lui, pas de doute possible. C'est une belle et rare couronne aurorale comportant des rideaux ondulants jusqu'au sud. Un étudiant en astronomie fera la même remarque à son professeur, l'astronome Robert Lamontagne, de l'Université de Montréal.

On a d'ailleurs vu que Robert Lamontagne avait annoncé sur une radio que le phénomène s'expliquait par une aurore boréale. Et de son côté, Claude Lafleur indiquait dans le Québec sceptique n° 18 :

Les rapports officiels faisant état des conditions climatiques indiquent une absence totale d'aurore boréale ce soir-là. Or, un ufologue québécois habitué à observer les aurores boréales affirme catégoriquement en avoir aperçu ce soir-là !

L'hypothèse était défendue notamment dans l'article déjà cité du Québec astronomique, sous la plume de Marc A. Gélinas... Curieusement, c'est le même Marc Gélinas qui avait indiqué dans la Presse du 9 novembre : Cela ressemble à un phénomène observé à maintes occasions, notamment lorsque l'on fait des travaux avec des projecteurs parfois utilisés en météorologie. La lumière est réfléchie par les cristaux de glace ou les gouttelettes d'eau contenus dans le nuage.

Et il excluait la possibilité d'aurores boréales en raison des nuages... C'est à croire que Marc Gélinas souffre d'un dédoublement de personnalité, et pense tout à fait différemment selon qu'il s'exprime comme météorologue ou comme secrétaire d'une association d'astronomie ! C'est dommage, il était sur la bonne voie, mais voyons comment il a défendu ensuite la mauvaise :

Les témoignages réunis autour du phénomène du 7 novembre permettent de tirer certaines conclusions qui étayent l'hypothèse de l'aurore boréale. La première, et peut-être la plus conclusive, c'est que les observateurs expérimentés qui en furent témoins ont reconnu immédiatement une aurore boréale. Quant aux descriptions des témoins peu familiers avec le ciel, elles concordent pour décrire un ou des centres lumineux, d'où s'échappent des rayons ; peu ou pas de mouvement, le phénomène dure longtemps ; en fait, ce seront les nuages qui y mettront fin ; la couleur est neutre ou verdâtre, du bleu est aussi mentionné par deux témoins.

Concernant la phénomène « reconnu » par les observateurs habitués, il est un fait que les aurores boréales peuvent beaucoup ressembler à des piliers de lumière, étant elles aussi souvent agencées en faisceaux à peu près verticaux.

aurore boréale en faisceau

Photo de Jouni Jussila, en Finlande

Si on se trouve vraiment sous les faisceaux de particules responsables de l'aurore, on peut même voir des faisceaux qui divergent à partir d'un point situé près du zénith :

aurore boréale avec faisceaux divergents

 Voilà qui rappelle effectivement beaucoup ce qui était vu au-dessus de l'hôtel Bonaventure... Mais s'il est fréquent de voir des aurores boréales à Montréal, elles se produisent rarement au-dessus de la ville. Les aurores polaires sont produites par des flux de particules chargées émises par le Soleil, qui heurtent l'atmosphère terrestre essentiellement dans une zone appelée l'ovale auroral, formant un cercle aplati centré sur le pôle magnétique :

exemple d'ovale auroral

L'ovale auroral se situe à environ une dizaine de degrés du pôle magnétique, lui-même décalé d'une vingtaine de degrés par rapport au pôle géographique et justement dans la direction du Canada. Il en résulte que l'ovale auroral se situe généralement à une latitude d'environ 60° du côté du Canada, alors que Montréal se trouve à 45° (une latitude un peu inférieure à celle de Paris, mais en raison du décalage du pôle magnétique l'ovale auroral est toujours beaucoup plus proche de Montréal que de Paris). Après de fortes tempêtes solaires, l'ovale auroral peut s'étendre jusqu'à des latitudes plus basses, incluant Montréal, mais c'est exceptionnel.

Mais ce soir-là, l'activité géomagnétique était plutôt faible, comme le note Marc Gélinas :

En résumé, le phénomène observé au-dessus de la région de Montréal présentait l'aspect d'une aurore boréale intense, mais les observations radio, magnétiques et celles des particules du vent solaire ne peuvent pas corroborer cette hypothèse avec certitude. Les mesures n'indiquent qu'une faible activité dans la magnétosphère. Par contre, il y a bien eu une éruption solaire dans les 48 heures précédentes. Ron Livesey, responsable de la section « aurores boréales » de la British Astronomical Association, rapporte qu'aucune activité n'a été enregistrée en Europe de l'ouest durant la nuit du 7 au 8 novembre. Par contre, durant les nuits suivantes, l'activité a été très forte. Il est possible, selon M. Livesey, que le phénomène de Montréal ait été un précurseur localisé des tourments à venir de la magnétosphère.

En clair, il y aurait eu une aurore boréale avant que les particules chargées responsables de ce type de phénomène n'arrivent ! Marc Gélinas poursuit :

Enfin, notons que le phénomène a été aperçu, avec les mêmes caractéristiques, dans un rayon d'au moins 30 kilomètres.

La première conclusion qu'il est possible de tirer de ces observations, c'est qu'il s'agissait sûrement d'un phénomène de haute altitude, car l'effet de parallaxe n'était pas sensible, du moins à cette échelle.


C'est là que se situe l'erreur de M. Gélinas et des autres astronomes qui ont pensé trouver l'explication dans une aurore boréale... Ils concluent à tort que c'est le même phénomène qui a été vu partout, alors que pourtant on a vu qu'il se présentait sous des formes très différentes, quelquefois au zénith et quelquefois bas sur l'horizon... En réalité, c'est bien le même phénomène qui est responsable de toutes les observations, une nappe de cristaux de glace horizontaux, mais ça n'est pas pour autant la même chose qui a été vue partout !

Gélinas s'appuie aussi sur les couleurs observées :

La teinte bleue mentionnée par M. Sirois et d'autres témoins selon le journal La Presse, est particulièrement intéressante. Les couleurs associées aux aurores boréales sont généralement le vert et le rouge, qui correspondent aux longueurs d'ondes émises par les atomes de l'ionosphère quand ils sont excités. Cependant, du bleu apparaît également quand une molécule d'azote est excitée alors qu'elle se trouve éclairée par la lumière solaire. Cette lumière est alors dispersée par les molécules en état d'excitation et du bleu devient visible. À 19 h, le 7 novembre, le Soleil n'était couché que depuis environ deux heures à Montréal et les molécules, à cent kilomètres et plus au-dessus du sol, étaient encore baignées par la lumière du jour.

Là, ça devient un peu n'importe quoi, puisque outre que la couleur bleue a été très peu évoquée par les témoins, le Soleil à 25° sous l'horizon éclairait les molécules à 650 km d'altitude au zénith, ou 150 km à l'horizon dans sa direction... Bref il n'éclairait pratiquement plus du tout l'atmosphère à 19 h, et moins encore plus tard !

Marc Gélinas envisageait d'autres hypothèses, mais revenait finalement à celle de l'aurore boréale :

D'autres hypothèses peuvent être envisagées, mais toutes doivent tenir compte des faits suivants :

1) Le phénomène était brillant, visible à travers une couche de nuages.

2) Il était constant par rapport à la rotation de la Terre (jusqu'à deux heures sans déplacement significatif).

3) Il a dû se produire à très haute altitude, car l'effet de parallaxe était négligeable sur plusieurs dizaines de kilomètres.

L'hypothèse d'un phénomène d'origine astronomique, météore par exemple, est inconciliable avec la courte durée de l'événement. L'hypothèse astronautique, rentrée de satellite ou dégazage d'un étage de fusée, est à écarter pour la même raison. Un seul autre phénomène s'approche des descriptions données, le lâcher d'un nuage de baryum par une fusée ou un satellite comme le SEER (voir : « Aurores boréales made in USA », QA novembtre-décembre 1990 page 26). Mais il n'y a eu aucune indication qu'une telle expérience ait été effectuée ce jour-là.

En définitive, seule l'aurore boréale semble réunir assez de caractéristiques pour expliquer les témoignages recueillis à Montréal le 7 novembre 1990.

En réalité, l'hypothèse de l'aurore boréale était exclue en raison des aspects et positions très variables du phénomène selon le point d'observation, du fait qu'aucune activité géomagnétique anormale n'avait été enregistrée ce jour-là, et surtout de la présence d'une couche de nuages épais pendant une grande partie des observations. Mais on peut comprendre la confusion...

Les deux phénomènes sont en tout cas tout aussi magnifiques, comme sur cette photo où ils sont réunis !

aurore boréale et piliers de lumière sur une même photo

Photo prise en Finlande par Antti Pietikainen de The Aurora zone.

Vingt ans après, l'ovni revient !

Nous avons vu qu'il a fallu près de vingt ans avant que l'explication qui semble correcte soit trouvée, le texte de Wim van Utrecht dans Caelestia datant de 2008... Et par un curieux hasard, peu après, dans la nuit du 16 au 17 décembre 2010, un phénomène très semblable s'est manifesté.

À l'époque, le réseau Ovni-Alerte était la principale association ufologique au Québec, elle était très connue des médias et recueillait donc beaucoup de témoignages. Elle était dirigée principalement par François Bourbeau, Patricia Paquette et Yann Vadnais. Et c'est donc Ovni Alerte qui a lancé l'information le 9 janvier 2011, avec un article signé Yann Vadnais portant le titre : Répétition de l'OVNI de Montréal du 7 novembre 1990 : des dizaines de personnes voient un PAN gigantesque au-dessus du Casino de Montréal !

Je recopie le début du texte :

Cela s'est produit dans la nuit du 16 au 17 décembre dernier. Des dizaines de personnes ont observé un PAN au-dessus du Casino de Montréal ! C'est d'abord vers les 20 h 00 que le phénomène a été constaté alors que quelques personnes aperçoivent une forme bizarre dans le ciel, qui ne semble être qu'un reflet généré par de puissants projecteurs sur la basse couche nuageuse alors présente au-dessus de la ville à ce moment-là. Il neige faiblement, mais pas suffisamment pour empêcher la visibilité du Vieux-Port. Alors que la nouvelle se répand dans le Casino à la vitesse d'une traînée de poudre, parmi les gens présents, de nombreuses personnes constatent que ce « supposé reflet de lumière » est en fait plus... « actif » et que les « lumières proviennent du ciel » (d'en haut) tout en bougeant et en changeant de couleurs. Vers 02 h 45 du matin, la manifestation du PAN cesse complètement.

Il était aussi indiqué que le réseau Ovni-Alerte avait reçu cinq photographies du phénomène, qui d'après les témoins ne rendaient pas vraiment compte de son ampleur. Voici la plus répandue, car la plus nette, prise par un agent de sécurité du Casino :

ovni vu à côté d'une grue

Le temps de pose était de 8 s, assez proche de celui utilisé par Marcel Laroche en 1990... Là encore, de multiples faisceaux convergents sur fond de ciel voilé, ça rappelle effectivement beaucoup la photo de l'ovni de 1990, mais la photo étant plus nette il est hors de doute qu'il s'agit de piliers de lumière zénithaux.

Et comme d'habitude, c'est à proximité d'une source de lumières intenses que le phénomène est vu :

Le Casino de Montréal la nuit

Sur Ovni-Alerte, on continuait ainsi :

Actuellement, et à la lumière des informations dont disposent les techniciens-enquêteurs du Réseau OVNI-ALERTE inc., un élément ressort magistralement de cette notification : plusieurs personnes au Casino de Montréal, sensibilisés à l'hypothèse de travail du fondateur du Réseau OVNI-ALERTE inc., soit Monsieur François C. BOURBEAU, auraient appliqué sa méthode d'observation qui consiste à placer un observateur à un endroit fixe (ici, en face du Casino), puis à demander aux autres observateurs de se déplacer, sur une ligne droite, de part et d'autre de l'observateur central, afin de vérifier si l'idée des « corridors spatio-temporels » peut ou pouvait coller à la présence de cet OVNI, de ce PAN, si cela allait tenir la route ? Bien, il semble qu'effectivement cela ait été le cas ! Quelques personnes, à bord de véhicules, auraient quitté l'Île Notre-Dame pour constater alors que le « PAN N'ÉTAIT VISIBLE QU'À PROXIMITÉ DU CASINO, ET PAS AILLEURS! »

Diantre, des « corridors spatio-temporels », on nageait dans la science-ficition ! Comme on l'a vu, le fait que les lumières s'estompent à mesure qu'elles s'éloignent du zénith et donc que l'observateur s'éloigne de leur source est aussi une des caractéristiques des piliers de lumière zénithaux, et ça c'est de la science sans fiction, c'est constaté et expliqué !

La disparition n'est pas brutale, sauf si la source de lumière est elle-même directive : avec un faisceau de lumière étroit dirigé vers le ciel, comme un laser ou un projecteur de type sky tracker, le reflet n'est visible que quand on est dans l'angle de divergence du faisceau. Dans le cas d'un laser, il n'y a pratiquement pas de divergence et c'est essentiellement la déviation moyenne de l'orientation des cristaux qui va déterminer l'angle limite de vision du faisceau, qui sera de l'ordre d'un degré. Pour une couche de cristaux située par exemple à 1 km d'altitude, cet angle correspondra à un cercle de visibilité au sol de vingt mètres de diamètre : si quelqu'un se trouve au centre de ce cercle et se déplace de dix mètres, la tache lumineuse disparaît ! Les sky trackers ont aussi des angles de divergence très faibles, de l'ordre du degré, mais puisque le faisceau diverge sur le double de la distance, on arrive à un cercle de visibilité au sol d'une cinquantaine de mètres de diamètre. Et bien sûr, il y a des faisceaux moins directifs, et les cristaux peuvent être à une tout autre altitude, si bien que la distance à laquelle la lumière n'est plus visible peut avoir n'importe quelle valeur.

En tout cas, sur la photo du phénomène, on voit bien que deux des faisceaux sont très largement plus lumineux que les autres, ce qui laisse bien supposer qu'il s'agissait de faisceaux directifs tournés vers le ciel.

Reste à savoir si de tels faisceaux sont utilisés au Casino. On n'en voit pas sur la plupart des photos du Casino, mais en faisant une recherche avec « casino Montréal la nuit » on trouve cette photo sur le site canoe.ca :

Faisceaux pointés vers le ciel

Mais en allant sur la page Instagram du casino on trouve une autre photo prise la même nuit, en 2014 :

Les mêmes faisceaux en éventail

Les faisceaux changeaient donc régulièrement de configuration, et il s'agissait de fêter la participation du club de hockey sur glace de Montréal à une finale de championnat. Mais on trouve une autre photo de faisceaux verticaux sur la même page Instagram du casino :

D'autres faiscaux verticaux sur le casino

Bref ça ne semble pas exceptionnel qu'il y ait des faisceaux de lumière très directifs tournés vers le ciel sur le toit du casino ! On peut objecter que les faisceaux sont bien visibles, mais d'une part des faisceaux un peu plus divergents le seront moins, et d'autre part s'ils sont dirigés à la verticale ces faisceaux seront dans le prolongement exact des piliers de lumière, on pourra donc penser que c'est l'objet porteur de cette mystérieuse colonne de lumière qui éclaire le Casino de son faisceau, plutôt que l'inverse !

Évidemment, puisque l'étude de Caelestia était bien connue des sceptiques, ils ont très vite donné cette explication pour la « répétition » de 2010... Notamment sur le forum des Sceptiques du Québec, qui discutait justement à l'époque des piliers de lumière à propos de l'observation de 1990.

Ovni-Alerte recevait donc de nombreux mails de personnes signalant cette explication, auxquels Patricia Paquette répondait :

Il faudrait m'expliquer PoG, comment se fait-il que plus de 40 témoins parlent de lumières mouvantes, que l'objet soit numériquement semblable pour ne pas dire pareil à celui de Bonaventure et que nous avons les preuves que ces photos sont originales par notre spécialiste vidéo. De plus un scientifique de la NASA a dans son rapport concernant l'objet de 90 affirmé hors de tout doute que ce n'était pas possible que ce soit un reflet. Alors cher Pog je vous connais plus perspicace que cela. Poussez un peu plus loin et faites des comparaisons numériques avec la photo de Bonaventure. Vous verrez, même les angles correspondent. Alors si vraiment c'est un reflet soit mais expliquez moi comment cela.

Et voilà, le « scientifique de la NASA » avait encore frappé... En réalité, outre que nous avons vu que Haines n'a aucune compétence dans le domaine de l'optique, météorologie ou tout autre chose se rapportant à ce type de phénomène, il n'a pas du tout évoqué dans son rapport, et donc moins encore infirmé, l'idée d'un reflet. Ça c'est une invention du reportage sur Canal C.

Et plus loin dans les commentaires, en répondant à un lecteur qui signalait le lien vers Caelestia, la réponse toujours de Patricia Paquette :

Oui, le problème est que nulle part à part cet endroit on ne mentionne le phénomène de : pilier lumineux de zénith. On parle bien de pilier lumineux mais je suis pas certaine que l'interprétation du gars soit bonne. Tout comme parfois on a vu des astronomes donner des explications farfelues à des PANS. Autre point le PAN de 1990 n'est pas un reflet selon le scientifique de la NASA qui a analysé la photo. Je suis en mesure de prouver que 1990 et 2010 c'est la même chose, or si on me prouve que c'est un phénomène lumineux récurrent cela remet en question toutes les données du rapport de 1990. Alors cheminons vers la vérité.

Et un autre lecteur insistait :

Bonjour,
Voici le lien et la photo d'un phénomène apparemment semblable (avec explications) :

http://www.atoptics.co.uk/halo/pilpic22.htm

Lights rayonnant à partir du zénith. Joel Bavais a vu ses lumineuses formes étranges dans le ciel près du centre de la ville d'Ath en Belgique le 20 novembre 2006. L'air était très froid et peu de temps après, un brouillard glacé est descendu et a effacé les lumières. Image © 2006 Joel Bavais

Denis Cloutier
Québec, Canada


Réponse de Patricia Paquette :

Parfois je me demande si vous lisez les commentaires, ou si les gens ne passent que 10,2 secondes sur un lien.

J'ai dit plus loin avoir pris connaissance du lien de Monsieur Cloutier, car j'ai eu des tonnes de courriels me le donnant. J'espère ne pas avoir à répéter :)

Oui la photo dans le lien que donne M. Cloutier est plutôt semblable. Le problème avec ce lien est que nulle part ailleurs sur le net on ne parle du phénomène « Pilier Lumineux de Zénith », les autres mentions sont sur des piliers lumineux. Or je le redis, ce monsieur a appliqué une conclusion à sa photographie en disant c'est de cela qu'on parle. Je doute vraiment de sa conclusion car si le phénomène était celui-là, on retrouverait d'autres photos de celui-ci.

Alors voilà, imaginons que j'ai une photo d'un OVNI, que j'y étais, que j'ai vu l'objet virer à angle droit, vitesse extrême, etc, et qu'ensuite je mets la photo sur un site, pour me faire dire par une personne ta photo c'est ce phénomène de bla bla bla.

Maintenant les internautes du site disent tous en choeur, eh bien oui voilà c'est cela.

Maintenant, je vous ai dit que le PAN s'était déplacé, sur les photos dont on dispose, le pan dans deux clichés n'est pas au même endroit exactement. Autre chose, les témoins affirmaient voir les bords de l'objet. Un phénomène lumineux de reflet atmosphérique ne peut être visible que sous un certain angle, or des témoins ont été jusqu'au bout de l'île et le voyaient encore dans les deux sens soit est-ouest. Or lorsqu'ils traversaient les ponts, il le perdaient de vue sous une distance de 10 pieds. Le Pan comportait des lumières mouvantes, selon un certain patron à sa surface. Alors SVP comme François vous le demande, cessez de tout classer d'un coup. Vous agissez comme un enquêteur de police qui a une photo de la scène et pouf, vous avez votre coupable sans avoir pris la peine d'écouter les témoignages. ALORS PATIENCE.

Ce qui est amusant, c'est que le lien donné par M. Cloutier, du site Atoptics, n'était pas le même que celui donné précédemment (Caelestia), au sujet duquel Patricia Paquette disait qu'il était le seul à parler de piliers de lumière zénithaux !

Mais le reste de la réponse est intéressant puisqu'il indique que le phénomène disparaissait lorsqu'on s'éloignait, mais que pourtant il avait été vu dans toute l'île de Montréal ! Bref, tout comme dans le cas de 1990, il semble qu'il y ait eu des témoins très éloignées du Casino, qui voyaient le même type de phénomène mais en lien avec d'autres lumières.

Quelques jours plus tard, le 11 janvier 2011, nouvel article de Yann Vadnais, intitulé Les témoins sont unanimes : le PAN du Casino se situait AU-DESSUS du plafond nuageux. Ce texte apporte des précisions intéressantes, outre le fait que d'après les témoins entre cinquante et cent personnes devaient avoir observé l'objet au-dessus du Casino :

Suite à la réaction du public et des médias jusqu'à maintenant, nous voudrions insister sur deux (2) points :

1)     Tous les témoins nous confient qu'ils étaient, de prime abord, portés à croire qu'il s'agissait de reflets des projecteurs du Casino sous la masse nuageuse, « peut-être pour le temps des Fêtes », pensa même l'un d'eux. Toutefois, en regardant attentivement, ils devinaient que les lumières distinctes « se tenaient haut dans les airs ».

Une dame, qui a pu observer le PAN durant une quinzaine (15) de minutes, nous décrit l'amas de lumières comme « quatre (4) pattes blanches avec des rayons orangés sur les côtés ». Elle ajoute de plus que « lorsque les nuages passaient en dessous de l'OVNI, les lumières faiblissaient… » Cela veut donc dire que ce ne pouvait pas être la lumière des projecteurs, parce que sinon les nuages (qui passent en-dessous) auraient été illuminés.

Tous les témoins sont d'accord sur ce point, et ils ajoutent que la luminosité était émise « d'en haut ».

Ce qui montre que les gens d'Ovni-Alerte, malgré tous les mails qu'ils recevaient à ce sujet, n'ont pas fait le moindre effort pour se renseigner au sujet des piliers de lumière : ils pensaient qu'il s'agissait de lumières PROJETÉES dans les nuages, alors qu'il s'agit de lumières REFLÉTÉES par un certain type de nuages... Si d'autres nuages passent dessous, il est bien évident que les lumières sont atténuées, et d'autre part, tout comme le reflet dans une glace, l'objet semble bien se trouver plus loin (deux fois plus loin) que les nuages responsables du reflet ! Tout cela confirmait donc parfaitement l'hypothèse de piliers de lumière, et il était quand même temps de s'en rendre compte !

Et le texte continue :

2)     Tous les témoins, jusqu'à maintenant, nous confirment qu'ils ont pu observer le PAN lorsqu'ils se situaient « immédiatement en-dessous de lui ». Le PAN n'était pas visible de points de vue obliques. Grâce aux nouveaux témoignages, nous comprenons maintenant que l'aire d'observation à partir de laquelle le PAN était observable était plutôt restreinte (moins de 100 mètres de diamètre). Un des témoins nous a aussi révélé : « C'était vraiment bizarre, je le voyais bien, puis je me déplaçais de cinq (5) ou dix (10) mètres, et puis on ne voyait plus rien. » (!).

C'est d'ailleurs ici qu'entre en jeu « l'hypothèse des corridors spatio-temporels » formulée par François C. BOURBEAU. Comment expliquer qu'un intense phénomène lumineux puisse s'estomper subitement, sur une distance de quelques mètres ? Rappelons-nous que dans de nombreux cas d'observation d'OVNIS, où « ces objets volants » se présentent aux observateurs au sol sous des aspects solides ou métalliques, ils ne sont pourtant pas toujours détectés par les systèmes radars. Comment également pouvons-nous parvenir à expliquer que des PANS d'apparence physique puissent échapper aux radars ? L'hypothèse de BOURBEAU ne relève pas de la science-fiction, elle a été déduite de façon empirique, à partir de la comparaison de nombreux cas réels et enquêtés, au fil de plus de trente (30) ans d'enquêtes auprès de la population québécoise, et aux détours de centaines de cas internationaux crédibles.


Ben voyons, sinon par l'hypothèse de « corridors spatio-temporels », comment expliquer « qu'un intense phénomène lumineux puisse s'estomper subitement, sur une distance de quelques mètres ? » Eh bien justement avec des reflets c'est courant il me semble : vous êtes ébloui par le reflet du soleil sur une vitre, vous vous déplacez de quelques mètres et ça disparaît ! Bon là c'est un peu plus compliqué et beaucoup moins brutal, mais c'est quand même compréhensible...

Enfin, un troisième texte de Yann Vadnais est paru le 10 janvier 2011, sous le titre Retour sur le PAN observé au-dessus du Casino de Montréal.

On y trouve un long exposé technique réfutant  « L'HYPOTHÈSE QU'IL S'AGISSE D'UN SIMPLE REFLET »... Mais cette réfutation porte sur l'idée qu'il s'agisse de REFLETS DANS L'OBJECTIF DE L'APPAREIL PHOTOGRAPHIQUE, ce que personne n'a jamais supposé (à part bien sûr, au sujet de certaines lumières de l'ovni de 1990, « l'expert de la NASA »).

Plus intéressant, Vadnais indique les conditions météorologiques lors des observations :

Les données météorologiques obtenues auprès d'Environnement Canada pour le secteur qui nous concerne indiquaient donc une température de -11 degrés Celsius dans la soirée du Jeudi 16 Décembre 2010. Les vents ne soufflaient pas avec vivacité : environ 10 km/h, du Nord. Humidité relative de 78% avec une accumulation de neige au sol d'à peine 1 cm. Donc, le type de nuages sous lesquels les témoins/clients du Casino de Montréal se situaient étaient des stratus, soit des nuages bas, avec une base assez uniforme, comparable aux nuages présents dans le ciel montréalais lors de l'apparition de l'OVNI du 7 novembre 1990 au-dessus de la place Hilton-Bonaventure. Les mêmes types de nuages !...

La principale caractéristique de ce type de nuages est qu'ils laissent filtrer plutôt facilement la lumière soit de la Lune ou du Soleil, ce qui se traduit souvent par la présence de halos. C'est ce qui explique également pourquoi le PAN, même s'il se trouve directement plongé dans les nuages, demeure tout de même « visible », surtout s'il produit une puissante source de lumière, ce que n'importe quel appareil numérique est alors en mesure de photographier à des temps d'expositions relativement courts, ce qui fut précisément le cas ici.


On voit que la température était compatible avec la présence de cristaux de glace hexagonaux, qui se forment soit entre 0 et -4 degrés comme c'était le cas en 1990, soit entre -10 et -20° comme ici. Et puisque les stratus comme l'explique Vadnais « laissent filtrer plutôt facilement la lumière », ils ne sont pas directement éclairés par des faisceaux lumineux, mais par contre les cristaux qui se trouvent dessous les réfléchissent !

Vadnais indique aussi :

En comparaison avec l'OVNI de Montréal du 7 novembre 1990, il nous apparaît clairement que les rayonnements émis par ces deux (2) PANS frôlent pratiquement la... parenté ? On dirait des jumeaux !

L'article se termine par :

Nous avons maintenant inscrit à nos agendas respectifs, soit trois (3) des techniciens-enquêteurs rattachés au Réseau OVNI-ALERTE inc., de nous rendre très prochainement au Casino de Montréal (entre le 10 janvier et le 14 janvier), avec nos appareils de télémétrie, afin de procéder à la capture de données essentielles à l'établissement et au développement de mon hypothèse de travail en rapport avec les « corridors spatio-temporels », particulièrement depuis que j'ai appris que des témoins auraient mis en pratique ma méthode de vérification de mon hypothèse. Reste à voir si tout ça tient bien la route, justement.

Ah on allait enfin avancer... On va voir qu'il n'y a pas eu de nouvel article exposant les résultats de ces investigations sur place, mais le 15 janvier François Bourbeau a posté un court message sur le Facebook d'Ovni-Alerte :

Nous arrivons du Casino de Montréal, vers les 4 H 30 am, Yann Vadnais, Martine Camirand et moi (FCB), et nous avons pu constater qu'effectivement, ce sont bien des spots de lumière installés au sommet de la bâtisse du Casino qui sont responsables de l'effet du PAN observé, sans doute, le 16 décembre. Enquête présentement en cours de conclusion.

Et voilà, donc les enquêteurs d'Ovni-Alerte ont constaté la parfaite similitude des observations de 1990 et 2010, et ont fini par se rendre compte qu'en 2010 le cas s'expliquait par des projecteurs installés sur le toit du Casino, ça aurait dû mettre fin aux deux affaires ! Mais plus rien ensuite : la conclusion de l'enquête n'a jamais été publiée.

Les trois articles auxquels je me suis référé sont visibles pour les personnes intéressées sur les archives Internet Wayback Machine :

Répétition de l'OVNI de Montréal du 7 novembre 1990 : des dizaines de personnes voient un PAN gigantesque au-dessus du Casino de Montréal !
Retour sur le PAN observé au-dessus du Casino de Montréal
Les témoins sont unanimes : le PAN du Casino se situait AU-DESSUS du plafond nuageux

Peu après, le réseau Ovni-Alerte a été dissous, et le site effacé, victime apparemment d'un gros clash entre François Bourbeau et Patricia Paquette ; peut-être que les remous causés par le gestion de cette observation ont joué un rôle, je n'en sais rien... Mais peu importent les raisons, c'est le genre de chose qui arrive souvent dans les associations surtout quand elles prennent un peu d'importance, et on peut juste se désoler du gâchis...

Patricia Paquette et François Bourbeau ont ensuite à peu près disparu de la scène ufologique, Bourbeau s'est isolé à la campagne et a eu du mal à se remettre d'un grave accident, on le retrouve maintenant sur les réseaux sociaux où il ne parle d'ovnis qu'occasionnellement mais il fait maintenant un retour et on s'en réjouit...

Yann Vadnais a pour sa part créé le GARPAN (Groupe d'assistance et de recherche sur les phénomènes aérospatiaux non-identifiés), une association très active au Québec. Il compte faire une mise à jour de son enquête sur cet ovni du Casino en 2010, on en apprendra sans doute d'avantage... Et il présente toujours le cas de la place Bonaventure comme « l'événement-OVNI le plus fameux de toute l'histoire du Canada », et le met en parallèle avec la vague d'ovnis du 5 novembre 1990 qui s'est produite deux jours auparavant, les deux événements n'ayant « jamais été éclaircis par les autorités » !

De son côté, Wim van Utrecht a rajouté une page sur cette observation dans son site Caelestia.

Notons que dans une page par ailleurs très bien faite consacrée aux piliers de lumière, rédigée par « Elevenaugust » sur le forum les Mystères des Ovnis, un certain Irvingquester, québécois, rejette pour de fort mauvaises raisons l'explication du cas de 1990 par des piliers de lumière, et sur sa lancée met en doute la réalité des observations de 2010, pensant que « Bourbeau a très probablement voulu lancer le buzz d'un ovni à Montréal 20 ans après Bonaventure. »

C'est ignorer complètement toute la discussion qui a eu lieu sur Ovni-Alerte et les différentes personnes qui ont participé à l'enquête (notamment Yann Vadnais qui est toujours très actif en ufologie à Montréal), et cette ignorance des faits les plus élémentaires est habituelle chez Irvingquester... Il va d'un forum à l'autre sous divers pseudonymes (Newtonathome, Jojolapin...) en répétant inlassablement les mêmes âneries qui ont été démontées dans le précédent... Après avoir erré ainsi sur les sites sceptiques où il finissait par se faire éjecter en raison de son trolling intense et d'une mauvaise foi à toute épreuve, il a fini par trouver sur les Mystères des Ovnis un site complaisant où on apprécie ses perpétuelles attaques envers les sceptiques et où on vire immédiatement toute personne qui contesterait une de ses affirmations mensongères, preuves à l'appui... Pour vous éclairer, voir par exemple le sujet qu'il a créé sur le prétendu ovni vu par l'astronaute Leroy Chiao (note : à la fin celui qui est intervenu sous le nom de « Robby13 » et qui s'est fait immédiatement virer, c'était moi).

Bref concernant l'observation de 2010 tout ce qu'avance Irvingquester pour la mettre en doute c'est le fait qu'on n'en ait pas parlé dans les journaux de Montréal ! Mais peut-être devrait-il chercher aussi si les journaux ont beaucoup parlé de l'observation de la place Bonaventure en 1990, en dehors du journal la Presse qui avait eu des journalistes sur place et une photo à montrer !

Ce qu'il faut noter c'est que comme l'explique Yann Vadnais « tous les témoins étaient, de prime abord, portés à croire qu'il s'agissait de reflets des projecteurs du Casino sous la masse nuageuse », et ça suffit largement à expliquer l'indifférence de la presse ! Et ça n'était sans doute guère différent lors de l'observation de 1990 : ce sont les ufologues qui ont monté les deux cas en épingle pour en faire des événements ufologiques majeurs.

Il y a eu une suite à cette histoire... Irvingquester a fini par être viré aussi de MO, sans doute en raison de sa lourdeur... Étant donné qu'il a demandé à ce que son compte soit supprimé, son nom n'apparaît plus sur ce forum, mais on n'aura pas de mal à reconnaître ses messages... Il est alors revenu faire un tour du côté des sceptiques sous un pseudonyme d'emprunt, et a relancé ses accusations de montage pour les photos du Casino... Mais, fait intéressant, il a ressorti une seconde photo qui avait été diffusé un temps, mais qui n'était plus visible nulle part sur Internet. Je connaissais cette photo, mais je ne l'avais malheureusement pas enregistrée, merci donc à Julien de l'avoir retrouvée. On y voit la même forme lumineuse que sur celle qui est bien connue, moins nette, mais avec une sorte de bâtiment à côté. Et donc, Irvingquester y voyait la preuve que la photo n'avait pas été prise à Montréal, n'ayant rien trouvé à proximité du Casino qui évoque cet élément de décor (précisons qu'Irvingquester habite Montréal). Voici la photo en question, que j'ai orientée dans le sens vertical pour rendre plus compréhensibles les explications qui vont suivre :

Autre photo du pilier de lumière, à côté d'une structure bizarre

Lorsque j'avais vu cette photo la première fois, j'avais l'impression que la structure visible à gauche était un bâtiment avec des fenêtres de forme bizarre... Mais la présence du pilier de lumière zénithal permet de remarquer une bizarrerie... On sait que les différents faisceaux d'un tel phénomène convergent vers le zénith, que l'on peut donc situer précisément sur cette photo... Et toute ligne verticale doit aussi converger vers le zénith, ce qui n'est pas le cas de ce qui semble être le côté de ce bâtiment. Il s'agit donc d'une structure inclinée, mais par contre ce qui a l'aspect d'un mur de grosses pierres en bas est bien vertical.

Et il n'est pas difficile avec Google street view d'identifier cette structure bizarre, qui longe une voie d'accès au Casino :

Des structures inclinées percées de trous triangulaires

Il y a un mur derrière qui évoque bigrement celui qui est visible sur la photo du pilier de lumière, et sous une certaine perspective on voit des alignements de triangles à la direction alternée, ce qui semble bien être le cas aussi sur la photo de 2010. La perspective est très déformée du fait que l'appareil photo devait être très proche de la structure, mais l'identification ne fait aucun doute. Le seul problème, c'est que la disposition de la structure est inversée par rapport à celle visible sur la photo du pilier de lumière. Mais il y a tout un ensemble de telles structures le long de deux routes d'accès au Casino, la seconde étant à peu près symétrique... Malheureusement, Google street view ne passe pas par cette deuxième route, et on ne peut voir ce deuxième ensemble de structures que de loin :

Strictures symétriques vues de loin

C'est probablement l'élément le plus à droite qui est visible sur la photo de 2010. Notons que de 2009 à 2013, il y a eu de gros travaux de rénovation du Casino, et une grue, dont la flèche est visible sur les photos de 2010, était bien présente dans ce secteur, comme on le voit sur Apple Plans dont la reconstitution 3D a été faite à partir de photos prises pendant les travaux :

Reconstitution 3D sur laquelle on voit la grue, non loin des structures percées

J'ai superposé la photo inversée du pilier de lumière avec l'image du sol, en orientant les lumières par rapport à la structure de façon identique à la photo :

Le pilier de lumière superposé au sol, on voit les principales lumières dirigées vers le Casino

On peut même tenter de calculer la hauteur de la nappe de cristaux... Il faut d'abord connaître le champ de la photo, que l'on peut estimer d'après la grue... On trouve cette photo du Casino pendant les travaux, avec la grue visible derrière.

Le Casino avec la grue derrière

La hauteur du Casino doit être d'après les photos et sa dimension au sol un peu supérieure à 50 m y compris l'espèce de mât à sa droite. La grue se trouve derrière, sa hauteur doit donc être de l'ordre de 60 m. D'après la position de la grue et la direction de la flèche, elle doit passer à 12,5 m au sol de la position d'où a été prise la photo. Sur la photo sur laquelle on voit la structure, la distance de la flèche de la grue correspond à 16% de la largeur de la photo, la largeur de la photo doit donc correspondre à une distance à l'altitude de la grue de 12,5 × 100/16 = 78 m, et la largeur de champ de la photo doit donc être égal à 2 × arc tangente ((78/2)/60) = 66°.

Les lumières principales du phénomène sont entre 20 et 30 pixels du point de convergence, sur une photo qui en fait 622 en largeur, cela correspond donc à 2,4 à 3,6°... Si les projecteurs à l'origine de ces lumières intenses se trouvaient au milieu du toit du casino, ils étaient à 100 m du photographe, et donc pour être vus entre 2,4° et 3,6° de la verticale ils doivent être à une distance de 1600 à 2400 m (100/tangente 3,6° et 100/tangente 2,4°). La nappe de cristaux est à mi-hauteur, soit entre 800 et 1200 m d'altitude.

Il est en fait vraisemblable que les projecteurs à l'origine des deux piliers les plus lumineux aient été plus proches du photographe que le centre du toit du casino, auquel cas la nappe de cristaux devait être un peu plus basse, mais elle était en tout nettement plus élevée que celle qui explique le cas de 1990... Les deux phénomènes ne sont pas vraiment comparables dans les conditions météorologiques, puisque nous avons vu qu'en outre la température au sol était une dizaine de degrés plus bas dans le cas de 2010 que dans celui de 1990. Il serait donc fallacieux de prétendre valider l'explication supposée pour le cas de 1990 par celle démontrée pour celui 2010... Quant aux similitudes des formes des deux phénomènes lumineux, elles semblent tout à fait fortuites... Le seul vrai point commun entre les photographies des deux phénomènes, c'est qu'on y voit des faisceaux lumineux qui convergent vers le zénith, et c'est bien la caractéristique principale des piliers de lumière zénithaux.

Deux jours avant, une vague d'ovnis en France ?

Un élément qui pour les croyants vient accréditer le mystère de l'ovni de Montréal est qu'il s'est produit seulement deux jours après la « formidable vague d'ovnis » du 5 novembre 1990 en France... Le problème c'est qu'il n'y a pas eu de vague d'ovnis ce jour-là, juste une rentrée atmosphérique très spectaculaire, des ufologues incapables de trouver des informations correctes sur ce phénomène, et quelques observations n'ayant rien à voir avec la rentrée mais entraînées par la vague de témoignages de cette dernière et pas spécialement convaincantes. Lire à ce sujet mon texte 5 novembre 1990, les ovnis fabriqués par les ufologues.

Pour ce qui est de la coïncidence des deux événements, elle n'est pas particulièrement étrange. On parle souvent de « loi des séries », des événements de nature identique ayant apparemment tendance à se produire en série... En fait, cela illustre simplement notre mauvaise appréciation des probabilités... On s'attend à ce qu'un événement aléatoire se produise de façon assez régulière, alors que ça n'est pas du tout le cas. Par exemple, s'il y a en moyenne une observation d'ovni importante par mois dans le monde, il y a plus d'une chance sur deux pour que deux d'entre elles se produisent à moins de deux jours d'écart dans une même année.

Et puis, il n'est pas du tout impossible que la « vague » française de 1990 ait amplifié l'importance donnée à l'observation de Montréal. Le Québec est francophone, il ne serait pas surprenant que des journaux français aient traîné dans le hall de l'hôtel Bonaventure, dans lesquels on accordait une bonne place aux observations du 5 novembre 90...

ovni vu à côté d'une grue

Cet article du Figaro du 7 novembre est assez représentatif de ce que l'ensemble de la presse française titrait au sujet de ce phénomène. Il serait intéressant aussi de savoir si la presse québécoise a signalé l'événement.

Ce jour-là et déjà la veille, le phénomène responsable n'était pas encore identifié, mais on privilégiait l'explication par une météorite ou un satellite... Et ça nous rappelle la première réaction d'Albert Sterling, le responsable de la sécurité de l'hôtel Bonaventure, lorsqu'il a vu l'objet : Sa première impression fut qu'il s'agissait de « ...débris tombant du ciel, un satellite ou autre objet de l'espace ». Vu que ça n'est guère logique de penser à cela quand on voit des faisceaux de lumière immobiles dans le ciel, on peut se demander si Sterling n'avait pas eu vent de ce qui s'était passé en France deux jours plus tôt !

Des touristes français pouvaient aussi être arrivés à l'hôtel dans la journée et s'être trouvés sur le toit avec les autres... Tout cela pouvait influer sur la perception du phénomène par les témoins, et sur l'attention qui a été portée à l'observation.

Et de la même manière, la « vague Belge » dont on avait beaucoup parlé peu avant a pu aussi amplifier l'importance que l'on a donnée à la vague du 5 novembre 1990 en France, et aussi à l'ovni de Montréal.

Bref la coïncidence n'en est peut-être pas tout à fait une, mais il n'empêche qu'aussi bien les observations du 5 novembre 1990 en France que celles du 7 novembre à Montréal s'expliquent parfaitement par des phénomènes bien identifiés.

L'enquêteur du paranormal reprend du service

Alors que je terminais la rédaction de cet article, Christian Page, scénariste du reportage de Canal D, a réalisé un nouveau reportage sur le phénomène dans la série « l'Enquêteur du paranormal ». Il a été diffusé pour la première fois le 28 novembre 2016 sur la chaîne TV québécoise Historia.

Christian Page est une véritable star au Québec, ayant réalisé des émissions très appréciées sur le paranormal en général... Il joue d'ailleurs beaucoup sur une image d'enquêteur-aventurier avec son bureau décoré d'un crâne de cristal et d'une tête d'extraterrestre sur laquelle il pose son chapeau !

Ambiance mystères

Mais ne nous arrêtons pas à la mise en scène, ses documentaires sont en général plutôt sérieux et très documentés.

Avec celui-ci, ça commence tout de même assez mal lorsqu'on voit qu'il illustre l'observation de 1990... par la photo prise en 2010 au-dessus du Casino, sans jamais le préciser !

Illustration de l'ovni de 1990 par une photo de celui de 2010 !

On verra beaucoup plus cette photo, en divers coloris, tout au long du reportage que la véritable photographie de l'ovni de la place Bonaventure en 1990... C'est d'autant plus surprenant que dans le cas de 2010 il n'y a vraiment aucun doute sur l'explication par un pilier de lumières zénithal, que Christian Page va complètement ignorer dans son reportage ! Ceci dit, il m'a précisé que s'il était réalisateur de ce documentaire il ne contrôlait pas tout, et qu'il n'est pas responsable du choix de cette photo comme illustration, qui l'a lui-même beaucoup contrarié lorsqu'il l'a découvert lors de la diffusion...

Après avoir résumé le cas, il interroge deux témoins de l'époque... D'abord Mario Boily, qui était employé de l'établissement :

Il devait être 8 h, à cet endroit-là il y avait un genre d'ovale, puis une plus petite au milieu, un peu plus foncée, et il y avait six spots. C'était pas trop brillant parce qu'il y avait des nuages un peu... Pas de son, pas de bruit, absolument rien.

CP : Est-ce que l'objet se déplaçait à ce moment-là ?

Moi ce que j'ai vu elle était là et puis elle est restée là pendant deux heures.

À un moment donné j'ai vu un avion passer qui devait être à huit mille, dix mille pieds, et puis à mon estimé il y avait au moins encore dix mille pieds avant d'arriver là, y avait six lumières au début, après ça y en avait quatre, après ça y en avait trois, puis quand quelqu'un de
la Presse est venu prendre une photo il restait plus juste qu'un spot. On voyait qu'ils étaient fixes, passé une heure, deux heures comme ça, c'était fixe l'emplacement.

CP : Est-ce que vous avez eu à un moment l'impression que ce que vous observiez aurait pu être un reflet ?

Impossible. Impossible, c'était trop immense et trop gros, ça pouvait pas être... Je sais pas y en a qui parlaient que c'était le reflet des spots de la piscine, la police a fait fermer les spots du mille la Gauchetière, et non, ça restait là.

CP : Aujourd'hui, Mario, 26 ans plus tard, est-ce que vous êtes toujours persuadé que ce que vous avez vu ce soir-là relevait de l'inexplicable ?

Absolument. Absolument, je suis certain qu'on n'est pas seuls dans ce monde, je regarde le ciel tous les soirs quand je sors dans la rue, c'était beaucoup trop gros pour être humain, c'est certain.

À remarquer dans cette interview la mention que certains témoins pensaient que les lumières étaient le reflet des spots de la piscine... Il faudrait savoir si cette explication a été évoquée par certains lors de l'observation, ce qui n'a été mentionné nulle part ailleurs, ou si le témoin a simplement entendu parler plus tard de l'explication exposée dans le site Caelestia.

Le second témoin interrogé est Luc Morin, policier de la Gendarmerie Royale du Canada :

Donc vers 21 h 30 je suis arrivé sur les lieux, et j'ai fait les premiers constats. J'ai effectivement noté la présence de trois faisceaux lumineux qui semblaient immobiles à travers un plafond nuageux.

CP : J'imagine que quand on reçoit un appel de ce type-là, on arrive sur place, on s'attend à prendre essentiellement un rapport d'observation, on s'attend pas à être soi-même témoin du phénomène.

C'est exact. C'était la première fois que ça m'arrivait dans ma carrière, et ma première préoccupation était la sécurité du public.

CP : Quelle est la démarche que l'on fait ? vous contactez les aéroports et vous contactez l'armée ? Est-ce qu'il y a une démarche qui a été faite ?

En fait on a contacté les aéroports, pour savoir s'ils avaient quelque chose sur les radars, et les autorités nous ont informé qu'il n'y avait rien sur les radars. Par la suite il y avait un pilote d'Air Canada qui était ici, qui m'a informé que selon lui ces lumières-là, on voyait en fait un triangle lumineux, que ces lumières-là étaient à environ 3500 ou 4000 pieds de hauteur.

CP : Quand vous regardiez le phénomène, aviez-vous l'impression que c'était un objet, physique, qui était là, ou c'était simplement un reflet de lumières ?

J'avais l'impression qu'il s'agissait d'un objet physique. En fait il y avait de la construction, très près d'ici, je crois qu'on montait l'édifice du 1000 de la Gauchetière — exact — on avait fait éteindre les lumières du chantier de construction pour s'assurer que ça n'était pas une réflexion, et malgré tout les lumières sont demeurées là, les faisceaux lumineux ne sont pas disparus.

CP : J'imagine que, on est témoin d'un incident comme celui-là, on garde quelques traces, et je crois deviner que vous avez conservé le rapport d'enquête de l'époque ?

Effectivement j'ai conservé les documents originaux de l'époque, par exemple les rapports des premiers appels qui ont été faits au quartier général de la G.R.C., les rapports du service de police de la ville de Montréal.

CP : Quand on parle de cette histoire de l'ovni au-dessus de la place Bonaventure bon y a les trois heures qui s'écoulent, mais par curiosité on aurait bien dû envoyer un hélicoptère, pour essayer de voir de quoi il s'agissait ?

On aurait pu, par contre les autorités policières ou l'état-major de la G.R.C., étant donné le non-danger pour la sécurité du public, avaient décidé qu'on ne prendrait pas cette voie-là. Effectivement ça aurait pu être intéressant d'avoir un hélicoptère pour aller constater en quoi ça consistait ces lumières-là.

CP : Vous avez été témoin vous-même du phénomène, vous avez parlé de ça autour de vous, est-ce que des gens ont proposé des explications à ce que vous aviez observé ?

Il y a quelques explications farfelues, oui, qui ont été proposées, en ce qui a trait à savoir quelle était la raison de ce phénomène-là. Je crois sincèrement que c'était pas une réflexion de lumière, je crois sincèrement qu'il y avait fort probablement un objet à cet endroit-là. L'observation que j'ai pu faire c'est que l'objet s'était déplacé. Les trois lumières sont restées à peu près à la même distance l'une de l'autre et se sont dirigées vers l'est. Je ne sais pas qu'est-ce que ça pouvait être, en fait, mais je suis persuadé que c'est quelque chose que je n'ai jamais vu auparavant. C'est inexplicable.

À noter que dans son rapport, il indiquait que la forme s'était « légèrement déplacée du sud vers le nord ».

Viennent ensuite des extraits d'une interview du Robert Masson de la S.P.C.U.M., réalisée pour l'émission de Canal D, mais avec quelques passages qui n'étaient pas dans ce premier reportage :

En fait le premier appel que j'ai fait, j'ai appelé la tour de Dorval. Et au téléphone le contrôleur m'informe que sur le radar actuellement il y avait un cargo numéro XXX qui passait au-dessus du centre-ville, et puis effectivement moi j'étais à l'extérieur avec le téléphone sans fil, et puis ça avait l'air très petit quand ça passait en dessous. On pouvait même distinguer que c'était en métal. Oui, peut-être que c'était quelque chose de métallique, il y avait une brillance, la même chose qu'un matériel métallique, et puis les sept raies de lumière, ou les six raies de lumière, comm ??? au ciel, parce qu'on y voyait très bien.

Ensuite, Christian Page se rend aux archives nationales du Canada, où l'archiviste David Rajotte résume l'histoire de l'étude officielle des ovnis au Canada, depuis les années 50... C'est intéressant mais ça ne concerne pas trop notre affaire, en dehors de la fin. En gros, depuis 1967 les rapports d'observation étaient collectés par le Centre national de recherche (l'équivalent de notre C.N.R.S.), mais peu à peu le C.N.R. s'est désintéressé du sujet et il a cessé de récolter ces rapports en 1995, le cas de Bonaventure étant donc un des derniers cas importants qui lui ont été transmis.

En bref il n'y a eu aucune enquête, juste les témoignages des policiers qui s'étaient rendus sur place, et tout ça peut être consulté librement aux archives sur demande. Aucun black out gouvernemental donc, mais un manque d'intérêt et de réactivité au sujet de ce phénomène.

Enfin, on passe à l'étude du rapport Haines-Guénette. Haines est présenté sans surprise comme un chercheur en aérospatiale, spécialiste de l'optique travaillant pour le laboratoire Ames de la Nasa. Et Christian Page reprend ses conclusions sur la taille de l'objet :

Le mouvement des nuages étant connu, grâce aux relevés d'Environnement Canada, Richard Haines estime que l'objet évoluait ce soir-là à une altitude comprise entre 1060 et 2700 mètres, et que son diamètre, d'après son évaluation la plus conservatrice, était de 540 mètres, soit l'équivalent de cinq terrains de football. Le tout illustré par une simulation de la taille l'objet au-dessus de la place Bonaventure :

La taille de l'ovni comparé à la place Bonaventure

Page poursuit :

Richard Haines rejette la possibilité que l'objet ait pu être un phénomène atmosphérique ou astronomique, justement à cause de cette couverture nuageuse. Richard Haines rejette aussi la possibilité d'un reflet sur les nuages. Ce soir-là, la couverture nuageuse est passée de 1600 à 1100 mètres. Or il faut savoir que dans le cas d'un reflet, plus la surface réfléchissante se rapproche de sa source, plus cette source devient lumineuse et définie. Dans le cas de l'ovni de la place Bonaventure, l'objet réagit de manière tout à fait différente.

En fait, rien n'est dit à ce sujet dans le rapport Haines-Guénette, mais d'après un courrier reçu par Caelestia c'est bien ce que Haines aurait dit par la suite pour rejeter l'explication par des piliers de lumière... Mais visiblement ni lui ni Christian Page n'ont compris en quoi consiste ce phénomène, qui n'a rien à voir avec l'éclairement d'un nuage par un faisceau lumineux ! Dans le cas des piliers de lumière, ce ne sont pas les cristaux qui sont éclairés, ils réfléchissent la lumière ; quant aux nuages, quand il y en a, ils ne sont nullement impliqués : Il y a des photos de piliers de lumière par temps clair, notamment la photo prise en Norvège où on voit clairement le ciel étoilé derrière ces lumières reproduisant le plan de la ville.

Bref Christian Page a raté là une occasion de donner une explication correcte du phénomène qui pourrait bien être, et qui est même sûrement, à l'origine de l'observation !

Il ajoute : Richard Haines conclut que les preuves attestant la présence d'un grand objet volant inconnu au-dessus de Montréal sont tout à fait indéniables, et que la nature de cet objet demeure pour l'instant non identifiée.

Mais ça ne l'empêche pas de conclure prudemment son reportage par :

Sommes-nous visités par des extraterrestres ? Que sont les ovnis ? Pour l'heure, toutes les recherches scientifiques vont dans le même sens : il y a apparemment des phénomènes célestes, comme celui de l'hôtel Hilton Bonaventure, qui échappent à notre compréhension. Mais de là à prétendre que ces phénomènes soient des engins venus d'une autre planète, il y a loin de la coupe aux lèvres. Évidemment cela ne remet pas en question la possibilité que d'autres mondes, ailleurs dans l'univers, soient peuplés par des civilisations plus avancées que la nôtre. En fait, la question ici n'est pas de savoir si des extraterrestres existent, mais si nous sommes visités par des extraterrestres. Et à ce chapitre, quoi qu'en disent les ufologues, les soi-disant spécialistes des ovnis, les preuves font cruellement défaut. Mais restons prudents : un axiome scientifique nous rappelle que l'absence de preuve n'est pas la preuve de l'absence.

Bravo pour la prudence, mais si Haines avait vraiment prouvé la présence d'un objet solide d'au moins 500 mètres de diamètre au-dessus de Montréal, et pendant trois heures, ça pourrait être quoi à part un vaisseau extraterrestre ? Disons que Christian Page ne s'exprime pas aussi librement dans une émission de télévision grand public que dans son livre (l'Enquêteur du paranormal tome 1) où il ne prend pas pour argent comptant tout le contenu du rapport Haines-Guénette :

Si le rapport Guénette-Haines apporte certaines réponses, il ne nous éclaire pas beaucoup sur la nature même de l'ovni. Était-ce un phénomène atmosphérique rarissime et encore inconnu de la science ? Un prototype militaire secret ? Un engin venu d'une autre planète ? La question reste ouverte.

Mise à jour du 6 janvier 2017

Cette mise à jour très rapide est justifiée par les courriers que j'ai reçus de deux personnes particulièrement impliquées dans ce dossier : Christian Page, « l'Enquêteur du paranormal » qui a pu observer la fin du phénomène et a été à l'origine des deux principaux reportages consacrés à l'affaire, et Wim van Utrecht, le chercheur belge d'anomalies célestes qui a proposé après une véritable étude l'explication par des piliers de lumière.

Je les remercie tous les deux vivement pour ces courriers très productifs, les suppléments d'informations qu'ils m'ont apportés, et aussi leurs réserves.

Christian Page, d'abord, s'est justifié au sujet des critiques que j'avais émises sur ses deux documentaires, expliquant que même s'il était réalisateur du second (mais pas du premier) il ne contrôlait pas tout, et qu'il n'a pas toujours pu leur donner une orientation aussi neutre qu'il l'aurait voulu. Reconnaissons qu'il doit être difficile d'éviter de tomber dans la facilité du sensationnalisme qu'une grande partie du public attend, et qu'il y réussit tout de même plutôt bien. J'ai donc quelque peu modifié mes critiques de l'épisode de Dossiers mystère et de l'Enquêteur du paranormal. À noter qu'en marge de ces deux séries de documentaires, il a écrit des livres dans lesquels il peut s'exprimer plus librement, et qui contiennent des compléments intéressants. Ces livres sont disponibles en e-book, je les ai signalés dans mes commentaires.

Page m'a aussi signalé que j'avais sous-estimé dans ma conclusion le retentissement médiatique qu'a eu cette affaire, j'ai aussi tenu compte de ses remarques.

Et puis, il m'a apporté des précisions intéressantes sur sa propre observation du phénomène, puisqu'il est arrivé sur le toit de l'hôtel Bonaventure alors que les dernières lueurs étaient encore visibles... Ce témoignage apporte à mon sens une confirmation de l'explication par des piliers de lumière, même si Christian Page lui-même n'y croit pas trop, je l'ai donc développé.

Enfin, Page regrette maintenant d'avoir négligé l'hypothèse des piliers de lumières (nous verrons qu'il s'est bien rattrapé depuis), bien qu'elle ne l'ait pas convaincu :

Les conditions météorologiques qui régnaient ce soir-là n'avaient rien d'exceptionnel. Sans être récurrent, ce phénomène des piliers zénithaux devrait se reproduire à l'occasion... Ce qui visiblement n'est pas le cas. Un tel phénomène n'avait jamais été observé auparavant et n'a jamais été observé depuis, pourtant la piscine est toujours là... et l'hiver, la présence de nuages chargés de glace et de neige est fréquente.

Je n'ai malheureusement aucune idée de la fréquence des phénomènes de piliers de lumière dans une ville comme Montréal, ça doit être en tout cas assez rare... La plupart des nuages chargés de glace ne sont pas formés de cristaux mais de gouttelettes d'eau qui ont gelé, et lorsqu'il y a des cristaux ils ne sont pas forcément horizontaux. Et lorsque ça se produit, il faut encore que les témoins le remarquent et que ça les intrigue suffisamment pour qu'ils le signalent au personnel de l'hôtel. Et depuis cette mise à jour, de nouvelles informations inattendues permettent de douter que les lumières de la piscine soient en cause, et les véritables lumières responsables n'étaient là que temporairement... Le phénomène précis vu au-dessus de l'hôtel ne se représentera donc pas. Mais il y a par contre eu un autre phénomène comparable dans la même ville, vingt ans plus tard ! Au sujet de cette seconde occurrence, Page remarque :

Vous associez — et avez raison — « l'ovni de la Place Bonaventure » (7 novembre 1990) et « l'ovni du Casino ». Toutefois, même si les photographies de ces deux phénomènes présentent des similitudes frappantes, ceux-ci n'ont pas eu les mêmes comportements. Dans le cas de « l'ovni du casino », les témoins ont rapporté que le phénomène avait disparu progressivement. La plupart d'entre eux, malgré « l'esthétisme du phénomène », ont tout de suite reconnu qu'il s'agissait d'un reflet... un reflet « bizarre » certes, mais un reflet quand même. Dans le cas de « l'ovni de la Place Bonaventure », tous les témoins, au contraire, ont rejeté la possibilité d'un reflet (cela ne leur donne pas raison pour autant).

Je ne sais pas... Si tous les témoins du Casino avaient reconnu un reflet, ils n'auraient pas contacté le groupe Ovni-Alerte, et les enquêteurs de celui-ci n'auraient pas mis un mois pour le comprendre... Et inversement, si aucun des témoins de la place Bonaventure n'avait pensé qu'il pouvait s'agir de reflets dans les nuages, on n'aurait pas fait éteindre les lumières du chantier à côté pour s'assurer qu'elles n'étaient pas en cause ! Ce qui fait la différence, c'est peut-être que les témoins qui étaient à côté du Casino voyaient bien toutes les lumières de ce dernier, qui pouvaient être la cause de réflexions, alors que ceux qui étaient sur l'hôtel Bonaventure ne voyaient pas l'origine de la plupart des lumières, hormis celles du chantier qu'ils ont justement suspectées, et celles de la piscine ou de guirlandes lumineuses qui paraissaient trop faibles pour être en cause. Mais dans les deux cas, il faut bien rappeler que les piliers de lumière n'ont rien à voir avec l'éclairement des nuages par des lumières au sol, et paraissent donc beaucoup plus mystérieux à quelqu'un qui ne connaît pas l'explication. Et le fait est que ce que montrent les photos dans les deux cas, ce sont des faisceaux lumineux qui convergent à proximité du zénith, et c'est bien la caractéristique principale des piliers de lumière zénithaux.

Pour en revenir à ma propre observation et à mes « réserves » sur l'explication de piliers zénithaux, je me rappelle que ce qui m'a frappé avec ce phénomène c'est que j'avais distinctement l'impression que ces « lumières » (lors de mon arrivée il s'agissait plutôt de halos) étaient DANS les nuages. Ce soir-là (selon Environnement Canada), la couche nuageuse faisait entre 1200 et 1500 m d'épaisseur, était « très opaque » et composée de neige et de glace. Ce plafond est passé de 1580 m (vers 20 h) à 1100 m (vers 22 h). Or, en début de soirée, les gens voyaient une « couronne lumineuse » et, au fur et à mesure que descendait ce plafond, la « couronne » devenait moins visible. Je ne suis pas un spécialiste de l'optique (ni des piliers zénithaux, j'en conviens), mais lorsqu'une surface de réflexion se rapproche de sa source lumineuse (comme une lampe de poche que l'on rapproche d'une feuille blanche), les reflets deviennent plus « brillants » et plus « concentrés », ce n'est pas ce qui s'est produit ici. C'est plutôt l'inverse. Plus les nuages descendaient sur Montréal, moins le phénomène était apparent. C'était vraiment déconcertant. Lorsque j'ai vu le phénomène, j'aurais juré qu'il y avait bel et bien « quelque chose » dans le nuage. Cela dit, je n'ai jamais cru à l'interprétation de Richard Haines concernant les dimensions «  dantesques » de l'ovni. Je n'exclus pas (au contraire) la possibilité d'un phénomène atmosphérique rarissime (comme je l'ai écrit dans mon livre « L'Enquêteur du paranormal (tome 1) », mais je reste perplexe.

Là, une seule chose à rappeler : les nappes de cristaux de glace ne sont pas les nuages, et se développent ou disparaissent indépendamment de ceux-ci.

La lettre de Wim van Utrecht n'est pas moins intéressante, et commence par des félicitations (traduit de l'anglais) :

Je suis ravi de voir que mon travail a servi à un article plus long sur ce qui est sans doute l'un des cas d'OVNI les plus instructifs de l'histoire (non seulement en ce qui concerne les témoignages, les mauvais rapports et les errances des scientifiques et ufologues, à propos d'un phénomène négligé depuis trop longtemps par les météorologues et les astronomes). Je doute que beaucoup de gens liront un article aussi exhaustif que celui-ci, mais je suis heureux de voir tout le matériel pertinent (et parfois pas si pertinent) sur cet incident rassemblé dans un seul document.

Il est content que des outils comme Google Earth et d'autres données Internet dont il ne disposait pas lors de son étude en 2008 permettent d'apporter de nouvelles évidences à l'explication par des piliers de lumière zénithaux, et reconnaît son erreur concernant l'altitude de la nappe de cristaux et son assimilation à la base des nuages.

Et il a joint à son courrier bon nombre de documents : un article du journal de Montréal que j'ai ajouté à la partie réactions de la presse ; plusieurs témoignages que j'ai aussi ajoutés ; et aussi l'article de Marc Gélinas dans le Québec astronomique défendant l'hypothèse d'une aurore boréale... et puisque cette idée a donc été pas mal évoquée j'ai ajouté une section pour en parler, appuyée largement sur cet article.

Par contre, Wim doute de mon explication de la position anormale du point de convergence des rayons par de petites variations de l'orientation des cristaux :

Je ne suis pas sûr, cependant, que ce soit une bonne idée d'évoquer l'écoulement vertical du vent autour de grands bâtiments pour résoudre la question des piliers convergeant vers un point à l'intérieur de la piscine et non l'extérieur. Non seulement il y avait très peu de vent cette nuit-là, mais nous savons que les cristaux de glace oscillent en tombant. Comme l'orientation de leurs faces principales change constamment, il est peu logique d'écrire qu'ils pourraient s'écarter d'environ 0,5° de l'horizontale. Il y a de nombreuses années, le Dr BLOMME et moi-même avons discuté de la possibilité que les cristaux de glace soient inclinés pour essayer d'expliquer une paire de vieux rapports sur des piliers solaires inclinés, mais nous n'avons jamais trouvé de réponse satisfaisante. Les seules occurrences que je connais au cours desquelles les cristaux de glace peuvent rester dans une position inclinée, c'est lors d'une décharge électrique d'un nuage d'orage (je me réfère à cet autre phénomène optique étrange connu sous le nom de Crown Flash ou parhélie instable).

De plus, d'après ce que je peux lire sur le site de Les COWLEYS, l'angle d'inclinaison des cristaux de glace peut affecter l'aspect du pilier mais pas sa verticalité (c'est-à-dire que la somme de la lumière réfléchie vers l'observateur ou la caméra doit toujours apparaître comme un pilier vertical pointant directement au zénith). Le diagramme de Robert avec les lignes rouges est un peu douteux, je pense. Pour moi, il semble que les lumières les plus petites et plus lumineuses ont un point de convergence légèrement différent que les grandes traces floues. Le pourquoi de cela, et pourquoi le point de convergence sur l'image de Google Earth se trouve à l'intérieur de la piscine, n'est pas clair pour moi. C'est une question intéressante, et si ce n'était pas le réveillon du Nouvel An, je suis sûr que ça m'aurait gardé éveillé ce soir.

Un commentaire intéressant de la part de quelqu'un qui s'intéresse depuis longtemps aux piliers de lumière ! Le fait que les piliers de lumières aient pu être causés par des arbres illuminés plutôt que par les lumières de la piscine rend cette discussion caduque, puisque le point de convergence se trouve bien alors au-dessus de la terrasse et pas dans la piscine, mais elle n'en reste pas moins intéressante.

Sur les parhélies instables mentionnées par Wim on peut lire un article sur le site Ciel des hommes, et voir aussi une impressionnante vidéo du phénomène, prise en Russie en juillet 2016.

Pour ce qui est de la dispersion de l'orientation des cristaux pendant leur chute, qui est discutée sur le site de Les Cowleys, elle n'empêche pas qu'il y ait une direction globale très précise, dont dépend la verticalité du pilier. La question est de savoir si les perturbations de l'écoulement de l'air peuvent modifier localement cette orientation générale, et dans quelle mesure...

Quoi qu'il en soit, il n'y a que pour des piliers de lumière zénithaux qu'une très petite variation de l'orientation des cristaux peut causer une déviation importante des faisceaux visibles sur la photo, par effet de perspective. La même variation sur un pilier de lumière vu près de l'horizon serait à peu près imperceptible.

Dans tous les cas, si les faisceaux des piliers zénithaux ne sont pas parfaitement convergents, ou ne convergent pas exactement au zénith (ce qui peut se vérifier lorsqu'on voit les étoiles en plus des réflexions lumineuses), ou si les piliers proches de l'horizon ne sont pas parfaitement parallèles, je ne vois pas d'autre explication à cela qu'une variation de l'orientation moyenne des cristaux. Il y a là matière à faire des recherches dans les nombreuses photographies de piliers de lumière (même si beaucoup moins nombreuses au zénith).

C'est une question qui mérite d'être approfondie, même si elle ne se pose plus vraiment pour le cas de l'hôtel Bonaventure.

Mise à jour du 31 décembre 2018

En deux ans, il y a eu beaucoup de nouveaux développements concernant cette observation à Montréal, et une nouvelle mise à jour s'imposait.

Tout d'abord, François Bourbeau, que je remercie vivement, m'avait fait part de quelques informations, et surtout m'avait transmis une photographie non recadrée, qui permettait certaines vérifications. Cette photo a été ensuite diffusée dans une version plus précise par Christian Page.

Et surtout, il a tout récemment mis en ligne des vidéos qu'il avait tournées à l'époque, dont une en particulier tournée au lendemain de l'observation sur laquelle on voit ce qui pourrait être des sources de lumières bien plus susceptibles d'expliquer les réflexions à l'origine du phénomène que les lumières éclairant le fond de la piscine... J'ai donc écourté toute la partie relative aux problèmes d'interprétation par les lumières de la piscine, et développé cette nouvelle hypothèse. J'ai aussi ajouté une recherche d'éventuelles étoiles visibles sur la photo complète, montrant une corrélation éventuelle avec une étoile mais peu convaincante.

J'ai aussi rajouté dans la partie relative aux observations en dehors de l'hôtel Bonaventure deux nouveaux témoignages recueillis par Philippe-Emmanuel Faure et par Christian Page, bien qu'ils ne soient pas très fiables du fait de la durée écoulée depuis l'observation. Par contre, Faure a aussi réinterrogé Pierre Caumartin, le témoin le plus connu en dehors de la place Bonaventure, qui apporte des précisions importantes permettant de mieux comprendre les circonstances de son observation. J'ai donc considérablement modifié la partie concernée, sans que ça remette en cause l'explication par des piliers de lumière.

Christian Page et Philippe-Emmanuel Faure encore ont aussi publié le rapport de la Gendarmerie Royale du Canada, qui était jusqu'alors introuvable dans son intégralité... J'en ai mentionné quelques passages intéressants.

Et puis, j'ai apporté un complément important à la partie consacrée au phénomène comparable qui a eu lieu en 2010 au-dessus du Casino de Montréal, du fait qu'une des photographies de l'époque a refait surface et permet de situer le lieu précis des observations. Cela permet de mettre fin à des rumeurs malveillantes propagées sur un forum d'où la contradiction est systématiquement écartée, et d'évaluer l'altitude de la couche de cristaux responsable à cette occasion des piliers de lumière.

Et puis il y a eu beaucoup de nouveaux développements concernant l'ovni de la place Bonaventure, par François Bourbeau qui a justement rapproché ce cas de celui du Casino vingt ans plus tard, par le Mufon-Québec qui a décidé à la suite de cela de « rouvrir l'enquête », et par Christian Page qui a abondamment parlé de l'hypothèse des piliers de lumière dans une émission de radio, à laquelle il m'a fait participer.

Ces nouveaux développements font l'objet de la suite, et j'ai enfin complété mes conclusions sur cette affaire.

François Bourbeau met les pieds dans la soucoupe

François Bourbeau, ufologue bien connu au Québec, a été le premier à enquêter sur l'ovni de l'hôtel Bonaventure. Dès le lendemain de l'observation, il est allé interroger notamment les témoins Line Saint-Pierre et Albert Sterling, quelques jours plus tard Marcel Laroche, et Luc Morin le 27 novembre... Malheureusement, il n'a pas publié d'enquête par la suite... Il reforme maintenant le réseau OVNI-Alerte, qu'il avait créé à la fin des années 2000, et il a mis en ligne sur Facebook les vidéos de ces interviews : Line Saint-Pierre et Albert Sterling, Marcel Laroche et Luc Morin. Et on a vu que la première montrait des détails tout à fait essentiels sur la disposition des lieux lors de l'observation, susceptibles de résoudre certains problèmes résiduels de l'explication par des piliers de lumière.

Mais après avoir rédigé mon article, j'ai appris que François Bourbeau avait peu auparavant parlé de l'ovni de Montréal, au séminaire de l'association MUFON-Québec du 30 avril 2016. Il a présenté en fait l'enquête sur l'ovni du Casino, pour revenir sur les ressemblances avec celui de l'hôtel Bonaventure 20 ans plus tôt. La conférence n'a malheureusement pas été publiée par le MUFON-Québec, pas plus qu'un compte-rendu ou un résumé, mais François Bourbeau en a cité un extrait dans sa page Facebook :

Je n'affirme pas dans l'absolu, que M. Richard Haines, anciennement de la Nasa, qui a été mandaté par Bernard Guénette (rapport Guénette-Haines), pour analyser la seule et unique photo de l'ovni du Hilton prise par le journaliste Marcel Laroche, qu'il a commis des erreurs de calculs et pire, d'interprétation de la source. Mais j'ai tenu à dire cependant que les ressemblances étaient à ce point « frappantes », que la simple logique très honnête dans toute démarche scientifique protocolaire minimale, consiste aussi à se poser la question « et si finalement il s'agissait d'un simple reflet ? »

Cette conférence a été assez mal apprécié si l'on en croit ce qu'a écrit François Bourbeau ensuite sur Google + :

Aux dernières nouvelles, suite à ma présentation de Québec le 30 avril, au Séminaire de MUFON-Québec, après avoir été PERSONNELLEMENT FÉLICITÉ par ce qui m'est apparu être une chaude poignée de main de la part du Directeur québécois du Mufon, soit Marc St-Germain, j'ai appris le lundi 2 mai qu'il avait soudainement « changé d'opinion à mon sujet », téléphoné ensuite au Directeur de Mufon Canada dans le coin de Toronto, pour lui dire que j'étais un DEBUNKER (sic), que je m'étais moqué de tous, même mon agent Don Emilion Zinno, en ne lui révélant pas le contenu de ma conférence par avance (je tenais à conserver la surprise), mais que concernant l'OVNI DU HILTON-BONAVENTURE du 7 novembrte 1990 à Montréal : « ... "il" — i.e. moi François C. Bourbeau — ne croyait en rien, que de plus je ne voulais que détruire l'affaire de l'OVNI DE MONTRÉAL !!!!! que je n'avais pas été gentil avec un spectateur qui criait après moi devant tout l'monde (re-sic), et qu'il fallait ne surtout pas m'inviter à Toronto pour leur symposium !!! » Bon Dieu ! Moi qui pensais que le Mufon était un organisme supposément SÉRIEUX ???? Cela revient à dire que si jamais un technicien-enquêteur ufologue formé et compétent (j'entends), venait à découvrir une quelconque faille dans le « système », il lui faut passer son savoir sous silence sous peine d'expulsion de ce groupe ?????? Hum ! Ç'en dit long sur la crédibilité véritable et les visages à 2 faces des supposés « ufologues » qui gravitent dans le giron du Mufon ??????

Marc Saint-Germain a pour sa part expliqué ceci sur la page de Mufon-Québec, suite à une demande :

Au moment où Bourbeau a déclaré qu'il s'agissait d'une réflexion lumineuse un des témoins de l'observation était dans la salle et a réagi. Ce témoin qui était dans la piscine avant même que l'ovni soit au-dessus de la Place Bonaventure l'a vu arriver. J'ai rencontré le témoin dans les jours suivants et j'ai fait une entrevue filmée avec lui. Par la suite je me suis procuré le rapport de Haines et celui de la police de Montréal. En vérifiant les données météorologiques du rapport de Richard Haines on en déduit qu'au moment de cette observation (des premiers témoins dans la piscine qui ont vu arriver l'ovni) il n'y avait pas encore de nuage à cet endroit. La thèse de réflexion est donc écartée (en dépit de tout ce que pourra dire Bourbeau). L'élément nouveau c'est ce nouveau témoin qui n'avait pas encore parlé publiquement de son observation laquelle amène, outre le fait d'avoir vu arriver l'ovni, d'autres éléments qui font présentement partie de notre enquête (après la conférence de Bourbeau MUFON Québec a décidé de reprendre l'enquête). Nous avons effectivement d'autres éléments nouveaux et tout ce que je peux dire pour le moment c'est que ça n'a absolument rien à voir avec une réflexion lumineuse.

Patricia Paquette a aussi contribué sur la même page, le 26 août 2016 :

C'est ni François C Bourbeau, Ni Vadnais qui sont arrivés à ces conclusions c'est moi. Je n'ai malheureusement plus les photos de l'objet du Casino, mais j'avais remarqué de frappantes similitudes voire les mêmes angles dans le phénomène lumineux. Pour ce qui est du Casino, j'avais conclu qu'il s'agissait d'un phénomène rare de pilier du zénith. En calculant les angles du Casino et de Bonaventure, j'arrive exactement au mêmes angles. Autre point. Le rapport Haines a un biais, je l'ai en ma possession. Le seul endroit dans le rapport où l'on parle qu'on a affaire à un objet et non un reflet est un diagramme avec quelques lignes et chiffres mais aucune explication sur le diagramme nulle part. Aucune documentation, référence rien. Donc à l'époque, j'ai émis à FCB cette hypothèse et il n'y croyait pas. J'ai présenté cette hypothèse à celui qui a fait l'enquête, monsieur Page et il a trouvé cela intéressant. Au Casino, on a réussi à prouver qu'en fermant les projecteurs, le reflet s'en allait. J'étais sur place. L'objet avait aussi l'air de bouger. Donc voilà.

Quant on a lu ce que Patricia Paquette répondait à tous ceux qui lui indiquaient que cet ovni était caractéristique d'un pilier de lumière zénithal, on ne peut que sourire ! Et plus loin, pour ceux qui émettaient des doutes :

J'étais la webmestre de FCB et enquêteure avec Yann Vadnais et Patrice Ratia à l'époque. Dans le rapport de police que j'ai vu et relu aucune mention de la GRC. Autre point, ce genre de phénomène relié à des cristaux de glace peut être visible aux radars. Les témoignages restent des témoignages. Le fait d'être convaincu d'avoir vu a un certain poids mais n'a pas le même poids que les évidences physiques. Je reste profondément convaincue de mon analyse. Les documents je les ai car c'est moi qui ai eu cette hypothèse. Évidemment je comprends que ce soit difficile autant pour moi que pour les autres de remettre en question ce cas.

Ohlala c'est elle qui a eu l'hypothèse des piliers de lumières maintenant ? Elle figurait depuis des années sur le site de Caelestia, et quand l'ovni du Casino est apparu les sceptiques ont tout de suite annoncé qu'il s'agissait du même phénomène, et Patricia Paquette répondait à tous ceux qui lui retournaient l'information qu'ils étaient forcément dans l'erreur puisque les phénomènes de 2010 et de 1990 relevaient manifestement de la même explication et que puisque pour 1990 un expert de la NASA avait conclu qu'il ne pouvait pas s'agir de réflexions il en allait de même pour 2010 ! Et puis il est bien mentionné dans le rapport de police de la C.U.M. : 21 h 30 : Rencontre de l'Agt Morin section Enquêtes fédérales GRC 4225 Dorchester O. Westmount H32-IV5 tél : 939-8307. Et le rapport de la G.R.C. lui-même est cité dans le rapport Haines-Guénette, avec sa référence exacte... Bref...

Et au sujet du rapport Haines-Guénette, en répondant à quelqu'un :

Je ferai un scan du rapport et je te défie de trouver l'endroit où scientifiquement on passe de reflet à objet. Il en parle pendant quelque pages. Mais un seul endroit où il étaye sa thèse par un petit graphique. Or ce graphique n'est supporté nulle part par une bibliographie, référence voire à d'anciens travaux qu'il aurait faits. Rien nada. Donc on a quelqu'un qui bien que scientifique a écrit plusieurs livres sur les OVNI donc pas désintéressé et rien sur comment il arrive à la conclusion que tel chiffre dans le graphique veut dire telle chose. J'ai même cherché via d'autres spécialistes et rien.

Bien, elle semble avoir changé d'opinion au sujet des conclusions de Richard Haines, mais elle n'avait rien dit de tel à l'époque, et du reste ce qu'elle dit maintenant est faux : les chiffres concernant le « balayage densitométrique » sont bien expliqués par Haines, mais ce qui est évident c'est qu'ils ne mettent nullement en valeur « l'objet » comme il le prétend, mais seulement les lumières qui sont censées l'entourer et qui sont toutes du même côté. Patricia Paquette a bien raison de trouver que tout ça n'a rien de scientifique, mais elle n'a rien compris à l'erreur, ou plutôt à l'accumulation d'erreurs aboutissant à la conclusion qu'il y avait un objet solide de grande dimension au-dessus de l'hôtel !

Elle explique aussi au sujet de François Bourbeau :

Pardonnez-moi Paulette Champagne l'écrit ne permet pas toujours de rendre la réalité. Le ton de mes propos pouvait donner l'impression que je tentais d'être mise de l'avant et peut paraître une bataille d'ego j'en conviens. Ce que mon ton un peu sec voulait porter était plus une exaspération face au comportement de François C Bourbeau qui a tenté de présenter le tout devant l'audience comme étant ses propres conclusions. Un différend important existe entre moi qui était sa webmestre, voire son bras droit à l'époque sur plusieurs méthodes et attitudes qu'il avait. À l'époque lorsque je lui avais présenté le tout, il avait démoli très durement ma thèse. En expliquant qu'il avait lui-même recueilli les témoignages etc. Alors qu'en fait la seule personne qui a réellement enquêté sur le cas et qui était présent sur place est Christian Page. Donc devant cette appropriation j'ai réagi un peu plus fortement que normalement. Mais il n'était pas question ici d'ego mais plutôt de justice. Pour ce qui est de Jean Morissette on se connaît très bien et l'échange se passait en privé et sur cette page de manière très amicale voire amusée. Encore dsl pour la perception.

Là c'est largement faux, François Bourbeau a bien recueilli pas mal de témoignages pour l'ovni de l'Hôtel Bonaventure, bien avant Christian Page même s'il n'a pour sa part jamais publié d'enquête. Page avait d'ailleurs honnêtement répondu en signalant les importantes contributions de François Bourbeau dans l'étude de ce cas. Et pour ce qui est de celui du Casino, c'est tout à fait clair que Patricia Paquette a fait le rapprochement avec celui de l'hôtel, mais en pensant prouver que les deux représentaient un ovni manipulant les « corridors spatiotemporels » comme le voulait Bourbeau... Les deux sont tombés de haut lorsqu'ils ont découvert que l'Ovni du Casino était bien dû à des piliers de lumière.

Yann Vadnais, l'autre ex-collaborateur de François Bourbeau au sein d'Ovni-Alerte, et créateur du Garpan, a aussi donné sa version. Dans un texte intitulé Le mètre de l'exagération, il règle ses comptes avec son ancien ami, n'ayant pas apprécié que celui-ci écrive que « tous les ufologues du Québec sont des clowns... » Bon, à chacun de se faire son opinion en lisant la prose des uns et des autres sur ce qui s'est passé, intéressons-nous juste à ce que Yann Vadnais dit au sujet de l'enquête sur l'ovni du Casino :

[Bourbeau aurait dit] Que YV n'aurait pas eu de rôle dans l'investigation de « l'ovni du Casino », le 17 décembre 2010.

Comble de l'ironie, M. Bourbeau a présenté en avril 2016, lors de sa première conférence après 5 ans d'absence...
une de mes investigations !

Je répète : après 5 ans d'absence, M. Bourbeau n'a rien trouvé de mieux à présenter qu'une de mes investigations. Jusqu'à maintenant, je n'avais pas protesté. Mais laissez-moi vous révéler ce qu'il en est.

D'abord, la preuve que M. Bourbeau n'a pas été l'investigateur principal de cette fameuse investigation, c'est qu'
il s'est trompé de date lors de sa présentation ET dans ses publications écrites à ce sujet : au lieu du 17 décembre 2010, il pensait que cela s'était produit le 17 décembre 2011... (Voir page suivante et Annexe 3)

En second lieu, il existe encore sur le web un article que j'ai écrit concernant cette investigation.

En troisième lieu, il existe encore sur le site des
Sceptiques du Québec, un commentaire de « François C. Bourbeau » affirmant ma présence lors de la seconde manifestation du phénomène (reflet d'un projecteur vertical sur la couche nuageuse).

Je ne dis pas que M. Bourbeau n'a pas participé à cette investigation : car en effet, lorsque s'est reproduit le phénomène, dans la nuit du 14 au 15 janvier 2011, lui et sa conjointe m'ont rejoint sur les lieux pour constater le phénomène une demi-heure après mon arrivée. Là s'arrête son implication dans ce cas (à ce que je sache).

La personne qui a d'abord pris le dossier en main et qui a interrogé cinq (5) des témoins de l'incident du 17 décembre 2010, c'est moi. Et la comparaison photographique avec le cas de « l'ovni de la Place-Bonaventure », c'est Mme L'Assistante qui s'en était chargée...


Eh oui, comme je l'ai montré on peut même trouver sur Internet ses TROIS articles sur l'ovni du Casino, dans lesquels il réfutait formellement l'hypothèse de piliers de lumière et défendait lui aussi celle de « corridors spatiotemporels » !

Il n'est pas douteux que Vadnais aussi bien que Paquette ont largement contribué à l'enquête, mais le fait est que c'est François Bourbeau et lui seul qui a révélé leur découverte que finalement l'Ovni du Casino n'était dû qu'à des reflets de lumières...

Depuis qu'il a fondé le Garpan, Yann Vadnais n'a jamais publié d'enquête sur cette observation, et a par contre publié de nouveaux témoignages, et de nouvelles enquêtes très orientées vers le mystère, sur l'ovni de la place Bonaventure en 1990... et cela sans jamais mentionner cette curieuse similitude avec la « réplique » de 2010 qui s'expliquait par des piliers de lumière...

Alors oui l'enquête avait été faite, et Yann Vadnais aussi bien que Patricia Paquette y ont largement et peut-être majoritairement contribué, mais depuis 2010 ils ont soigneusement gardé le silence (avec pour Patricia Paquette l'excuse d'avoir pris ses distances avec l'ufologie, mais Yann Vadnais a de son côté créé une nouvelle association très active)... Et c'est finalement François Bourbeau qui a fait en 2016 ce qui aurait dû être fait en 2011, soit avec cinq ans de retard. Les autres auraient apparemment voulu que ça dorme au fond d'un tiroir pour l'éternité !

Un enlèvement de masse pour le Mufon-Québec !

Et donc, à la suite de cette conférence dérangeante de Fançois Bourbeau puis de mon article encore bien pire, le Mufon-Québec a décidé de rouvrir l'enquête sur cette observation. Le Mufon est la principale organisation ufologique dans le monde, et elle était autrefois réputée, mais elle est depuis quelque temps très critiquée pour ses dérives sensationnalistes, et sa section québécoise ne fait pas exception... Elle a joué un rôle central dans cette affaire, puisqu'elle a vu se succéder à sa tête les principaux enquêteurs : François Bourbeau, Christian Page et Bernard Guénette... Elle est maintenant dirigée par un certain Marc Saint-Germain, lequel s'est exprimé à la chaîne Youtube les Sentiers du réel le 17 novembre 2016, à la fin d'une vidéo consacrée à un cas d'enlèvement :

Au Québec on a eu une observation intéressante qui est l'ovni de la place Bonaventure dans les années 90, puis qui est à peu près dans les mêmes années [que la vague en Belgique]... J'ai commencé à faire, bon ma petite enquête là-dessus, puis c'était beaucoup dénigré, certains disaient « oh non, finalement c'est une réflexion lumineuse », mais il y a eu des enquêtes assez approfondies qui ont été faites par Richard Haines, puis une autre personne du nom de Guénette, mais dans ce rapport-là eux semblaient dire que le rapport montre, il est conçu de façon assez scientifique, ils disaient que, bon parce qu'il y a eu des photographies de faites de l'ovni au-dessus, et puis ils disaient l'objet, ça devait être un objet solide. Donc ça excluait la thèse de l'objet, bon de la réflexion lumineuse. Et puis nous on a fait un séminaire à Québec au début de 2016, et puis bon on avait un conférencier qui avait fait une conférence sur l'ovni de la place Bonaventure, et puis il était arrivé avec la conclusion que c'était une réflexion lumineuse. Bon, on l'a laissé donner sa conférence, mais ce qui est intéressant c'est que dans la salle on avait un des témoins qui était là à ce moment-là, puis lui il était venu à notre conférence parce qu'on lui avait dit il y a des éléments nouveaux, bon ben c'était pas nous c'était l'intervenant qui avait annoncé qu'il donnerait des éléments nouveaux sur l'ovni de la place Bonaventure, donc lui était venu. Lui, bon, est sorti un peu de ses gonds, parce qu'il a dit « moi j'étais là et puis je peux vous dire que c'était pas une réflexion lumineuse parce que je l'ai vu arriver », et puis il était avec une autre personne... Moi j'ai été rencontrer ce témoin-là, et puis j'ai fait une entrevue avec lui. Là ce que je vais te dire, je l'ai dit à personne encore. OK ? Tu as la primeur. Oui parce que tu es un chic type. OK Alexis et puis bon je te remercie de m'avoir invité dans ton entrevue, et puis ceux qui vont écouter ça aussi, c'est une primeur. Euh, l'individu — parce que l'entrevue est filmée mais je l'ai pas encore rendue publique, normalement je garde cette information-là puis j'attends, bon là je vais te le dire. Il me dit « bon j'étais sur le toit de l'immeuble, ben avec plusieurs personnes, et puis il y a eu la Gendarmerie royale, il y a eu la sûreté du Québec, il y a eu beaucoup de gens crédibles qui ont vu l'ovni, et puis à un moment donné ça s'est déplacé, bon ça a été vers le stade olympique, et puis bon vers onze heures bon y avait plus rien à voir donc moi et mon collègue on a pris l'ascenseur pour aller à notre chambre, parce que ils étaient sur le toit de l'édifice, dans la piscine, et puis bon il dit bon on va descendre... Il était onze heures. On a pris l'ascenseur, on est arrivés à la chambre il était cinq heures du matin ! » Un temps manquant, puis quand je te parle d'intuition, moi j'avais l'intuition que l'événement de l'ovni de la place Bonaventure avait un lien à voir avec les enlèvements. Mais c'est des enlèvements de masse, mass abduction, ok ? Ici, ça fait partie d'un enlèvement de masse. Dernièrement j'ai discuté de ça avec, bon Richard Glenn, pour pas le nommer, et puis il me dit « Marc, il dit, justement j'ai un témoin — il m'a donné ses coordonnées — qui est resté dans le nord de Montréal, qui elle a vu l'ovni arriver puis se positionner là ». Elle était avec une dizaine de personnes, donc on parle pas d'un témoin on parle d'une dizaine de témoins. Mais en même temps dans le témoignage il était question d'enlèvement aussi, parce que ces individus-là y a certaines personnes qui ont eu du temps manquant en même temps. Et puis comme je l'ai dit tout à l'heure quand il y a des enlèvements souvent c'est pas qu'un individu, c'est plusieurs. Donc, nous, on a réouvert l'enquête de l'ovni de la place Bonaventure, mais on commence à avoir suffisamment d'informations pour arriver avec de nouvelles révélations. Celle-là c'est la révélation assez incroyable, et puis je sais déjà que si bon cette information-là fait son chemin et puis se retrouve au Québec je vais en entendre parler et puis là des gens vont dire « ah mais qu'est-ce que tu racontes là c'est pas possible », bla bla bla... « Il est en Belgique il a bu une bière... » Oui c'est ça, t'as bu trop de Leffe... Mais nous on fait un point d'honneur à monter des enquêtes sérieuses, et puis malgré le fait que ça peut sembler complètement incroyable des fois ben la réalité ça dépasse la fiction. C'est un peu ça.

Marc Saint-Germain a développé cette histoire, et diffusé l'interview de ces nouveaux témoins, au séminaire Mufon-Québec de 2018, dont la vidéo est maintenant publique...

Il commence par se moquer de Robert Lamontagne, l'astronome qui a déclaré avec sérieux que c'était des aurores boréales :

Ça c'est notre debunker national à nous autres au Québec ici... Bon avant Christian Page...

Mais heureusement qu'il y a aussi des gens sérieux qui ont étudié ça :

Richard Haines et Robert Guénette, qui ont décidé d'enquêter là-dessus... Hein ils ont fait une recherche approfondie, ils ont analysé la photo, la fameuse photo qu'on voit là, mais il y a une autre photo aussi, celle là je l'avais pas mise là-dedans, et puis là ils ont analysé ça, mais pas des petites analyses, ils ont envoyé ça par le laboratoire de la Nasa, bon, puis les conclusions c'était que bon, c'était un objet solide. Ça c'est les conclusions d'un rapport sur les photos.

On continuera encore longtemps à en parler, du rapport d'un expert de la Nasa concluant que la photo montre bien un objet solide ! Et puis il reparle de l'intervention surprise de François Bourbeau :

Mais au début de tout ça quand j'ai commencé à m'intéresser à ça je connaissais absolument rien de ce cas-là, ben oui on a vu des photos et cetera, et puis je savais que François Bourbeau lui avait enquêté là-dessus, il avait interrogé des témoins dans ce temps-là, donc au séminaire à Québec en 2016, y a deux ans, on avait approché François Bourbeau pour qu'il nous donne une conférence sur les informations qu'il avait amoncelées sur l'ovni de la place Bonaventure. Et puis on a eu une surprise, une méchante surprise. Finalement François Bourbeau il a fait sa conférence et puis il a dit que c'était rien d'autre que les réflexions lumineuses. Puis là Monsieur Marquis s'est levé, puis il a dit « moi j'étais là, puis c'était pas ça, ça peut pas être ça ! » Donc j'ai dit à monsieur Marquis, « ???, on va en parler après, et puis on va faire une entrevue. »

Et il diffuse donc cette entrevue avec Monsieur Marquis, que je retranscris intégralement :

— Bonjour, merci d'avoir bien voulu collaborer avec nous dans le cadre de cette enquête sur le cas de l'ovni de la place Bonaventure. Donc c'est arrivé le 7 novembre 1990, puis vous vous êtes un des témoins principaux qui étaient dans la piscine à ce moment-là.

— Oui c'est bien ça.

— Pouvez-vous nous décrire à partir du début en gros comment ça s'est passé, comment vous vous êtes ?? à l'hôtel de la place Bonaventure, quand vous avez perçu l'objet, tout le déroulement de cette histoire-là que vous avez vécue personnellement ?

— Ok moi une semaine avant c'était ma fête puis j'avais un ami qui me l'a souhaitée une journée en retard, puis il m'avait dit « ben vu que tu étais en retard ben j'ai eu des billets sur quelque chose ?? qui a eu des billets pour une nuit, et puis j'ai pensé à un ou deux potes qui avaient... Et puis y en avait pas un qui voulait, ben comme je suis seul ben viens avec moi on va prendre cette journée ?? », et on était là je me souviens on est arrivés là ben je dirais il était aux alentours d'onze heures le matin, et puis là on s'est inscrits, on a été à notre chambre, et puis là on a passé la journée on était ?? à quatre places, et puis le soir quand on est revenus il était je sais pas, pas loin de six heures, alors c'est là qu'on s'est décidés, « ben y a une piscine sur le toit, ben on va aller l'utiliser il paraîtrait qu'elle est chauffée », et moi c'est la première fois j'avais jamais été me baigner dans une piscine au mois de novembre... On est montés, ben quand on est partis il était vers sept heures moins dix à peu près, vers sept heures sept heures moins quinze, on est partis le temps de monter en haut puis là on est rentrés dans la piscine, ça faisait là je dirais peut-être cinq, dix minutes, grand maximum quinze, c'est dur à déterminer parce qu'on n'avait pas nos montres.

— Donc autour de sept heures plus ou moins cinq minutes

— Dans ces alentours-là. Alors moi j'étais dans la piscine, puis je vois une lumière qui s'en vient de loin dans le ciel je dis...

— De loin mais mettons une estimation de où ça pouvait être au début cette lumière-là...

— C'est venu entre ce qu'on appelle, ben maintenant ça s'appelle le Grand Hôtel, aujourd'hui je pense c'était le Delta, c'est changé pour la résidence Soleil je pense. C'est pas compliqué tu mets Grand Hôtel c'est pas dur à reconnaître d'autant ??? en haut. C'est entre ça et je dirais le pont qui traverse l'université là, de là on le voit de loin, j'étais là au début je dis « bon, c'est une lumière y a quelque chose », mais là, ça vient vers nous-autres, tranquillement...

— C'était quoi exactement que vous voyiez venir vers vous ?

— C'était une lumière comme, je dirais jaune-orangé... Et puis au début je dis « c'est peut-être un avion », et là ça s'approche, ça s'approche, et je dis à mon ami qui est devant moi, je dis « y a quelque qui s'en vient, je sais pas c'est quoi... » On se regarde et puis là ça s'en vient, ça vient à l'hôtel, ça s'arrête au-dessus. Et puis là tu dis ben non, là y a quelque chose, là c'est pas... Là tu regardes ça et puis à un moment donné ça se stabilise au-dessus.

— Vous pourriez faire un petit croquis de ce que vous aviez vu à ce moment-là ?

— Quand c'était au-dessus ? Au-dessus c'est quelque chose qui était comme un, je dirais c'était une affaire qui ressemblait, à peu près comme ça là, en dessous y avait comme des spots qui sont ici, mais ça semble un petit peu ovale. Mais c'est pas parfaitement ovale, c'est comme, y a des lumières à l'intérieur qui sont ici...

— Il y avait plusieurs lumières ?

— Il y en avait huit. Mais au-dessus c'était au-dessus de moi, puis au-dessus là on voyait des spots comme ça, blancs, qui sortaient en haut.

— Ok, des effluves de lumière...

— Oui, mais c'est comme si ça avait été par dessus, c'est pas cette lumière-là ici qui éclairait en bas là, c'est comme si ça éclairait en ligne droite.

— Des rayons lumineux qui partaient de ces...

— C'était comme blanc je dirais, c'est pour ça qu'on les voyait je dirais c'était pas la même couleur que la lumière qui est ici.

—  La photo qu'on a vue, qui a été prise par le journaliste, versus ce que vous vous avez vu à l'oeil nu, c'est quoi la différence ce qu'on voit ?

— Ok, d'après moi la photo c'était ça. La seule chose que je... moi d'après moi, y a un zoom dans le cadrage j'ai l'impression, qui était éloigné. C'est comme si ce qui à nous autres va peut-être, quoi, faire dans le ciel, c'est comme s'il était éloigné par le... qu'il était zoomé plus loin… Mais les couleurs sont là, sont les bonnes couleurs.

— Ok, donc, à partir de là, quand vous avez vu ça au-dessus de la place Bonaventure, qu'est-ce qui s'est passé par ls suite, parce que vous étiez trois dans la piscine ?

— Non on était deux dans la piscine, l'autre il était pas dans la piscine il était au-dessus. Là ce qu'on a fait quand on est sortis, bientôt y avait encore juste nous autres. Quand on est retournés en bas on a été se changer, on s'est dit on va revenir. ??,  On est redescendus, on a été se changer, on a pris notre douche, on est revenus, et là par contre y avait au moins une vingtaine de personnes sur le toit.

— Et quand vous êtes revenus après...

— C'est là qu'il y avait une vingtaine de personnes, je les ai pas vus arriver moi ces gens, mais ils étaient là... Moi je peux parler pour moi là, j'ai essayé de regarder le plus de détails, même y aurait eu une fanfare à côté de moi qui aurait joué là, et puis qui m'aurait demandé quel air qu'ils ont joué, j'aurais pas su répondre, on était... ?? sur cette affaire-là. C'est comme, on regardait ça on savait qu'il se passait quelque chose mais c'est comme pas conscient de ce qui se passe.

— Qu'est-ce que vous entendez par là, qu'il se passait quelque chose ??

— Ben on était tellement occupés là à regarder cette affaire-là que il peut entrer du monde là, il peut en sortir on était pas alertes à ça. On regardait la lumière dans le ciel, c'est ça qu'on regardait. À un moment donné ça devenait comme une obsession, tu regardes ça dans l'eau puis c'est pas normal, puis c'est quoi ? Là la question « c'est quoi » qu'on s'est posés au début, bien sûr ?? ils disaient « ah ça c'est des extraterrestres », non non, terminé...

— Combien de temps à partir de cette deuxième observation-là, votre retour, la chambre, vous avez commencé à regarder ça, vous avez regardé ça environ jusqu'à quelle heure à ce moment-là ?

— Jusqu'à à peu près dix heures, dix heures et quelque chose avant que ça commence à bouger... C'est quand il est parti vers l'est, je dirais vers l'est, nord, mais peut-être un peu... Moi je pense que c'est vers le stade olympique qu'il est parti.

— Quand après l'observation finale, après ça qu'est-ce que vous avez fait ?

— Ben on s'est posé un paquet de questions... « Qu'est-ce qu'on fait de ça » ? Avant de descendre on s'est posé quelques questions... On a parlé dessus, « ??? J‘ai vu ça là, c'est pas normal »... « Là, qu'est-ce que c'est », on s'est posé la question, « là ils vont tous nous prendre pour des fous », mais on disait « y avait du monde sur le toit, on va voir», là en fait on s'est dit « on va attendre voir s'ils vont en parler dans le journal ou aux nouvelles. On n'est pas sûrement les seuls qui ont vu ça, déjà sur le toit », puis on s'est dit « il doit y avoir du monde en bas qui ont vu ça aussi ». Donc là on s'est dit « ben on va aller se coucher parce que moi je travaille demain à cinq heures demain je pars bosser ». Je rentre là, on arrive à notre chambre, et puis il y a un cadran dans la chambre et puis c'était marqué quatre heures quarante et un ou quarante deux je pense.

— Et vous êtes partis du toit il était vers dix heures et quart, à peu près.

— On pense, non peut-être dix heures et demie, parce que on est peut-être restés là à se poser quelques questions peut-être bon dix, douze ou quinze minutes. Même on s'est demandé des fois si ça pouvait revenir.

— Vous êtes arrivés à votre chambre à quatre heures quarante...

— Quatre heures quarante c'était marqué ça sur le cadran on s'est dit « pour moi cet appareil-là ça a déboîté le cadran », puis là on a pris nos montres qui étaient restées dans la chambre puis on a vu que c'était la même heure, et puis moi à cinq heures fallait que je sois... j'ai pas pu me coucher.

— Et puis l'heure sur vos montres, l'heure était la même que sur le cadran, il était quatre heures quarante, et puis vous deviez partir pour travailler à cinq heures, donc vous êtes jamais rentré dans votre chambre en fin de compte...

— C'est dans notre chambre qu'on a vu ça...

— Non mais je veux dire vous vous êtes pas couché, vous avez pas profité de votre chambre... Là vous êtes en train de me dire que vous avez perdu comme six heures de temps.

— Six heures de temps.

— Six heures de temps manquant, ok.

— On sait pas si... Je peux pas te dire, on a cherché des explications...

— Parce que la personne qui était avec vous elle a aussi vécu cette expérience, et puis elle a confirmé ça aussi, ok...

— Et puis après on a vu des témoignages, tout ce qu'on a vu, c'est dit, excepté ça, la partie de temps manquant... C'est pour ça on s'est dit à un moment donné y a quelqu'un qui va faire un témoignage il va peut-être parler de ça...


Après quoi un message s'affiche sur la vidéo :

Depuis que MUFON Québec a réouvert l'enquête de l'ovni de la Place Bonaventure, plusieurs témoignages de temps manquant ont été rapportés en lien avec cet événement.

Et alors où ils sont les autres témoignages de temps manquant ? C'est surtout eux qui manquent, parce que le fait est qu'on ne nous parle d'aucun autre. C'est un peu comme le commentaire de Marc Saint-Germain un peu avant : Parce que la personne qui était avec vous elle a aussi vécu cette expérience, et puis elle a confirmé ça aussi, ok...

Ben oui comme d'habitude quand il y a un témoin qui dit des choses extraordinaires et qui était accompagné d'une autre personne, le témoignage de l'autre on ne l'a pas, mais ça n'empêche par les ufologues d'être persuadés de tenir un témoignage multiple !

Donc, on a juste ce témoin, Monsieur Marquis, qui affirme vingt-six ans plus tard qu'alors qu'il nageait dans la piscine il a vu l'objet arriver, vers 19 heures, alors qu'à l'époque aucun des témoins n'a prétendu une telle chose... Aucun en particulier des témoins qui étaient debout sur la terrasse et qui étaient bien mieux placés que ceux qui nageaient dans la piscine pour voir l'objet arriver ! Le rapport Haines-Guénette écrit : Une touriste américaine nageait dans la piscine, elle fut la première à voir l'étrange objet éclairé dans le ciel nocturne juste au-dessus de sa tête aux environs de 19 h 15. Quel dommage que Monsieur Marquis ne se soit pas manifesté à ce moment-là !

On ne sait pas trop de quelle direction il venait, les indications sont difficiles à comprendre :

C'est venu entre ce qu'on appelle, ben maintenant ça s'appelle le Grand Hôtel, aujourd'hui je pense c'était le Delta, c'est changé pour la résidence Soleil je pense. C'est pas compliqué tu mets Grand Hôtel c'est pas dur à reconnaître d'autant ??? en haut. C'est entre ça et je dirais le pont qui traverse l'université là, de là on le voit de loin...

Je n'ai pas trouvé de Grand Hôtel, des Delta et des résidences Soleil il y en a plusieurs, et je ne vois pas de pont traversant une université... Et notons au passage que la terrasse de l'hôtel Bonaventure est entourée de bâtiments, on ne voit donc rien d'extérieur à l'hôtel (et moins encore quand on nage dans la piscine) sinon quelques hautes tours qui dépassent, mais sûrement pas un pont. Alors peut-être que tout ça peut parler à un Montréalais, dans ce cas ça serait bien que le Mufon fasse un peu de commentaires au lieu de nous noyer sous des témoignages enregistrés, ça permettrait d'y voir un peu plus clair... Enfin ça n'a guère d'importance, ça permettrait juste de savoir si cette « arrivée » était conforme à ce qu'avait dit l'officier Lippé dans son rapport de police : On me mentionna que l'objet s'était déplacé de l'hôtel de la Bourse jusqu'au-dessus de l'hôtel Bonaventure. L'hôtel de la Bourse s'est aussi appelé Delta centre-ville, c'est donc peut-être de celui-là que parle le témoin, et il se se trouve à l'est-nord-est du Bonaventure.

Pour la description rien d'inhabituel : deux types de lumières, des jaune-orangé qui formaient comme un ovale, d'autres blanches qui paraissaient au-dessus et émettaient des faisceaux vers l'extérieur, huit au total...

Son dessin ressemble beaucoup à ceux des témoins interrogés dans le rapport Haines-Guénette :

Forme ovale avec 8 lumières émettant des faisceaux douleur indiquée jaune pâle à blanc

Après avoir un peu observé cette chose formidable, nos deux témoins sont allés tranquillement se changer et se doucher, et sont revenus pour voir si c'était toujours là... Et ça l'était, et ils ont pu observer jusqu'à la fin le spectacle, complètement fascinés au point de ne prêter aucune attention à ce qui se passait autour d'eux, jusqu'à ce que l'objet s'éloigne à 22 heures passées.

Parce que non seulement Monsieur Marquis a vu l'objet arriver, mais il l'a vu aussi partir, alors que là encore aucun des témoignages de l'époque ne le rapportait : certains mentionnent un léger déplacement, mais tous disent que l'objet a peu a peu disparu dans les nuages... Quoi qu'il en soit, cette fois la direction est précise : Moi je pense que c'est vers le stade olympique qu'il est parti. Comme par hasard le stade olympique, là où Pierre Caumartin l'a vu peu après.

Et ça n'était pas fini, puisqu'après avoir vu l'objet partir vers 22 heures 15 et avoir encore discuté à peu près un quart d'heure, guère plus, ils sont descendus à leur chambre pour se rendre compte avec stupeur qu'il était quatre heures quarante, sans qu'ils aient aucun souvenir de ce qu'ils avaient fait pendant ces six heures « manquantes » !

Là encore, tant que le Mufon ne nous aura pas donné les autres témoignages de « temps manquant » qu'il est censé posséder au sujet de ce cas, on ne peut que constater que M. Marquis est le seul à avoir signalé quelque chose d'aussi extraordinaire...

Il peut être intéressant de s'interroger aussi sur les circonstances du séjour à l'hôtel de ce témoin. Il nous dit que c'est l'ami qui l'accompagnait qui lui a offert cette nuit, ainsi que tout l'après-midi à faire on ne sait quoi (je n'ai pas réussi à comprendre cette partie du témoignage), pour fêter un peu en retard son anniversaire (il dit sa fête, mais au Québec la fête de quelqu'un c'est son anniversaire). Donc, les deux ont passé l'après-midi à faire la fête, et sont allés à l'hôtel pour continuer en soirée, lorsqu'ils ont fait leur observation... Sans avoir l'esprit tordu, on peut imaginer que lorsqu'on a une trentaine d'années (il me semble avoir vu quelque part que c'était son âge à l'époque, je ne retrouve pas où mais en tout cas ça ne doit pas être loin) et qu'on va passer une journée à fêter son anniversaire avec un pote, on reste rarement tout à fait sobre... Et j'ai connu beaucoup de gens qui ont eu un « temps manquant » après une journée bien arrosée, sans que les extraterrestres y soient pour quelque chose ! Il ne s'agit bien sûr que de spéculations, mais il me semble que compte tenu des circonstances la question devrait au moins être posée, et Marc Saint-Germain ne le fait pas... On pourrait croire qu'il a peur que la réponse ne lui convienne pas !

Bref, on a au Mufon-Québec un témoin passionné par les ovnis, suffisamment pour se rendre à un séminaire sur le sujet, qui se trouvait sur le toit de l'hôtel avec les autres après avoir passé la journée à faire la bringue, qui témoigne après vingt-six ans en affirmant que contrairement à tous les autres témoins il a vu l'objet arriver, puis repartir vers le stade olympique, qui se fâche lorsqu'on considère que l'objet vu par toutes ces personnes a trouvé une explication, et qui ajoute qu'après l'observation il a eu un « temps manquant » de six heures ! Bien évidemment il était accompagné d'un ami mais on n'a pas le témoignage de ce dernier, et voilà que cet unique témoignage suffit à convaincre le directeur du Mufon-Québec que l'ovni de la place Bonaventure est lié à des enlèvements de masse !

Ou plutôt non, ça s'appuie sur un autre témoignage, qu'il introduit ainsi :

Et puis quand je disais qu'on devait rester ouvert d'esprit, ça fait environ deux ou trois ans, j'ai rencontré une dame qui elle a fait une observation à Montréal, et puis ben à ce moment-là bon j'avais à faire dans le coin, je l'ai rencontrée, j'ai fait une petite entrevue avec elle... Puis l'information qu'elle donnait c'était trop... C'était trop, là dans ma tête elle avait eu une vision, au-dessus de ??, j'essayais de rationaliser un petit peu son observation ben elle me disait non non, c'est quelque chose qui est arrivé, qui s'est passé, mais ces personnes-là, qui vivent seules, c'est flou, c'est un peu comme un rêve, elle dit aussi dans l'entrevue qu'on a faite, c'était un peu comme un rêve, et puis des fois y avait des événements qui fait que ça remonte à la surface. Elle c'était une observation qu'elle avait faite à Montréal mais dans les années 2014, et puis elle nous a contactés quand elle a fait cette observation-là, mais cette observation-là fait que ça a débloqué plein plein de mémoire, pas toute mais une certaine partie, plusieurs mémoires. Et puis y en a une qui trahit avec l'observation de l'ovni de la place Bonaventure, puis ça c'est quelque chose...

Suit l'interview de ce témoin, dont je donnerai juste un résumé étant donné qu'il est long et qu'il faut avoir la foi du charbonnier pour lui trouver un rapport avec l'ovni de la place Bonaventure, mais elle est dans l'intervention de Marc Saint-Germain au symposium...

Donc, cette dame habitait à Fonrouge, et a vécu plusieurs expériences « d'enlèvement », qui sont « comme un rêve mais c'est pas un rêve » et qui ont resurgi bien plus tard... Et elle est sûre que ça n'est pas un rêve parce qu'une nuit où elle a fait une de ces sorties avec des extraterrestres à la peau toute blanche et aux yeux foncés, sa voisine a vu au-dessus de sa maison une « boule blanche »... Ça se passait en 1980 ou 81.

Et une autre nuit, bien plus tard, « on pourrait dire dans les années 90 », elle s'est retrouvée dans un vaisseau avec des tas de petits êtres, de petits extraterrestres, tous pareils et de couleur peau, et au fond du vaisseau il y avait comme une grande vitre à travers laquelle on voyait le ciel étoilé et à un moment elle a vu passer Pluton... Bon elle savait que c'était Pluton parce qu'elle savait que c'était la fin du système solaire, mais bizarrement elle ne mentionne pas son satellite Charon, presque aussi gros que lui et tout proche ! Elle était avec une dizaine d'autres personnes dans le vaisseau, outre les petits extraterrestres, ils ont tous été transformés en « êtres de lumière » et ils ont ainsi traversé tout le système solaire, et sont revenus au-dessus de Montréal, pour se poser près du Palais des Congrès... Et là il y avait des tas de gens qui attendaient et qui sont tous montés dans l'ovni...

« Tout le monde montait, tout le monde, tout le monde... Tout le monde sans exception. Ça s'est fait comme ça. » Et son récit s'arrête là, je suppose qu'après elle s'est réveillée...

Et c'est là que pendant la conférence de Marc Saint-Germain, apparaît une image de Google maps montrant que le Palais des congrès est à seulement 600 mètres de l'hôtel Bonaventure... Et voilà le lien ! Le témoin lui-même ne l'a jamais fait, elle dit juste : J'en ai parlé avec une amie, une fille qui est très ouverte avec UFO, et puis elle a dit qu'il y avait quelque chose comme ça qui était arrivé à Montréal, mais moi dans ce temps-là il me semble que je restais pas à Montréal, je restais dans la région de Québec, mais elle elle me dit que c'était arrivé à Montréal, cet événement-là.

Donc, elle dit que dans son souvenir elle n'était pas à Montréal au moment de l'observation de Bonaventure, que ça n'est donc pas à ce moment-là qu'elle a fait son « rêve qui n'était pas un rêve » qu'elle situe juste « dans les années 90 », mais parce qu'elle s'est vue enlevée avec des tas d'autres personnes à 600 m de l'hôtel Bonaventure Marc Saint-Germain en déduit que le célèbre ovni est lié à un enlèvement de masse !

Rappelons en outre ce qu'il disait au sujet de cette dame aux « sentiers du réel » : Elle était avec une dizaine de personnes, donc on parle pas d'un témoin on parle d'une dizaine de témoins. Ah oui dans son rêve elle a traversé le système solaire avec une dizaine d'autres personnes, et donc « on parle pas d'un témoin on parle d'une dizaine de témoins »... C'est affligeant ce que l'ufologie est devenue dans des associations autrefois sérieuses !

Et puis Marc Saint-Germain nous parle de la vague Belge, puis de celle du 5 novembre 90 en France, qu'il ne connaît que par quelques témoignages déposés sans la moindre enquête presque trente ans après l'observation : Il y a des cas qui sont arrivés dans ces dates, mais en Europe, en France. La vague d'ovnis belges c'est dans ces années-là... Mais les ovnis ils sont pas là pour rien, qu'est-ce qu'ils font ? Mais, ils enlèvent des gens, c'est un petit peu ça qu'ils font...

Et puis il parle quand même des piliers de lumière, pour dire qu'il n'en discutera pas parce que l'enquête à ce sujet a été confiée à quelqu'un d'autre au Mufon-Québec, Philippe-Emmanuel Faure :

Ça c'est un témoignage, parmi tant d'autres, ok ? Il y a eu une ?? d'?? en lien avec cette observation-là, des piliers lumineux zénithaux... OK... Et puis Philippe-Emmanuel quand il faisait son enquête à un moment donné il est tombé sur quelque chose sur internet, un gars en France qui avait développé, puis il disait pourquoi, puis comment, et puis bon Philippe il a dû encore déconstruire tout, il a dit non en fin de compte ça peut pas être ça... Je rentrerai pas dans ces détails-là, bon c'est pas vraiment d'intérêt pour nous autres...

Ah, voyons un peu qui est cet enquêteur qui a « tout déconstruit »... On trouve la présentation de Philippe-Emmanuel Faure sur l'annonce du séminaire de l'année précédente, en 2017 :

Philippe-Emmanuel a une formation en Administration (bac et maîtrise) de l'UQAM. Il est passionné par l'astronomie et l'ufologie depuis son enfance et c'est seulement depuis 2015 qu'il a commencé à étudier le sujet sérieusement. C'est à l'automne 2016 qu'il découvre l'existence du MUFON et qu'il décide de passer la formation d'enquêteur. Il devient enquêteur certifié en janvier 2017. Les cas historiques le passionnent et c'est pour cette raison qu'il a accepté avec grand plaisir de présenter le cas de la Place Bonaventure.

Bref, ça fait deux ans qu'il étudie vraiment les ovnis, et il est tout fraîchement « enquêteur certifié » du Mufon avec des « formateurs » de la trempe de Marc Saint-Germain... Les résultats de son enquête ont été publiés dans le bulletin interne du Mufon-Québec, je n'en ai donc pas eu connaissance, et il a fait sa conférence le 22 avril 2017 pendant le séminaire, dont aucun compte-rendu n'a été publié... On se demande à quoi ça sert ces séminaires si rien n'est publié ensuite.

On trouve juste une courte déclaration de Philippe-Emmanuel Faure dans l'annonce du Séminaire :

Personnellement après tout ce que j'ai enquêté, tout ce que j'ai vu, et surtout les témoins avec qui j'ai parlé, parce que j'ai rencontré beaucoup de nouveaux témoins qui n'avaient jamais été entendus auparavant, euh moi je suis convaincu qu'il y avait bel et bien un objet physique au-dessus de l'hôtel Bonaventure, et pas juste au-dessus, ça s'est déplacé dans les deux Montréal, ç'a été aperçu à différents lieux de la ville, sur la rive sud, sur la rive nord, partout, et j'ai des témoins qui ont tous vu ça et il faut donner plus de crédit aux témoignages des gens... Ils savent ce qu'ils ont vu, et souvent c'est insultant pour eux, parce qu'ils me disent « je sais ce que j'ai vu, je suis pas fou ». Pour être honnête la version officielle je sais pas pourquoi ça a tourné comme ça, est-ce que c'est du camouflage, est-ce qu'on fait exprès de noyer le poisson pour pas qu'on en parle, tout ça c'est très possible, ça s'est déjà vu dans le passé, il y a beaucoup de cover up, comme on dit, qui ont été faits dans le passé sur un paquet de cas d'ovnis, est-ce que celui de Montréal c'est ça, peut-être, c'est très très très possible, mais ce qui est pas normal c'est qu'un événement de cette ampleur-là soit tombé dans les oubliettes et n'ait pas été enquêté plus sérieusement que ça... Surtout quand on a des gens aussi qualifiés que Richard Haines qui ont sorti un rapport qui est quand même extrêmement bien documenté en disant « il y avait un objet physique au-dessus de Montréal », qui avait été sorti deux ans après les faits. Je trouve ça incroyable qu'on soit pas allé plus loin. Mes conclusions... Mes conclusions personnelles à moi c'est que moi j'ai pas fini d'enquêter parce que j'ai encore des gens à entendre, parce que là il y a des théories, j'entends des nouvelles choses comme du temps manquant, des... aller dans des vaisseaux extraterrestres, même pour moi je suis enquêteur, c'est des choses... il faut avoir l'esprit ouvert... Je veux même pas dire si j'y crois ou pas, ce que je veux dire c'est qu'il y a des gens qui racontent des choses, et des gens qui croient à ce qu'ils disent et qui n'ont pas l'air de mentir ou quoi que ce soit, donc c'est des gens qu'il faut quand même écouter, parce qu'on a des témoignages qui se rejoignent, de différentes personnes qui se connaissent pas, et il faut les écouter, il faut les écouter... On écoute les témoignages dans les cours de justice de gens, on envoie les gens derrière les barreaux, basé sur des témoignages, il faut écouter les gens quand ils parlent.

Hum heureusement que les juges n'envoient pas les gens derrière les barreaux en croyant sur parole tout ce que disent des témoins, surtout après vingt-six ans : ils les comparent entre eux, ils cherchent les incohérences dans leurs témoignages successifs, ils les confrontent à des évidences physiques telles que des photographies... Bref ils font exactement ce que nous avons fait ici, et ils constatent à quel point la mémoire d'un événement peut être déformée après une telle durée !

M. Faure m'a envoyé un mail le 13 avril, ayant été informé de mon article par Christian Page. Il semble douter que j'accorde de l'importance aux témoignages, et ajoute :

J'ai interviewé plusieurs témoins qui n'avaient jamais été entendus avant ce jour et croyez-moi, on est TRÈS loin des piliers lumineux. Si bien sûr, vous accordez du crédit à ces récits. J'ai des témoins qui ont vu le phénomène se déplacer vers le centre-ville alors qu'il faisait encore jour. J'ai un témoin qui l'a tellement bien vu qu'en en parlant pour la première fois publiquement, il en tremblait. Je vais mettre la vidéo en ligne après ma présentation à un séminaire le 22 avril.

Et puis, s'il apprécie mon travail (c'était du moins le cas lors de ce premier échange, depuis il semble avoir changé d'avis), il trouve que je manque de classe pour avoir attaqué celui de Richard Haines de cette façon, mais n'apporte aucun commentaire sur mes critiques factuelles et vérifiables.

Je lui ai répondu :

Monsieur Faure, merci pour votre message...

Habitant à Marseille, je n'ai bien évidemment parlé à aucun témoin du phénomène de Montréal, mais vous dites que je n'ai pas eu de mal à convaincre Christian Page (ceci dit, vous m'apprenez que je l'ai convaincu), et lui a rencontré beaucoup de témoins, et certains le soir-même, il me semble donc que son avis a de l'importance.

Mais oui, j'accorde une grande importance aux témoins oculaires, et pour d'autres cas où j'en ai rencontré (notamment la vague du 5 novembre 1990 en France) je me suis toujours efforcé de montrer qu'ils avaient pour la plupart correctement décrit le phénomène qu'ils observaient, même s'ils ne l'avaient pas reconnu (une rentrée atmosphérique dans le cas du 5 novembre 1990).

Et il en va de même pour le cas de Montréal, j'ai me semble-t-il abondamment cité tous les témoignages dont j'avais connaissance. Parmi les témoins il y en a qui étaient persuadés d'être survolés par un immense vaisseau extraterrestre, et ça me paraît normal que ceux-ci puissent encore trembler lorsqu'ils évoquent cet événement, mais il y en a d'autres qui observaient la même chose et qui pensaient qu'il s'agissait d'un phénomène lumineux naturel, comme la réflexion de lumières sur les nuages ou une aurore boréale.

J'ai pu aussi constater à de nombreuses reprises que les souvenirs des témoins sont très largement déformés avec le temps, et j'accorderai donc beaucoup moins de crédit à un récit fait après 25 ans qu'à un témoignage immédiat. C'est tout à fait patent dans le cas qui nous occupe, avec les premiers témoignages qui parlent juste de lueurs dans le ciel, précisément ce qu'on voit sur les photographies, et un « objet » qui prend de la consistance avec le temps, y compris sur les schémas des témoins (pas un seul qui présente un « contour » de l'objet parmi ceux qui ont été dessinés après quelques jours, mais ce détail apparaît par contre sur plusieurs schémas faits après un an).

Tout cela m'a convaincu que ce qu'ont vu les témoins sur le toit de l'hôtel Bonaventure s'explique bien par des piliers de lumière zénithaux, et puisqu'il n'y a pas de raison que la couche de cristaux de glace responsable n'ait été présente qu'au-dessus de l'hôtel il est clair aussi que bon nombre d'autres témoignages à d'autres endroits de la ville relèvent du même type de phénomène...

Ceci dit, étant donné le large écho médiatique suscité par le phénomène, il n'est pas du tout exclu que cela ait drainé aussi des observations relatives à tout autre chose, qui peuvent se révéler intéressantes. Je n'ai rien vu pour l'instant qui m'ait convaincu qu'il y a eu quelque chose de vraiment inexplicable ce soir-là, mais je suis toujours curieux de prendre connaissance de nouveaux témoignages et j'attends donc avec impatience le compte-rendu de votre intervention au congrès du Mufon.

Concernant maintenant le travail de Richard Haines, je n'ai aucune compétence particulière dans le domaine de l'analyse photographique, mais le problème c'est que visiblement lui non plus et il passe pourtant pour un expert en la matière. J'ai exposé de façon claire toutes ses erreurs dans cette « expertise », et il n'est pas besoin d'être un expert pour comprendre par exemple que quand on mesure précisément sur une photographie la dimension angulaire de ce qu'on pense être un « objet », et qu'on s'appuie ensuite sur l'estimation moyenne des témoins, plus de dix fois plus importante, pour calculer la dimension de cet objet et la présenter comme une « limite inférieure raisonnable », il y a quelque chose qui ne va pas ! Si quelqu'un me montre qu'une de mes critiques est infondée ou excessive, je corrigerai aussitôt et adresserai mes plus plates excuses à Richard Haines... Mais j'ai pour habitude de ne pas critiquer un travail sans être sûr de mon fait, alors je doute que cela arrive, et pour l'instant en tout cas personne ne m'a rien dit de tel, pas plus vous-même qu'un autre. Alors j'ai l'impression que vous admettez que le travail de Haines sur cette photo soit entaché d'erreurs énormes, mais que vous ne voudriez pas qu'on le dise parce que Haines est un ufologue respecté et, je n'en doute pas, un homme charmant ! Je suis désolé mais mon sentiment est que c'est avec ce genre d'attitude qu'on discrédite l'ufologie aux yeux des scientifiques... Si un travail est pourri, il faut le dire, et ici c'est le cas, désolé si ça vous dérange...

Bien à vous,

Robert Alessandri


Depuis, il a rendu public plusieurs entretiens avec des témoins, dont celui qui « en tremblait » (il a ensuite retiré cette vidéo à la demande du témoin, c'est dommage).

Ce témoin se trouvait au parc Hochelaga, à 2 km au sud-sud-est du stade olympique, je ne serais donc pas étonné que les lumières de la tour soient là encore responsables du phénomène observé, et je l'ai signalé dans les observations extérieures à l'hôtel Bonaventure. Il avait 11 ans lorsqu'il a vu ça, et ça l'a tellement impressionné qu'il a couru chez lui pour demander à sa mère d'appeler la police pour le signaler. Mais ensuite il n'en a plus du tout parlé et il a oublié cet épisode de sa vie... C'est en voyant le documentaire de Canal D 16 ans plus tard qu'il s'est souvenu de son observation, et que ça l'a fait réfléchir : Quand tu es jeune, surtout quand t'as pas vu le documentaire, c'est juste c'est plus fort ?? dans ta tête, mais là quand tu as les preuves là, là tu voudrais en savoir... ça m'a affecté dans mon système... Et donc encore dix ans plus tard il a donné cette interview. Effectivement il est assez fébrile en racontant son aventure, mais on ne sait pas trop si c'est à cause du souvenir de son observation ou du fait d'être interviewé. Il n'est pas douteux en tout cas que ça l'ait marqué, et qu'après avoir vu le reportage il était persuadé d'avoir observé une énorme soucoupe volante... Mais sa description reste tout à fait classique, et rien ne laisse supposer qu'il ait vu autre chose qu'un phénomène lumineux qu'il ne pouvait pas expliquer. Il était avec son frère et des amis, mais son frère n'a pas voulu en reparler et il ne sait plus qui étaient les autres.

Faure a aussi réinterrogé Pierre Caumartin, celui qui a vu un objet juste au-dessus du stade olympique, et cette nouvelle interview permet de préciser les circonstances de l'observation, mais ne remet guère en cause l'explication par des piliers de lumière. J'ai modifié en conséquence mon texte à ce sujet.

Et puis, il a diffusé l'interview d'un serveur du restaurant la Bourgade situé sur le toit de l'hôtel Bonaventure, « Patrick ». Je n'en ai pas discuté dans les témoignages parce qu'il me semble évident que ce témoin a complètement mélangé ses souvenirs avec ce qu'il a vu dans le reportage télévisé.

Patrick servait donc dans le restaurant de la terrasse du Bonaventure, et alerté par des clients vers 21 heures sur la présence de cet « objet » il allait voir entre deux services ce qui se passait...

Sa description de l'objet :

C'était comme un cercle mais un petit peu ovale, et puis il y avait au centre comme une lumière, c'était blême, c'était pas une lumière qui était aveuglante, c'était une lumière je dirais comme blanc laiteux, oui crème, et alors donc de ce cercle-là ou cet ovale-là il y avait des lumières multicolores, des lumières rectangulaires, ok, qui faisaient tout le tour de ce rond-là, central, et c'était... Il y avait du rouge, du vert, du bleu et du jaune. Il y avait ces couleurs-là et on voyait ça assez haut, puis c'était gros.

Cercle de lumières multicolores au milieu, grand cercle autour avec 4 faiscaux qui s'échappent à angle droit

On retrouve les lumières centrales, ce qu'il appelle un « rond d'énergie »... Par contre ce qui est curieux c'est qu'alors que tous les témoins décrivent ces lumières de couleur identique, jaune ou orangée, lui décrit des lumières multicolores rouge, vert, bleu et jaune... On se demande s'il n'aurait pas été influencé par la reconstitution fantaisiste du reportage de Canal D :

Objet circulaire entouré de lumières jaune, verte et rouge

Les quatre faisceaux externes, décrits comme plutôt blancs ou bleus, évoquent plutôt bien les faisceaux les plus éloignés sur la photo de Laroche, ils ont juste gagné une parfaite symétrie avec le temps...

— Mais c'est une lumière, c'est un objet, c'est une masse ?

— Non non non, c'est une masse, c'est un objet, c'est un objet solide là... C'est un objet solide.

— Pourquoi vous en êtes si sûr ?

— Ben parce que c'était des lumières qui descendaient, c'était pas une lumière qui était floue là c'était fixe, c'est comme si c'était fixe. Et puis y avait pas la gravité, il faisait aucun effet, il était là immobile pendant plusieurs heures là... Puis l'image n'a pas changé, ça bougeait pas, c'était pas un ballon, c'était pas... Et puis des lumières c'est plus ou moins flou, et puis ça peut peut-être bouger, mais ça c'était fixe, ça bougeait pas du tout là. Et puis c'était immense, et puis à un moment donné je me souviens que le mille de la Gauchetière était en construction, et puis à un moment donné on m'a dit de fermer l'éclairage, et puis on le voyait encore mieux là... Ça pouvait pas être autre chose, c'était trop grand, puis c'est quelque chose qu'on connaît pas sur la Terre, c'est immense là, avec des lumières, avec tout ça...


En clair il est sûr que c'était un objet et pas des lumières parce que ça ne bougeait pas du tout ! C'est bien typique des piliers de lumière zénithaux, qui restent immuables tant que les lumières qui en sont à l'origine sont fixes, mais le « c'est quelque chose qu'on connaît pas sur la Terre », qui n'est pas vraiment justifié, évoque un peu trop les dires de Robert Masson dans le même reportage de Canal D : Je suis convaincu que j'ai vu quelque chose qui est pas, qui est pas faite par des terriens, ou qui est pas faite par quelqu'un de la Terre, c'est sûr et certain que ça venait de l'extérieur de la Terre.

Et puis il dit qu'il s'est rendu compte de la taille de l'objet quand « un Boeing est passé au-dessous », et c'est encore Robert Masson qui a dit quinze ans après son observation qu'un avion cargo était passé sous l'objet alors que tous les autres témoins ont dit qu'il s'agissait d'un petit avion de type Cessna.

Et enfin ce témoin confirme aussi une affirmation de Robert Masson et lui seul, comme quoi un avion de l'armée serait passé à la fin pour prendre des photos :

— Moi ce que j'ai vu sur internet là et qui m'a vraiment beaucoup, que j'ai beaucoup aimé là, TQS qui avait fait un reportage là-dessus puis c'est sur internet, You tube, et on voit un policier qui était là qui raconte...

— Robert Masson

— Et c'est exactement ça. Il parle de l'avion, c'est exactement ça... Il parle des F-16 c'est exactement ça, il parle des lumières c'est exactement ça, c'est... Il était là j'imagine, je me souviens pas de l'avoir vu parce que on était, je l'ai vu plus vieux là...

— Les F-16 vous les avez entendus ?

— Je les ai entendus... Ah ben j'en ai entendu, je pense, il me semble qu'il y en avait un, j'ai pas entendu plusieurs.

— Quand vous avez entendu, il était là le pilote d'Air Canada, il y avait d'autres gens autour de vous ?

— Non non, quand j'ai entendu les F-16 il était plus tard là, il y avait des nuages, le pilote d'Air Canada il était parti se coucher, il était rendu tard, 10 h et demie 11 h... Et là on voyait juste à peu près ça là (montrant la photo).

— Est-ce qu'il y avait encore du monde quand même sur place ?

— Oui, oui encore mais un petit peu moins de monde...

— Du monde avec qui vous êtes encore en contact ?

— Non. Et là j'ai entendu un avion F-16 ou un F-18, mais y a quelqu'un qui a dit « on a appelé l'armée, et puis ils ont envoyé un F-16 à Bagotville là »... C'est quelqu'un... Parce qu'il y avait aussi des gens de la Gendarmerie royale du Canada là, qui étaient avec un homme en uniforme là, lui était en civil là, en complet, et lui avait vérifié je sais qu'ils ont appelé Dorval, pour voir s'il y avait quelque chose là, y eu des types qui avaient rien vu, ils ont appelé Saint-Hubert, la réponse de Saint-Hubert, ils ont appelé un peu partout...

— Mais ça vous le savez parce que vous avez regardé le documentaire ou ils partageaient l'information autour de la piscine ?

— Oui, oui les gens parlaient.


.../...

— Je savais que c'était un avion de l'armée, parce que il y avait quelqu'un qui venait nous dire « on a appelé l'armée, ils envoient un avion F-16 à Bagotville prendre des photos ». Alors là j'étais content ils vont prendre des photos on va pouvoir avoir ça sur les journaux demain matin et puis je l'ai entendu vvvvrrrruuiiii, plusieurs passes oui oui... Je l'ai entendu au moins deux trois passes là... Deux trois passes. Et puis je me disais cette fois il va prendre des photos avec, et finalement le lendemain ben c'est... gros zéro...

Avec le passage de cet avion de l'armée que personne n'a signalé à part Robert Masson, on voit clairement le mélange que fait ce témoin avec ce qu'il a vu au reportage télévisé.

Lorsque Faure montre la photo de Marcel Laroche au témoin, il reconnaît ce qu'il a vu mais dit :

— Ce que je trouve de similaire c'est le rond d'énergie. Le rond d'énergie et puis le fait que aussi il y a comme un faisceau qu'on peut voir là (un des faisceaux blancs) un faisceau sur le côté... Mais oui c'est... Là je retrouve un peu plus...

— Quand vous êtes sorti la première fois est-ce que il était de cette apparence-là ?

— Ah non non, ben non c'était clair, je pourrais même vous le dessiner. Ça c'était justement quand je vous ai dit, quand les nuages ont apparu. De toute façon il devait être à peu près dix heures et demie onze heures, et c'est là un petit peu plus tard au bout d'à peu près de ce moment-là qu'il y a un journaliste qui est venu prendre une photo, je sais pas si c'était
la Presse, mais on voyait presque... On voyait plus rien. On voyait juste les ronds d'énergie en dessous, mais on voyait plus la forme, on voyait plus les lumières, alors tout, on voyait plus rien. Et puis moi j'ai même vu des lumières horizontales là, des faisceaux horizontaux comme si c'était des écoutilles qui étaient ovales. C'était bleu, c'était plus bleuté.

Bon, le problème c'est que ce témoin dit lui-même qu'il a été averti assez tard par des clients de la présence de l'objet, vers 21 heures, et Marcel Laroche a pris sa photo non pas à 22 ou 23 heures, mais justement à 21 h 10... Il est donc tout à fait clair que le témoin a complètement fantasmé la forme du « vaisseau » avec ses lumières bien disposées symétriquement qui « sortaient des écoutilles ».

Et quand Pierre-Emmanuel Faure lui montre d'autres photos de piliers de lumière zénithaux, notamment celui d'Ath en Belgique, il dit :

Y avait quand même des reflets mais le centre lumineux de l'engin comme l'énergie pour le maintenir en l'air est pas là...

En clair, c'est ressemblant mais il manque le « rond d'énergie », les lumières centrales disposées à peu près en cercle ou du moins en demi-cercle... C'est bien la disposition de ces lumières, et sans doute le fait qu'on voyait qu'elles étaient dirigées vers le bas puisqu'elles changeaient de perspective lorsqu'on se déplaçait, qui a fait beaucoup fantasmer aussi bien les témoins que les ufologues !

Et à propos d'ufologues qui fantasment, ce témoin raconte aussi une anecdote intéressante, quand on lui demande comment s'est passée la journée au travail le lendemain :

— Ben y avait beaucoup de gens qui en parlaient, parce qu'il y avait des clients de la veille qui étaient encore là et puis qui déjeunaient. Mais il y a un monsieur qui a posé une question, qui est il m'a dit « est-ce que vous étiez là hier soir ? » J'ai dit oui. Il a dit « est-ce que je peux vous toujours vous poser des questions ? » Ben j'ai dit « oui si je peux répondre... » Il m'a dit que lui il avait pris des geiger là pour les radiations, il a dit qu'il y avait des radiations dans le jardin. C'était un client mais moi je trouvais ça bizarre avec un geiger... C'était pas un touriste, je pense qu'il me disait qu'il s'informait là-dessus... Je me souviens plus de son nom puis s'il était pour une organisation quoi que ce soit... Mais il m'a dit si j'avais vu des... Parce que j'ai fait un dessin aussi là, et puis il m'a demandé si j'avais vu des vaisseaux rentrer et sortir... Ben je lui ai dit « non j'ai pas vu des vaisseaux »... Parce qu'il m'a dit c'était un vaisseau-mère que j'avais vu. Sûrement parce qu'avec la grosseur que c'était, c'était immense là... Mais j'ai dit « moi j'ai rien vu rentrer ni sortir mais ça se peut qu'il y ait quelque chose qui rentrait et puis qui sortait » mais j'ai dit je les ai pas vus mais... J'aurais pas été surpris de voir des choses rentrer et sortir avec la grosseur que ça avait là...

On sait que François Bourbeau est venu ce matin-là avec du matériel de télévision pour interroger plusieurs témoins... Mais il a mis ses vidéos en ligne, et il n'y est pas question d'un compteur geiger et il n'a pas évoqué de « vaisseau mère » ! Alors soit c'est le témoin qui fantasme encore quelque peu sa rencontre avec Bourbeau, peut-être mélangeant avec un autre cas, soit il y a un autre ufologue qui est venu enquêter ce matin-là, et ça serait intéressant de l'identifier et de savoir ce qu'il a pu récolter comme témoignages...

Et puis Faure lui parle de Line Saint-Pierre :

— L'entrevue qu'elle a donné à la radio le lendemain c'est très... Y a une lumière, y a pas d'objet, est-ce que c'est la peur du ridicule, je sais pas c'est pour ça que j'aurais voulu lui parler...

— Oui, ça se peut. Ça se peut, et puis peut-être aussi qu'elle avait peut-être peur, peut-être des réactions de la direction, si elle en disait trop, peut-être aussi elle pouvait peut-être avoir des problèmes.


Bien sûr, ceux qui ont été interrogés tout de suite et qui disent qu'ils n'ont vu que des lumières, précisément ce qu'on voit sur la photo, c'était par peur du ridicule, ou pour ne pas avoir des problèmes, et la vérité est dans les témoignages recueillis après 27 ans !

Et puis ce témoin raconte aussi que son beau-frère qui habite à Saint-Hubert (partie sud-est de Montréal) a vu aussi quelque chose le même soir :

— Ben mon beau-frère il est à Saint-Hubert un petit peu plus vers le sud, et à un moment donné il a parlé parce qu'il aime bien toutes les choses paranormales, les ovnis puis toutes ces choses-là, et puis il m'a dit qu'un soir il m'a dit la date là, il était sur son toit et puis il était en train d'arranger son antenne de télévision, et puis à un moment donné il a vu un ovni passer en haut, il est presque tombé en bas, et puis je lui ai dit « ben cet objet-là que tu as vu passer moi je l'ai vu à la place Bonaventure il est resté pendant des heures en haut »... C'est la même journée, le même moment... Après il était peut-être, je sais pas vers quelle heure qu'il est monté sur son toit mais c'est après que moi je l'ai vu là.

Hum il ne sait pas à quelle heure il est monté sur son toit mais il est sûr que c'était après son observation à lui, on a un peu l'impression que ce témoin veut croire absolument que c'était le même objet qui serait passé à Saint-Hubert après avoir cessé de stationner au-dessus de l'hôtel Bonaventure... Parce que quoi qu'il en dise ensuite ça n'est pas très crédible que son beau-frère soit monté sur son toit à 23 heures ou plus !

Bref ce beau-frère aurait vu « un gros objet spatial » qui est parti vers le sud, vers les États-Unis, et il aurait été tellement surpris qu'il a failli tomber du toit... Ça ne fait jamais qu'un témoin de plus ayant vu des lumières étranges dans le ciel ce soir-là à Montréal, la différence avec beaucoup d'autres c'est que cet objet se déplaçait... Ça n'exclut pas une explication par des piliers de lumières, il faut juste que la source de lumière elle-même se déplace, peut-être un camion très bien éclairé, ou un avion rendu méconnaissable par les piliers de lumière qui l'accompagnaient, et peut-être aussi qu'une impression de fuite rapide peut se produire lorsque la nappe de cristaux se termine. Quoi qu'il en soit, il s'agit d'un témoignage recueilli après 27 ans, indirect en outre, et on ne sait pas quand le témoin a parlé de ça avec son beau-frère, mais apparemment bien après leurs observations respectives... Bref sans aucune crédibilité.

Philippe-Emmanuel Faure a aussi présenté le cas au « souper ufologique » de Montréal le 27 mai 2017, mais là encore il n'y a eu aucun enregistrement ou compte-rendu à ma connaissance :

L'Ovni de la place Bonaventure, par Philippe-Emmanuel Faure, enquêteur certifié du MUFON


Le 3 mai 2017, M. Faure m'a envoyé un nouveau mail pour m'informer de ses nouvelles interviews, en ajoutant :

J'ai soumis la théorie des piliers à un scientifique et spécialiste des cristaux de glace qui a rejeté la possibilité des piliers tout simplement parce qu'il ne faisait pas assez froid. Et même si théoriquement des cristaux plats peuvent se former à -1, ils ne seront pas assez plats pour pouvoir permettre un tel phénomène. Le saviez-vous ? Pourquoi vous pensez que toutes les photos de ce phénomène sont toujours prises par grand froid ?

Voilà enfin un argument sérieux... Mais bon M. Faure ne semble pas s'être bien renseigné, puisqu'on a une vidéo de piliers de lumières zénithaux faite à Paris le 2 août 2009, il ne faisait sûrement pas grand froid !

C'est vrai que l'important c'est la température à l'altitude où se trouvent les cristaux, et ici on ne la connaît pas... On pourrait sans doute la déterminer en prenant des renseignements sur cette vidéo (ça ne doit pas être très difficile, le vidéaste est sur Facebook) et en identifiant les lumières source, mais dans tous les cas la nappe de cristaux était ici sûrement très au-dessus de ce que nous avons trouvé dans le cas de Montréal... Probablement pas non plus suffisamment haute pour que la température soit très au-dessous de 0° C en plein été à Paris... Mais bon, ce qu'il faudrait ça serait un cas où on aurait des piliers lumineux avérés avec une température peu inférieure à 0° et une nappe de cristaux à basse altitude, de quelques centaines de mètres seulement... Des conditions identiques à celles de Montréal le 7 novembre 1990. Le cas de Montréal en 2010 au-desssus du Casino est un mauvais exemple puisque la température était nettement inférieure et l'altitude des cristaux sûrement très supérieure. Mais un cas convenable, il semble qu'il y en ait au moins un, dont l'étude se trouve sur le site Caelestia :

Photo de piliers de lumière caractéristiques

C'était le 19 novembre 2008 près de Philadelphie. On a plusieurs photos tout à fait caractéristiques de piliers de lumière banals, ici une prise par Rick Rotondo, la température au sol était proche de 0° C, et du fait que la présence d'étoiles sur certaines photos permettait de connaître précisément les azimuths et hauteurs angulaires des lumières, certaines sources de lumière ont été identifiées et l'altitude de la couche de cristaux a pu être déterminée à environ 400 mètres... Bref des conditions météorologiques tout à fait semblables à celles de Montréal en 1990, les piliers de lumière ont été vus par des milliers de témoins sur une région assez étendue autour de Philadelphie, certains voyaient des lumières juste au-dessus d'eux, le phénomène a duré une bonne heure aux environs de 20 h locales, et de nombreux témoins ont pensé avoir affaire à des ovnis, alors que d'autres pensaient à des aurores boréales. Tout est donc comparable à l'ovni de Montréal en 1990, mais on a ici la certitude qu'il s'agit de piliers de lumière, du fait de l'existence de plusieurs photos bien nettes.

Tout ce que M. Faure a trouvé à répondre c'est que le spécialiste qu'il avait consulté n'était autre que Kenneth Libbrecht, qui anime le site snowcrystals.com dans lequel j'ai trouvé de nombreux renseignements, mais qu'il ne pouvait pas publier son courrier personnel sans autorisation.

Kenneth Libbrecht est assurément un des meilleurs spécialistes des cristaux de glace, mais je me demande pourquoi M. Faure n'est pas autorisé à publier son opinion... Soit il ne lui a pas demandé l'autorisation, et on se demande pourquoi, soit M. Libbrecht ne la lui a pas donnée, et on peut alors penser qu'il ne veut pas trop s'avancer dans cette affaire... Mais en l'état ça n'est rien d'autre que des on-dit, et ayant pu remarquer à quel point M. Faure déforme les propos des témoins (il dit par exemple que Luc Morin, l'officier de la G.R.C., dit qu'il a vu l'ovni s'éloigner alors que tout ce qu'il dit c'est que pendant les 45 minutes de son observation la forme s'est « légèrement déplacée du sud vers le nord pour être finalement complètement cachée par les nuages. ») je doute de la fiabilité de ce qu'il rapporte.

Et depuis, Pierre-Emmanuel Faure clame partout que je suis de mauvaise foi, parce que j'ai des preuves de l'invalidité de l'hypothèse des piliers lumineux en ce qui concerne le cas de Montréal et que je les cache sciemment ! Eh bien non, s'il a des preuves que les cristaux responsables de piliers lumineux ne pouvaient pas se former dans ces conditions c'est à lui de les montrer, pour ma part ce que j'ai ce sont des preuves que des piliers de lumière avérés ont été vus dans des conditions tout à fait semblables.

Ce que j'ai répondu à Philippe-Emmanuel Faure :

Pour ma part tout mon travail sur ce cas est public (celui de van Utrecht aussi), tout le monde est libre de le critiquer et si je reçois des critiques argumentées je ne manquerai pas d'en discuter dans une mise à jour... De votre côté il y a un article dans un bulletin associatif réservé aux adhérents, des conférences qui ne sont apparemment pas destinées à être diffusées, et diverses assertions sans rien de concret (vous avez parlé à des tas de témoins mais les deux interviews que vous avez diffusées ne remettent guère en cause le cas, vous avez parlé avec Haines et des tas d'autres gens qui « rejettent mon analyse » mais vous ne me dites pas pourquoi, vous avez une lettre d'un « scientifique spécialiste des cristaux de glace » qui dit qu'il ne faisait pas assez froid pour des piliers de lumière mais vous ne la montrez pas...)

Que voulez-vous que je vous dise ?

Bon week-end, et bonne continuation


Ceci dit je voulais en avoir le coeur net avec cette histoire de cristaux pas assez plats, et j'avais bien l'intention d'écrire à M. Libbrecht avant de mettre à jour mon article, mais j'ai un peu traîné du fait que je ne voulais pas me focaliser longtemps sur le cas de Montréal et que j'ai quelques difficultés à écrire des courriers en anglais. Mais je l'ai donc fait le 21 novembre, il y a maintenant plus d'un mois... Voici la traduction en français du mail que j'ai envoyé à M. Libbrecht :

Cher M. Libbrecht,

Je suis l'auteur d'une étude sur le fameux « OVNI » de Montréal, que j'attribue à un phénomène de piliers de lumière zénithaux.

Le lien : http://univers-ovni.com/ufologie/montreal.html

J'ai appris beaucoup sur votre site qui est une incomparable mine d'informations sur les cristaux de glace et de neige, et je vous remercie pour tout ce travail de passionné...

Il me semble que la photographie du phénomène, montrant des faisceaux de lumières convergeant précisément vers le zénith, ne laisse guère de doute sur sa nature, et aucune autre explication ne convient.

Toutefois, il y a un an, vous avez été interrogé au sujet de cet « OVNI » par un certain Philippe-Emmanuel Faure du Mufon-Québec, et vous lui auriez dit qu'il était impossible que des piliers de lumières soient responsables du phénomène, du fait qu'il ne faisait pas assez froid... « Et même si théoriquement des cristaux plats peuvent se former à -1° C ils ne seront pas assez plats pour permettre un tel phénomène », auriez-vous écrit.

Cela remettrait en question l'explication proposée (pas seulement par moi), puisque la température au sol était de -1 ou -2° C et l'altitude de la nappe de cristaux supposément responsable inférieure à 300 m.

Pouvez-vous confirmer ce courrier et me fournir des détails supplémentaires ? Et me permettez-vous de publier votre réponse dans une prochaine mise à jour de mon texte ?

J'ai effectué quelques recherches, et il semble qu'au moins un phénomène de piliers de lumière avéré se soit produit dans des conditions similaires, le 19 novembre 2008 à Philadelphie : on a quelques photographies de piliers de lumière très typiques, alors que la température était juste inférieure à 0° C, et l'identification de certaines sources de lumière a permis d'estimer l'altitude de la nappe de cristaux à 400 m. Je joins le lien de cette étude : http://www.caelestia.be/philadelphia.html

Merci de me dire ce que vous pensez de tout ça.

Respectueusement,

Robert Alessandri, Marseille, France


Je n'ai malheureusement pas reçu de réponse. Si j'en reçois une je ferai une mise à jour, mais en attendant il n'y a rien qui permette de remettre en cause la possibilité que des piliers de lumière aient été visibles à Montréal le soir du 7 novembre 1990.

Et pour en terminer avec M. Faure, une petite anecdote... Curieux d'être informé de ce qui se passait au Mufon-Québec, j'ai rejoint le groupe Facebook de cette association...

En mai 2017 le président du Mufon Québec Marc Saint-Germain publiait un documentaire présentant trois petites vidéos sur les crop circles, faisait la promotion des idées du « spécialiste » Umberto Molinaro et critiquait Christian Page pour avoir fait preuve de scepticisme au sujet de ces phénomènes...

J'y ai réagi en écrivant :

Hum la première vidéo semble un remake de la seconde, la seconde, la vidéo d'Oliver Castle est un fake reconnu et expliqué : https://youtu.be/jMeRd5EdBwE

Quant à la dernière rien à voir avec des crop circles ça ressemble plutôt à la verse des blés due à du vent, de la pluie ou des parasites : http://damelolo.canalblog.com/archives/2007/06/28/5373971.html

Concernant Umberto Molinaro il raconte un peu n'importe quoi et continue à voir du mystère dans des choses expliquées depuis longtemps comme les histoires de « mouches mortes » trouvées quelquefois dans les crop circles : http://ufologie.patrickgross.org/htm/croppgdeadfliesf.htm

Je suis allé enquêter sur les crop circles il y a quelques années : http://univers-ovni.com/ufologie/crop_circles_2003.html

C'est fascinant, aussi bien les dessins que les divers personnages qui tournent autour, mais je n'ai rien trouvé de très convaincant sur la présence d'un authentique mystère... et beaucoup d'ufologues pas forcément sceptiques partagent l'avis de Christian Page...

Mon message a été plutôt apprécié, mais Philippe-Emmanuel Faure, administrateur du groupe, a répondu :

Il faut savoir que Robert Alessandri est de la même espèce que Christian Page et je m'attends à ce qu'il sorte du groupe MUFON QUÉBEC de lui-même...

Et pour en être plus sûr il m'a lui-même exclu du groupe, et signalé pour que je ne puisse même pas voir ce qui s'y disait !

Voilà comment on est ouvert à la discussion au Mufon-Québec !

Notons que le Mufon-France ne vaut pas mieux, puisque j'ai aussi demandé à m'y inscrire et on ne m'a pas validé, sans même prendre la peine de me répondre...

Cette attitude est tout à fait représentative d'une certaine ufologie, où on ne cherche qu'à attirer des gogos prêts à croire n'importe quoi et où on écarte donc tous ceux qui font preuve d'un minimum d'esprit critique et qui pourraient perturber cette belle mécanique... Ces types sont les fossoyeurs de l'ufologie... Et ce sont les mêmes qui se plaignent que les sceptiques soient de plus en plus écoutés dans les milieux scientifiques, au Geipan ou sur Wikipédia...

Christian Page se met à la page

Fin octobre 2018, Christian Page m'a contacté, pour me dire que je lui avais reproché avec raison de ne pas avoir traité de l'hypothèse de piliers lumineux dans son dernier reportage, mais qu'il allait avoir l'occasion de se rattraper dans une émission de radio, et il me proposait d'y participer... Je lui ai répondu que ça serait volontiers mais que je n'étais pas très doué comme orateur... Il m'a donc téléphoné quelques jours plus tard pour m'interroger, et l'enregistrement a été diffusé à la fin de son émission.

Il s'agit d'une émission hebdomadaire de deux heures, Radio X-files, que Christian Page anime avec Yann Marceau sur CHOI Radio X, une des radios les plus écoutées au Québec. Cet épisode consacré en grande partie à l'ovni de la place Bonaventure a été diffusée le 9 novembre, il est disponible avec les autres sur facebook (avec des commentaires) et sur le site de CHOI Radio X... Il est vraiment intéressant à écouter, comme les autres qui sont consacrés à divers événements mystérieux abordés avec objectivité et raison, je vous en donne juste un résumé.

Il y a d'abord des publicités, puis une petite actualité consacrée à Oumuamua, l'astéroïde provenant d'un autre système planétaire qui est passé près de soleil, considéré par certains comme un possible vaisseau extraterrestre. Le débat sur l'ovni de la place Bonaventure commence à 16 minutes.

Christian Page commence par dire qu'il risque de heurter certaines sensibilités en osant remettre en question ce cas emblématique de l'ufologie québécoise. Il précise que des observations de phénomènes lumineux, souvent des zébrures dans le ciel, ont eu lieu ce soir-là dans tout Montréal et sa périphérie, prises quelquefois pour des aurores boréales. Et il en vient à l'observation principale, celle de la terrasse de l'hôtel Hilton-Bonaventure, où des nageurs dans la piscine chauffée ont vu les premiers au-dessus de leur tête une série de lumières de couleur ambre, déclenchant l'afflux de témoins et l'arrivée de deux policiers de la ville.

Page diffuse une partie de l'interview qu'il avait faite en 2015 du commandant Robert Masson, l'un de ces policiers de la C.U.M., qui était alors persuadé d'avoir vu un objet solide et métallique.

Il précise ensuite que les témoignages sont un peu contradictoires concernant l'immobilité de l'objet : certains témoins disent l'avoir vu se déplacer légèrement alors que d'autres précisent qu'il est resté parfaitement immobile juste au-dessus de l'hôtel pendant les trois heures de sa présence.

Puis ce sont des journalistes de la Presse qui arrivent, dont Marcel Laroche qui allait faire sa fameuse photo, et encore un peu plus tard un policier de la Gendarmerie Royale du Canada, Luc Morin, dont Page donne le témoignage recueilli en 2016 (après 26 ans donc).

Il nous parle ensuite de la photo, dont il diffuse sur le site, et pour la première fois, une reproduction au format d'origine... On ne disposait jusqu'alors que de reproductions incomplètes, ce qui interdisait certaines analyses.

Il précise qu'il est arrivé lui-même sur le toit de l'hôtel en fin de soirée, alors que presque tout le monde était parti et que l'objet n'était plus visible, mais qu'il restait une espèce de vague halo dans les nuages, pas complètement au zénith.

Il parle ensuite de l'observation de Pierre Caumartin, celle dont on a le plus parlé en dehors de l'hôtel, en disant que le témoin a continué à observer l'objet alors qu'il était chez lui... C'est à vérifier, je n'ai rien trouvé de tel dans aucune de ses interviews.

On passe ensuite aux réactions suscitées par cette observation de masse, lorsque la presse cherchait des réponses. Page s'insurge avec raison contre les astronomes et météorologues qui se sont succédé pour avancer des hypothèses plus ridicules les unes que les autres, sans prendre la peine de se renseigner le moins du monde sur les récits des témoins... Il y a eu l'astronome qui a affirmé qu'il s'agissait des reflets dans les nuages du chantier du 1000 la Gauchetière, alors que les lumières de ce chantier avaient été éteintes à la demande des policiers, le météorologue qui a d'abord dit qu'il s'agissait de reflets de projecteurs dans les nuages puis qui s'est ravisé en disant, avec d'autres, qu'il s'agissait d'une aurore boréale très particuliière, ce qui serait du jamais vu en plein centre-ville de Montréal et complètement impossible à travers une couche nuageuse de 1500 mètres d'épaisseur ! Et il nous apprend qu'un journaliste scientifique très connu est allé jusqu'à affiremer qu'il devait s'agir de la planète Mars (laquelle était bien visible dans le ciel, mais très bas sur l'horizon).

Et puis il parle du rapport Guénette-Haines, arrivé après presque deux ans... Il dit avec raison que les deux auteurs ont été les premiers à réellement étudier ce qui avait été vu, les témoignages et la photographie, au lieu de donner leur opinion toute faite. Il nous dresse aussi le portrait de Richard Haines, psychologue spécialisé dans les relations entre l'oeil et le cerveau, qui travaillait alors au centre Ames de la Nasa et à qui Guénette a fait appel pour expertiser la photographie... Un scientifique reconnu, très respecté en ufologie comme en recherche scientifique, mais qui n'était pas du tout compétent pour l'analyse de la photographie, et qui a commis des erreurs grossières à cette occasion, invalidant complètement sa conclusion qu'il y avait un objet réel, solide, d'au moins 500 mètres de diamètre.

Arrive la première pause, avec des pubs, puis des informations sur un « ghost center », et le sujet reprend à 1 h 14.

On repasse le bulletin d'information du lendemain dans lequel il était dit que plus d'une centaine de personnes sur la terrasse de l'hôtel Bonaventure ont observé un « plafonnier lumineux » à hauteur des nuages.

Page nous rappelle d'abord qu'il n'y a pas que là que des phénomènes ont été observés, citant le témoignage de Pierre Caumartin qui voyait un objet au-dessus du stade olympique, et il enchaîne sur un nouveau témoignage qu'il a recueilli récemment, de quelqu'un qui roulait en voiture à quelque 35 km de Montréal. Le témoin, Éric Bernaccé, est interviewé. Il se déplaçait en automobile avec une autre personne lorsqu'ils ont vu l'objet. C'est intéressant parce que tous les autres témoins se trouvaient beaucoup plus près de Montréal, et aussi parce que l'objet se déplaçait, les a doublés, a fait un virage et a disparu rapidement. J'en ai donc discuté dans la partie consacrée aux observations hors de Montréal, et franchement je ne sais pas trop si cette observation est liée au même phénomène que les autres ou si elle a été drainée par la publicité faite autour de cette affaire... Quoi qu'il en soit il faut se méfier des témoignages faits après 25 ans, et par des témoins qui se déplacent en automobile.

Page nous dit qu'on a pour ce soir-là des témoignages très divers, certains évoquant quelque chose qui ressemblait à une aurore boréale, d'autres parlant d'un objet à l'aspect très structuré, vraiment matériel. Il répète que chaque témoignage doit être traité indépendamment, et qu'il est possible que dans le lot certains témoins aient pu être abusés par un phénomène astronomique ou météorologique, par un avion, etc.

Et puis, il nous dit qu'il y a deux ans on a attiré son attention sur une possibilité d'explication qui avait été émise par des chercheurs européens : les piliers de lumière zénithaux, et c'est là qu'il diffuse mon interview... Je l'ai dit, je ne suis pas très doué comme orateur, je voudrais bien avoir la facilité d'élocution de Christian Page, mais enfin je ne m'en suis pas trop mal sorti... Ça commence à 1 h 23.

Je commence par expliquer que c'est le chercheur belge Wim van Utrecht qui a pensé le premier à cette explication, et cela grâce au reportage réalisé justement par Christian Page : on y voit l'hôtel Bonaventure la nuit depuis un hélicoptère, avec les lumières éclairant le fond de la piscine qui évoquent curieusement la disposition des lumières sur la photo de Marcel Laroche.

Et donc j'explique un peu ce que sont les piliers de lumière, ceux qu'on voit près de l'horizon qui ressemblent à des faisceaux verticaux, et ceux qu'on voit près du zénith où les faisceaux convergent vers le zénith, et c'est exactement ce qu'on voit sur la photo.

J'explique que les lumières de la piscine ne sont pas les seules lumières ayant produit un reflet dans le ciel, mais qu'elles ont particulièrement attiré l'attention du fait de leur disposition en demi-cercle.

Ensuite Christian Page parle des nuages, j'explique que les cristaux de glace à l'origine des réflexions ne forment pas les nuages, qu'ils étaient nettement plus bas, et que c'est une simple coïncidence que la nappe de cristaux se soit peu à peu atténuée après trois heures, en raison des changements de conditions climatiques, alors même que la couche nuageuse descendait et se densifiait.

Page dit ensuite qu'effectivement en comparant les quelques photos de piliers lumineux zénithaux qu'on trouve sur Internet, il est difficile de ne pas faire le rapprochement avec la photographie de Marcel Laroche... Mais qu'en est-il des autres phénomènes qui ont été vus dans tout Montréal et quelquefois nettement plus loin ?

J'explique donc qu'il n'y a pas de raison qu'une nappe de cristaux de glace soit restée localisée au-dessus de l'hôtel Bonaventure, et donc que des piliers lumineux ont pu être vus ailleurs, que ce soit près du zénith ou près de l'horizon selon la distance des lumières source au sol. Je fais remarquer que parmi ces témoins extérieurs à l'observation principale il y a Pierre Caumartin qui a vu un objet juste au-dessus du stade olympique, lequel constitue avec sa tour une des sources de lumière les plus importantes de Montréal, ou Bernard Guénette qui a vu un phénomène lumineux juste au-dessus de lui alors qu'il se trouvait à côté d'une place où avait lieu un exercice d'alerte incendie regroupant un grand nombre de véhicules d'urgence très éclairés. J'ajoute que j'ai l'impression que toutes les observations rapportées peuvent s'expliquer par des piliers de lumière, mais qu'il n'est pas impossible qu'il y en ait quelques-unes qui ne relèvent pas de cette explication, et qui auraient été entraînées par la médiatisation de l'affaire.

Page me demande ensuite si pour moi l'ovni de la place Bonaventure est une affaire classée, si j'ai la certitude que les piliers lumineux sont l'explication... Je réponds que oui, mais que je peux réviser mon jugement si je vois d'autres données... En fait j'hésitais un peu non pas concernant l'implication des piliers lumineux, mais parce que l'identification aux lumières de la piscine posait de nombreux problèmes... Et effectivement on a vu que de nouvelles données semblent montrer qu'il y avait d'autres lumières sur la terrasse de l'hôtel, bien plus susceptibles de créer le phénomène dans le ciel que les lumières de la piscine... Mais cela, je ne le savais pas lorsque j'ai été interviewé par Christian Page : la vidéo de François Bourbeau n'a été mise en ligne que le 7 novembre, et je n'ai pas remarqué tout de suite qu'il y avait ce qui semblait être des guirlandes lumineuses sur les arbres !

Puis Page me demande mon opinion sur le rapport Haines-Guénette, qui « ne laisse que peu de place à d'autres interprétations que celle de la présence d'un objet physique bien matériel au-dessuis de l'hôtel Bonaventure ». Je réponds que le rapport présentait bien les observations mais que concernant l'analyse de la photo par Haines ce dernier n'est pas spécialiste de la photographie et qu'il a commis des erreurs énormes.

Page demande enfin si ce phénomène au-dessus de Montréal pourrait se reproduire si les conditions atmosphériques étaient réunies, je réponds que oui, et que je connais un cas, le 19 novembre 2008 près de Philadelphie, où de nombreux témoins ont assisté à des piliers de lumières bien avérés par des photographies, dans des conditions météorologiques sensiblement identiques à celles de Montréal en 1990.

Page conclut la conversation en disant que je l'ai passablement convaincu que la réflexion par des cristaux de glace était probablement la bonne explication concernant l'ovni de la place Bonaventure, et qu'il sait qu'il va se faire vilipender pour remettre ainsi en question la nature exotique de cette observation, mais que toutes les observations de ce soir-là ne sont peut-être pas à mettre sur le compte de cette explication.

Il continue son émission en disant que c'est vrai que la photo de Marcel Laroche évoque fortement un phénomène de piliers de lumière zénithaux, et que les conditions météorologiques étaient idéales pour que cela se produise. Et par ailleurs une phénomène semblable s'est produit en décembre 2010 au-dessus du Casino de Montréal, dans les mêmes conditions météorologiques, mais cette fois les témoins ont pour la plupart associé ces lumières dans le ciel à celles du Casino, même s'ils ne comprenaient pas le mécanisme du phénomène.

Notons que concernant les conditions météorologiques ça n'est pas vraiment exact : pour l'ovni du Casino la température était très inférieure et la nappe de cristaux réfléchissants était nettement plus haute, c'est pourquoi je préfère la comparaison avec le cas de 2008 à Philadelphie.

Page revient alors sur des témoignages qui lui paraissent difficilement explicables par des piliers lumineux, notamment l'observation d'Éric Bernacce près de la Plaine, à 35 km de Montréal, et celle de Pierre Caumartin au sujet de laquelle il précise : au début lorsqu'il dit l'objet bougeait c'est vrai mais lui aussi bougeait dans sa voiture. Mais pourtant à un moment donné il s'est arrêté et a observé le phénomène, alors que lui ne bougeait plus il est persuadé que le phénomène se déplaçait. Ce qui semble exclure a priori l'hypothèse de piliers lumineux à ce moment-là pour cette observation-là.

Ça n'est pas vraiment ce que j'ai compris pour le cas de Caumartin : ce qui m'apparaît c'est que quand il s'est arrêté et est descendu de sa voiture pour observer l'objet celui-ci a complètement cessé de se déplacer... Bref quoi qu'il en soit il n'a donné des explications précises qu'après 15 ou 25 ans, on ne peut pas s'y fier aveuglément.

Pour terminer Christian Page revient sur l'histoire des F-16 qui seraient passés au-dessus de l'hôtel pour prendre des photographies : il faut quand même mentionner que toutes les démarches que j'ai faites dans le but de confirmer cet événement-là n'ont jamais abouti. Les militaires ont été catégoriques, il n'y a jamais eu de F-16 qui ont décollé de Bagotville pour aller vers l'hôtel Hilton-Bonaventure. Quant aux témoins qui étaient sur place, aucun témoin ne se rappelle la présence de ces avions, sauf Robert Masson, le policier de la C.U.M. ... Alors est-ce qu'il s'agit d'un ajout, un fantasme proposé par Robert Masson ou est-ce que c'était la réalité, on n'a pas le fin mot de l'histoire.

Après une dernière pause, à 1 h 51, Christian Page répond aux questions des auditeurs...

Il y en a qui insistent sur le passage des F-16, ou plutôt au Canada des F-18, disant qu'un serveur du restaurant confirme avoir entendu ces avions. Page répète qu'il n'y a pas de confirmation militaire, que Luc Morin de la G.R.C. dit que les militaires avec qui il a été en contact n'ont jamais parlé du décollage d'avions pour prendre des photos, que tout ça reste donc de la rumeur.

D'autres disent que Pierre Caumartin qui a observé un objet près du stade olympique réfute l'hypothèse de piliers lumineux... Page indique qu'il ne faut jamais privilégier les témoignages au détriment des preuves matérielles, et ici la preuve matérielle c'est une photographie qui évoque étrangement des piliers de lumières zénithaux, la disposition des lumières de la piscine qui ressemble à celle des lumières sur la photo... Tout un faisceau d'indices qui conduit à penser que pour le cas des témoignages sur le toit de l'hôtel, l'explication par des piliers de lumière est probablement la bonne... Mais pour ce qui est du « boomerang » observé par Pierre Caumartin, ou de l'objet volant observé au-dessus d'un champ à la Plaine, il n'a jamais prétendu que c'était l'explication. Il constate qu'il y a des témoignages très disparates, certains qui rappellent vaguement une aurore boréale, qu'il faut tous les examiner un à un. Mais il ajoute qu'après 28 ans « les témoignages se colorent, ils varient les uns les autres, et on ajoute des éléments qui n'étaient peut-être pas là dans les témoignages originaux ». Il regrette que les astronomes, physiciens, météorologues de l'époque se soient livrés à une « désastreuse démonstration d'autorité » au lieu d'étudier réellement le phénomène, sans quoi on aurait pu poser les bonnes questions. Il a fallu attendre 2011 [en réalité 2008, mais ça ne change pas grand-chose] pour que Wim van Utrecht propose enfin l'hypothèse de piliers lumineux, et il est difficile après autant de temps d'essayer de modéliser ce qui s'est passé exactement ce soir-là.

L'émission se conclut à peu près là-dessus, et Page ne pouvait pas savoir que deux jours avant sa diffusion, une vidéo prise au lendemain de l'observation et restée inédite pendant ces 28 années allait justement bouleverser la modélisation de ce qui s'était passé ce soir-là, en montrant une autre source potentielle de lumières que celles de la piscine, et à mon avis convenant beaucoup mieux à l'explication par des piliers lumineux !

Les leçons à tirer

L'affaire de la place Bonaventure est exemplaire à plus d'un titre...

Au départ, il y a eu l'observation de simples lueurs dans le ciel, qui ont attiré la curiosité des témoins mais ne les ont apparemment pas trop impressionnés : les clients du restaurant continuaient à manger, les nageurs allaient se changer et prendre une douche avant de revenir, et beaucoup de témoins sont allés tranquillement se coucher sans attendre la disparition de l'ovni... Et la plupart des témoins interrogés ne parlent pas vraiment d'un objet, quelque chose de solide... Ils assistaient à un phénomène lumineux bizarre, rien de plus.

Mais en raison du nombre de témoins et de la durée du phénomène, la police a été appelée, ainsi que la presse, et une unique photo de ce phénomène intrigant mais très peu lumineux a été prise avec une pause de 30 secondes.

Il en est résulté une couverture médiatique très importante le lendemain, comme l'écrit Christian Page : Les deux quotidiens (La Presse et Le Journal de Montréal) lui ont consacré plusieurs articles, l'affaire a été rapportée aux actualités télévisées, tant dans les réseaux anglophones que francophones et, au lendemain de l'observation, à peu près toutes les radios parlées de Montréal ont fait des émissions de « lignes ouvertes » pour en discuter (je travaille d'ailleurs à l'une de ces stations [le 98.5 fm] dont les locaux sont situés... à la Place Bonaventure). De mémoire (et je suis dans ce milieu depuis 1976), aucun incident ovni n'a suscité autant d'intérêt de la part des médias.

Des ufologues s'y sont bien sûr intéressés, en particulier Christian Page lui-même et François Bourbeau qui se sont rapidement rendus sur place pour interroger des témoins... Mais ils n'en ont ensuite rien fait pendant des années, et il semble que cet ovni ait été rapidement oublié... Même si les explications des « spécialistes » étaient parfaitement ridicules, tout le monde semblait penser que cet ovni s'expliquait par quelque phénomène atmosphérique ou astronomique particulier. Aucun ufologue ne semble en particulier avoir cherché à compiler les observations faites en-dehors de l'hôtel Bonaventure, alors qu'il y en avait manifestement en grand nombre... Ce sont des amateurs d'astronomie qui l'ont fait, en se persuadant malgré l'évidence que tous ces témoins avaient observé une aurore boréale très particulière...

Ça n'est qu'un an plus tard qu'un ufologue ayant lui-même assisté à un phénomène lumineux étrange dans la soirée, Bernard Guénette, a décidé de se pencher sérieusement sur le cas, et a fait appel à un autre ufologue, Richard Haines, réputé pour ses travaux scientifiques, pour expertiser la photographie prise par un journaliste. Il en est résulté le fameux rapport Haines-Guénette, concluant à la présence d'un objet réel, solide, de plus de 500 m de diamètre, qui serait resté stationnaire au-dessus de Montréal pendant trois heures !

C'est alors que l'ovni de la place Bonaventure est devenu pour à peu près tous les ufologues une des plus fantastiques observations collectives de l'histoire des ovnis... Et il s'agit d'un parfait exemple des dégâts causés par l'argument d'autorité : ce prétendu ovni n'aurait pas existé sans l'incursion d'un « spécialiste de la Nasa » dans des domaines qu'il ne maîtrisait pas du tout !

Et le plus affligeant, c'est qu'alors que ce rapport resté d'abord très confidentiel a été inclus dès 1993 à un livre ayant connu un certain succès, personne pendant plus de vingt ans ne semble avoir remarqué les erreurs monstrueuses et évidentes qui invalidaient complètement ces conclusions : Haines avait éliminé de la photographie les lueurs qui ne cadraient pas avec son interprétation, les considérant de façon absurde comme des « reflets dans l'objectif », il avait prétendu grâce à des analyses poussées mettre en évidence un « objet » entre les lumières là où il n'y avait toujours que les lumières elles-mêmes, et il avait enfin fixé une « limite inférieure raisonnable » à la dimension de l'objet d'après les estimations des témoins, alors qu'il avait mesuré sa dimension angulaire réelle, dix fois moins importante, sur la photographie... Que personne n'ait relevé cette accumulation de sottises qui sautait aux yeux en dit long sur le manque d'esprit critique des ufologues !

L'ironie de l'histoire, c'est que récemment Ted Roe, directeur exécutif et cofondateur avec Richard Haines du Narcap, a voulu discréditer des chercheurs sérieux qui accomplissent un travail remarquable sous le prétexte qu'ils tiennent à rester anonymes pour des raisons professionnelles, arguant qu'eux n'ont rien à cacher et n'hésitent pas à mettre en jeu leur réputation professionnelle... Quand on voit le résultat avec l'ovni de Montréal, on se demande s'il ne vaudrait pas mieux que tous ceux qui étudient les ovnis restent anonymes, ça inciterait leurs lecteurs à ne pas croire aveuglément ce que certains écrivent en étant éblouis par leurs titres scientifiques !

On peut s'étonner encore qu'il ait fallu pas moins de dix-huit ans pour que le phénomène atmosphérique à l'origine de cette affaire soit trouvé... Pourtant, les faisceaux lumineux convergents visibles sur la photo sont sa caractéristique principale des piliers de lumière zénithaux... Il faut croire que ce phénomène était bien peu connu à l'époque.

Enfin, on a pu constater tout récemment comment le manque de données peut nuire à l'appréciation d'une observation d'ovnis... Un détail qui n'a fait surface que cette année, vingt-huit ans après l'observation, vient apporter des réponses aux principales difficultés posées par l'hypothèse de piliers lumineux. Si la vidéo prise le lendemain sur les lieux de l'observation par François Bourbeau n'avait pas été diffusée, ou n'avait même pas été tournée, on n'aurait rien eu de mieux à proposer que les lumières de la piscine comme source des piliers lumineux, en cherchant des explications boiteuses (je le reconnais) aux incohérences rencontrées. Certains n'auraient pas manqué d'y trouver une nouvelle preuve de la malignité du phénomène ovni, mimant un phénomène naturel mais en laissant volontairement des anomalies afin d'attirer l'attention des esprits les plus perspicaces !

Ce qu'on peut retenir aussi, c'est qu'une telle méprise ne serait plus possible aujourd'hui, pas plus que celle de la vague du 5 novembre 1990 en France... Et cela, grâce à Internet, qui met à la portée de tous une immense documentation qui était beaucoup plus difficilement accessible autrefois. Il n'est plus possible que des ufologues ne reconnaissent pas immédiatement une rentrée atmosphérique, des piliers de lumière, ou tout autre phénomène connu même rare...

On a vu d'ailleurs que dans le cas de la « réplique » de 2010, l'explication certaine a rapidement été trouvée et peu contestée, même si les enquêteurs d'Ovni-Alerte ont eu quelques difficultés à l'accepter...

Et puis, maintenant, on n'accepterait pas de discuter d'un ovni photographié sans même disposer de la photo dans son format d'origine !

Internet nous a apporté le pire comme le meilleur : il incite à la multiplication des observations les plus faciles à expliquer et des canulars grossiers, mais en même temps il facilite l'identification d'un maximum d'observations. C'est d'ailleurs ce qu'a constaté le Geipan dans un article récent : on lui signale de plus en plus d'observations, mais le nombre de cas non identifiés (les PAN D dans sa terminologie) est en forte baisse ! L'influence des nouveaux canaux d'information n'est pas évoquée comme explication, mais pour ma part elle me semble évidente !

Certains s'attristent que la proportion de cas de « vrais ovnis » se réduise ainsi comme une peau de chagrin, mais il faut comprendre que ça signifie qu'on les confond moins facilement avec les faux... Et plus on arrivera à éliminer les faux ovnis, plus on aura des chances de savoir reconnaître un vrai !

Et puis, qu'il y ait ou non des vaisseaux extraterrestres dans nos cieux, il y a des phénomènes étonnants de la nature qui méritent bien d'être un peu mieux connus...


Robert Alessandri




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Ce texte a été lu fois depuis le 29/12/2016