L'ovni de la base militaire d'Ota en 1982 :
Quand l'armée portugaise s'entoure de scientifiques
(mis en ligne le 02/11/2024)
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Le 2 novembre 1982 vers 10 h 50, Júlio Guerra, pilote de l'armée de l'Air portugaise, a vu un objet lenticulaire métallique de 2 à 3 m de diamètre s'élever de
quelque 1500 m en une dizaine de secondes, puis tourner autour de son avion pendant un quart d'heure à une vitesse estimée à 2500 km/h, pendant que
Guerra tournait lui-même en rond. Un autre avion est alors arrivé, avec à son bord deux autres pilotes de chasse, Carlos Garcez et António Gomes, qui
ont pu confirmer les dires de Guerra. Après encore une dizaine de minutes de ce manège, Guerra a fait une manœuvre pour intercepter cet objet, lequel
s'est alors positionné à quelques mètres au-dessus de lui avant de s'éloigner à grande vitesse.
Ce cas est présenté comme extraordinaire par un groupe de scientifiques ayant enquêté à la demande de l'armée de l'Air, mais nous allons voir qu'il peut
s'expliquer par des erreurs d'appréciations tout à fait banales, et des déformations tardives.
Nous abordons ensuite d'autres cas plus ou moins en lien avec celui-ci.
Tout d'abord, l'observation de cuba du 24 septembre 1952 et celle de Glendale, en Californie, du premier février 1977,
dont les descriptions présentent de nombreux points communs avec celle d'Ota.
Nous examinons ensuite plusieurs cas qui pourraient avoir été causés par des ballons en Mylar :
– deux cas français célèbres, celui dit de l'Amarante déshydratée à Laxou, le 21 octobre 1982, et celui dit du
pilote Fartek à Varois-et-Chaignot, le 8 décembre 1979 ;
– un cas, dit Batman, lié à une photographie prise par un pilote de l'US Air Force au-dessus de l'Atlantique ;
Pour terminer, noous abordons deux autres cas impliquant l'armée de l'Air portugaise, enquêtés par le même groupe de scientifiques que dans l'observation d'Ota :
Ce texte est dû de façon complémentaire à deux ufologues : Florent Michaud et Robert Alessandri.
Tous deux ne sont pas spécialement sceptiques sur la possibilité que certains ovnis soient le fait de visiteurs extraterrestres, mais ils sont
souvent considérés comme des sceptiques endurcis du fait qu'en étudiant en profondeur certains cas considérés par beaucoup comme convaincants, ils ont
trouvé que l'hypothèse d'une méprise était la plus vraisemblable. Et ils voudraient tout deux avant tout qu'il y ait des discussions enrichissantes entre
sceptiques et tenants de l'hypothèse extraterrestre.
Ils ont pas mal participé au forum les Mystères des Ovnis, d'où ils ont été exclus :
Florent sous le nom de Flo78, et Robert sous les noms successifs de RA, Robby13 et ArthurC, ayant été exclu à trois reprises (la dernière pour avoir
signalé son étude sur les Lumières de Phœnix en espérant que cela susciterait des discussions, ce qui a été
interprété comme de la provocation !)
Bien sûr, les animateurs de ce forum sont libres de le gérer comme ils veulent, c'est juste dommage qu'ils ne veuillent pas discuter avec ceux
qui n'ont pas la même opinion qu'eux, d'autant que tout le monde sur le forum n'a pas la même attitude.
Et ils ont aussi bien sûr participé au forum Ufo-scepticisme, sous les pseudonymes respectifs de Flo78 et hal9000.
C'est dans ce forum que Florent a lancé la discussion sur cette observation en 2014, en proposant l'hypothèse a priori peu vraisemblable d'une
confusion avec un ballon festif en Mylar. Mais cette discussion est assez longue du fait qu'elle s'est étendue à d'autres cas, et une partie n'est pas publique,
si bien qu'elle est peu compréhensible pour qui n'aurait pas tout suivi...
Robert voulait donc depuis longtemps en faire une synthèse et clarifier l'hypothèse, et c'est en 2023 qu'il s'est lancé... Il a alors contacté
Florent qui avait un peu laissé tomber l'ufologie et ne se manifestait plus qu'occasionnellement dans le groupe Facebook
Ufo Pragmatism de Gilles Fernandez.
Florent avait aussi de son côté commencé un gros dossier sur ce cas, et avait obtenu l'étude menée par des ufologues scientifiques portugais
en collaboration avec l'armée de l'Air, mais à titre privé et il ne pouvait donc pas la partager. Florent a alors proposé d'écrire un texte
commun, et le résultat est ici.
Ce texte a été mis en ligne à la date anniversaire de l'observation, 42 ans plus tard !
Florent est donc à l'origine de l'hypothèse, il a fait beaucoup de recherches sur les ballons en Mylar et les méprises dont ils
peuvent être responsables, il a aussi expérimenté sur ces ballons, fait des reconstitutions avec une maquette puis un ballon filmé par un drone... Et il a
bien sûr résumé les témoignages originaux, dont il avait connaissance par l'étude des enquêteurs Portugais.
Robert a de son côté plutôt synthétisé l'hypothèse et réalisé des reconstitutions virtuelles, et il s'est aussi intéressé aux deux autres cas étudiés par la
même équipe en collaboration avec l'armée de l'Air, et quelques autres cas qui semblent relever de la même explication.
L'observation
Ce cas implique trois pilotes de l'armée de l'Air portugaise volant à bord de deux avions d'entraînement De Haviland DHC-1 « Chipmunk » :
L'observation a fait l'objet d'un article dans la Flying Saucer Review en 1987 (vol. 32 n°5), que nous traduisons :
OBSERVATION RAPPROCHÉE PAR DES PILOTES DE L'ARMÉE DE L'AIR PORTUGAISE (NOVEMBRE 1982)
José Sottomayor et Antônio Rodrigues (Groupe d'enquête sur les OVNI du CNIFO, Lisbonne)
(Traduction précise du portugais)
Nous sommes très reconnaissants à notre estimé consultant portugais, M. Joaquim Fernandes, du CNIFO (Groupe portugais d'investigation sur les OVNI),
de nous avoir envoyé ce long et minutieux rapport sur un événement survenu récemment dans son pays. Faute de place, nous regrettons de ne pouvoir en
donner que les principaux détails. Lui-même et d'autres membres de haut rang du CNIFO ont pu discuter de l'affaire par la suite, lors d'un entretien
privé, avec le général Brochado Miranda, chef d'état-major de l'armée de l'Air portugaise, ce qui souligne clairement le sérieux absolu avec lequel
cette armée de l'Air considère cette observation d'OVNI tout à fait typique. — L'ÉDITEUR.
Cet épisode s'est produit en plein jour, entre 10 h 50 et 11 h 50, le matin du 2 novembre 1982, dans la région située entre Torres Vedra et la Serra de
Montejunto (chaîne de montagnes). C'est-à-dire dans une zone située juste au nord-est de Lisbonne, et au-dessus de la province d'Estremadura.
Le ciel était clair, la visibilité illimitée et le vent faible. L'indice d'étrangeté est de 2 et l'indice de crédibilité de 3
[Cette notation des cas en indices d'étrangeté et de crédibilité avait été proposée par Allen Hynek. La notation allait de 0 à 5, on a donc affaire ici
à une note moyenne selon la FSR].
Comme indiqué, la durée totale de l'observation a été d'environ 25 minutes, et deux avions d'entraînement de l'armée de l'Air portugaise ont été
impliqués, avec des pilotes à bord. Ces hommes, le lieutenant d'aviation J.M.G., l'enseigne C.G. et l'enseigne A.G., volaient à bord d'avions
d'entraînement primaire Chipmunk DHC-1 construits au Canada et venaient de la base aérienne n° 2 d'OTA.
Le lieutenant J.M.G., volant à une altitude d'environ 1500-1600 m au-dessus de Maxial, a vu un objet brillant en dessous, apparemment très proche du sol
(peut-être à 50 ou 100 m, a-t-il pensé), se déplaçant sur une trajectoire N-S. Au moment où il a décidé qu'il serait bon de continuer à le regarder,
l'objet a soudainement changé de comportement, comme s'il s'était rendu compte de sa présence, et en dix secondes il s'est élevé à la même hauteur que
lui, ce qui implique une vitesse d'ascension d'environ 500 km/h.
L'objet commença alors à voler autour de lui en faisant de grands mouvements, et il fut obligé d'effectuer une série de virages serrés pour le suivre.
L'objet était alors suffisamment proche pour qu'il puisse constater qu'il était rond et qu'il « ressemblait à une
boule de mercure ». Il se composait de deux hémisphères (l'inférieur étant rougeâtre), métalliques, brillants, avec une zone circulaire
sombre au centre de sa base. Autour des bords, là où les deux « hémisphères » se rejoignaient, il crut distinguer une sorte de protubérance ou
d'irrégularité. L'objet reflétait fortement la lumière du soleil et, comme nous le verrons plus loin, l'estimation finale de son diamètre est d'environ
deux mètres.
Le lieutenant J.M.G. a signalé à sa base ce qu'il voyait, — « une boule de mercure ». D'autres pilotes dans les environs ont capté son message et il y
a eu un peu de badinage mutuel, avec des suggestions qu'il voyait un ballon, ou même un ballon de football, ou qu'il avait « été à la bouteille ». Ce à
quoi il a rétorqué qu'il s'agissait d'un « ballon » ou d'un « ballon de football » assez remarquable, capable de s'élever de 100 mètres à 1 500 mètres
en quelques secondes, puis de voler autour de lui à une vitesse fantastique. Et cela a fait taire les bavardages...
L'OVNI tournait maintenant autour de lui en décrivant de vastes cercles, estimés par lui à un périmètre de 21 000 mètres et à un diamètre de
6 000 à 8 000 mètres, au-dessus de la zone comprise entre Torres Vedras et Montejunto. J.M.G. lui-même volait en anneaux serrés d'un périmètre d'environ
1 500 mètres et d'un diamètre de 450 mètres, à une vitesse de 170 km/h. Il estime la vitesse de l'OVNI à plus de 2 500 km/h.
À aucun moment il n'a observé d'effets sur ses instruments ou sur lui-même.
Les deux autres témoins oculaires, l'enseigne C.G. et l'enseigne A.G., sont arrivés sur les lieux, également dans un avion d'entraînement Chipmunk,
vers 11 h 05. Leur description de l'objet correspond en grande partie à celle de J.M.G., à savoir qu'il semblait métallique, de forme arrondie, avec
deux zones convexes surélevées et une « grille » autour du centre. Cette « grille », pensaient-ils, émettait des « éclairs » très intenses, qui ne leur
semblaient pas dus à la lumière du soleil, dans la mesure où les « éclairs » semblaient être rougeâtres d'un côté et verts de l'autre, et ressemblaient
donc plutôt à des décharges électriques.
Ils ont dûment signalé à la base qu'ils avaient eux aussi l'objet en vue. L'objet a continué à voler pendant une dizaine de minutes. À un moment donné,
il passa entre les deux avions, et C.G. put observer qu'il arrivait devant l'avion de J.M.G., ce qui lui permit d'estimer sa largeur, à savoir environ
deux mètres. (L'avion d'entraînement « Chipmunk » mesure 7,75 m de long et 10,46 m de large).
Enfin, l'OVNI a effectué un balayage, passant très près de J.M.G., et s'est élancé vers les pentes de la chaîne de Serra de Sintra, située au sud-ouest,
et a disparu de la vue.
De retour à la base, les trois témoins s'accordent à dire que l'objet ne pouvait pas être un « ballon » et qu'il était manifestement contrôlé
par une intelligence.
Comme nous l'avons mentionné plus haut, leur compte rendu général concorde, bien que les trois pilotes n'aient pas tous eu la même vision claire de la
« grille » centrale autour de l'objet, ou de son centre circulaire sombre inférieur. Alors que deux d'entre eux ont mentionné un système de « côtes » sur
la moitié inférieure de l'objet, le troisième ne l'a pas fait, et le récit et le croquis d'A.G. l'a plutôt montré comme « cylindrique », avec des
extrémités arrondies, comme une gélule, bien qu'il admette que cela puisse être dû à la perspective. Mais A.G. pilotait et n'était donc pas en mesure
de le voir aussi bien que son compagnon, C.G..
Déclassification au Portugal
Cette affaire a été l'élément déclencheur de la déclassification d'observations d'ovnis par l'armée de l'Air portugaise.
Le chef d'état-major de l'armée de l'Air portugaise était alors le général José Lemos Ferreira, et il se trouve que lui-même avait été témoin d'un ovni en
1957.
Voyons ce qu'en dit Guerra dans le livre de Leslie Kean :
En 1957, le général Ferreira avait lui-même observé un objet lumineux inconnu alors qu'il dirigeait un vol de nuit entre les bases de l'Ota au Portugal
et de Cordoba en Espagne. Trois autres pilotes de l'Air Force volant dans trois avions séparés avaient également vu le phénomène — d'abord un objet de
grande taille puis quatre petits « satellites » qui en sont sortis. Il était conscient de l'importance scientifique de ce genre de choses et a
envoyé un rapport sur cet incident au Projet Livre Bleu conduit par l'armée de l'Air américaine.
Et donc lorsqu'a eu lieu l'observation de 1982, le commandant Ferreira a décidé qu'il ne fallait pas que cette affaire reste cantonnée à l'armée, et il a
décidé de faire appel à des scientifiques, et en même temps de déclassifier d'autres histoires d'ovnis au Portugal.
Si l'on en croit le
bilan des déclassifications de Ballester Olmos, l'armée de l'Air portugaise a déclassifié l'ensemble de ses rapports d'observations en 1990 en les
donnant au CNIFO. Et cela représente 190 pages consacrées à trois cas datant du 4 septembre 1957 (observation de Ferreira), 17 juin 1977 (cas de
Castelo de Bode) et 2 novembre 1982 (celui qui nous concerne)... On parlera un peu des deux autres cas à la fin.
L'enquête des scientifiques
Les scientifiques responsables de l'enquête étaient des membres du CNIFO (Comissão Nacional de Investigação do Fenómeno Ovni, Commission nationale
d'investigation sur le phénomène ovni), une association d'étude des ovnis fondée en 1982 par Joaquim Fernandes, historien à l'université Fernando Pessoa.
On voit ici l'enquêteur principal José Sottomayor (deuxième en partant de la gauche), puis les pilotes Júlio Guerra et Carlos Garcez, et deux autres
enquêteurs aux extrémités :
Guerra indique encore dans le livre de Leslie Kean :
Puisque le général avait une certaine compréhension du problème ovni, il a diffusé toutes les informations en possession de l'armée de l'Air portugaise
concernant mon observation, et une longue enquête scientifique a été lancée en 1983 pour s'achever en 1984. L'équipe d'experts comptait environ trente
personnes de différentes disciplines et d'institutions académiques, dont des historiens, des psychologues, des physiciens, des météorologues, des
ingénieurs et d'autres scientifiques.
Cette enquête impliquait une coopération entre les militaires et les scientifiques civils. Je suis retourné sur la zone et j'ai volé selon le trajet
suivi par l'objet au cours de son ascension initiale lorsque je l'ai vu pour la première fois, ce qui n'avait pris que quelques secondes. En comptant
dix secondes et en parcourant la même distance, nous avons déterminé que la vitesse ascensionnelle était d'environ 480 km/h. Ceci est impossible pour un
hélicoptère et, plus important, un être humain à son bord n'aurait pu survivre à la force d'accélération nécessaire à un tel déplacement.
Ayant pu montrer aux enquêteurs sur la carte la trajectoire de l'objet selon une orbite elliptique par rapport à des points au sol, ils ont été capables
de déterminer que sa vitesse était d'environ 2500 km/h. Cette vitesse est incroyable, en particulier compte tenu des manœuvres qu'il a réalisées. Je ne
sais pas s'il venait d'un autre univers, ou bien si c'était un objet terrestre ; je ne le sais tout simplement pas. Je n'ai jamais rien revu de tel
depuis lors.
L'équipe scientifique a étudié toutes les données ainsi que les trois rapports des pilotes puis, après une réunion des trente enquêteurs à Porto en
1984, le groupe a rendu une analyse écrite de plus de 170 pages. Ils ont fait tout ce qu'ils pouvaient pour comprendre ce cas mais n'ont pu lui trouver
une explication. Ils ont conclu que l'objet restait non identifié.
Cette collaboration totale de l'armée de l'Air avec un groupe de scientifiques en fait un cas exceptionnel, voire unique en son genre.
Et ce sont bien d'authentiques scientifiques qui ont participé à cette enquête, mais très portés sur l'hypothèse extraterrestre au sujet des ovnis.
L'historien Joaquim Fernandes, cofondateur du CNIFO, a écrit un livre sur les apparitions de Fatima intitulé « Intervention extraterrestre à Fatima : Les
apparitions et le phénomène ovni »... C'est une opinion tout à fait respectable que bon nombre d'ufologues partagent, mais le caractère affirmatif du
titre paraît excessif venant d'un scientifique.
En 1997, le CNIFO s'est intégré à la Société portugaise d'exploration scientifique (SPEC, Sociedade Portuguesa de Exploração Cientifica) ayant des champs
de recherche plus larges avec les mêmes deux fondateurs, laquelle a édité un gros livre et organisé un symposium (Frontières de la science) en 1997. Et en
2001, la SPEC s'est transformée en CTEC : Centro Trandisciplinar do estudo da consciência (Centre
transdisciplinaire d'étude de la conscience, un glissement sémantique assez révélateur). Ces associations successives étaient toujours liées à l'université
Fernando Pessoa, impliquant une certaine reconnaissance scientifique.
On voit que les auteurs de l'étude font une confiance aveugle aux estimations des pilotes... Écoutons par exemple dans le reportage de la TV portugaise
Pedro Feriel, ingénieur mécanicien :
Un avion à réaction pourrait parfaitement avoir cette vitesse, mais les accélérations qu'ils décrivent, ou qu'ils arrivent à déduire à travers les
mouvements de l'aéronef, sont très grandes, et probablement beaucoup trop grandes pour être supportées par un être humain.
Je crois que le point le plus intéressant de ce cas d'Ota est le fait d'avoir été relaté par trois pilotes de la Force Aérienne avec beaucoup
d'expérience dans l'évaluation des vitesses, l'évaluation des performances.
Des pilotes d'avion, en particulier militaires, ont vraiment une grande expérience dans l'évaluation D'OBJETS QU'ILS CONNAISSENT... Mais quand il s'agit
d'objets de nature inconnue ils n'ont pas des capacités surhumaines, ils sont tout aussi incapables que le commun des mortels de différencier un objet de
petite taille à faible distance et se déplaçant à faible vitesse d'un objet de grande taille à grande distance et se déplaçant à grande vitesse...
L'homme est simplement incapable de cela, du moins tant que la distance réelle de l'objet n'est pas inférieure à une cinquantaine de mètres.
Et nous verrons que cette incapacité à connaître la distance des objets est certainement à l'origine de la méprise.
Le pilote Garcez en a d'ailleurs conscience lorsqu'il dit dans son témoignage :
En terme de taille, pour donner une idée, au début je ne me suis pas rendu compte, car le ciel était totalement dégagé, sans aucune référence de
contraste, une chose ronde de cette nature peut être très grande et être très loin comme très petite et près de nous, ainsi nous n'avons pas la notion
de la taille.
Il évalue pourtant cette taille en pensant que l'ovni est passé très près de l'autre avion, mais en fait il n'en a aucune idée : ce qu'il donne si l'objet
est passé devant l'avion de Guerra et si son appréciation est fiable, c'est une dimension maximale.
Les enquêteurs semblent admettre sans le moindre doute l'estimation de Guerra que l'ovni décrivait des cercles de 21 km de diamètre en 30 secondes,
laquelle implique des performances extraordinaires : une vitesse de plus de deux fois la vitesse du son sans que personne n'ait entendu de bang
supersonique, et des accélérations qu'un être humain ne pourrait pas supporter et dont aucun de nos aéronefs ne serait capable.
Nous verrons pourtant que les témoins étaient loin d'être unanimes sur cette estimation, et que Guerra lui-même a beaucoup varié dans ses déclarations successives.
La journaliste Leslie Kean, bien connue pour avoir intéressé la presse à de nombreuses observations faites par des pilotes, des officiels ou des
militaires (dont beaucoup se sont ensuite dégonflées), n'a pas manqué de s'intéresser à cette affaire. Elle lui a consacré un chapitre de son livre
Ovnis : des généraux, des pilotes et des officiels parlent (paru en 2014 pour la traduction française, en 2010 pour l'édition originale américaine),
sous le titre « Encerclé par un ovni »...
Et Kean a intéressé le National Geographic à ce cas, ce qui a donné lieu en 2012 à une grande partie du reportage « Les Ovnis envahissent l'Europe
partie V, les Fusées fantômes » (bien qu'il n'ait vraiment aucun lien avec les « fusées fantômes » observées en Suède en 1946, lesquelles sont d'ailleurs
à peine évoquées dans le reportage). On peut le trouver en anglais sur Youtube,
ou en français mais avec une moins bonne qualité d'image sur Dailymotion. Le cas
Guerra commence à partir de 13'19", nous avons aussi retranscrit les paroles en français.
Ce documentaire est intéressant surtout parce qu'on y voit au passage quelques extraits de l'étude du CNIFO...
Sur les calculs de la vitesse de l'objet :
Sur les dimensions attribuées à l'objet :
Sur sa description :
Et aussi sur les trajectoires suivies par l'objet et les avions, avec des schémas compliqués et difficiles à interpréter en l'absence de tout commentaire :
Nous verrons après consultation du rapport comment tout cela s'interprète, mais le moins que l'on puisse dire est que ça n'était pas clair du tout dans le
reportage.
Cover Up des ufologues
Ces quelques images sont les seuls extraits de l'enquête que l'on puisse trouver publiquement... C'est un peu curieux pour des scientifiques de consacrer
près d'un an à l'étude détaillée d'une observation, d'en tirer un rapport de près de 200 pages, et de ne pas le publier...
On ne trouve même pas un résumé de cette étude dans la revue
Anomalia éditée par le CNIFO/SPEC, dont cinq numéros de quelque 200 pages chacun ont été publiés entre 1993 et 2001 (il semble qu'il y ait eu juste
un bref résumé de l'affaire dans le numéro 5 de cette revue, paru en 1995, dans une petite rétrospective des ovnis au Portugal).
L'attitude scientifique consiste plutôt à publier un étude pour permettre à d'autres de la discuter ou de la compléter. Or ici le moins que l'on puisse dire
est que ça n'a pas été le cas : en quarante ans, cette enquête n'a été montrée qu'à quelques journalistes... On a vu qu'un
des auteurs de ce texte, Florent, a fini par l'obtenir, après avoir beaucoup insisté et fait jouer ses relations.
Et de même, le CNIFO n'a jamais rendu public le rapport de l'armée de l'Air, avec les témoignages initiaux des trois pilotes... Ce rapport prétendument
« déclassifié », avec ceux de deux autres cas, n'est jamais sorti du CNIFO/SPEC/CTEC.
Et lorsque Florent a pu consulter ce fameux rapport, il a constaté que la présentation faite dans les médias était très incomplète et pas
parfaitement représentative de la réalité. Comme nous le verrons par la suite, de très nombreux détails importants n'y ont jamais été évoqués.
Ainsi, Júlio Guerra, le témoin principal, explique dans le livre de Leslie Kean :
Immédiatement après l'atterrissage, nous avons fait tous les trois un rapport écrit, formel et détaillé de l'incident et
nos avions ont été vérifiés pour voir s'il y avait des dégâts. Mais aucun membre de l'Air Force ne nous a rien dit de plus et nous n'avons pas été
interrogés par les militaires.
En réalité, apparemment seul le témoin Carlos Garcez a de lui-même rédigé un rapport de son observation le jour-même, les deux autres ont simplement rempli
un questionnaire succinct réalisé par une association ufologique (le CEAFI, Centro de Estudos Astronómicos e de Fenómenos Insólitos,
Centre d'études astronomiques et des phénomènes insolites, qui est en fait le prédécesseur du CNIFO), qui n'est même pas
daté (on peut supposer que c'était peu après l'observation, mais probablement pas le jour même). La description détaillée de l'événement
n'est venue que lors de l'enquête du CNIFO, près de six mois plus tard.
Et le rapport de l'armée de l'Air indique aussi tout au contraire que les avions impliqués n'ont pas été inspectés à leur retour à la base.
Pourtant, l'enquêteur principal José Sottomayor indiquait aussi dans le reportage de la TV portugaise :
Les avions impliqués, les Chipmunk, ont été revus à peine après avoir atterri... Ils ont atterri très peu de temps
après, ils ont été immédiatement revus, il n'y avait aucune anomalie, rien n'a été détecté.
Sottomayor aussi bien que Guerra disent cela plus de vingt-cinq ans après les faits, de telles erreurs ne sont donc pas surprenantes, mais c'est bien
pour cela qu'il faut absolument publier les témoignages et documents originaux si on veut faire preuve d'un minimum de sérieux.
Et nous verrons aussi que les trois pilotes étaient loin d'être unanimes sur ce qu'ils avaient observé, contrairement à ce que laissent penser les reportages.
Il semble malheureusement, et c'est loin de se limiter aux Portugais, que les ufologues sont souvent bien plus adeptes du fameux cover-up qu'ils ne
cessent de dénoncer que l'armée elle-même !
À noter que lorsque Florent a demandé à Joaquim Fernandes, qui a toujours eu un rôle clé au sein du CNIFO/SPEC/CTEC, ce qu'il en était du rapport « déclassifié » de l'armée de l'Air portugaise,
ce dernier lui a répondu que le dossier n'avait jamais été classifié pour eux. Ils ont eu accès à l'intégralité du dossier. On peut supposer qu'on ne leur a pas interdit de publier l'intégralité du rapport, à l'exception bien sûr
des informations qui concerneraient la vie privée des témoins, notamment les rapports médicaux, ou qui relèveraient du secret défense.
Et on n'a sans doute pas interdit non plus à ce groupe de scientifiques de publier son propre rapport sur ce cas !
Les sceptiques lancent le débat
Nous avons vu que cette observation a reçu un certain écho médiatique, mais elle est restée complètement ignorée des sceptiques, peut-être justement parce
qu'on ne trouvait que des sources journalistiques.
C'est en novembre 2014 que Florent a présenté ce cas
sur
le forum Ufo-scepticisme, en suggérant l'hypothèse d'une confusion avec un ballon en Mylar...
Il s'appuyait essentiellement sur les descriptions de l'apparence de l'objet, certains de ses comportements (ses oscillations), ainsi que le croquis
du témoin principal, qui semblaient fortement correspondre à un ballon en Mylar. En faisant des recherches, il avait appris que ce type de ballons
était très récent à l'époque, donc peu connu, et très novateur par l'aspect, ce qui expliquait l'incapacité des témoins à l'identifier.
Florent proposait une méprise due à une très forte surestimation de la taille de l'objet, donc de sa distance, donnant l'impression que l'objet se déplaçait
extrêmement rapidement, alors qu'il n'était que porté par le vent.
Il faisait des hypothèses assez échevelées sur ses mouvements réels, n'envisageant pas que le ballon ait été presque immobile, mais la discussion qui a suivi
a vite montré que c'était pourtant bien possible, et que toute la méprise résultait uniquement d'une mauvaise estimation de la dimension et de la distance
par les pilotes.
La méprise serait assez similaire aux nombreux cas où la lune a été prise pour une « boule suiveuse » : les témoins n'identifient pas la lune
et la prennent pour une sphère lumineuse proche, ils pensent que cette boule suit leur automobile, s'arrête quand ils s'arrêtent, ce qu'ils attribuent à un
comportement intelligent.
Ici, on a plutôt une confusion inverse : les pilotes voient un ballon d'une quarantaine de centimètres de diamètre qu'ils prennent pour un objet à peu
près six fois plus grand, quand ils se mettent à tourner autour de lui ils pensent donc qu'il est six fois plus loin d'eux et que c'est lui qui
effectue des cercles autour d'eux cinq fois plus loin que le rayon de leur propre orbite et se déplace cinq fois plus rapidement que leur avion !
Voici dans cet exemple un avion qui tourne autour d'un ballon, et le pilote qui ne peut faire aucune différence entre un ballon immobile au centre de son orbite,
un ballon deux fois plus proche et deux fois plus petit, un ballon deux fois plus lointain et deux fois plus grand, et un ballon cinq fois plus lointain
et cinq fois plus grand :
C'est un effet de parallaxe, que l'on peut illustrer par ce schéma :
On a un avion qui vole de gauche à droite, et le pilote voit un ballon à sa gauche et un peu devant lui... Il imagine que c'est un objet quatre fois plus loin
et quatre fois plus gros... Après s'être déplacé d'une certaine distance, il voit l'objet en arrière de lui, et l'objet imaginaire quatre fois plus gros que le ballon
s'est déplacé d'une distance triple de celle de l'avion, en sens inverse... Le pilote suppose donc, en toute objectivité, que cet objet se déplace trois fois
plus vite que lui (trois fois et pas quatre : l'objet imaginaire est quatre fois plus loin de l'avion que le ballon, et donc par rapport au ballon
il est trois fois plus loin que l'avion).
Dans le cas de la « boule suiveuse » causée par la lune on a de même cette situation :
Le conducteur de la voiture voit la lune dans une direction déterminée... Ne la reconnaissant pas, par exemple parce qu'il ne sait pas qu'une demi-lune
peut-être horizontale, il la prend pour un ovni en forme de demi-sphère proche de lui... Après s'être déplacé, il voit l'objet dans la même direction,
puisque le lune est à une très grande distance, et imagine donc qu'il s'est déplacé à la même vitesse que lui-même.
Le débat sur Ufo-scepticisme a été très long et a fait intervenir un certain nombre d'intervenants, outre Florent : Nablator qui a sans doute le plus fait
avancer dans la compréhension de l'affaire, mais il y a eu aussi des interventions très pertinentes de The Phantom (Gilles Fernandez), Oncle Dom (Dominique
Caudron), Chris Isbert, Patrice (Seray), Marcassite (Éric Maillot), L.J. Silver, et aussi bien sûr hal9000 (Robert).
C'est quoi, un ballon en Mylar ?
Le nom de Mylar est une marque déposée par DuPont de Nemours. Le nom véritable du matériau, c'est le biaxially oriented polyethylene terephthalate,
ou polytéréphtalate d'éthylène orienté biaxialement, en abrégé BoPET.
Le BoPET a été inventé dans les années 50 pour former de très fins films de plastique transparent résistants et peu élastiques, utilisés en particulier
comme enveloppes de ballons-sondes.
On l'utilise aussi, recouvert de métal, dans les couvertures de survie, et les ballons festifs en Mylar sont apparus de leur côté à la fin des années 70,
donc peu avant l'observation qui nous intéresse.
Ces ballons sont formés de deux cercles de Mylar aluminisé, soudés sur le périmètre (cela forme une collerette plus ou moins large selon les modèles),
avec une petite excroissance non soudée équipée d'un système de fermeture faisant office de valve pour le gonflage. En anglais, ces ballons sont appelés
« foil balloons » ou ballons-feuille. Beaucoup des ballons disponibles à l'époque avaient une face imprimée ou simplement colorée, l'autre étant argentée.
Le diamètre le plus courant était de 45 cm (18 pouces), se réduisant à environ 35 cm une fois gonflé, le contour se plissant du fait que le Mylar est
très peu élastique. Plus tard, on a fabriqué des ballons de formes et de couleurs très variées, mais à l'époque la plupart étaient circulaires ou en forme de cœur,
et colorés ou imprimés sur une seule face.
Il est en tout cas certain que des ballons en Mylar bicolores se trouvaient facilement lors de l'observation en 1982, puisqu'on en voit un dans un film
sorti cette année-là :
Celui-ci était en forme de cœur, mais les ballons circulaires étaient au moins aussi courants.
Ces ballons sont beaucoup plus hermétiques que les ballons de baudruche ordinaires, ils peuvent rester en l'air plusieurs semaines lorsqu'ils sont gonflés
à l'hélium et atteindre une altitude très élevée. Souvent, toutefois, ils éclatent bien avant, lorsque la pression atmosphérique baisse. Mais du fait
que leur enveloppe n'est pas élastique, ils n'éclatent pas aussi brutalement que les ballons de baudruche... Ils se déchirent plutôt, et si la déchirure
est de petite taille ils peuvent continuer à s'élever assez haut, avant de redescendre.
Si on veut éviter que ces ballons n'éclatent ou ne se déchirent en prenant de l'altitude, il faut les gonfler partiellement.
C'est ce que font notamment des radioamateurs qui utilisent des ballons en Mylar de 90 cm de diamètre pour emporter un capteur GPS, un émetteur radio,
un micro-contrôleur, quelques instruments de mesure miniaturisés et des cellules solaires pour l'alimentation électrique, le tout pesant une vingtaine de grammes :
Il s'agit bien d'un ballon circulaire classique, et c'est le fait qu'il soit sous-gonflé qui lui donne cet aspect particulier. Ces « pico-ballons »
atteignent couramment une altitude de plus de 10 km et peuvent y demeurer plusieurs semaines... Un de ces ballons, répondant au joli nom de K9YO,
est devenu célèbre en ayant été abattu par un missile après avoir fait plus de six fois le tour de la Terre en 123 jours de vol, lorsque les militaires américains
s'en sont pris à tous les ballons non identifiés après l'affaire du ballon-espion chinois !
Les révélations du rapport du CNIFO
L'hypothèse d'une illusion d'optique causée par un ballon en Mylar semblant très prometteuse, Florent a redoublé d'efforts afin d'obtenir l'enquête du CNIFO.
L'objectif était de la confronter à tous ses éléments. Il avait déjà tenté d'y avoir accès au début de ses recherches sur ce cas, en envoyant divers courriels,
mais sans succès.
C'est finalement grâce à l'ufologue espagnol Vicente-Juan Ballester Olmos qu'il a pu entrer en contact avec Joaquim Fernandes, l'un des membres fondateurs du CNIFO.
Après avoir exposé son hypothèse à ce dernier, il a accepté de lui fournir tous les documents du dossier. Merci à lui pour sa confiance.
L'enquête du CNIFO est extrêmement détaillée, environ 210 pages en comptant les annexes. Elle est d'une qualité remarquable, rarement égalée.
Le rapport contient notamment une présentation du cas, la transcription des déclarations des témoins lors de leur entretien (d'une dizaine de pages par témoin),
une analyse de leurs profils, une étude de la zone d'observation et, enfin, les conclusions de l'enquête. Les annexes représentent environ 140 pages.
Elles comprennent l'enquête initiale, divers questionnaires, des QCMs, les croquis de l'objet réalisés par chaque témoin,
le compte rendu ainsi que des croquis réalisés le jour de l'observation par Carlos Garcez, des plans illustrant les déplacements de l'objet et des avions,
un questionnaire destiné à évaluer les compétences des témoins, une enquête psychologique, les données météo et astronomiques...
Chaque témoin a répondu séparément à tous ces documents.
Le cas d'Ota est donc non seulement exemplaire du fait de la collaboration de l'armée de l'Air portugaise avec une association civile, mais également
en raison de l'ampleur et de la qualité de l'enquête réalisée par le CNIFO.
Après avoir lu plusieurs fois l'intégralité des documents, Florent a pu constater que la description qu'il avait établie, presque uniquement à l'aide
des interviews de Júlio Guerra et des articles ou documentaires sur ce cas, était dans les grandes lignes conforme à son témoignage.
Cependant, le rapport contient également de très nombreux nouveaux éléments, notamment concernant ce dernier, mais surtout à propos des deux autres témoins,
pour lesquels très peu de renseignements étaient disponibles auparavant.
Tout d'abord, l'hypothèse d'un ballon en Mylar n'y est jamais évoquée, même lorsque les enquêteurs interrogent les témoins sur la possibilité d'une méprise
avec un ballon. Étant donné la forte ressemblance entre ce type de ballon et les croquis et descriptions des témoins, cela semble confirmer qu'ils étaient encore
très peu répandus et connus à l'époque.
Il est important de préciser que les trois témoins ne souhaitent apparemment plus s'exprimer à propos de cette observation. Merci de respecter leur décision
et de ne pas les déranger... De toute façon, ce qu'ils pourraient dire au sujet de leur observation après 42 ans n'apporterait rien d'intéressant à l'étude du cas.
Nous allons maintenant examiner en détail l'aspect et les mouvements de l'objet lors des différentes phases de l'observation, à la lumière des déclarations
successives des trois témoins.
L'aspect de l'ovni
Le lieutenant Guerra a donc vu d'abord ce qui ressemblait à une « boule de mercure », donc un objet d'apparence métallique brillant, dont la forme s'est
ensuite précisée... La partie supérieure était décrite comme de l'aluminium métallique, la partie inférieure comme rouge métallique (entre le rouge et le brun
d'après son témoignage dans le livre de Kean), avec un cercle sombre ou un trou au centre... Et entre les deux hémisphères il voyait une sorte
de bande brillante.
Voici comment il a dessiné l'objet dans son rapport pour l'armée de l'Air, quelques jours après son observation :
Il est clair que ça évoque beaucoup un ballon festif en Mylar, comme on a commencé à en commercialiser à la fin des années 70 :
Le sous-lieutenant Garcez a pour sa part dessiné le croquis suivant pour l'enquête en avril 1983, et il en avait fait un très similaire le jour-même de l'observation :
Il comparait l'objet à un hamburger, la partie supérieure argentée et la partie inférieure couleur de vin, avec une
sorte de grille métallique sur son pourtour. D'après l'article dans la FSR, cette « grille » émettait des « éclairs » très intenses, qui ne semblaient pas
dus à la lumière du soleil dans la mesure où ils étaient rougeâtres d'un côté et verts de l'autre, ressemblant plutôt à des décharges électriques. Mais
Guerra pensait plutôt quant à lui voir la lumière du soleil se refléter sur le pourtour de l'objet.
Lorsqu'un ballon est gonflé, la bande du contour fait des ondulations, et peut donc former un chapelet de points lumineux mouvant en réfléchissant la
lumière du soleil. Il se pourrait que la coloration différente (rouge d'un côté, vert de l'autre) de ces points soit due à la réfraction à travers les
vitres de l'avion, faisant office de prisme, mais il se peut plus simplement que les reflets sur le contour prennent des teintes irisées.
Ces plis sur le contour sont aussi caractéristiques des ballons en Mylar gonflés. Deux des témoins ont bien distingué ces plis, qu'ils assimilent plutôt à
des « côtes ». Ils les voyaient uniquement sur la partie inférieure, mais la partie supérieure reflétant le ciel était peut-être simplement trop lumineuse
pour qu'on puisse les distinguer.
Le sous-lieutenant Gomes, qui pilotait le second avion, ne donne pas beaucoup de détails sur la structure de l'objet et ne l'a pas dessiné... Dans l'enquête du CNIFO, il indique
qu'il l'a vu d'abord comme « un gros ballon de rugby aux bouts arrondis », puis il précise qu'il l'imaginait plutôt en forme de gélule ou d'extincteur,
ça devrait ressembler à cela en respectant les proportions :
Il précise comme détail que l'objet était muni d'une lumière intense, évoluant du rouge à une sorte de flash ou éclair, et qu'il ne s'agissait pas d'une réflexion
du soleil.
Gomes dit aussi qu'il voyait l'objet tourner, comme un objet dévalant une pente, mais il précise qu'il l'a toujours vu de profil... La rotation se serait donc
effectuée sur un axe horizontal plutôt que vertical, ce qui expliquerait qu'il donne une largeur différente de la hauteur (1 m de longueur, 40 cm de hauteur
et 20 cm de largeur dans le premier questionnaire). Étant donné que les deux autres témoins indiquent plutôt
une forme de disque, on peut supposer que cette impression de Gomes résultait d'une oscillation du ballon.
Si on fait une synthèse des trois témoignages, la description générale évoque de façon remarquable un ballon en Mylar, aussi bien en forme qu'en proportion.
On peut s'étonner par contre que ce ballon soit resté durant toute l'observation dans une position pratiquement horizontale.
Ça n'est que lorsqu'ils sont tenus au sol, retenus par la ficelle, que ces ballons sont en position verticale... Ensuite, que se passe-t-il ? Si la
ficelle a un certain poids, ils vont garder cette position, sinon ils vont se coucher à l'horizontale pendant qu'ils s'élèvent, pour offrir leur plus
grande surface à l'avancement... C'est la position naturelle de tous les corps symétriques. Mais ils finissent par arrêter de s'élever, lorsque leur masse
est exactement celle du volume d'air qu'ils occupent (souvenez-vous, le principe d'Archimède). Ils auront alors atteint leur altitude d'équilibre, et
puisque Guerra et les deux autres pilotes ont tourné avec l'objet pendant près d'une demi-heure sans que leur altitude ait sensiblement varié, le ballon
supposé avait bien atteint cette altitude d'équilibre.
A priori, si le ballon est symétrique, il n'y a pas de raison qu'il reste dans une orientation privilégiée : il n'y a rien qui puisse créer un couple de
force pouvant le maintenir dans une position plutôt qu'une autre.
On peut imaginer quelques possibilités :
– les ballons en s'élevant dans les nuages pourrait s'électriser à des potentiels différents sur les deux
faces, et s'aligner alors avec le champ électrique terrestre, orienté verticalement (les nuages sont chargés positivement, le sol négativement, créant
une différence de potentiel d'environ 100 volts par mètre);
– en éclairant une face du ballon, le soleil pourrait créer un mouvement de convection
à l'intérieur, entraînant dans sa rotation l'enveloppe jusqu'à ce que le ballon adopte une position horizontale;
– il est encore possible que le ballon n'ait pas tout à fait atteint son altitude d'équilibre, et s'élevait à faible vitesse, de l'ordre de 10 cm/s... Il se
pourrait que l'échauffement au soleil ait provoqué une nouvelle ascension. Les témoins indiquent que l'objet s'est élevé à la fin de l'observation, ce qui
pourrait trahir une augmentation de la poussée d'Archimède. Notons que cette ascension due à la poussée d'Archimède est indépendante du vent. Un ballon
est emporté par le vent, il suit les mouvements de l'air sans subir de différence de pression (sauf momentanément si la vitesse ou la direction du vent
change). Par contre, la poussée d'Archimède le fait s'élever dans l'air qui l'entoure, l'air exerce donc une pression sur sa partie supérieure (si au
contraire le ballon est plus lourd que l'air, il va bien sûr subir une pression sur sa partie inférieure, et dans les deux cas il s'orientera à
l'horizontale);
– bien sûr, le ballon sera aussi horizontal si les deux hémisphères n'ont pas le même poids. Peut-être que si une de ses faces est colorée ou imprimée, elle sera un peu plus lourde, et c'est bien la partie argentée de l'objet qui se trouvait vers le haut;
– et on pense aussi au cercle sombre vu au centre de la partie inférieure par Guerra et un des deux autres pilotes. Peut-être s'agissait-il
d'un autocollant collé sur le ballon, ou encore d'une pastille collante permettant d'attacher la ficelle ici plutôt que sur la valve
(pour quelle raison ? Peut-être pour que ce ballon ressemble justement à une soucoupe volante ! La présence d'un « lest »
expliquerait aussi que l'objet ayant l'aspect d'un ballon bien gonflé se soit stabilisé à une altitude de seulement 1,5 km, où
la densité de l'air n'est inférieure que de 20% à sa densité au sol, alors que d'ordinaire un tel ballon atteint couramment une altitude de plus de 10 km
s'il n'éclate pas avant. Peut-être que celui qui a lâché le ballon voulait justement que ce ballon reste longtemps à une altitude assez faible (on peut
imaginer toutes sortes de raisons pour cela), et le plus simple était de coller un poids de quelques grammes sur une des faces.
Bref dans tous les cas le fait que le ballon se soit maintenu en position horizontale n'est pas vraiment surprenant, et c'est peut-être justement la
raison pour laquelle sa nature n'a pas été reconnue par les pilotes. Notons que Guerra mentionne que l'objet a oscillé à plusieurs reprises, ce qui est
tout à fait typique d'un tel ballon.
Le fait que l'objet ait été argenté sur sa partie supérieure et plutôt rougeâtre sur sa partie inférieure pourrait indiquer que le ballon était bicolore
ou imprimé. Dans le second cas, il se pourrait que la tache sombre au centre ait fait partie du motif imprimé, que les pilotes n'auraient pas vu en détail
en raison de la distance. Il se pourrait aussi que le ballon ait été tout argenté et que la coloration vue résulte du fait qu'il réfléchissait le sol dans
sa partie inférieure, et le ciel dans sa partie supérieure. On peut voir ce que cela donne sur la vidéo d'un tel ballon uniformément argenté :
En automne, le sol de cette région du Portugal, constitué essentiellement de forêts et de champs, doit tirer plutôt vers le brun-rougeâtre, qui était bien
la couleur de la partie inférieure de l'objet d'après les témoins.
C'est la taille qui compte
Nous avons vu que d'après les divers reportages et publications sur l'observation, les témoins estimaient la taille de l'objet à deux ou trois mètres de diamètre...
Si on suppose une confusion avec un ballon en Mylar, cela suppose une grosse surestimation de la distance par les trois pilotes.
La taille la plus courante de ces ballons est de 45 cm de diamètre (18 pouces), se réduisant à environ 35 centimètres sur 20 centimètres de haut lorsqu'ils sont gonflés.
Il existe un modèle plus grand, mesurant 90 centimètres, mais le modèle de 45 centimètres est le plus courant et semblait dès le départ plus propice à des erreurs
de surestimation.
Mais nous allons voir en étudiant le rapport du CNIFO qu'en réalité, les premières estimations de taille par les trois pilotes
étaient bien plus faibles, et étonnamment proches de la taille d'un ballon en Mylar.
– En ce qui concerne Júlio Guerra, on apprend que, suite à l'ascension de l'objet, lorsqu'il se retrouve pour la première fois à proximité de ce dernier,
il estime sa taille à environ 25 à 30 centimètres de diamètre. Il reproduit ces dimensions sur ses premiers croquis, « 25-30 cm » sur l'un et « +- 30 cm » sur un autre.
Au cours de son observation, il réévaluera plusieurs fois sa taille, estimant dans un deuxième temps qu'elle devait correspondre à celle d'une jante ou
« d'une roue d'automobile », soit environ 50 centimètres.
Par la suite, il explique qu'en tenant compte de la distance, il conclura que l'objet devait mesurer entre 2 et 2,5 mètres.
Dans son entretien, il souligne toutefois qu'initialement l'objet lui semblait mesurer aux alentours de 30 centimètres.
« La première fois que je l'ai vu et qu'il a commencé à tourner autour de moi, j'ai eu l'impression qu'il mesurait environ vingt-cinq à trente centimètres ».
Cette estimation est particulièrement précise dans l'hypothèse d'un ballon en Mylar de 35 centimètres.
Dans le tout premier questionnaire réalisé au cours de l'enquête, il indiquera « environ 50 cm », ou encore « hauteur 30 cm »
et « largeur 50 cm ».
Florent a échangé plusieurs fois avec Júlio Guerra, via courriels, et lui a demandé des éclaircissements
à propos des grandes variations de ses estimations au fil de l'enquête et du temps. Aucune réponse.
Quoiqu'il en soit, ces nouveaux éléments confirment la grande difficulté d'évaluation de la taille de l'objet, sa plus petite estimation étant de 25 centimètres et sa plus grande
2,5 mètres, soit 10 fois plus.
– En ce qui concerne Carlos Garcez, comme lors de ses interviews, il précise dans le rapport qu'il était difficile d'estimer la taille de l'objet.
Au cours de son entretien, il explique que ce qu'il trouve étrange dans cette observation, c'est la taille de l'objet. Il lui semblait petit.
À l'approche de la zone de l'observation, il observe tout d'abord un « point », avec l'avion de Júlio Guerra qui décrit de petits cercles au-dessus.
Puis, en arrivant à proximité, il lui semble que l'objet est de la taille d'un ballon de football, ou légèrement plus grand.
Dans son entretien, il indique à nouveau que l'objet lui semblait initialement de la taille d'un ballon de football, mais qu'en fin de compte il devait faire environ 2 mètres.
Il explique être parvenu à cette estimation en observant l'objet avec l'autre avion en arrière plan, ce dernier lui servant de repère.
Malheureusement, pour que cette technique de comparaison soit fiable, il faut nécessairement que les deux objets soient très proches
l'un de l'autre, voire, si possible, collés l'un à l'autre. Si ce n'est pas le cas et si l'objet est plus proche de l'observateur qu'il ne l'imagine,
cela risque d'engendrer une surestimation de sa taille.
On constate qu'à nouveau l'estimation de la taille de l'objet était complexe pour ce témoin, puisqu'en plus de le préciser lui-même, il donne des dimensions
allant d'environ 22 centimètres (« un ballon de football ») à 2 mètres de diamètre, soit 9 fois plus.
– En ce qui concerne le troisième témoin, António Gomes, le rapport mentionne qu'il a toujours estimé que la taille de l'objet était petite, inférieure à 1 mètre.
Au départ, il l'estime de la taille d'un gros ballon de rugby (avec les bouts arrondis), soit environ 28 à 30 centimètres.
Par la suite, il l'évaluera de « 0,5 à 1 mètre ».
Dans son entretien, il répétera à plusieurs reprises que la taille était « d'une cinquantaine de centimètres ».
Selon lui la forme de l'objet était celle d'un extincteur vu de profil, avec les bouts arrondis, comme une gélule. Pour autant, lorsque les enquêteurs, étonnés par
cette description, lui demandent s'il a vu l'objet de face (donc dans son profil le plus étroit dans l'hypothèse d'une forme de gélule), il répond que non, c'est
simplement l'impression qu'il a eue.
Et il aurait été moins large que haut, les dimensions étant estimées dans le premier questionnaire à 1 m de longueur, 40 cm de hauteur et 20 cm de largeur.
Comme Carlos Garcez, il explique que lors de leur première approche de l'objet, il a réussi à le voir avec l'avion de Júlio Guerra en fond, ce qui lui permit
de faire ses estimations.
Étant donné que lui et Carlos Garcez étaient dans le même avion et que, bien qu'ils aient utilisé la même méthode, ils parviennent à des estimations très différentes
(0,5 à 1 mètre maximum, contre 2 mètres), il est évident que cette technique d'estimation n'est pas fiable, du fait sans doute que ce passage devant l'autre avion a dû être très bref.
En résumé, il était de toute évidence très difficile pour chacun des témoins d'estimer les dimensions de l'objet. Tous les trois ont, dans un premier temps, estimé une taille
d'environ 30 centimètres mais, par la suite, ils ont tous mis en doute cette première estimation.
Dans « l'enquête initiale », qui est chronologiquement le tout premier document de l'enquête rempli par les témoins, chacun des pilotes avait conclu
que la taille de l'objet était inférieure à 1 mètre.
Ci-dessous leurs estimations respectives :
Júlio Guerra : 50 cm de large sur 30 cm de haut.
Carlos Garcez : 60 cm de large sur 25 cm de haut.
António Gomes : 1 mètre de long sur 40 cm de haut et 20 cm de large.
António Gomes maintiendra sa seconde estimation, « de 50 centimètres à 1 mètre », mais Júlio Guerra et Carlos Garcez mettront à nouveau en doute
leur estimation au fil du temps, et concluront que l'objet devait finalement être beaucoup plus grand : 2,5 mètres de long pour Júlio Guerra et de 2 à 2,5 mètres
pour Carlos Garcez.
Dans les conclusions de l'enquête, l'estimation retenue est de 2 mètres, mais en lisant attentivement tous les documents de l'enquête, on constate
qu'elle ne fait pas l'unanimité.
Elle implique même qu'António Gomes n'ait jamais pu percevoir la taille réelle de l'objet et qu'il l'ait fortement sous-estimée.
Ce dernier étant aux commandes du deuxième avion, les enquêteurs ont dû considérer qu'il avait disposé de moins de temps pour observer l'objet que
les deux autres témoins, ce qu'il admet. Ils se sont donc probablement plus fiés aux estimations de Júlio Guerra et Carlos Garcez, ce qui est compréhensible.
On peut toutefois regretter que cette divergence de taille ne soit pas mentionnée dans le résumé de l'enquête, ou lors des interviews postérieures.
En fin de compte, la seule estimation qui fasse réellement l'unanimité à quelques centimètres près est celle d'une taille très réduite, de 22 à 30 centimètres.
Elle correspond pour les trois pilotes aux premiers instants passés à proximité de l'objet.
Júlio Guerra : « 25 à 30 cm » et « +- 30 cm ».
Carlos Garcez : la taille d'un ballon de football, soit environ 22 centimètres.
António Gomes : la taille d'un ballon de rugby avec les bouts arrondis, soit environ 28 à 30 centimètres.
Leur seconde estimation, d'environ 50 centimètres, est également proche de faire l'unanimité.
Júlio Guerra : « environ 50 cm » sur 30 cm.
Carlos Garcez : 60 cm sur 25.
António Gomes : « une cinquantaine de centimètres ».
C'est quand l'objet est passé juste devant l'avion de Guerra, à une seule occasion, que les deux pilotes du second avion ont révisé leur estimation à la hausse.
Guerra explique dans le reportage de RTP2 :
Au moment d'un des passages que l'objet faisait où je me suis retrouvé dans la trajectoire de l'objet, l'objet s'est comme plaqué, projeté, sur mon avion.
Et le sous-lieutenant Garcez, dans l'autre avion :
De là on a eu la notion que l'objet devait avoir 2,5 m ou trois de diamètre, pas plus. En jugeant d'après l'envergure de l'avion, la distance
entre nous en faisant une légère comparaison.
Mais c'est encore exagéré par rapport à ce qu'il disait lors de l'enquête du CNIFO, où il estimait la dimension à environ deux mètres. Et Gomes qui a aussi observé
ce passage devant l'avion de Guerra estimait quant à lui la longueur de l'objet entre cinquante centimètres et un mètre seulement. Cette différence d'appréciation
n'est pas surprenante pour un passage devant l'autre avion qui n'a pas sans doute duré qu'une fraction de seconde, mais en tout cas on voit que toutes
les estimations de la taille de l'objet étaient bien plus basses que ce qui a été dit des années plus tard.
Donc l'objet serait passé vraiment juste devant l'avion de Guerra, ce qui aurait permis aux pilotes de l'autre avion d'estimer sa dimension entre 50 cm et 2 m.
Mais ils pensaient que cet objet mystérieux se trouvait à distance d'eux, et donc beaucoup plus près de l'avion de Guerra. S'il avait été par exemple
à mi-distance des deux avions, sa dimension réelle aurait été deux fois plus petite, donc d'environ un mètre pour un témoin, et entre 25 et 50 cm
pour l'autre. Et ç'aurait été encore moins s'il avait été plus proche de l'avion de Garcez/Gomes que de celui de Guerra... Toutefois, dans ce cas,
Guerra aurait aussi vu l'objet passer devant l'autre avion, ce qu'il ne mentionne pas. Mais étant donné la brièveté de ce passage, il est possible
qu'il ait détourné les yeux au mauvais moment.
Pour résumer, ces nouvelles informations démontrent que la taille de l'objet était particulièrement complexe à estimer pour les trois témoins,
puisque tous les trois ont modifié à plusieurs reprises leur estimation au fil du temps, en la multipliant par 9 ou 10 pour deux d'entre eux.
Nous sommes donc de toute évidence dans un contexte particulièrement propice à une surestimation.
Nous allons maintenant nous pencher sur la perception de la distance, des déplacements et de la vitesse de l'objet par les trois témoins au cours
des diverses phases de l'observation.
Première phase : l'ascension
Revoyons comment le début de l'observation est relaté dans la FSR :
Le lieutenant J.M.G., volant à une altitude d'environ 1500-1600 m. au-dessus de Maxial, a vu un objet brillant en
dessous, apparemment très proche du sol (peut-être à 50 ou 100 m., a-t-il pensé) se déplaçant sur une trajectoire N-S. Au moment où il a décidé qu'il
serait bon de continuer à le regarder, l'objet a soudainement changé de comportement, comme s'il s'était rendu compte de sa présence, et en dix secondes
il s'éleva à la même hauteur que lui, ce qui signifiait qu'il s'était élevé à environ 500 km/h.
Et le témoignage de Guerra dans le livre de Leslie Kean, trente ans après l'observation :
Vers 10 h 50 du matin, alors que je survolais la zone Maxial à une altitude de 1500 à 1700 mètres, j'ai remarqué un
autre « avion » au-dessous de moi et vers ma gauche. Mais après quelques secondes j'ai vu que cet avion semblait avoir seulement un fuselage.
Il n'avait pas d'ailes ni de queue, seulement un cockpit ! Il était de forme ovale. Quelle sorte d'avion cela pouvait-il être ?
J'ai immédiatement orienté mon avion à 180 degrés vers la gauche afin de suivre et d'identifier cet « objet », qui volait vers le sud.
Soudain, l'objet est monté directement à mon altitude de 1500 mètres en moins de dix secondes. Il s'est arrêté juste devant moi, d'abord de façon un peu
instable, avec des oscillations et un mouvement ondulatoire, puis il s'est stabilisé et est resté immobile — un disque métallique composé de deux
moitiés, l'une au-dessus et l'autre au-dessous avec une sorte de bande brillante au milieu, réfléchissant le Soleil sur le dessus. La partie inférieure
était plus sombre.
Suivent ses commentaires concernant les performances supposées de l'objet :
Cette enquête impliquait une coopération entre les militaires et les scientifiques civils. Je suis retourné sur la zone
et j'ai volé selon le trajet suivi par l'objet au cours de son ascension initiale lorsque je l'ai vu pour la première fois, ce qui n'avait pris que
quelques secondes. En comptant dix secondes et en parcourant la même distance, nous avons déterminé que la vitesse ascensionnelle était d'environ
480 km/h. Ceci est impossible pour un hélicoptère et, plus important, un être humain à son bord n'aurait pu survivre à la force d'accélération nécessaire à
un tel déplacement.
Qu'un hélicoptère soit incapable d'une telle vitesse ascensionnelle est exact, mais par contre un être humain pourrait parfaitement la supporter : si
l'objet accélère jusqu'à la vitesse de 960 km/h pendant cinq secondes puis décélère pendant les cinq secondes suivantes, il a bien une vitesse
ascensionnelle moyenne de 480 km/h et il accélère de 192 km/h par seconde, soit 53 m/s ou 5,4 g, qui s'ajoute à la pesanteur terrestre de 1 g... Et cela c'est très
supportable par un homme, les astronautes au décollage ou lors de la rentrée atmosphérique subissent couramment des accélérations de 5 à 10 g pendant
plusieurs minutes.
Les informations données dans l'enquête du CNIFO sont plus précise et plus fiables.
Júlio Guerra décolle à 10 h 40 de la base d'Ota. C'est en se dirigeant
vers sa zone d'entraînement (la zone ECO) qu'il découvre l'objet, à la verticale de Vilar. Ce dernier se déplace dans le sens opposé à une vitesse très élevée
et à une altitude d'environ 50 ou 100 mètres. Il décide de faire demi-tour afin de mieux l'observer. Après son virage, il constate que l'objet se trouve
maintenant à son altitude, environ 5 000 pieds (1 500 mètres). Il en déduit une ascension très rapide. En arrivant à proximité, il le voit soudainement partir
rapidement dans la direction opposée, par le côté gauche de son avion. Le pilote entame un virage dans cette même direction, pour ne pas le perdre de vue.
L'objet commence alors à tourner autour de lui, ce qui l'oblige lui-aussi à effectuer des cercles.
Essayons maintenant de supposer une erreur raisonnable.
La vitesse de 480 km/h correspond à une élévation de 1330 m en 10 s, celle de 500 km/h mentionnée dans la SFR correspond à une élévation de 1400 m dans le
même laps de temps.
C'est assez conforme à ce qui est indiqué, puisque l'objet est estimé à une altitude de 50 ou 100 m du sol, et qu'il se serait retrouvé en 10 s à
l'altitude de l'avion, d'environ 1500 m. Les pilotes donnent en général leur altitude par rapport au niveau de la mer, qui était dans cette région
supérieure de 90 m à l'altitude au-dessus du sol, donc ça colle.
Mais le problème, c'est que le pilote n'avait aucun moyen de savoir que l'objet était très proche du sol, à moins que son ombre ait été visible sur le
sol, ce dont il n'est absolument pas question. Et de fait, l'ombre d'un objet de 3 m de diamètre volant à 50 à 100 m du sol aurait dû être visible alors
que le soleil se trouvait assez haut dans le ciel (à 33° de hauteur angulaire).
Supposons donc que l'objet semblable à une « boule de mercure » ait été un ballon en Mylar de 35 cm de diamètre, la taille la plus courante... Le pilote
aurait donc surestimé pratiquement d'un facteur dix sa distance, et donc la différence d'altitude par rapport à lui.
On a l'impression en lisant le rapport de la FSR qu'il aurait réellement vu l'objet s'élever, mais si on se rapporte à son témoignage dans le livre de
Kean il dit qu'après avoir vu l'objet près du sol sur sa gauche, qui semblait voler dans la direction opposée à lui-même, et avoir remarqué que cet
« avion » avait une forme ovale sans aucune aile ni queue, il a décidé de faire demi-tour (« j'ai orienté mon avion à 180 degrés vers la gauche ») pour
identifier cet objet. Et le rapport du CNIFO confirme bien que Guerra a fait demi-tour après avoir dépassé l'objet, afin de mieux l'observer.
Donc, il voit cet objet très en dessous de lui, dont on doit signaler que la taille angulaire était très petite : il estime alors son
diamètre à environ 3 m d'après le rapport du CNIFO, et son altitude à environ 1500 m au-dessous de lui. La distance était alors sûrement supérieure
à 2 km parce qu'il n'aurait pas pu voir l'objet s'il avait été exactement au-dessous de lui, et du reste il indique que cet objet qui lui a ensuite
paru parfaitement circulaire était « ovale », il le voyait donc bien en biais. Et un objet de 3 m vu à 2 km présente une dimension de seulement
5 minutes d'arc, soit le sixième du diamètre angulaire de la lune, moins d'un millimètre à bout de bras.
Et donc, s'il fait demi-tour pour mieux voir cet objet estimé beaucoup plus bas que lui, il est logique que Guerra ait aussi orienté son avion vers le bas
pendant ce virage... Du reste, il est indiqué que Guerra volait initialement à 1500 à 1700 m d'altitude, et lorsqu'il a rencontré l'objet il était
précisément à 1500 m, ça suppose qu'il a vraisemblablement abaissé son altitude d'une centaine de mètres... Et perdre une centaine de mètres ou un peu
plus en dix secondes de virage, c'est tout à fait banal avec un tel avion. Et il se serait alors naturellement retrouvé à l'altitude du ballon immobile,
ou guère au-dessus.
Une telle erreur d'évaluation, tout à fait banale, explique donc parfaitement ce début d'observation. Le pilote qui voit un objet métallique n'imagine pas
qu'il puisse s'agir d'un simple ballon, ces ballons métallisés en Mylar n'existant que depuis quelques années, et il suppose donc que c'est un engin
de plusieurs mètres de diamètre qu'il situe à la distance maximale (juste au-dessus du sol) pour pouvoir lui attribuer une dimension compatible avec un
aéronef qu'il connaît, et tout de même assez faible (sa première estimation semble être de trois mètres).
On a vu d'autre part que lorsque l'objet s'est retrouvé à son altitude, Guerra a d'abord estimé qu'il était très petit, entre 25 et 30 cm de diamètre seulement.
Ce qui est surprenant, c'est que si un objet de 30 cm de diamètre avait été vu près du sol, à quelque 2 km du témoin, sa dimension apparente
aurait été de moins d'un dixième de millimètre à bout de bras, ou une demi-minute d'arc... C'est inférieur au pouvoir
séparateur de l'œil, il se serait donc présenté sous la forme d'un minuscule point sans aucun détail visible, et même en tenant compte de la réflexion du
soleil il est invraisemblable que Guerra ait pu le remarquer.
C'est ensuite « en tenant compte de la distance » qu'il a considéré que l'objet avait entre 2 et 2,5 m de diamètre, mais justement la distance
il n'avait aucun moyen de la connaître. Et même avec un diamètre de 3 m correspondant à l'estimation maximale de Guerra, cet objet dont
la dimension apparente serait nettement inférieure à un millimètre à bout de bras n'aurait probablement pas attiré son attention.
On a l'impression en connaissant son témoignage initial que Guerra a eu tout au long de son observation beaucoup de mal à concilier ses différentes
estimations de la distance et de la dimension de l'objet.
Deuxième phase : l'illusion d'encerclement
Voyons ce qui s'est passé ensuite... On suppose donc que l'objet était un ballon métallisé d'environ 35 cm de diamètre, qui se serait trouvé initialement
à peut-être 150 m au-dessous de l'avion de Guerra et une centaine de mètres à sa gauche.
En effectuant un demi-tour vers la gauche en descente, Guerra a dû se déporter de quelques centaines de mètres, et donc après ce demi-tour il a retrouvé
l'objet à son altitude mais à nouveau sur sa gauche, et sans doute à au moins cent mètres, qu'il pensait plutôt à un kilomètre en conservant son erreur
sur la dimension et la distance de l'objet. Il a donc pensé que l'objet s'était élevé très vite et était venu à sa rencontre pour s'être positionné ainsi.
Et puis, il a rapidement dépassé l'objet, en pensant que c'était celui-ci qui allait à grande vitesse dans la direction contraire, et il a viré sur sa
gauche pour tenter de garder le contact visuel...
Et là, Guerra explique que l'objet s'est mis à décrire des cercles, ou plutôt des ellipses, autour de lui, alors que lui-même tournait en rond en
décrivant des cercles vers la gauche.
C'est bien ce qui est expliqué dans le compte rendu de la SFR :
J.M.G. lui-même volait en anneaux serrés d'un périmètre d'environ 1500 mètres et d'un diamètre de 450 mètres, à une vitesse de 170 km/h.
Et aussi dans le reportage d'RTP2 :
Le lieutenant Guerra s'est aperçu alors que tandis que son Chipmunk à la vitesse de 160 km/h prenait environ une demi-minute pour effectuer un cercle serré,
l'engin inconnu prenait sensiblement une demi-minute pour décrire un tour d'un diamètre approximatif de 7 kilomètres et un périmètre de l'ordre de 21 kilomètres.
Le Chipmunk a une vitesse de croisière de 166 km/h, et on trouve bien un diamètre de 450 m pour un cercle décrit en 30 secondes à la vitesse de 170 km/h.
Et ce manège a continué une quinzaine de minutes...
L'enquête du CNIFO confirme encore tout cela... Júlio Guerra y a représenté les déplacements de l'objet et de son avion sur un plan de la zone d'observation.
En s'y référant, on constate que le diamètre des cercles effectués par l'objet était d'environ 6 à 8 kilomètres.
Il lui semblait passer au pied de la Serra de Montejunto lors de ses passages au nord-est et au-dessus de la ville de Torres Vedras au sud-ouest.
Júlio Guerra estime que les cercles qu'il a effectués avec son avion étaient d'environ 450 mètres de diamètre. L'objet tournait autour de lui, dans le même sens
que lui (le sens inverse des aiguilles d'une montre), à l'extérieur de ses propres cercles. Le temps que l'objet et l'avion mettaient à effectuer un tour
était identique, environ 30 secondes. Guerra interprète cela comme un comportement intelligent de l'objet, mais c'est tout à fait conforme à notre hypothèse
d'une illusion d'optique causée par la surestimation de la distance d'un ballon situé au centre des cercles de l'avion.
C'est en utilisant ses estimations de la taille des orbites de l'objet, ainsi que la durée d'un tour, qu'il sera calculé lors de l'enquête que sa vitesse
était d'environ 2500 km/h.
Sur son dessin, Guerra ne représente pas une orbite circulaire mais allongée, passant au plus près à l'est-nord-est à environ 2,5 km de distance, et au plus loin
à l'ouest-sud-ouest à 4,5 km de distance (il n'indique pas ces distances, mais on les déduit à peu près des proportions de l'orbite sur son dessin).
On peut supposer qu'il avait simplement constaté que la distance de l'objet variait sensiblement au cours de son orbite, mais cela pourrait s'appliquer
à un cercle excentré plutôt qu'à une ellipse.
On peut déduire de toutes ces informations que la distance le séparant de l'objet devait être d'environ 3000 mètres en moyenne, minimum. Il
avait donc l'impression que ce dernier était constamment à une très grande distance.
De son premier virage jusqu'à sa tentative d'interception, le pilote le percevra toujours en train d'effectuer ces immenses orbites autour de lui,
à une vitesse extrêmement élevée, et à l'extérieur des cercles décrits par son avion. Cette situation durera environ 25 minutes.
Il ne fait jamais état d'orbites plus petites que 6 km de diamètre et à aucun moment de phases où l'objet se déplaçait à la vitesse de son avion, ou moins.
Bien entendu, il est impossible qu'un ballon ait parcouru une orbite de 7 km de grand-axe, qu'elle ait été circulaire ou elliptique, à une vitesse de
quelque 2500 km/h !
Mais rappelons-nous que nous sommes partis de l'hypothèse que Guerra multipliait d'un facteur huit ou plus la distance aussi bien que la dimension et la
vitesse de l'objet.
Et cela nous amène vite à la conclusion que l'objet était en réalité pratiquement immobile !
Guerra décrivait avec son avion des cercles de 450 m de diamètre en 30 secondes... Si le ballon se trouvait un peu excentré par rapport au centre de ce
cercle, Guerra pouvait passer à chaque tour à quelque 160 m à l'ouest-sud-ouest du ballon, et à 290 m à l'est-nord-est...
Si Júlio Guerra estimait que l'objet était environ 10 à 20 fois plus grand qu'il ne l'était en réalité, soit entre 3,5 et 7 mètres, il est tout à fait
logique et cohérent qu'il ait constamment eu l'impression qu'il était très éloigné de lui et qu'il parcourait d'immenses orbites à une vitesse supersonique.
C'est ce que nous avons représenté sur le schéma ci-dessous :
Le point bleu clair représente le ballon, le cercle vert l'orbite de Guerra, et le cercle rouge l'orbite apparente de l'objet supposé 16 fois plus grand
et plus lointain que le ballon. Ça paraît évident quand on a compris que le témoin n'avait simplement aucun moyen d'évaluer la distance de l'objet.
Cette « illusion d'encerclement » n'est pas vraiment une illusion d'optique, puisqu'une telle illusion se produit lorsqu'on a par exemple l'impression de voir des lignes
parallèles qui se rapprochent, ou de longueur différente alors qu'elles sont identiques, des points gris qui n'existent pas, des couleurs différentes
quand ce sont les mêmes, des mouvements quand il n'y en a pas... On a par exemple ici sur une image fixe une double illusion de mouvement et de lignes non parallèles :
Dans notre cas, il n'y a pas d'illusion, puisque la perception du témoin serait rigoureusement identique s'il y avait réellement une soucoupe volante
métallique de 5 m de diamètre (et non 2,5, c'est la seule vraie erreur d'estimation de Guerra) effectuant des boucles de 7 km de diamètre autour de
l'avion, à la vitesse de 2500 km/h.
On peut voir avec intérêt une vidéo tournée par un pilote d'U.L.M. paramoteur qui a croisé des ballons sur sa route...
Il les a bien reconnus et en a même attrapé deux, mais à 1'45" il dit : « ça suit ma route, ça tourne autour de moi » ; et pareil à 3'50"...
Et c'est bien l'impression que l'on peut avoir par moments, alors que bien sûr c'est lui qui tourne autour du ballon, et non l'inverse !
Florent a fait une petite reconstitution de ce que Guerra pouvait voir avec une maquette :
L'objet filmé est parfaitement immobile, c'est la caméra qui tourne autour. C'est bien sûr très approximatif : l'objet observé par Guerra avait une taille apparente
à peu près 20 fois inférieure, on va voir qu'il se situait sans
doute pendant la plus grande partie de l'observation devant le sol et non devant le ciel, et il effectuait un tour six fois plus lentement.
Et plus tard, il a réalisé une autre vidéo avec un drone tournant autour d'un véritable ballon attaché à un fil de pêche, à une altitude d'environ 25 mètres :
Bien que l'on sache qu'il s'agit d'un ballon, on a bien l'impression que ce dernier tourne autour du drone, et aussi qu'il s'éloigne et change d'altitude,
mais cela relève bien d'une illusion puisque le ballon, retenu au sol par un long fil de pêche, est parfaitement immobile, c'est bien le drone qui tourne autour :
On peut tout de même se demander s'il est plausible que cette erreur ait persisté pendant un quart d'heure, et même encore ensuite, soit pendant une
trentaine de tours ! Mais oui, il est bien possible que le pilote ait inconsciemment corrigé sa propre trajectoire pour conserver toujours ces cycles : il
aurait viré un peu plus sur la gauche en voyant l'objet s'écarter un peu trop en arrière pour essayer de le maintenir en vue, et au contraire un
peu moins en voyant l'objet un peu trop devant en craignant une possible collision. Ce simple réflexe explique qu'il ait maintenu l'objet dans une
position à peu près constante, y compris si celui-ci se déplaçait un peu en étant poussé par le vent.
Et n'oublions pas que pendant ces quinze minutes, Guerra conversait avec la tour de contrôle et d'autres pilotes, et il attendait l'arrivée de deux
d'entre eux sur les lieux... On comprend donc que dans cette attente et en expliquant ce qu'il voyait, il n'ait rien fait pour tenter d'échapper à ce
cycle répétitif.
Intéressons-nous maintenant aux cercles décrits par Guerra...
Avec un rayon de 225 m et une vitesse de 170 km/h, il est facile de calculer la force centrifuge subie par le pilote... L'accélération centrifuge est
simplement égale à V2/R... Avec V=47 m/s (170 km/h), cela donne une accélération de 9,9 m/s2, soit presque exactement 1 g ou la
pesanteur terrestre (9,81 m/s2) !
D'ailleurs, un diamètre de 450 m et une rotation toutes les 30 s, c'est ce qui a été envisagé pour la construction de « villes spatiales » constituées de
cylindres habités à l'intérieur, et reproduisant ainsi la pesanteur terrestre... Parce qu'une rotation toutes les 30 s, c'est le minimum pour que cela ne
perturbe pas trop le sens de l'équilibre des habitants... Et on finira bien par construire de telles villes, si toutefois des écologistes idiots
incapables de se rendre compte que la conquête de l'espace est une nécessité pour la survie de l'humanité n'empêchent pas des visionnaires comme Elon Musk
d'arriver à abaisser drastiquement le prix de l'accès à l'espace.
Après cette minute de promotion (par Robert) de la conquête spatiale et ses acteurs les plus créatifs, revenons à nos ovnis ou ballons.
Si l'avion subit une accélération verticale de 1 g du fait de la pesanteur, et une accélération horizontale de 1 g du fait de la force centrifuge, l'avion
sera incliné de 45°, et le pilote subira une accélération totale de 1,4 g (√2), tout à fait supportable pendant une longue durée.
Et donc, si l'avion se trouve exactement à la même altitude que l'objet, il sera vu par le pilote à une hauteur angulaire de 45° et complètement sur la
gauche, et même nettement en arrière à certains moments... De quoi attraper un bon torticolis !
Júlio Guerra explique aussi qu'il n'a pratiquement jamais quitté l'objet des yeux. Lors de l'enquête il indiquera que, pour ce faire, il gardera tout au long
de l'observation la tête complètement tournée à gauche, à l'exception de la phase d'interception à la toute fin. Il posera même son menton sur son épaule gauche
pour soulager la douleur de son cou. Il dit dans son entretien : « j'ai dû replier mon menton contre mon épaule pour ne pas le perdre de vue ».
Il est donc vraisemblable que le pilote se soit positionné un peu au-dessus de l'objet afin de réduire sa hauteur angulaire apparente... Cela implique
que l'objet aurait été vu au-dessus du sol et non dans le ciel, et c'est bien ce qui est au moins suggéré sauf à la fin de l'observation.
Il semble en effet que Guerra ait estimé la dimension de l'orbite apparente de l'objet (les 7 kilomètres de diamètre) d'après les repères au sol qu'il
semblait survoler.
C'est totalement illusoire en ne connaissant pas la distance réelle de l'objet, mais en tout cas il semble bien que l'objet se détachait sur le fond du
sol et non du ciel.
Guerra indique dans le livre de Kean : Ayant pu montrer aux enquêteurs sur la carte la trajectoire de l'objet selon une
orbite elliptique par rapport à des points au sol... Et l'article de la FSR indique : L'OVNI tournait maintenant autour de lui en décrivant
de vastes cercles, estimés par lui [Guerra] à un périmètre de 21 000 mètres et à un diamètre de 6 000 à 8 000 mètres, au-dessus de la zone
comprise entre Torres Vedras et Montejunto.
Et c'est bien confirmé par le rapport du CNIFO, dans lequel Guerra estime que l'objet passait au pied de la Serra de Montejunto
lors de ses passages au nord-est et au-dessus de la ville de Torres Vedras au sud-ouest.
Ça semble signifier que Guerra voyait passer l'objet alternativement devant Torres Vedras et Montejunto, qui sont distants d'une vingtaine de kilomètres
et se situent de part et d'autre de Maxial, lieu approximatif de l'observation. Ailleurs il est dit que tout se passait au pied du Montejunto, qui est
plus à l'est, et en reconstituant les proportions de l'orbite imaginaire on trouve plutôt Vila Verde dos Francos qui se trouve juste entre les deux, à moins
de 5 km de Maxial. Et dans le rapport du CNIFO, Guerra indique qu'il a découvert l'objet alors qu'il se trouvait à la verticale de Vilar, environ 3 km
au nord de Vila Verde. Si l'avion se situait alors approximativement au-dessus de Vila Verde, l'objet aurait bien été vu en direction de Vilar.
Il est bien sûr vraisemblable que la position ait notablement varié pendant les 25 minutes de l'observation, le ballon ayant été poussé par le vent.
Voici la carte de la région, avec les cercles décrits par l'avion de Guerra (en violet) au-dessus de Vila Verde, l'orbite imaginaire de l'objet
(en bleu), et les repères géographiques devant lesquels il passait (flèches orange) :
Et en supposant ce passage de l'objet devant ces repères au sol, on peut calculer la différence d'altitude entre le ballon et l'avion :
h = 1410×450/20000 = 32 m, qu'on arrondira à 30.
Voici comment se seraient présentées les directions de vision du ballon si celui-ci se trouvait 30 mètres plus bas que l'avion de Guerra :
Tout est représenté à l'échelle : les 10,5 m d'envergure de l'avion par rapport aux 450 m de diamètre de l'orbite... Quant au ballon, il se présenterait à
cette échelle sous la forme d'un minuscule point à l'intersection des deux lignes, ayant un diamètre d'environ le vingt-cinquième de l'envergure de l'avion !
On peut avec ces données essayer de représenter dans une animation ce que voyait Guerra... Les paysages sont ceux de la région, reproduits avec Google earth.
La carte du haut représente la vue de dessus, avec les déplacements de l'avion sur une orbite de 450 m de diamètre, et la trajectoire de l'objet supposée
par le pilote, d'un diamètre de 7 km. La partie basse représente la vue depuis l'avion et le déplacement apparent de l'objet (le ballon). La croix représente
l'horizontale et la vue à 90° à gauche, et l'ellipse bleue représente la trajectoire apparente approximative du ballon (le ballon représenté par un point rouge
s'en écarte légèrement, la trajectoire réelle n'étant pas exactement elliptique).
Tout est à l'échelle : le ballon s'écarte de plus ou moins 16,6° de la position pleine gauche, et sa hauteur varie entre 5,9 et 10,6 degrés au-dessous de l'horizontale
(l'image a une largeur de 36° et une hauteur de 13,3°). Le ballon est représenté par un point circulaire rouge pour être facilement repéré, et ça n'est tout de même pas évident; dans la réalité
il s'agirait d'un cercle argenté un peu aplati, encore plus difficile à voir; et on rappelle qu'il serait encore deux fois plus petit s'il s'agissait d'un objet de deux à trois mètres d'envergure
situé à 3,5 km en moyenne, comme le pensait le pilote.
La trajectoire apparente elliptique dans le sens des aiguilles d'une montre pourrait expliquer les impressions d'accélérations et décélérations effectuées cycliquement
par l'objet (et là il s'agirait bien d'une illusion).
Bien entendu, cette position relative du ballon par rapport aux cercles décrits par Guerra ne pouvait pas être invariable pendant une trentaine de tours, et Guerra
précise justement qu'elle a considérablement varié.
Lors de son entretien, il indique que les orbites de l'objet variaient parfois, aussi bien en taille et qu'en altitude. Certaines étaient plus étirées vers le nord
et l'objet y prenait parfois une altitude considérable.
Il précise qu'après avoir décrit plusieurs cercles à la même altitude que lui, environ 5000/6000 pieds (1500/1800 mètres), l'objet a pris de la hauteur
lors de son passage au nord, atteignant environ 10 000 pieds (3000 mètres), puis qu'il est revenu à une altitude de 5000 pieds lors de son passage au sud.
Il indique aussi qu'à un moment donné il a pris de la hauteur avec son avion et est monté jusqu'à 10 000 pieds, l'altitude à laquelle il percevait l'objet
lors de certaines orbites au nord. Il explique : « J'ai presque arrêté de la voir ».
Les orbites de l'objet étaient donc par moments inclinées, de 45°, voire plus. Selon lui, ces variations d'altitude étaient parfois très rapides.
C'est probablement cela qu'indique un de ses dessins dans le rapport du CNIFO, bien qu'on ne voie pas trop ce que représente l'ellipse avec les flèches
dans le sens des aiguilles d'une montre, alors que Guerra indique constamment que l'objet ainsi que lui-même tournaient dans le sens inverse :
S'il s'agit du mouvement apparent de l'objet, on a vu qu'il allait bien dans le sens horaire, mais uniquement dans le cas où l'objet se trouvait plus bas
que l'avion, ça semble donc être encore confirmé au moins pour une grande partie de l'observation.
Dans tous les cas, cette inclinaison de 45° est certainement exagérée, puisque si l'altitude de l'objet variait de 1500 m au sud à 3000 m au nord
sur une orbite estimée à un diamètre de 7000 m, ça ne fait jamais qu'une inclinaison de 12°. Peut-être Guerra parlait-il de la variation de l'inclinaison
par rapport à lui, mais c'est encore exagéré puisqu'il estimait la distance de l'objet à environ 3000 m lors de son passage au nord, s'il s'était élevé de 1500 m
ça correspondrait à un angle de 27°, et nettement moins si Guerra avait aussi pris de l'altitude comme il l'indique.
Ces variations d'altitude apparaissent extrêmes, mais n'oublions pas que dans notre hypothèse Guerra surestimait la distance de l'objet d'un facteur 16,
et donc il en va de même pour la différence d'altitude. L'élévation supposée de 1500 m pendant un demi-tour, soit en 15 secondes,
se réduirait donc à 107 m pour le ballon situé à environ 200 m de distance. Et cela correspond à une vitesse d'élévation de 25 km/h, tout à fait compatible
avec un courant d'air ascendant, comme on en trouve aux abords du Montejunto, une colline culminant à 666 m pour cela très prisée des parapentistes.
Et il est possible aussi que ce soit l'avion qui ait effectué des changements d'altitude de quelques dizaines de mètres pendant ses manœuvres, sans que Guerra
imagine que cela expliquait les changements apparents d'altitude de l'objet qu'il pensait très lointain.
Cet autre plan filmé avec un drone montre le ballon qui semble monter brutalement, alors que seul le drone se déplace :
De même, si les propres cercles de Guerra étaient par moments plus grands, il est logique qu'il ait eu l'illusion que l'objet parcourait des orbites plus grandes.
Tout s'accorde décidément avec notre hypothèse.
Troisième phase : l'arrivée du second avion
Les choses se compliquent lorsque le second avion est arrivé sur les lieux.
En approchant, ses deux pilotes ont d'abord eu du mal à voir l'objet, si l'on en croit le reportage de RTP2 :
Encore loin, les deux pilotes ont vu alors l'avion du lieutenant Guerra qui continuait à décrire des virages serrés, et un peu en dessous de l'avion un
petit point brillant, qui à cette distance se voyait à peine.
Et c'est bien ce qu'a dit Garcez aux enquêteurs du CNIFO : il indique que l'objet était « initialement stationnaire » ; en approchant, il a vu un
« point à la dérive », avec l'avion de Júlio Guerra effectuant des cercles serrés au-dessus. Dans son entretien, il dit : « lorsque nous nous sommes approchés
et que nous avons vu l'autre avion faire des cercles, il nous semblait qu'il tournait au-dessus d'un point, une balle, vu la distance ».
Et selon António Gomes, « au moment où nous nous sommes approchés ensemble, il [l'objet] ne tournait pas vraiment en rond ».
Les deux pilotes décrivent donc un objet de petite taille et immobile, ou dérivant très lentement, et l'avion de Júlio Guerra tournant autour. À ce moment-là,
ni l'un ni l'autre ne voit l'objet décrire des cercles.
Pour rappel, au même moment, Júlio Guerra percevait l'objet en train d'effectuer d'immenses orbites à l'extérieur des cercles de son avion, à une vitesse extrêmement élevée.
Ensuite, il est dit clairement que le deuxième avion s'est inscrit dans le cercle de l'avion de Guerra, à l'opposé. C'est ce qui est
expliqué dans le reportage de RTP2 :
Ensuite, pour qu'ils puissent suivre ensemble les évolutions du mystérieux objet volant, il déphasa le vol de son avion de 180° par rapport à celui du
lieutenant Guerra.
C'est aussi ce qui est dit dans l'enquête du CNIFO, et c'est bien ce que suggère un dessin diffusé dans le reportage du National Geographic :
Notons que l'impression de proximité suggérée par ce dessin est trompeuse : avec des avions séparés par une distance de 450 m, l'avion opposé aurait eu
une dimension apparente de moins d'un centimètre à bout de bras, et un objet de 3 m de diamètre qui se serait trouvé à une distance minimale de 1500 m
d'après Guerra aurait été encore dix fois plus petit... Voici à l'échelle véritable ce qu'aurait vu un observateur situé dans la cabine à un mètre à
droite des pilotes :
L'objet est le minuscule trait situé sous l'avion et un peu à gauche, devant le casque du copilote.
On remarque que l'objet se trouve apparemment sous l'avion opposé, il était donc bien à une altitude inférieure aux deux avions effectuant leurs cercles.
Le plan sur lequel Carlos Garcez a lui aussi reproduit les déplacements de son avion et de l'objet est radicalement différent de celui de Júlio Guerra.
Aucune trace des immenses orbites représentées par ce dernier. On peut seulement y voir des cercles dont la taille est à peu près similaire à ceux représentés
par Júlio Guerra pour illustrer les déplacements de son avion. Si l'on se fie à ses estimations, selon lui l'objet était donc la plupart du temps
à environ 180 mètres d'eux en moyenne, voire moins.
Gomes ne donne quant à lui pas de dimensions de l'orbite, mais indique que les avions allaient à la vitesse de 90 à 100 nœuds, soit entre 166 et 185 km/h,
en accord donc avec les dires de Guerra.
Malheureusement, le plan des déplacements de l'objet et de son avion réalisé par António Gomes n'est pas inclus dans le dossier, bien qu'il s'y réfère
lors de son entretien. Florent a demandé à Joaquim Fernandes s'il l'avait à sa disposition, mais il a répondu qu'il lui avait envoyé l'intégralité du dossier.
On peut cependant comprendre à travers ses description que le plan devait être relativement similaire à celui de Carlos Garcez.
Selon António Gomes, l'objet devait être en moyenne entre 180 et 200 mètres de distance.
Concernant la situation des avions par rapport à l'objet, on a un peu de mal à comprendre l'explication de Guerra dans le livre de Leslie Kean :
Quand Garcez et Gomes sont arrivés à bord de leur Chipmunk, au bout de quelques minutes, ils m'ont demandé par radio
« Où est-il ? » Je leur ai donné la position et, une fois qu'ils l'ont vu, je me suis senti mieux car à présent deux autres pilotes de l'Air
Force avaient vu la même chose que moi. Ils sont restés avec moi environ dix minutes alors que l'objet continuait sa trajectoire circulaire, chaque tour
presque identique au précédent, et que nous communiquions par radio. J'étais à l'intérieur de l'orbite et ils étaient à l'extérieur, de sorte que
l'objet passait entre nos deux avions. Grâce à cela, nous avons pu comparer la taille de l'objet avec la longueur du fuselage du Chipmunk (7,75 mètres) :
environ 2 à 3 mètres.
On ne voit vraiment pas comment un avion aurait pu être à l'intérieur de l'orbite de l'objet et un autre à l'extérieur, si cet objet effectuait des
cercles ou ellipses de 7 km de diamètre ! Mais d'après le témoignage de Guerra au CNIFO, cela s'est produit seulement lorsque l'avion de
Garcez et Gomes s'est approché, donc avant qu'il ne décrive une orbite circulaire comme celui de Guerra.
On peut plutôt imaginer que chacun des pilotes voyait l'objet en regardant vers le centre de sa propre orbite circulaire, et pensait que
l'autre le voyait au contraire en regardant à l'extérieur. Rappelons encore que les deux avions étaient distants de 450 m ou guère moins dans leur trajectoire
circulaire, et à cette distance il est absolument impossible de voir dans quelle direction le pilote opposé regarde.
Mais en fait, le rapport du CNIFO nous apprend que les trois témoins ne percevaient pas du tout les déplacements de l'objet de la même manière !
Pour Guerra, on l'a vu, l'objet a décrit tout au long de l'observation de larges orbites autour des deux avions, d'environ 7 km de diamètre,
bien qu'elles aient un peu varié aussi bien en taille qu'en altitude. Ça n'est qu'à la toute fin de l'observation qu'il aurait vu l'objet beaucoup plus près.
Mais pour les occupants du deuxième avion, Garcez et Gomes, l'objet effectuait de petits cercles à l'intérieur de leur propre orbite, il était donc
beaucoup plus proche que dans la pensée de Guerra.
Carlos Garcez avait l'impression que l'objet se déplaçait plus vite qu'eux, mais radicalement moins que ce que décrit Júlio Guerra. Il avait l'impression
que l'objet décrivait deux cercles pendant qu'eux n'en décrivaient qu'un.
« L'objet au milieu se déplaçait en faisant des cercles dans le même sens que nous, mais beaucoup plus rapidement. Il m'a semblé que pendant que nous faisions
un tour complet (360°), il en faisait environ deux, c'est-à-dire le double de la vitesse. » Ce détail est étonnant dans notre hypothèse d'une illusion d'optique.
Quoiqu'il en soit, même en imaginant que l'objet parcourait effectivement deux tours quand ils n'en faisaient qu'un seul, étant donné que les cercles de l'objet
étaient plus petits et à l'intérieur de ceux des avions, la distance à parcourir était forcément plus courte, donc la vitesse de l'objet qu'il percevait
devait être relativement proche de celle des avions.
En ce qui concerne António Gomes, lorsque leur avion a commencé à suivre les mêmes cercles que Júlio Guerra, l'objet se trouvait également au centre,
effectuant des tours plus petits qu'eux, donc à une vitesse moins élevée que les avions.
Cette description est proche de celle de Carlos Garcez, sauf qu'António Gomes ne mentionne pas que l'objet faisait deux tours pendant qu'eux n'en faisant qu'un.
Lors de cette situation, il estime que la vitesse de l'objet était d'environ 50 nœuds, soit 90 km/h, donc bien plus lente que celle des avions d'environ
90 à 100 nœuds, soit 166 à 185 km/h.
Carlos Garcez et António Gomes avaient donc une perception relativement proche. L'objet se trouvait au centre de leurs propres cercles et se déplaçait
à une vitesse proche ou inférieure à celle des avions. Au même moment, Júlio Guerra percevait toujours l'objet en train de décrire des immenses orbites à l'extérieur
des cercles des avions et à une vitesse supersonique.
Toutes ces perceptions des différents pilotes s'expliquent assez naturellement dans notre hypothèse d'une mauvaise estimation de la taille et de la distance de l'objet.
Les pilotes à bord du deuxième avion devaient faire une légère surestimation de la taille de l'objet, inférieure à x2 (par exemple 50 centimètres), ce qui donnait
l'impression que l'objet faisait de petits cercles au centre des leurs.
Júlio Guerra quant à lui devait faire une forte surestimation de sa taille, par exemple 3,5 mètres ou plus.
Après quelques tours, la perception d'António Gomes va changer. Alors que les avions continuent de parcourir les mêmes orbites, il explique que l'objet
s'est mis à décrire exactement les mêmes cercles qu'eux, à la même vitesse... Selon lui, l'objet et les deux avions étaient tous en file indienne, sur le même cercle,
et se déplaçaient tous à environ 90 ou 100 nœuds, soit environ 160 km/h. L'objet suivait exactement la même trajectoire qu'eux, dans le même sens
et à la même vitesse. Les deux avions le suivaient, « en colonne », « comme s'il était le chef ». Ils sont restés ainsi, en file indienne,
à décrire cette même trajectoire circulaire pendant trois tours, sur environ cinq tours effectués au total pendant leur observation. Il indique qu'un des détails
qui l'ont convaincu que l'objet était contrôlé est qu'il n'y a jamais eu de risque de collision.
Garcez et Guerra percevaient pour leur part toujours la même chose, des petits cercles intérieurs à la trajectoire des avions pour l'un,
et de grands cercles extérieurs pour l'autre.
Globalement, ces descriptions très différentes, qui ont dû sembler très incohérentes aux enquêteurs, s'expliquent bien si les trois témoins
suivaient tous la même trajectoire circulaire excentrée par rapport au ballon, mais faisaient juste différentes erreurs d'estimations de la distance de ce dernier.
Imaginons par exemple que Guerra ait surestimé cette distance d'un facteur 7 (on a vu que c'était sans doute nettement plus, mais ça rendrait le schéma
peu compréhensible), Garcez d'un facteur 1,3, et Gomes d'un facteur 2 à la fin de son observation... Les trois imagineraient alors que l'objet
suivrait ces trois orbites différentes, assez en accord avec leurs dires :
Mais il s'agirait juste d'erreurs d'interprétation, les trois témoins voyant rigoureusement la même chose, l'objet ayant le même déplacement apparent,
représenté sur le schéma de dessous, simplement déphasé d'un demi-tour selon l'avion dans lequel ils se trouvent.
Cela n'expliquerait pas que Garcez voyait l'objet effectuer deux tours pensant que les avions en effectuaient un seul, mais on a vu que Gomes qui se trouvait
dans le même avion, et qui le pilotait, n'a rien perçu de tel. On peut tout de même imaginer comment une telle erreur a pu se produire, si on suppose qu'à un moment,
pendant quelques tours, l'avion de Garcez et Gomes n'effectuait plus une orbite circulaire excentrée, mais une orbite elliptique centrée sur le ballon... On supposera aussi
que cette ellipse avait un périmètre de 1100 m pour se conformer à la vitesse de 165 km/h indiquée par Gomes, un grand axe de 400 m et un petit axe de 300 m,
afin que l'amplitude de la position apparente du ballon soit la même qu'avec l'orbite excentrée supposément suivie par l'avion de Guerra.
Voyons alors comment l'objet aurait été perçu depuis l'avion de Garcez/Gomes (pour Guerra, rien n'aurait changé sinon que l'avion en face se serait un peu déplacé
de droite à gauche et aurait un peu varié en distance) :
Tous les mouvements sont restitués, le centre de l'image représentant une direction fixe par rapport à l'avion (comme si un viseur était dessiné
sur la vitre de l'avion). Ainsi, la hauteur apparente de l'horizon varie en fonction de l'inclinaison de l'avion (le rayon de braquage étant plus petit
aux extrémités de l'ellipse), et on voit avec surprise que la positon apparente de l'objet suit approximativement une ellipse en effectuant deux tours
pendant que l'avion en effectue un seul !
Bien sûr, il ne s'agit que du mouvement apparent, alors que le ballon est toujours fixe et qu'un objet imaginaire qui se trouverait à une distance quelconque
suivrait toujours une orbite elliptique synchrone avec celle de l'avion pour avoir ce même mouvement apparent... Mais même les pilotes peuvent facilement
faire ce genre de confusion, et il ne faut pas oublier que Garcez n'avait pas trop conscience des déplacements de son propre avion alors que c'était Gomes qui le pilotait...
Il lui était bien difficile de se situer précisément dans l'espace alors qu'il voyait à la fois le paysage, l'objet et l'avion en face bouger !
De même, il se peut que l'impression de Gomes à la fin de l'observation que les deux avions suivaient l'objet en file indienne s'explique par une modification
de l'orbite des avions autour du ballon... C'est exactement ce qui apparaîtrait si les deux avions, après avoir suivi une orbite circulaire excentrée pour l'un,
une orbite identique ou plus petite et peut-être elliptique pour l'autre, s'étaient ensuite calés sur une même orbite circulaire centrée sur le ballon, mais avec
un décalage entre eux de moins de 180° :
En supposant que Gomes (dans l'avion rouge) multipliait par deux la distance de l'objet (ce qui est conforme à son estimation de sa dimension, puisqu'il lui supposait
une dimension comprise entre 50 cm et 1 m alors que le ballon avait sans doute un diamètre de 35 cm), il avait bien l'impression que l'avion de Guerra (en bleu)
suivait l'objet, et que lui-même suivait l'avion de Guerra.
Il ne s'agit là que d'exemples, montrant à quel point la perception d'un pilote peut varier en fonction de son propre mouvement. Et il est évident
que les deux avions n'ont pas suivi une trajectoire identique et invariable durant les quelques minutes de leur évolution commune, et que chaque témoin
a pu être influencé par une phase particulière, avec son lot de perceptions trompeuses.
Garcez précise aussi dans son témoignage au CNIFO qu'à la toute fin de leur observation, ils ont réduit leur orbite à un diamètre de 150 à 200 m.
Il estime cette distance en se basant sur la taille apparente de l'avion de Júlio Guerra, à l'opposé du cercle. Il précise également que, vers la fin de cette phase,
ils ont réduit leur vitesse, afin de décrire des cercles plus petits. Il a vu qu'ils étaient alors à 45 nœuds seulement, soit 83 km/h. Ils étaient alors
très proches de la vitesse de décrochage (et même un peu en dessous selon les conditions de vol, cette situation a donc dû être très brève).
Notons que pour des cercles de 150 à 200 m à une vitesse de 83 km/h, un tour serait bouclé en 20 à 27 secondes, une durée toujours très proche
des 30 secondes estimées précédemment. Il est donc très possible que les deux avions aient volé quelque temps à des vitesses différentes, tout en restant toujours
sur des orbites synchrones à des positions opposées.
Enfin, il y a une grosse différence d'appréciation sur la durée de l'observation commune : Guerra indique que les deux avions sont restés avec l'objet
pendant une dizaine de minutes, ce qui correspondrait à une vingtaine de rotations, alors que Gârces pense qu'il n'a effectué que quatre ou cinq rotations
(et donc l'objet deux fois plus, puisque c'est aussi lui qui a eu l'impression que l'objet effectuait deux rotations pendant que les avions en effectuaient une).
Il y a décidément de grosses divergences dans les déclarations des trois pilotes, ce qui est bien normal surtout pour des récits rapportés près de six mois après les faits,
mais il faut en tenir compte.
On voit en tout cas que les descriptions des pilotes s'expliquent remarquablement par une mauvaise estimation de la distance de l'objet, et par des variations
de leur propre trajectoire autour d'un ballon dont la position variait seulement au gré du vent.
Quatrième phase : tentative d'interception
Après pense-t-il une dizaine de minutes de ce manège avec les deux avions et l'objet, Guerra décide de se diriger vers la trajectoire de l'objet, pour l'observer
de plus près et voir comment il allait réagir. Il a fait part de son intention à ses collègues, qui ont voulu le dissuader, mais il a persisté,
et il a tenté une manœuvre pour se placer devant l'objet et l'obliger à dévier de sa trajectoire.
Étant donné qu'il pensait l'objet beaucoup plus rapide que lui, la solution la plus logique était de quitter la trajectoire circulaire pour se diriger
en ligne droite et à la vitesse maximale vers la direction où l'objet paraissait le plus proche. En considérant que la trajectoire de l'avion de Guerra
et celle qu'il imaginait pour l'objet était inchangée, on trouverait ceci :
En 1, Guerra quitte sa trajectoire circulaire alors que l'objet se trouve à sa gauche, et se dirige vers le point 2 où l'objet est censé passer à sa distance minimale.
L'objet effectue entre les deux points presque 3/4 de tour, donc en 22 secondes environ. La vitesse maximale d'un Chipmunk étant un peu supérieure à 220 km/h,
Guerra aurait parcouru en 22 secondes 1,35 km, ce qui le placerait à sa position 2, encore assez loin de celle supposée de l'objet. En fait, toute tentative d'interception
aurait été complètement vaine si l'objet ne passait pas à nettement moins de 2,5 km de l'avion et s'il se déplaçait à 2500 km/h comme le pensait Guerra.
Le fait qu'il ait tenté cette manœuvre semble indiquer que Guerra pensait alors que l'objet était nettement plus proche et moins rapide qu'il ne l'avait imaginé plus tard.
Ça serait le plus logique, mais ça n'est pas ce que Guerra dit avoir fait. Voici à peu près la manœuvre qu'il aurait effectuée d'après son schéma pour l'enquête du CNIFO :
L'avion suit son orbite de 450 m de diamètre (cercle vert) jusqu'à ce que Guerra entame sa manœuvre... Quant à l'objet, il suit la trajectoire rouge.
Guerra précise que lorsqu'il a commencé son virage pour intercepter l'objet, ce dernier était toujours en train de décrire les immenses orbites, et il le voyait alors
« plus ou moins au-dessus de Torres Vedras », donc au sud-ouest, et à une distance de 5 kilomètres, voire plus. Il se situerait alors devant Guerra
plutôt qu'à sa gauche. Et on remarque aussi que pendant la manœuvre de Guerra l'objet semble se rapprocher de lui, ce que Guerra interprète comme une réaction intelligente.
Tout ça serait assez cohérent, mais sur le schéma de Guerra, l'ellipse décrite par l'objet fait en comparaison avec les cercles de l'avion un peu plus de deux kilomètres
de longueur, et non sept.
Dans sa description, Guerra indique que pour effectuer sa manœuvre, il commence par accélérer, puis entame un virage en direction de la future trajectoire de l'objet.
En une fraction de seconde, l'objet entreprend ce qu'il interprète comme une manœuvre intelligente d'évitement : « Il me fuit, me serre à nouveau et s'en va ».
Il interprétera cela comme une manœuvre intelligente d'évitement et de fuite. Il représente cette phase sur le plan des déplacements de son avion et de l'objet.
Son avion semble se diriger vers le centre de ses propres cercles, afin d'atteindre l'orbite de l'objet à l'opposé.
Voyons comment on peut interpréter tout cela au mieux, en restant sur l'idée que Guerra surestimait la distance de l'objet d'un facteur 16 (que l'on a réduit à 6
sur ce schéma pour qu'il reste clair).
Le ballon est le point bleu, et la trajectoire suivie par Guerra est en vert : il commence par virer un peu pour accélérer en direction de l'objet, vers Torres Vedras,
pensant peut-être qu'il croiserait sa trajectoire après un tour... Il est donc probable que Júlio Guerra ait pris, sans le savoir, la direction du ballon qui se trouvait
au centre de ses cercles, et qu'il ait été très surpris de le croiser aussi rapidement. Puisqu'il imaginait que sa taille était de plusieurs mètres, il devait alors s'attendre
que la taille apparente de l'objet augmente fortement en s'approchant, mais le ballon ne faisant que 35 centimètres, celle-ci n'a pas dû augmenter autant qu'il s'y attendait,
ce qu'il a pu interpréter comme une manœuvre d'évitement à environ 300 ou 500 mètres de lui. Il a donc très vite dépassé le ballon, ce qu'il interprète comme
une « fuite » de l'objet. Guerra fait alors un demi-tour serré et accélère à sa vitesse maximale, allant vers le point où l'objet était censé passer au plus près
au cours de ses boucles habituelles... Mais bien sûr, il croise très rapidement le ballon, et pense que c'est l'objet qui a accéléré, qui le « serre à nouveau »
et qui s'éloigne ensuite rapidement vers le sud-est, vers Sintra. Il ne l'a jamais revu.
La trajectoire supposée de l'objet est en rouge, en considérant donc une surestimation de la distance d'un facteur six... Cette trajectoire est identique à celle de l'avion
mais tournée de 180° et agrandie d'un facteur cinq... Si Guerra surestimait la distance d'un facteur 16, cette trajectoire imaginaire serait encore trois fois plus grande.
Concernant la « quasi-collision », Guerra écrit dans le livre de Kean :
Étant donné que la vitesse de l'objet était bien plus grande que la mienne, je me suis dirigé directement vers un point
de sa trajectoire elliptique. Il est alors venu dans ma direction et a volé directement au-dessus de moi, par-dessus mon avion, et il s'est immobilisé
là comme un hélicoptère à l'atterrissage mais beaucoup plus rapidement, violant toutes les règles de l'aérodynamique. Il était tout près de mon avion, à
seulement cinq mètres environ. J'étais stupéfait. J'ai fermé les yeux et suis resté pétrifié à cet instant, sans réaction.
Mais là encore, le témoignage initial est bien différent de cette version plus de 25 ans plus tard !
Dans l'enquête initiale, lorsqu'on l'interroge sur la distance le séparant de l'objet, il indique : au « plus proche à environ 500 mètres ».
Dans son entretien, il dit : « je l'ai intercepté en restant à environ trois ou cinq cents mètres de lui, peut-être plus ».
Dans un autre questionnaire, il donne à nouveau cette même information « 300-500 m ».
Une division de la distance estimée par au moins 60, ça montre encore à quel point il faut se méfier des témoignages très tardifs que les journalistes
comme Leslie Kean privilégient...
Ceci dit, puisque nous avons considéré que Guerra multipliait par 16 la distance de l'objet lorsqu'il effectuait ses boucles autour de lui,
il devait en être de même lors de cette « quasi-collision », et on peut donc supposer qu'il est passé à 20 ou 30 m du ballon. C'est
ce que nous avons représenté sur le schéma. Et à 25 m de distance, un ballon de 35 cm de diamètre aura une dimension apparente de 0,8°, ou 8 mm à bout de bras.
Guerra indique pour sa part dans son questionnaire rempli cinq mois après les faits que lors de son approche maximale l'objet avait un diamètre apparent de 1,5°...
On n'est pas loin, et on sait que pratiquement tous les témoins ont tendance à exagérer la dimension angulaire d'un objet (peu de personnes non averties
attribueraient à la lune un diamètre d'un demi-degré ou 5 mm à bout de bras, son diamètre réel).
Notons qu'un objet de 1,5° de dimension angulaire vu à 300 à 500 mètres de distance aurait une taille comprise entre 8 et 13 mètres,
alors que Guerra n'a jamais parlé d'une dimension supérieure à 3 m.
Pour résumer, la description de Júlio Guerra est conforme dans les grandes lignes à la version disponible dans les articles et interviews, mais certains nouveaux éléments
contenus dans l'enquête du CNIFO, a priori surprenants, semblent bien conforter l'hypothèse d'une illusion d'optique causée par une forte surestimation de la taille
d'un ballon de 35 centimètres se situant près du centre des cercles de son avion.
Les deux autres pilotes estiment que la distance minimale à laquelle ils ont pu observer l'objet est d'environ 30 mètres. Étant donné qu'eux aussi exagéraient
la distance mais beaucoup moins que Guerra, il se pourrait qu'ils aient vu le ballon à une distance de 10 ou 15 m, soit d'encore plus près que Guerra.
Pour ce qui est de leur perception de la phase finale de l'observation, Garcez et Gomes précisent que l'objet commençait à prendre de l'altitude lorsque
Guerra a entrepris sa manœuvre d'interception.
Dans le reportage du National Geographic, Garcez explique :
Júlio a essayé de lui barrer la route en se lançant dans une manœuvre très périlleuse. Mais juste après, la chose nous a
semés. Une manœuvre incroyable. Après ça il est parti à toute vitesse, et nous l'avons perdu.
Il semble que Garcez, qui n'étant pas aux commandes devait avoir bien du mal à se situer, ait été très surpris par ce qui se passait.
Dans le rapport du CNIFO, il précise que l'objet a accéléré progressivement, jusqu'à atteindre une vitesse d'environ 300 nœuds, soit 550 km/h.
Pour António Gomes, l'objet a également pris de la hauteur, mais a aussi commencé a élargir ses cercles au-delà de ceux des avions, à une « vitesse considérablement
plus élevée ».
Lors de son entretien, un enquêteur lui demande quelle était la vitesse maximale de l'objet, il répond : « à mon avis, au moment où il a disparu, elle devait être
d'environ 400 à 500 nœuds » (soit de 740 à 925 km/h). « Peut-être même plus ». Si son avion volait à 200 km/h, cela suppose qu'il aurait surestimé
d'un facteur cinq la vitesse d'éloignement de l'objet, et donc sa distance. On a vu qu'il la surestimait plutôt d'un facteur deux auparavant, mais c'est plutôt normal même pour
un pilote d'avoir une telle différence d'estimation entre une vitesse latérale et une vitesse d'approche ou d'éloignement, et l'erreur reste assez limitée.
Pour ce qui est de la toute fin de l'observation, Garcez écrit que l'objet a encore effectué une boucle après son passage tout près de l'avion de Guerra. On peut donc supposer
que ce sont Garcez et Gomez qui auraient encore effectué presque un tour après avoir assisté à la scène, après quoi ils auraient suivi Guerra et l'objet se serait éloigné dans
leur dos. C'est encore une grosse contradiction entre les témoignages qui s'explique par la mauvaise perception de la distance de l'objet : Guerra qui s'éloigne tout droit
après sa manœuvre voit l'objet s'éloigner à grande vitesse derrière lui, et Garcez qui effectue encore un tour voit l'objet faire une dernière boucle avant de s'éloigner.
Ensuite, les trois témoins disent que l'objet s'est éloigné vers Sintra, vers le sud-ouest, alors que bien sûr eux-mêmes allaient dans le sens inverse.
Les trois pilotes indiquent aussi que l'objet s'élevait en s'éloignant, et même qu'il avait commencé avant la tentative d'interception de Guerra.
Il se peut qu'il ait été pris dans un courant ascendant, on a vu qu'ils ne sont pas rares au pied du Montejunto. Et peut-être aussi qu'il a été pris
dans les perturbations de l'avion de Guerra après l'avoir croisé d'assez près... Ou encore que Guerra aurait instinctivement un peu plongé vers le bas
de quelques dizaines de mètres lorsque l'objet a paru lui foncer dessus, et que les autres pilotes l'ont suivi. Là encore, ils n'imaginaient pas
qu'une perte d'altitude de leur part de quelques dizaines de mètres pouvait expliquer une élévation apparente de plusieurs centaines de mètres de l'objet.
Dans cette dernière situation, les trois témoins ont encore une fois une perception différente des déplacements de l'objet, mais tous décrivent que sa vitesse
était très élevée. Ils sont également d'accord sur le fait que l'objet semblait faire des manœuvres rapides, parfois inconcevables selon les lois de l'aérodynamique connues,
notamment à la toute fin de l'observation.
Florent a encore utilisé un drone pour voir comment pouvait être perçu le croisement du ballon, puis son éloignement final :
Rappel : Dans toutes les reconstitutions, le ballon est immobile. Seul le drone se déplace, et à une vitesse de seulement 60 km/h, donc beaucoup moins rapidement
que les avions lors de l'observation. L'illusion de vitesse de rapprochement et d'éloignement devait donc être largement supérieure pour les pilotes.
Rien donc de très surprenant dans les erreurs d'estimations des trois aviateurs, et l'hypothèse d'une confusion avec un ballon en Mylar explique au mieux
les grosses divergences des trois témoignages.
Conclusion
On a vu que la ressemblance entre les descriptions de l'ovni et les premiers ballons festifs en Mylar étaient vraiment frappante, et que la petite taille
de ces ballons expliquait en grande partie l'erreur des pilotes sur la distance et la vitesse de l'objet...
Pourtant, personne à notre connaissance n'a évoqué cette hypothèse avant 2014... Ni les pilotes, ni les scientifiques du CNIFO qui ont enquêté sur cette
affaire n'y ont fait la moindre allusion dans leur volumineux rapport. Comment expliquer cela ?
La réponse, c'est que ces ballons ne sont apparus qu'à la fin des années 70, et étaient encore très peu répandus en 1982.
Il est donc probable que personne parmi les enquêteurs ne connaissait l'existence de ces ballons, ou en tout cas n'imaginait qu'ils pouvaient être à
l'origine de méprises avec des ovnis. On a eu de même des observations restées longtemps inexpliquées lorsque les skytrackers ont commencé à être
utilisés par des discothèques, ou lorsque les lanternes thaï ont été commercialisées en occident.
Les enquêteurs ont par contre pensé à des ballons-sondes, mais de tels ballons qui emportent une certaine masse de matériel ont un diamètre de plusieurs
mètres, qui correspond à ce que pensaient les témoins après avoir réévalué leurs premières estimations. Et si ces pilotes de l'armée avaient correctement évalué
la dimension de l'objet, il est impensable qu'ils se soient énormément trompés sur sa distance... Et si la distance était correctement estimée, l'objet
se déplaçait réellement à quelque 2000 km/h, ce qui est évidemment incompatible avec un ballon !
C'est précisément le fait que ces ballons d'un genre nouveau avaient une petite taille qui est à l'origine de toute la confusion.
Pensons aussi que lorsque le CNIFO a enquêté en 1983, on ne disposait pas de tous les outils de maintenant : les ordinateurs personnels commençaient
à peine à se démocratiser et avaient des possibilités limitées, Internet n'existait pas encore...
Mais tout de même, on commençait à bien connaître les mécanismes de méprises, et notamment sur la surestimation de distances.
Paul M. Fitts, psychologue au sein du projet Blue Book, écrivait dans les années 60 :
Il y a suffisamment d'explications psychologiques concernant les rapports d'objets volants non identifiés pour fournir une explication plausible
aux rapports non élucidés. Ces erreurs d'identification de stimuli réels résultent principalement de l'incapacité à estimer leur vitesse,
leur distance et leur taille.
Il est donc tout de même surprenant qu'en plusieurs mois d'enquête approfondie, aucun des nombreux scientifiques ayant participé n'ait imaginé
une telle méprise, et cela révèle un certain manque d'objectivité des membres du CNIFO, une orientation un peu trop favorable
à l'hypothèse extraterrestre en matière d'ovnis. C'est d'ailleurs ce qui transparaît dans les interventions de divers de ces membres dans les reportages.
Avoir des idées préconçues est humain et n'est pas forcément mauvais, cela pousse à creuser dans une direction qui pourrait être ignorée par d'autres enquêteurs,
et qui pourrait tout à fait s'avérer la bonne...
Ce qui est beaucoup plus critiquable, c'est de cacher des informations qui ne vont pas dans cette direction : ici, ce sont les fortes différences de perception
des trois témoins, leurs divergences dans l'estimation de la dimension de l'objet observé, en bref tout ce qui remet en cause l'observation d'un objet
se déplaçant à très grande vitesse et effectuant des manœuvres dont nos propres appareils seraient incapables. Ce manque d'objectivité dans la relation des observations
est malheureusement très courant en ufologie, et quoi que l'on pense des ovnis c'est profondément regrettable.
Ce que l'on a pu remarquer aussi, comme c'est souvent le cas, c'est que si les enquêteurs ne sont souvent pas à l'abri des critiques, les témoins sont plutôt fiables.
Ici, les trois pilotes ont décrit très correctement ce qu'ils ont observé, et on pouvait sans mal identifier l'objet de la méprise et comprendre ses mécanismes
en se fiant à leurs témoignages.
Ça sera la conclusion concernant ce cas plein d'enseignements.
La suite du texte ne porte plus sur cette affaire d'Ota, mais sur d'autres observations qui peuvent lui être comparées.
Nous aborderons d'abord la situation de pilotes confrontés à des phénomènes qu'ils n'identifient pas, avec en particulier deux observations pour lesquelles
ils ont été victimes d'une méprise analogue à celle du cas d'Ota, avec un autre type de ballon.
Et puis, quelques autres cas, impliquant pour la plupart des pilotes militaires, de confusion avec un ballon en Mylar ou un objet apparenté en taille et en comportement.
Enfin, nous examinerons les deux autres observations par des pilotes militaires portugais ayant fait l'objet d'une enquête par le même groupe de scientifiques.
Les pilotes ne sont pas infaillibles
Beaucoup d'ufologues ont tendance à croire que les pilotes sont des témoins idéaux, du fait qu'ils ont l'habitude d'observer des objets dans le ciel et de se déplacer
dans les airs.
En réalité, le fait qu'ils se déplacent et effectuent des manœuvres à grande vitesse favorise les mauvaises interprétations, du fait que le corps humain
n'est pas adapté pour cela... Même si les pilotes ont l'habitude de telles manœuvres, ça n'est pas une situation normale pour un être humain : ils sont soumis
à des accélérations pouvant perturber leurs sens et leur concentration, ils doivent être attentifs à la fois à leur environnement et à leurs appareils...
Et en outre, les pilotes ne sont généralement pas formés correctement à reconnaître des phénomènes qui peuvent avoir un aspect bizarre : météores, planètes, ballons...
Il peut y avoir des efforts en ce sens selon les époques et les pays concernés, que ce soit pour les pilotes civils ou militaires, mais c'est loin d'être une généralité.
Et de fait, il est fréquent que des pilotes se lancent à la poursuite de Vénus, ou ne reconnaissent pas un météore pourtant très caractéristique, prennent un ballon
pour un objet en déplacement rapide ou effectuant des manœuvres...
Et cela peut quelquefois avoir des conséquences tragiques... On connaît le cas du Capitaine Mantell, mort le 7 janvier 1948 après s'être lancé
à la poursuite d'un objet rond et lumineux de grande taille vu par de nombreux témoins au-dessus de Madisonville (Kentucky). Thomas Mantell,
appartenant à la Garde nationale aérienne, effectuait des manœuvres à bord de son avion Mustang F-51D, accompagné de deux lieutenants, lorsqu'ils se sont lancés
à la poursuite de cet objet. À 6600 m d'altitude, les deux autres pilotes ont abandonné la poursuite du fait que leur réserve d'oxygène s'épuisait,
mais Mantell a continué à s'élever jusqu'à 7500 m... Le contact radio a alors été perdu, et l'avion du Capitaine Mantell a été retrouvé écrasé.
Il a été établi que l'objet était très probablement un ballon géant Skyhook lancé par la Marine américaine. Ces ballons ayant un diamètre maximal de 30 mètres
et une hauteur de 200 m s'élevaient jusqu'à une altitude de 20000 m, bien plus haut que ce que pouvait atteindre l'avion de Mantell, et ce dernier
a dû s'évanouir par manque d'oxygène.
Observation du 24 septembre 1952 à Cuba
Un cas intéressant de confusion avec un ballon, qui nous rapproche du cas de Guerra, s'est produit le 24 septembre 1952, il a été relaté par le Capitaine
Edward J. Ruppelt, qui dirigeait alors le programme Blue Book d'étude des ovnis.
Traduction :
24 septembre 1952, Cuba, Duel entre un pilote d'un TBM et une lumière
L'autre « duel » s'est produit le 24 Septembre 1952, entre un pilote de la Navy d'un TBM et une lumière sur Cuba. Les suites de cette observation
ont révélé des informations fascinantes sur les illusions que l'œil humain, prétendument objectif, peut provoquer.
Le pilote venait juste de finir de faire quelques passages pour les chasseurs de nuit quand il a repéré une lumière orange, à l'est de son avion.
Il vérifia si des avions étaient présents dans la région et comprit que l'objet était non identifié. Il décida d'aller voir cela de plus près. Voici son rapport,
rédigé immédiatement après :
Alors qu'elle [la lumière] s'approchait de la ville par l'est, elle commença un virage à gauche. J'ai commencé à intercepter. Pendant la première partie de la chasse,
j'ai pu me rapprocher, au plus proche, entre 1,3 à 1,6 kilomètres de cette lumière. À ce moment, l'OVNI semblait être aussi grand qu'un SNB et avait une queue verdâtre
qui paraissait cinq à six fois plus longue que le diamètre de la lumière. Cette queue a été vue à plusieurs reprises dans les 10 minutes suivantes,
par période de 5 à 30 secondes chacune. Alors que j'arrivais à 3000 mètres d'altitude, il semblait être à 4500 mètres et dans un virage à gauche.
Il a fallu 40 degrés d'inclinaison pour garder le nez de mon avion sur la lumière. À ce moment j'ai estimé que la lumière était dans une orbite de 16 à 25 kilomètres.
À 3600 mètres j'ai cessé la montée, mais la lumière continuait de s'élever toujours plus vite que moi. J'ai alors inversé mon virage de gauche à droite,
et la lumière a fait de même. Comme je ne gagnais pas de distance, j'ai tenu le cap au sud essayant d'estimer une perpendiculaire entre la lumière et moi-même.
La lumière se déplaçait vers le nord, donc j'ai tourné vers le nord. Alors que je tournais, la lumière a semblé se déplacer vers l'ouest, puis le sud au-dessus
de la base. J'ai encore essayé de l'intercepter, mais la lumière a semblé s'élever rapidement à un angle de 60 degrés. Elle a grimpé à 10000 mètres,
puis a commencé une descente rapide.
Avant cela, tandis que la lumière était encore à environ 4500 mètres, je l'ai délibérément placée entre la Lune et moi trois fois pour essayer d'identifier
un corps solide. Moi et mes deux hommes d'équipage, nous avons tous eu une bonne vue de la lumière alors qu'elle passait devant la lune.
Nous ne pouvions voir aucun corps solide.
Nous avons considéré le fait qu'il pourrait s'agir d'un ballon d'un aéronaute, mais nous n'avons pas vu de silhouette. De plus, nous aurions rapidement rattrapé
et dépassé un ballon.
Pendant sa descente, la lumière a semblé ralentir à environ 3000 mètres, à ce moment j'ai fait trois passages à proximité. Deux étaient sur une trajectoire
de collision de 90°, et la lumière a voyagé à une vitesse énorme traversant ma trajectoire. Au troisième passage, j'étais si proche que la lumière masquait
l'aérodrome en dessous de moi. Tout à coup, elle a commencé une plongée et je l'ai suivie, puis je l'ai perdue à 450 mètres.
Quand le pilote a atterri, quiconque aurait essayé de lui dire qu'il était à la poursuite d'un ballon météo éclairé aurait eu un moment difficile.
Vingt-quatre heures plus tard, il était convaincu qu'il avait chassé un ballon.
La nuit suivante, un ballon éclairé a été lâché et le pilote a été envoyé pour comparer ses expériences. Il reproduit son « duel » – ses illusions, tout.
L'US Navy nous a fourni une longue analyse de l'affaire, expliquant comment le pilote avait pu être dupé. Elle est recommandée à toute personne
croyant qu'un pilote expérimenté ne peut pas être dupé par ce qu'il voit.
Ce cas est particulièrement intéressant parce que le pilote a pensé à trois reprises que l'objet effectuait des manœuvres rapides, changeant rapidement d'altitude
et suivant de très grandes boucles. Et le pilote a reconnu qu'il avait poursuivi un ballon immobile lorsqu'il a recommencé ses manœuvres le lendemain avec un ballon
lâché pour l'occasion.
Certes, il n'a pas tourné une vingtaine de fois autour de ce ballon comme l'a fait Guerra, mais la situation est tout de même assez similaire.
Observation du 1 février 1977 à Glendale, Californie
Un autre cas d'ovni rappelle à bien des égards celui d'Ota. Il est décrit dans l'ouvrage très instructif d'Allan Hendry,
The UFO handbook : a guide to investigating, evaluating, and reporting UFO sightings.
Allan Hendry, un astronome, fut embauché pendant les années 1970 par le célèbre J. Allen Hynek en tant qu’enquêteur pour le Center of UFO Studies (CUFOS).
Dans son livre, il fait le bilan de ses enquêtes et des enseignements qu'il en a tirés.
Il établit une classification détaillée des observations les plus intéressantes qui lui ont été rapportées, en distinguant notamment les cas expliqués (IFOs)
et les cas inexpliqués (UFOs), répartis en plusieurs sous-catégories selon leur nature, leur intérêt ou leur solidité.
Le cas qui nous intéresse est classé dans la catégorie des Lumières Nocturnes des Bons Cas d’OVNIs (Nocturnal Lights Good UFOs), qui regroupe les rapports
de lumières nocturnes demeurant non identifiées après enquête. Dans ces cas, une explication naturelle est a priori exclue, mais une explication prosaïque
reste envisageable.
La date n'est pas mentionnée dans son livre, mais nous avons retrouvé ce rapport d’OVNI dans la revue du CUFOS. L’observation a eu lieu à Glendale, en Californie,
le 1er février 1977 à 20 h 30 et a duré environ 3 à 4 minutes.
Ci-dessous la traduction de la présentation du cas extraite de son livre :
Cas 40 — Deux pilotes d'hélicoptère de la police volaient au-dessus de Glendale, en Californie, à 20 h 30. Un objet lumineux, se dirigeant vers le nord,
est passé en dessous d'eux, puis est monté à leur altitude. Il ressemblait à un cylindre vertical sombre, que les policiers ont estimé entre 3 et 4,5 mètres de haut
et entre 1,5 et 2,5 mètres de large. Sa taille apparente était estimée à environ trois quarts de celle d'une pleine lune.
Supposant que l'objet se trouvait entre 90 et 150 mètres de distance, les pilotes ont distingué une lumière à la base de la structure et des « supports »
sur le côté.
L'hélicoptère, volant à environ 100 km/h, a effectué deux ou trois tours dans le sens antihoraire autour de l'objet. Ce dernier semblait partager leur trajectoire,
se trouvant toujours à 180° d'eux. Bien sûr, le même effet aurait pu se produire si l'OVNI se trouvait simplement au centre de la spirale de l'hélicoptère,
mais les pilotes affirment avoir utilisé le sol comme repère.
En se rapprochant, les témoins ont observé la forme prendre de l’altitude, se diriger vers le sud-est, puis disparaître en une à deux secondes.
Ni l'aéroport de Hollywood-Burbank ni le Burbank Approach Control n'étaient au courant de l'événement. Il est bien sûr possible qu'il s'agisse
d'un récit exagéré basé sur un ballon lumineux, mais aucun n'avait été lancé depuis El Monte, l'aéroport international de Los Angeles
ou la base aérienne de Vandenberg.
Et une capture de la revue du CUFOS avec la description du cas :
Outre la date de l'observation, ce texte nous apprend que l'altitude était de 600 m (2000 pieds) au-dessus du niveau de la mer, soit 450 m au-dessus du sol.
Comme pour Ota, plusieurs témoins crédibles décrivent un objet non identifié effectuant des manœuvres extrêmement similaires à celles rapportées
par les pilotes portugais : tout d'abord un passage sous leur engin, suivi d'une ascension, d'orbites à 180° des leurs, d'une prise d'altitude
lorsque les témoins resserrent leurs orbites, et, pour finir, d'une disparition très rapide en une ou deux secondes.
Les différences principales étant que les témoins se trouvaient à bord d'un hélicoptère au lieu d'un avion, qu'il faisait nuit, et que la durée était moindre
(3 à 4 minutes).
Comme Allan Hendry le précise, ce cas peut tout à fait s'expliquer si les pilotes de l'hélicoptère ont surestimé la taille de l'objet, donnant l'illusion
d'un déplacement plus rapide qu'en réalité, et qu'il effectuait les mêmes manœuvres qu'eux, mais à 180°, alors qu'il se trouvait au centre de leurs orbites.
Il explique que les pilotes affirment avoir utilisé le sol comme repère, comme l'a fait Julio Guerra. Cependant, comme nous l'avons vu précédemment,
ce n'est en aucun cas une méthode fiable.
Allan Hendry en était bien conscient, ce qui explique qu'il classe cette observation dans les Bons Cas d’OVNI (Good UFOs) plutôt que dans la catégorie supérieure,
celle des Meilleurs Cas d’OVNI (Best UFOs).
On peut regretter que les pilotes de l'hélicoptère n'aient pas tenté de faire du surplace (chose impossible avec un avion comme dans le cas d'Ota)
plutôt que de tourner autour. Tout porte à croire qu'ils auraient eu une occasion de comprendre que les déplacements de l'objet n'avaient rien d'extraordinaire.
Cela dit, il n'est pas exclu qu'ils auraient malgré tout conclu que l'objet les imitait en faisant lui aussi du surplace.
Quant à la nature exacte de l'objet, Hendry envisage un ballon lumineux... Cela peut sembler a priori tiré par les cheveux, mais dans son livre,
il explique qu'il a réussi à démontrer qu'un ballon éclairé était bel et bien l'explication d'un autre cas, a priori inexplicable,
qui lui avait été soumis. Il s'agissait en réalité d'un ballon captif (retenu par un fil) éclairé, dont il avait finalement réussi à identifier la source.
L'idée d'un ballon captif ne peut pas être retenue ici étant donné l'altitude, mais on peut aussi trouver des ballons non captifs munis d'une lumière.
Il y a aussi des amateurs qui fabriquent des montgolfières miniatures, qui pourraient avoir une taille convenable, et dans ce cas la lumière pourrait représenter
le brûleur. On peut trouver un site très intéressant en français,
consacré à la fabrication de telles montgolfières.
On pourrait aussi penser à une lanterne thaï, mais en 1977 elles étaient peu connues et difficilement disponibles en occident, et de plus elles se présentent
comme un objet entièrement éclairé, et non comme un objet sombre muni d'une unique lumière.
On peut donc s'interroger sur la source précise de la méprise, mais le fait est que les caractéristiques de cette observation s'expliquent bien par un objet
plus léger que l'air dont la distance aurait été simplement exagérée.
Notons que dans son même livre, Hendry parle d'une autre source de confusion, qu'il n'envisage pas dans ce cas sans doute parce que la description
ne correspond pas trop : celle des « ballons canulars » (prank balloons).
Ça ne manque pas d'intérêt, et nous en avons fait une traduction :
7) Ballons canulars
14 signalements – 1 % de tous les OVI (Objets Volants Identifiés) NL.
La catégorie numéro 7 des OVI regroupe un cas particulier d'objet fabriqué par l'homme : le ballon canular. Je classe les signalements de ballons canulars
dans les OVI et non dans les supercheries, car, comme pour les autres rapports OVI, le témoin n'est pas l'auteur de la supercherie, mais une personne extérieure
et innocente. Un rapport de supercherie est ici défini comme une tromperie délibérée de la part du témoin.
PÉRIODE
Toute l'année, mais avec une prédominance durant les mois les plus chauds. Signalements entre 18 h et 2 h 30.
APPARENCE ET COMPORTEMENT
Le ballon canular, se distinguant des autres types de ballons par sa fabrication artisanale, consiste généralement en un sac de pressing en plastique transparent
et léger, équipé de bougies d'anniversaire fixées à sa base par des pailles, des fils de fer ou des tiges de balsa. Lorsque les bougies sont allumées,
l'air chaud fait monter le sac. Les quatorze rapports de cette étude indiquent des vols observés de une à quinze minutes. La taille apparente était habituellement
classée comme « 1 » ou « 2 ». Les descriptions de forme incluaient des termes comme « point orange », « dôme »,
« étincelles orange », « rouge, rond »,
« en forme de ballon de football », etc. Une fois en l'air, la lumière des bougies se reflétant sur certaines parties du sac plastique donne l'illusion de ces formes.
Dans un cas antérieur à cette étude, un témoin d'un de ces lancements de ballon avait pensé voir un homme en casque blanc se tenant debout dans un cylindre.
Le phénomène le plus fréquent du ballon canular est la chute de cire de bougie de sa base, associée à la combustion progressive du ballon lui-même, ce qui se manifeste par :
– « du métal en fusion tombant directement vers le sol à la fin » – cas 196
– « trois gouttes de lumière avant de s'éteindre » – cas 471
– « a chuté pendant trois secondes en laissant une traînée d'étincelles brûlantes » – cas 524
– « s'est désintégré en cendres » – cas 872
– « s'est éteint en trois secondes en chutant » – cas 991
– « flammes crépitantes en gouttelettes » – cas 1067
COMMENT CONFIRMER LES BALLONS CANULARS
Comme on peut l'imaginer, cet OVI est extrêmement difficile à identifier avec certitude. Une seule fois ai-je eu la chance de découvrir exactement qui en avait lancé un,
uniquement parce que la police l'a appréhendé. Je suis heureux que cela soit arrivé (ce cas est détaillé dans le chapitre des OVI Radar-Visuel), car ce ballon particulier
a généré huit appels distincts à la police à l'heure ridicule de 1 h 15, et même une « confirmation » radar.
Dans la plupart des cas, vous devrez vous fier à la description fournie. Le symptôme important est la présence de cire de bougie brûlante qui coule et la conformité
avec la direction du vent.
Cette conception ressemble finalement beaucoup aux lanternes thaï, avec juste des matériaux différents, et le but serait précisément de provoquer de fausses
observations d'ovnis plutôt que de fêter un événement... Et cette utilisation semblait assez fréquente à l'époque, puisque Hendry trouvait 1% des signalements
expliqués ainsi.
On ne retrouve par contre pas les principales caractéristiques qu'il énumère dans le cas de Glensdale, mais ça n'est pas forcément discriminant :
l'écoulement de cire n'est sûrement pas visible depuis un hélicoptère en vol à une certaine distance, la combustion du sac n'est sûrement pas systématique
et dépend de la conception de l'objet, l'utilisation d'un sac poubelle noir plutôt que d'un sac de pressing rendrait l'objet plutôt sombre...
Et il se pourrait alors que la disparition de l'objet à la fin résulte de l'extinction des flammes des bougies en raison du vent créé par l'hélicoptère.
Bref cette explication n'est pas forcément exclue, mais nous avons vu qu'il y avait d'autres possibilités.
Et on peut remarquer que le cas d'Ota qui fait l'objet de l'essentiel de ce texte pourrait aussi relever d'un « ballon canular » d'une autre nature...
On a vu que les éléments un peu surprenants pour la méprise avec un ballon en Mylar étaient le fait que l'objet est resté en position à peu près horizontale
pendant la majeure partie de l'observation, qu'il avait l'aspect d'un ballon bien gonflé mais stabilisé à une faible altitude, et qu'il avait un cercle sombre
sur sa partie inférieure. Ces trois caractéristiques s'expliquent très bien si le ballon était muni d'un morceau d'adhésif sur sa partie inférieure,
faisant office de lest d'un poids de quelques grammes.
Et il se pourrait bien que la présence de ce lest soit intentionnelle pour que le ballon ressemble à un ovni ! On a vu que ce type de ballons
était nouveau à l'époque, il était facile de faire le lien entre un tel objet discoïdal d'aspect métallique et les fameuses « soucoupes volantes »
dont on parlait beaucoup dans les années 80... Il n'est donc pas impossible qu'un farceur ait eu l'idée d'en utiliser un pour susciter une observation d'ovni,
peut-être simplement à l'intention d'un ami s'intéressant au phénomène, et la meilleure façon était justement de le doter d'un tel lest :
il restait ainsi horizontal comme toute soucoupe volante qui se respecte (au moins dans l'imagerie populaire), et il ne s'élevait pas trop vite.
Dans ce cas, l'éventuel farceur n'avait sans doute pas imaginé que sa petite plaisanterie aurait un tel succès, et ne l'a sans doute pas su :
on n'a pas beaucoup parlé de cette observation dans la presse généraliste, et à l'époque il n'y avait pas Internet.
Quoi qu'il en soit, que ce soit pour Glendale ou Ota, on peut se passer d'une telle hypothèse.
D'autres observations imputables à des ballons en Mylar
Lorsqu'il s'est intéressé au cas d'Ota et a suggéré l'explication par un ballon en Mylar, Florent a pensé que beaucoup d'autres observations, en particulier dans les
années 70-80 lorsque ces ballons étaient peu connus, pouvaient s'expliquer de la même manière. Il savait bien qu'il y aurait beaucoup de déchets en approfondissant les
cas, mais Florent avait sans doute raison au moins pour un cas fameux.
L'amarante déshydratée
Il s'agit d'une observation à Laxou, près de Nancy, le 21 octobre 1982 en début d'après-midi. Le témoin, biologiste, a d'abord vu un point lumineux qui
s'est approché lentement jusqu'à stationner dans son petit jardin, à quelque 1 m du sol. L'objet avait un diamètre estimé à 1,5 m pour 80 cm d'épaisseur,
et semblait constitué de deux dômes opposés séparés par une ceinture, le tout ayant l'aspect du béryllium (un métal très brillant) :
Après avoir observé l'objet pendant une vingtaine de minutes en s'approchant à moins d'un mètre de lui, mais sans oser le toucher, le témoin a vu l'objet s'élever
brutalement, et l'herbe de son jardin s'est alors dressée momentanément.
Le témoin a vu ensuite que des plants d'amarante que l'objet avait approchés semblaient bizarrement desséchés. Il a appelé immédiatement la gendarmerie,
laquelle a prélevé des plants le lendemain, mais ils ont été conservés dans de mauvaises conditions et leur analyse n'a rien donné de probant.
Du fait de ces « effets physiques », le cas est devenu un des préférés du Gepan au temps de Jean-Jacques Velasco, et a fait l'objet de la
Note technique n°17
de cet organisme (devenu ensuite Sepra, puis Geipan).
Il est à noter que le témoin est assez « spécial » : il craignait par-dessus tout que son nom ne soit connu et a fort mal accueilli la visite d'enquêteurs
privés, ne voulait parler qu'au directeur du Sepra même si on lui proposait de rencontrer d'authentiques scientifiques, et il a arraché une grande partie
des plantes de son jardin, dont les fameuses amarantes, et tondu sa pelouse, deux jours avant la visite du Gepan sur les lieux, six jours seulement après
son observation, sous prétexte de réorganiser son jardin...
La « dessication » de certains plants d'amarante n'a rien de très surprenant, ces plantes étant assez fragiles et un gel s'étant produit la veille de
l'observation.
La description évoque assez bien un ballon en Mylar bicolore, dont la forme un peu bizarre pourrait résulter d'un gonflage partiel (ce qui est nécessaire
pour qu'il se soit posé au sol, en l'absence de toute charge visible). La dimension ne serait pas beaucoup exagérée puisque de tels ballons peuvent faire
plus de 70 cm de diamètre.
Cette explication a pourtant été négligée par les ufologues, en raison du fait que l'objet n'était pas posé mais semblait flotter à
environ un mètre du sol, et que d'après les photos du Gepan il ne semblait pas y avoir quoi que ce soit dans le jardin qui aurait pu lui servir de
support. Il était invraisemblable qu'un ballon soit resté à une position fixe pendant une vingtaine de minutes s'il n'y avait rien pour le maintenir.
Mais les questionnements de Florent ont relancé l'intérêt pour cette observation, et le sceptique Éric Maillot a pu obtenir du Geipan une vieille copie
d'une photo prise au lendemain de l'observation par les gendarmes, non publiée jusqu'alors, sur laquelle on voit que le jardinet était une véritable
jungle et que bon nombre de plantes, dont justement les amarantes, pouvaient avoir servi de support à un ballon :
Il se pourrait donc que le ballon soit resté en équilibre sur un plant d'amarante ou d'une autre plante présente, et que le témoin ne connaissant pas ces
ballons, persuadé qu'il s'agissait d'un objet en métal très lourd, n'ait pas imaginé qu'il pouvait être maintenu simplement par une branche d'arbuste.
Ensuite, le ballon réchauffé par le soleil se serait à nouveau élevé dans l'air, poussé par un petit coup de vent.
Robert a pour part suggéré qu'un effet d'électricité statique pourrait être responsable du « redressement » de l'herbe lorsque l'objet est parti : le ballon
aurait été chargé négativement dans les nuages, et attiré par le sol chargé positivement (la différence de potentiel atteint des centaines de milliers de
volts) : après vingt minutes, poussé par un petit coup de vent, le ballon se serait encore rapproché du sol, provoquant le redressement de l'herbe, mais
il aurait touché un objet métallique (piquet supportant la corde à linge, grillage ?), et se serait chargé au potentiel du sol, qui l'aurait alors
repoussé, de même que l'herbe.
Cela expliquerait l'élévation rapide aussi bien que le mouvement de l'herbe, mais il est douteux que le ballon soit resté chargé durant vingt minutes...
Des expériences seraient à mener à ce sujet. Il se peut aussi plus simplement que ce soit le même coup de vent qui ait fait redécoller le ballon et agité l'herbe.
Quoi qu'il en soit, il semble bien que l'hypothèse d'un ballon en Mylar soit à privilégier pour ce cas, et
Éric Maillot a écrit un nouvel article
allant dans ce sens.
L'observation du capitaine Fartek
Un cas où l'explication par un ballon en Mylar ne fait guère de doutes est celui du capitaine de l'armée de l'Air Jean-Pierre Fartek, qui a eu lieu le
8 décembre 1979 vers 9 h 45. Fartek est pilote, mais c'est au sol qu'il a observé l'objet, avec sa femme.
Une interview du capitaine Fartek a été publiée dans la revue l'Inconnu n° 56, d'octobre 1980 :
Prenant un petit déjeuner, j'ai été averti par mon épouse d'un phénomène insolite apparaissant à quelque distance de
notre habitation. M'étant déplacé à la fenêtre, j'ai pu observer un objet se déplaçant de façon instable, à une vitesse paraissant rapide, environ cent
mètres au-dessus du sol, en direction du nord-est. […] La perte de visuel, due à l'éloignement, a eu lieu
après environ deux minutes d'observation. Seules les explications de mon épouse ont pu me permettre de donner une appréciation quant aux dimensions de
« l'engin ». En effet, l'origine de l'observation se situe à une distance de 250 mètres de notre habitation, à proximité d'une haie d'arbustes dont les
plus grands mesurent entre 6 et 8 mètres.
L'objet était bleu marine d'un côté et blanc métallique sans brillance de l'autre.
Nous l'avons observé pendant une minute trente environ et ensuite il s'est envolé en direction du nord à très grande
vitesse. Je pense vitesse supérieure à celle du son.
Et :
Cet objet était en forme de croissant, de couleur bleu marine et blanche sans brillance. Lorsqu'il s'est mis en oblique,
j'ai pu évaluer sa hauteur, par rapport aux arbres du bosquet, qui est de 4 à 5 mètres de hauteur.
Sa femme :
Cet engin, en forme de croissant, s'est mis en oblique, et j'ai jugé, par rapport aux arbres, qu'il faisait entre 4 et 5 mètres de hauteur.
J'ai tout de suite avisé mon mari qui a pu constater, comme moi, les mêmes choses.
Les enquêteurs qui se sont rendus sur place ont constaté que la haie d'arbres se trouvait à 200 à 250 m du lieu d'observation, et que la hauteur des plus grands
était de 6 à 8 mètres.
Et selon le trop fameux rapport Cometa,
rédigé par d'anciens militaires désireux d'attirer l'attention du gouvernement sur les ovnis mais bien peu rigoureux en matière d'enquêtes :
À environ 250 m se trouve un bouquet d'arbres d'une hauteur moyenne de 15 m au maximum. Le 9 décembre 1979 vers 9 h 15
du matin, F et sa femme observent un objet insolite (appelé M par la suite) dans le champ avoisinant leur maison ; la météo et la visibilité sont
excellentes. M, dont ils estiment les dimensions à 20 m de diamètre sur 7 m d'épaisseur, est en vol stationnaire à 3 m de hauteur environ devant le
bouquet d'arbres qu'il masque en partie. En parfaite concordance avec sa femme, le témoin F le décrit comme :
— ayant la forme de deux soucoupes superposées aux contours très nets, renversées l'une sur l'autre, ne présentant ni hublots ni lumières,
— étant de couleur gris métallique sur la partie supérieure, et plus foncée (bleutée) sur la partie inférieure, avec une séparation parfaitement
délimitée entre le dessus et le dessous de l'engin. Cette différence de couleur ne pouvait pas être due à une différence d'éclairage, compte tenu de la
position du soleil,
— animé de façon permanente de très légères oscillations, dont la fréquence n'était pas très rapide, comme quelque chose recherchant l'équilibre...
On remarque que dans ce rapport rédigé près de vingt ans après l'observation, les arbres font 15 m de hauteur au lieu de 6 à 8 dans les premiers
témoignages, et le diamètre de l'objet est monté à 20 m contre 4 à 6 pour les sources plus immédiates (pour 2 à 3 mètres d'épaisseur). Toute les
dimensions ont donc été multipliées par deux à quatre, comme c'est très courant avec les témoignages tardifs.
En bref, il s'agissait donc d'un objet bicolore, bleu marine sur sa partie inférieure et blanc métallique sur sa partie supérieure, en forme de deux
soucoupes l'une renversée sur l'autre, de cigare ou de croissant, qui se déplaçait de façon instable... Là encore, ça évoque parfaitement un ballon
en Mylar mal gonflé. Quant à la dimension de 4 à 6 mètres, elle est estimée en supposant que l'objet se trouvait juste devant les arbres distants de 250 m...
Mais tout comme dans le cas d'Ota où l'objet est censé être passé juste devant l'avion opposé, le témoin n'a aucun moyen de savoir cela : il pourrait
aussi bien s'agir d'un objet de 40 à 60 cm de diamètre passant à une distance de 25 m, et là c'est tout à fait compatible avec un ballon en Mylar.
On peut en principe dans de bonnes conditions faire la différence entre un objet à 25 m et à 250 m, et on peut supposer qu'un pilote militaire jouit d'une
très bonnne perception du relief, mais justement il semble bien que seule sa femme ait été témoin de l'objet passant devant les arbres. Le capitaine
Fartek, d'après son témoignage dans l'Inconnu, n'a observé l'objet qu'alors qu'il s'éloignait à une altitude d'environ 100 m (qui serait donc ramenée à
10 m s'il s'agissait d'un ballon dix fois plus petit que son estimation) et à une distance très supérieure à la distance maximale que l'on peut évaluer avec
notre vision binoculaire. Ça n'est que d'après les indications de sa femme qu'il a estimé la dimension de l'objet.
Bref il n'y a guère de doutes sur l'identité de l'objet observé par le capitaine Fartek et sa femme.
Dans les cas de Guerra, de l'amarante ou du capitaine Fartek, les ballons en Mylar étaient encore peu répandus et on peut supposer que les témoins n'y
étaient pas habitués ou ne connaissaient même pas leur existence. Mais de nos jours encore, ces ballons sont à l'origine de nombreuses observations,
y compris dans des rapports considérés comme inexplicables par l'armée des États-Unis.
On sait qu'après l'épisode du ballon-espion chinois en 2023, les États-Unis ont utilisé des
missiles pour faire exploser des petits ballons en Mylar de moins d'un mètre de diamètre et porteurs d'une charge de quelques grammes, couramment utilisés
par des radioamateurs.
On connaît aussi des cas récents où des objets considérés par l'armée américaine comme non identifiés étaient à l'évidence des ballons.
Batman contre l'avion de chasse
C'est le cas de cet objet photographié à environ 10 000 m d'altitude depuis un avion de chasse F/A-18, mentionné dans un rapport de 2018.
Mais lorsque cette photo a été publiée, des internautes n'ont pas tardé à remarquer que la forme de l'objet évoquait irrésistiblement un ballon en Mylar
représentant Batman :
Certes, on ne voit pas le dessin sur la photo, mais n'oublions pas que la plupart de ces ballons ne sont imprimés que sur une face, l'autre étant
argentée. La similitude des formes est vraiment trop parfaite pour qu'il s'agisse d'une coïcidence, et il n'y a rien dans les caractéristiques de la photo
qui élimine la possibilité d'un ballon en Mylar. Et ces ballons peuvent bien atteindre une altitude de 10 000 m, s'ils ont été peu gonflés au sol ou s'ils
n'ont subi qu'une petite déchirure en prenant de l'altitude.
La vidéo « Go Fast »
En 2017, une grande révélation a été faite par le New-York Times, sous l'impulsion de l'inévitable Leslie Kean : l'armée américaine n'avait pas cessé
d'étudier les ovnis, et avait financé un programme d'études entre 2007 et 2012, l'AATIP (Advanced Aerospace Threat Identification Program,
Programme avancé d'identification des menaces aérospatiales), à hauteur de 22 millions de dollars.
Il est vite apparu que ce programme lancé sous la pression d'industriels et de politiques passionnés par les ovnis n'avait pas fait preuve de beaucoup de sérieux
ni fourni beaucoup de résultats, mais cette révélation a eu l'intérêt de remettre les ovnis au goût du jour et d'inciter les agences gouvernementales
à lancer de nouveaux programmes de façon plus efficace.
Quoi qu'il en soit, un ancien membre de l'AATIP, Louis Elizondo (qui s'est prétendu faussement directeur de cet organisme), a révélé à cette occasion trois vidéos
que son service avait étudiées, toujours avec l'appui du New-York Times, et le Pentagone les a ensuite reconnues authentiques. On va s'intéresser à l'une d'elles :
La vidéo, d'une durée de 35 secondes, a été prise par des pilotes de l'US Navy volant près de la côte est des États-Unis sur un chasseur F/A-18
équipé d'une caméra infrarouge, le 21 janvier 2015.
Elizondo indiquait en commentaire que l'objet se déplaçait à grande vitesse et très bas au-dessus de l'eau... Mais en fait, on voit sur la vidéo
qu'à la 12e seconde, l'objet a été accroché par le radar, et sa distance est alors indiquée : 4,4 miles nautiques ou 8150 mètres,
alors que l'avion vole à une altitude de 25 000 pieds ou 7600 mètres, et que l'objet est vu à 26° sous l'horizon. Et à la fin de la vidéo,
la distance est de 3,3 miles ou 6200 mètres, et l'angle est de 35° sous l'horizon... Et un simple calcul trigonométrique
indique donc que l'objet volait à une altitude à peu près constante de 13 000 pieds ou 4050 m, donc bien loin de la surface de l'eau.
Et dans ce cas, il est facile de comprendre que l'objet peut être immobile, et que son mouvement apparent n'est dû qu'au déplacement de l'avion,
qui volait à la vitesse de 685 km/h par rapport à l'air (on ne connaît pas la vitesse du vent, donc pas la vitesse de l'avion par rapport au sol) :
En réalité, l'étude précise de la vidéo et des déplacements par rapport à la surface de l'eau montre que l'objet n'était pas fixe, et les diverses études
trouvent une vitesse comprise entre 50 et 160 km/h, ce qui peut être compatible avec la vitesse du vent à cette altitude (inconnue puisque l'armée n'a pas
communiqué l'heure ni la position précise de prise de la vidéo).
Quant à la dimension de l'objet, d'après les caractéristiques de la caméra, elle est
d'environ un mètre... L'objet étant accroché par le radar, il pourrait s'agir d'un petit ballon météo équipé d'un réflecteur radar, ou encore d'un ballon en Mylar
de grande taille, réfléchissant très bien les ondes radar en raison de sa couche métallique. On a vu que des radio-amateurs en utilisent pour réaliser
des « pico-ballons » qui restent à haute altitude pendant plusieurs semaines. Une autre possibilité serait un oiseau, mais elle paraît moins vraisemblable.
Et nous avons donc un autre cas de ballon, probablement en Mylar, pris pour un ovni en raison d'une mauvaise appréciation de sa distance.
L'ovni filmé par un drone en Syrie
Un cas similaire a été diffusé en juin 2023 par le professeur Sean Kirkpatrick, physicien directeur de l'AARO (All-domain Anomaly Resolution Office), le
dernier groupe de recherche gouvernemental sur les ovnis, lors d'une réunion organisée par la NASA sur le sujet.
Il s'agit d'une vidéo prise le 12 juillet 2022 par un drone militaire Reaper MQ-9 (le drone de combat le plus utilisé par l'armée américaine), montrant
une mystérieuse boule en déplacement rapide quelque part au Moyen-Orient.
Kirkpatrick explique dans son allocution que ces ovnis, pardon UAP (Unidentified Aerial Phenomenom, l'équivalent de nos PAN), en forme de sphères et
intéressantes par leurs manœuvres, constituent plus de la moitié des cas étudiés par l'armée. À noter qu'il a peu après démissionné de son poste, après s'être rendu compte
que l'étude des ovnis par des agences officielles avait été noyautée par des adeptes de thèses complotistes manquant totalement de sérieux, et qu'elle n'avait donné
aucun argument sérieux en faveur d'un phénomène vraiment anormal. Il continue toutefois à militer pour que des études sérieuses soient menées.
De son côté,
le
groupe d'enquêteurs Bellingcat a pu retrouver avec Google earth le lieu exact survolé, situé en Syrie, et ça lui a permis de montrer que d'après la
dimension des bâtiments, l'objet n'avait qu'une dimension de 43 cm s'il était proche du sol, ou moins encore dans le cas contraire.
Notons que l'heure indiquée sur la vidéo (21 h 56 Z) est fantaisiste : le Z indique normalement le temps universel (fuseau horaire zéro, Zulu time pour
les aviateurs) ou G.M.T. La Syrie a 3 h d'avance sur l'heure TU, ça correspondrait donc à 1 h du matin locales, en pleine nuit, alors que le soleil est
haut dans le ciel ! Le soleil se trouve d'après les ombres haut dans le ciel vers l'est-sud-est, ça pourrait correspondre à 9 h 56 en Syrie (soleil à 102°
d'azimuth, 55° de hauteur), auquel cas l'indication de la vidéo pourrait résulter d'une confusion entre heure locale et TU et entre après-midi et matin
(ce qui fait beaucoup d'erreurs sur un document officiel de l'armée).
Quant à sa vitesse apparente, qui serait de 170 km/h par rapport au sol, il pouvait encore s'agir d'un simple effet de parallaxe dû au déplacement du drone dans
le sens inverse... En effet, un tel drone est incapable de faire de surplace, et si le sol paraît fixe c'est parce que la caméra est programmée pour
rester pointée sur un point fixe au sol bien que le drone se déplace. Le changement de paralaxe est d'ailleurs visible sur les
bâtiments au cours de la vidéo. Et si le drone volait à son altitude et vitesse de croisière (7500 m et 300 km/h), un objet de 32 cm de diamètre poussé
simplement par le vent et qui se serait trouvé à 2000 m du sol aurait présenté ce mouvement apparent sur la vidéo.
Il s'agirait plus vraisemblablement d'un ballon en caoutchouc plutôt qu'en Mylar, tout colle parfaitement et il est d'autant plus normal de trouver un tel
ballon dans le ciel ce jour-là que le 18 juillet 2022 marquait la fin de la principale fête musulmane, l'Aïd-el-Adha.
Ces trois exemples montrent bien accessoirement que les militaires américains ne sont pas particulièrement doués pour trouver les méprises à l'origine d'observations d'ovnis,
et ça n'a rien de surprenant puisqu'ils n'ont pas été formés pour cela. Et on ne peut guère espérer que les militaires portugais soient plus
performants dans ce domaine, alors qu'ils se contentent de fournir à leurs témoins un formulaire à remplir élaboré par une association ufologique !
La vidéo d'Aguadilla
Un autre cas intéressant ayant suscité beaucoup de polémiques est celui d'Aguadilla.
Il s'agit d'un objet qui a été filmé pendant environ trois minutes avec la caméra infrarouge d'un avion de la Police de l'air et des frontières des États-Unis
près de l'aéroport Rafael Hernández à Aguadilla, Porto Rico, le 25 avril 2013 vers 21 h 23 locales (0 h 23 TU) :
On voit l'objet qui semble disparaître à plusieurs reprises, quelquefois au-dessus de la mer comme s'il y plongeait, et se dédoubler à un moment.
Un groupe ufologique à prétentions scientifiques, la Scientific Coalition of UFOlogy (SCU, coalition scientifique d'ufologie), lui a consacré en 2015
un volumineux rapport
concluant à un objet qui plongeait réellement dans l'eau à plus 150 km/h, changeait plusieurs fois de direction, bref qui serait complètement inexplicable.
Mais il est vite apparu que tout cela était très discutable... Les disparitions successives de l'objet, que ce soit au-dessus de l'eau ou du sol,
pourraient être une conséquence des limitations de la caméra infrarouge, l'objet aussi bien que le sol ou la mer pouvant changer de température et se retrouver
par moments à la même, et les changements de trajectoire apparents pourraient encore une fois résulter d'une mauvaise appréciation de la distance.
Quant à la dimension de l'objet, tout le monde s'accorde à dire qu'elle est d'environ un mètre.
En 2017, le colonel Rubén Lianza, directeur du CIAE
(Centro de Identificatión Aerospatial, Centre d'identification aérospatiale, organisme d'étude des ovnis dépendant de l'armée de l'Air argentine)
a suggéré qu'il pourrait s'agir d'une paire de lanternes thaïlandaises reliées par une ficelle, une coutume courante dans le secteur pour célébrer des mariages.
En supposant une certaine altitude, l'objet suit à peu près la direction et la vitesse du vent, sans jamais passer au-dessus de la mer, et on trouve
dans la direction d'où venait le vent une plage d'où de telles lanternes étaient souvent lancées. Le rapport de Lianza a été traduit en français
sur le site d'Ipaco.
De leur côté, Lance Moody et Florent Michaud (un des auteurs du présent texte) ont réalisé à l'aide de Google Maps une simulation de la trajectoire d'un objet poussé par le vent,
qui reproduit assez précisément la vidéo réelle à laquelle elle est comparée... La reconstitution originale en grand format se trouve
sur You Tube,
nous l'avons reproduite à un format réduit en traduisant les commentaires d'introduction :
Contexte
Dans la nuit du 25 avril 2013, vers 21 h 22 (heure locale), un avion Bombardier DHC8 exploité par les douanes et la protection des frontières des États-Unis,
équipé d'une caméra infrarouge, a capturé et suivi un objet volant très particulier qui émettait une signature infrarouge fluctuante, au-dessus de l'aéroport Rafael Hernández,
Aguadilla (Porto Rico).
L'objet semblait parfois disparaître (ce qui était interprété par certains ufologues comme « plongeant dans l'océan ») et se divisait également en deux morceaux.
(extrait du rapport original d'Ipaco.fr)
Selon un rapport publié par un groupe appelé Scientific Coalition for UFOlogy (SCU), le PAN volait à grande vitesse
contre le vent puis s'est immergé dans l'océan sans changer de vitesse de manière significative. Pour les auteurs de ce rapport, cet événement était l'un de ces cas classiques
d'OVNIS qui ne pourraient jamais être expliqués par quelque chose de conventionnel.
Une nouvelle fois, plusieurs chercheurs se sont réunis sur Facebook pour examiner ce rapport. Le groupe s'est fait connaître sous le nom de Puerto Rico Research Review (PRRR),
regroupement ad hoc d'une vingtaine de chercheurs et sceptiques sur les ovnis, dont les suivants :
Curt Collins (États-Unis)
Gilles Fernandez (France)
Roger Glassel (Suède)
Shepherd Johnson (États-Unis)
Isaak Koi (Angleterre)
Florent Michaud (France)
Lance Moody (États-Unis)
Tim Printy (États-Unis)
Lance Moody, en collaboration avec Florent Michaud, a mis ses compétences à profit pour produire un modèle 3D de l'avion, du terrain et d'un potentiel
ballon/lanterne thaï.
(lire dans la description : comment la simulation a été réalisée).
Voici le modèle 3D de la scène comparé à la séquence originale, où un petit objet flottant à la vitesse du vent (comme un ballon ou une lanterne)
correspond parfaitement à la vidéo de l'OVNI allégué :
De son côté, la 3AF (Association Aéronautique et Astronautique de France, une société savante qui a depuis quelques années un groupe d'étude des ovnis, la commission 3AF/Sigma),
sollicitée par la SCU, a aussi consacré un rapport à ce cas, dans lequel elle étudie notamment
les différentes trajectoires possibles de l'objet en fonction de sa distance réelle.
La trajectoire calculée est en blanc (les variations rapides résultent de l'imprécision des mesures plutôt que du mouvement réel de l'objet) et va de gauche à droite...
La première trajectoire correspond à celle, à peu près linéaire, d'un objet poussé par le vent. Les deux autres sont beaucoup plus exotiques, et on remarque
que la troisième décrit une boucle. Cela illustre parfaitement la diversité des trajectoires possibles selon la distance à laquelle se trouve l'objet.
La 3AF étudie ensuite les différents objets qui peuvent être concernés : ballon, lanterne, drone, oiseau ou quelque chose de totalement inconnu.
Bien, mais le fait est qu'une des trajectoires possibles suit parfaitement la direction et la vitesse du vent, alors la coïncidence est un peu trop forte
pour que l'on puisse avoir un doute ! La nature exacte de l'objet (lanterne ou ballon) reste incertaine, mais il s'agissait à l'évidence d'un plus léger que l'air.
L'observation du Capitaine Ferreira en 1957
Cet autre cas n'a pas vraiment de rapport avec l'observation de Guerra, hormis le fait qu'elle concerne aussi des avions militaires portugais ayant
décollé de la base d'Ota, mais on a vu que c'est son observation en 1957 qui a poussé le Capitaine Ferreira, devenu ensuite commandant de l'état-major de
l'armée de l'Air, à confier les archives de l'armée de l'Air, concernant à la fois sa propre observation et celle de Guerra, ainsi qu'une troisième
que nous examinerons ensuite, à un groupe de scientifiques ufologues. Et on trouve aussi des extraits du rapport d'observation de Ferreira dans les reportages
sur l'observation de Guerra.
Et puisque les deux cas ont été étudiés par le même groupe de scientifiques qui gardent jalousement leurs rapports, il peut être intéressant de creuser un peu.
Le cas a fait quelque bruit dans la presse de l'époque, avec par exemple un article de la Presse du 18 novembre 1957 inspiré d'une dépêche AFP :
Lisbonne, 18 (AFP) — Une escadrille d'avions à réaction de l'armée portugaise a été prise en chasse par de mystérieux
objets lumineux : telle est l'étrange aventure rapportée au journal Diaro Illustrado par un officier de la base d'Ota. L'incident s'est produit le
4 septembre dernier, mais l'officier n'a été autorisé qu'aujourd'hui à en révéler les circonstances.
Le capitaine Lemos Ferreira effectuait, à la tête d'un groupe de trois avions à réaction, un vol d'entraînement entre l'Espagne et le Portugal, lorsque,
à la verticale de Grenade, il aperçut un point lumineux, scintillant et passant du vert intense au rouge vif. En même temps que leur chef, les pilotes
des autres appareils observaient le même phénomène.
L'objet se maintenait en oscillant à une altitude constante, le chef du groupe ayant ordonné un changement de cap afin de se diriger vers Cordoue et le
Tage, il constata que le mystérieux engin suivait son groupe. Au cours de la poursuite, qui dura quarante minutes, l'objet largua quatre anneaux
lumineux qui se dispersèrent dans le ciel autour de lui. Soudain, l'objet et ses satellites exécutèrent un vol piqué, semant la panique dans la
formation aérienne, puis ils disparurent. Les quatre avions regagnèrent aussitôt leur base.
Pendant toute la durée de cette aventure, ajoute le Diaro Illustrado, les observateurs de la base aérienne notèrent l'interruption de la liaison radio
avec les quatre appareils en vol. Le même jour et à la même heure, l'observatoire météorologique de Combre signalait une extraordinaire variation du
champ magnétique.
Les quatre aviateurs, dont le journal rapporte le témoignage, sont tous des pilotes chevronnés totalisant un nombre respectable d'heures de vol...
Une observation apparemment extraordinaire, mais comme d'habitude il faut se méfier des relations dans la presse... Si on cherche les circonstances
réelles de l'observation, on voit notamment que les avions n'ont pas été « pris en chasse » par le mystérieux objet, qui est resté tout le temps devant
eux. Aucune mention non plus d'une interruption des communications radio, et quant à « l'extraordinaire variation du champ magnétique » elle est à
relativiser fortement.
Référons-nous plutôt aux extraits du rapport de l'armée de l'Air que l'on aperçoit dans le reportage de National Geographic sur le cas Guerra... Le premier
se rapporte au début du vol, relaté directement par Lemos Ferreira :
Traduction :
RAPPORT SUR LES OBJETS VOLANTS OBSERVÉS EN VOL LA NUIT DU 4 DE CE MOIS
01 — Le 4 septembre 1957, à 20 h 21 heure locale, une escadrille de quatre avions F-84G a décollé de la base d'Ota sous mon commandement, portant les
numéros 2, 3 et 4 de la même unité de vol, respectivement les pilotes aviateurs de chasse Manuel Carlos Heves Marcelino, Alberto Augusto Pereira Gomes
Covas et Salvador Alberto de Oliveira. Pour les besoins des procédures radio, le code de vol de l'escadron était « Atlas ».
02 — La mission à effectuer par l'escadrille mentionnée au paragraphe précédent était d'effectuer un trajet de navigation de nuit à 25 000 pieds (niveau
constant) [7600 mètres], selon le triangle ou dans le sens Ota – Grenade (37° 11'N - 03° 36'W) — Portalegre – Coruche avec ascension en route
et descente appuyée par la balise radio existante à Coruche.
03 — L'altitude de 25 000 pieds a été atteinte par la formation Atlas à 20 h 34 heure locale et au point 38° 35'N – 07° 30'W, où nous étions,
à environ 6,5 km au sud-est de la ville de Redondo. Lors de l'ascension et du virage vers la ville espagnole de Grenade, aucun des pilotes de la formation Atlas n'a
remarqué quoi que ce soit de particulier. La nuit était éclairée par la lune, presque pleine, sans nuages et avec une visibilité oblique au sol d'au
moins 80 kilomètres. Ce n'est qu'à basse altitude, jusqu'à environ 6 000 pieds [1800 m], qu'il y avait une légère brume, mais ce n'était pas le cas jusqu'à la
montée à 25 000 pieds. Les 80 kilomètres de visibilité ont été déterminés en vol, car au point de contrôle de Palma del Rio (position 37° 46'N – 05° 12'W,
soit exactement 8 kilomètres au NE de la ville de Palma del Rio), la ville de Séville, située exactement à 65 kilomètres au SE du point susmentionné,
était parfaitement visible.
Le second concerne la description des objets, mais il est moins lisible et les lignes visibles sont tronquées à droite :
Je traduis ce que j'arrive à lire :
Incident de la nuit du 4 septembre 1957, avec une formation de F-84G, de la Base aérienne ??.
Description des objets :
a e b)
Au départ, ils ont repéré un objet simple et circulaire, dont le diamètre variait d'un point doré à la taille d'une boule de (pétanque ?)
Par la suite, il a été présenté sous la forme de l'annexe 1, avec la taille apparente d'une gousse de 5 cm de long, aux contours mal définis.
Trois autres objets apparurent à ce stade, de forme circulaire et d'apparence similaire au premier objet, mais de taille plus réduite. La proportion
apparente entre le premier et ces trois objets était approximativement de 10/1.
c) Initialement, le premier objet semblait être d'une intensité comme ... une augmentation apparente de son diamètre...
La Flying Saucer Review a également parlé de ce cas dans son vol.4, n°3, mai-juin 1958 (donc à peu près six mois après l'observation, ça reste proche).
J'en donne la traduction française :
DES PILOTES DE L'ARMÉE DE L'AIR PORTUGAISE PASSENT 40 MINUTES AVEC DES SOUCOUPES
Dans la nuit du 4 septembre 1957, un vol de quatre F-84 Thunderjets américains a décollé de la base aérienne d'Ota, au Portugal, pour une mission de
navigation de routine. La nuit était claire, la lune presque pleine, et la visibilité air-sol signalée en vol était bien supérieure à 80 kilomètres.
Les pilotes étaient le capitaine Jose Lemos Ferreira, commandant de bord, le sergent Alberto Gomes Covas, le sergent Manuel Neves
Marcelino et le sergent Salvador Alberto Oliveira. Le capitaine Ferreira reprend l'histoire :
Après avoir atteint Grenade, à 20 heures 06, et entamé un virage à gauche pour changer de cap vers Portalegre, j'ai
remarqué sur ma gauche et au-dessus de l'horizon une source de lumière très inhabituelle... Après trois ou quatre minutes, j'ai décidé d'en faire part
aux autres pilotes. À ce moment-là, le pilote volant sur mon aile droite m'a dit qu'il l'avait déjà remarquée. Les deux autres pilotes volant sur mon
aile gauche ne l'avaient pas encore vue. Ensemble, nous avons commencé à échanger des commentaires par radio sur notre découverte et nous avons
envisagé plusieurs solutions, mais aucune ne semblait être une explication raisonnable pour la chose que nous observions à ce moment-là. La chose
ressemblait à une étoile très brillante, inhabituellement grande et scintillante, avec un noyau coloré qui changeait constamment de couleur, passant
du vert profond au bleu en passant par des colorations jaunâtres et rougeâtres.
Les pilotes ont écarté la possibilité que l'objet ait pu être soit Vénus, soit une autre planète ou une étoile, soit un ballon ou un avion. Le capitaine
Ferreira poursuit :
Tout d'un coup, l'objet a grandi très rapidement, prenant cinq ou six fois son volume initial, devenant un véritable
spectacle... [puis] aussi vite qu'il avait grandi, [il] a
décidé de rétrécir, disparaissant presque à l'horizon, devenant un petit point jaune à peine visible. Ces expansions et contractions se sont produites
plusieurs fois, mais sans devenir périodiques et en marquant toujours une pause, plus ou moins longue, avant de modifier le volume. La position
relative entre nous et la chose était toujours la même, c'est-à-dire environ 40° sur notre gauche, et nous n'avons pas pu déterminer si les
changements de dimensions étaient dus à des approches et des reculs très rapides sur le même vecteur ou si les modifications avaient lieu de façon
stationnaire..... Après sept ou huit minutes, l'objet est descendu progressivement sous l'horizon et s'est disloqué pour se positionner à environ
90° sur notre gauche.... À 20 h 38, j'ai décidé d'abandonner la mission et de faire un virage à bâbord dans la direction générale de Coruche puisque
personne ne prêtait attention à l'exercice. Nous avons tourné d'environ 50° à bâbord, mais l'objet a maintenu sa position à 90° sur notre gauche, ce
qui n'était pas possible avec un objet stationnaire.
Le phénomène se trouvait alors bien en dessous de notre niveau de 25 000 pieds et apparemment très proche, présentant une couleur rouge vif et
ressemblant à une gousse de haricot courbée à bout de bras. Après plusieurs minutes sur notre nouvelle trajectoire, nous avons découvert un petit
cercle de lumière jaune qui sortait apparemment de la chose et, avant que notre surprise ne soit passée, nous avons détecté trois autres cercles
identiques sur la droite de la chose. L'ensemble se déplaçait, les positions respectives changeant constamment et parfois très rapidement. Nous
n'avons pas pu évaluer la distance qui nous séparait d'eux, bien qu'ils se trouvaient en dessous de nous et apparemment très près. En tout cas, la
grande « chose » semblait dix à quinze fois plus grande que les cercles jaunes et était apparemment le directeur des opérations puisque les autres se
déplaçaient autour d'elle.
Alors que nous étions près de Coruche, le « gros truc » a soudainement et très rapidement effectué ce qui ressemblait à un piqué, suivi d'une montée
dans notre direction. Tout le monde s'est alors déchaîné et a failli rompre la formation en traversant et en devançant l'OVNI. Nous étions tous très
excités et j'ai eu du mal à calmer les choses. Dès que nous avons traversé, tout a disparu en quelques secondes et nous avons atterri sans autre
incident. Entre le moment où nous avons détecté l'OVNI et le spectacle final, il s'est écoulé quarante minutes, au cours desquelles nous avons eu
l'occasion de vérifier toutes les explications possibles du phénomène. Nous n'avons tiré aucune conclusion, si ce n'est qu'après cela il ne
faut plus nous resservir la vieille routine des Vénus, des ballons, des avions et autres, qui a été donnée comme panacée générale pour presque tous
les cas d'OVNIs[souligné par nous].
Au moment où les pilotes ont eu leur rencontre, l'Observatoire météorologique de Coimbra a enregistré des variations localisées extraordinaires du champ
magnétique terrestre, comme le prouvent les cartes de cet établissement.
Si on fait une synthèse des éléments dont on dispose, les avions ont décollé à 20 h 21 locales (19 h 21 TU) de la base d'Ota, près de Lisbonne, et se sont
dirigés vers Grenade en Espagne, puis ont viré pour aller vers Portalegre, et ensuite Coruche. Soit un circuit de 504 km à l'aller, et 501 km (401+100) au
retour. Ils évoluaient à une altitude de 25000 pieds, soit 7,6 km.
L'observation aurait débuté lors du virage au niveau de Grenade à 21 h 06, et se serait terminée quarante minutes plus tard peu avant l'arrivée à Coruche.
Et si on comprend bien, les avions devaient regagner leur point de départ Ota après avoir effectué une manœuvre de descente à Coruche.
On a aussi l'indication de deux points de passage à l'aller, lorsque l'escadrille a atteint son altitude nominale et lorsqu'elle est passée à Palma Del
Rio, et ces points sont bien alignés sur le trajet Ota-Grenade, les avions se sont donc déplacés en ligne droite à l'aller.
Voici donc la trajectoire effectuée lors de ce vol :
On ne nous parle pas de la vitesse des avions, mais on peut l'estimer. On sait que les F-84 peuvent voler à un peu plus de 1000 km/h, mais ils n'allaient
vraisemblablement pas à leur vitesse maximale. Puisque l'observation a duré environ 40 minutes et la presque totalité du trajet de retour, de 501 km, cela
correspond à une vitesse moyenne de 751 km/h ou un peu moins si l'observation s'est terminée bien avant Coruche.
Et à l'aller, on sait que les avions ont atteint leur altitude nominale 13 minutes après leur décollage, après avoir parcouru une distance de 139 km, soit
une vitesse moyenne de 643 km/h pendant cette phase d'ascension. Ils auraient ensuite volé sur une distance de 365 km entre ce point et Grenade qu'ils ont
atteint à 21 h 06, soit une durée de 32 minutes et une vitesse de 684 km/h.
Ça reste cohérent.
Quant à la description, en s'appuyant sur d'autres éléments, le premier objet s'est présenté à 40° sur la gauche, d'abord sous la forme d'un point
brillant jaune, puis a augmenté de diamètre, cela à plusieurs reprises... On sait que s'agissant d'un point lumineux, les témoins interprètent souvent une
variation de luminosité comme une variation de diamètre. Et on a vu que les articles de presse parus à l'époque mentionnaient aussi que l'objet changeait
de couleur.
Et plus tard il a pris la forme d'une gousse (ou saucisse) aux contours indistincts, d'une longueur apparente de 5 cm. Ensuite sont sortis quatre objets
similaires au premier objet apparu mais environ dix fois plus petits (donc sans doute dix fois moins lumineux).
Pour plus de détails, on peut écouter le reportage qu'en a fait encore la télévision RTP2 en 2008, d'après les
indications du CTEC, sous le titre Encontres imediatos — Ovni Caso Lemos Ferreira. On peut trouver le reportage en portugais
sur youtube,
ou avec sous-titres français sur Dailymotion en trois parties (partie1,
partie2, partie3),
mais avec une moins bonne qualité d'image. Étant donné son intérêt, nous avons retranscrit le texte en
français.
Il y a une surprise dès le début avec le résumé de l'historien du CTEC Joaquim Fernandes, qui explique que ce cas « s'est déroulé pendant un vol de
routine, un vol nocturne entre la base d'Ota, Cordoba (Cordoue), Cáceres en Espagne, et retour à la base d'Ota ». Soit ce trajet indiqué dans le reportage :
Or, on a vu que d'après le rapport du Capitaine Ferreira à l'armée de l'Air, le vol allait en fait à Grenade et non Cordoue, et revenait par Portalegre et
non Cáceres !
C'est apparemment Ferreira lui-même qui a de mauvais souvenirs de cette mission après une cinquantaine d'années, puisqu'il confirme cette fausse
trajectoire dans son interview qui suit... C'est compréhensible après autant de temps, mais ce qui l'est moins c'est que les scientifiques du CTEC
s'appuient sur ces souvenirs très anciens plutôt que sur le récit immédiat de Ferreira dans le rapport de l'armée de l'Air qui leur avait pourtant été
fourni depuis longtemps ! Et cela permet d'avoir une certaine méfiance vis à vis de ce reportage et des commentaires des enquêteurs du CTEC.
Une lumière qui semble changer de couleur, c'est assez typique des étoiles très lumineuses lorsqu'elles sont vues très près de l'horizon. Quant aux
changements d'intensité, on a peut-être l'explication par la présence d'une « légère brume » à une altitude de 6000 pieds (un peu moins de 2000 m).
Ferreira précise que la visibilité était excellente à leur altitude, et pense donc que cette brume ne peut pas avoir affecté sa vision de l'objet... Mais
il pensait avoir affaire à un objet proche, alors que si c'était un astre près de l'horizon sa lumière pouvait bien traverser la brume, dont l'épaisseur
et l'opacité pouvaient varier au cours du trajet.
Or, que trouve-t-on vers l'ouest très près de l'horizon à 20 h 06 TU ? Vénus, bien plus brillante que toutes les étoiles avec une magnitude proche de -4,
à moins d'un degré au-dessus de l'horizon et à un azimut de 261°, soit à 4° de la position estimée de l'objet par les pilotes qui se dirigeaient au cap
305°... Ça paraît un peu gros comme coïncidence, d'autant que les pilotes ne mentionnent pas du tout cette planète très brillante juste dans la
direction où ils voyaient leur ovni !
Quant aux scientifiques du CTEC, ils ont envisagé cette hypothèse si l'on en croit leur astrophysicien Paolo Gali Macedo interrogé dans le reportage
d'RTP2 :
Il n'y a qu'au début de l'observation que Vénus était visible clairement, mais déjà très proche de la ligne d'horizon. Donc, en 40 minutes, elle avait
disparu de l'horizon, on ne peut pas penser que ce soit Vénus.
Bon, si c'est un astrophysicien qui le dit ça doit être vrai... Mais vérifions tout de même : si elle était à moins de 1° au-dessus de l'horizon
à 21 h 06, Vénus devait se coucher à 21 h 10, donc effectivement bien avant la fin de l'observation...
Oui mais non ! D'abord parce que depuis un avion à 7600 m d'altitude l'horizon se trouve à 2,8° sous l'horizontale, et donc depuis l'avion Vénus se
couchait à 21 h 23.
Ça ne suffit toujours pas, mais il ne faut pas non plus oublier que l'avion se déplaçait vers l'ouest. La fin de l'observation aurait eu lieu vers Coruche
au Portugal, et là depuis l'avion Vénus ne se couchait qu'à 21 h 39... Elle n'était donc plus visible aux yeux des pilotes à cette heure, quelques minutes
avant la fin de l'observation, et même encore quelques minutes avant si les avions avaient commencé leur descente.
Elle était visible à Portalegre jusqu'à 21 h 35, alors que les avions devaient passer au-dessus de cette ville à 21 h 38 s'ils volaient bien à la vitesse
de 751 km/h. Vénus aurait donc disparu peu avant ce passage au-dessus de Portalegre.
Si on en croit Ferreira, c'est justement après le virage à Portalegre (il dit Cáceres) que l'objet a changé de forme, pour devenir une sorte de « saucisse »
dentelée de couleur rouge, d'où sont sortis peu après quatre objets beaucoup plus petits...
Et ailleurs le pilote dit que cet objet se trouvait à 90° à gauche du cap suivi par l'avion, après ce virage d'une soixantaine
de degré vers la gauche, donc à environ 155° d'azimut, très loin de Vénus.
Mais on a vu que Vénus n'était sans doute plus visible après le virage, et on ne sait pas vraiment si l'objet de forme différente a été vu immédiatement,
ni si la fin de l'observation a eu lieu au-dessus de Coruche ou nettement avant lorsque les avions ont commencé à perdre de l'altitude. D'après l'article
de la FSR, c'est avant le virage vers Coruche, donc avant le passage au-dessus de Portalegre à 21 h 38, que « l'objet est descendu
progressivement sous l'horizon pour se positionner à environ 90° sur notre gauche ». Cette dernière phase n'a donc duré que quelques minutes et peut-être moins,
et quant au mouvement ayant provoqué la dispersion de la formation il a été extrêmement rapide.
On peut se demander si cette dernière phase ne serait pas en lien avec la fameuse « extraordinaire variation du champ magnétique terrestre ». Le
Géophysicien Paolo Ribeiro donne quelques informations à ce sujet dans le reportage :
Le 4 septembre 1957 se développait une tempête qui avait commencé depuis le 2, et l'observation s'est produite très près
de la période de maximum d'intensité de cette tempête. On a mesuré des indices de l'activité du champ magnétique de 8 sur une échelle de 9 c'est de fait
beaucoup. Le phénomène me paraît correspondre à l'ensemble de phénomènes désignés par ball lightning. En
accord avec les descriptions, s'agissant d'une boule de lumière, avec scintillements et variations de lumière, on pourrait tomber dans ce type de
phénomènes. Cependant il y a des particularités assez anormales dans l'ensemble des phénomènes anormaux décrits comme des boules de lumière.
Les « boules de plasma » ont été souvent évoquées pour expliquer des ovnis, mais on n'a jamais démontré même leur existence. Le fait est qu'en période de
maximum solaire, les tempêtes magnétiques ne sont pas rares, et on se trouvait bien dans une telle période en 1957/1958... Il y a eu plusieurs tempêtes géomagnétiques
intenses au mois de septembre 1957, et celle du 4 et 5 septembre, incluant la date de l'observation, a été une des plus importantes. Des aurores boréales
ont été vues à plusieurs reprises en janvier et septembre 1957 à des latitudes faibles, notamment en Espagne et au Maroc. L'observation a donc bien eu lieu
pendant une tempête géomagnétique importante, mais étant donné la durée de cet événement cela peut relever d'une coïncidence.
Mais on peut penser aussi, justement, à une aurore polaire... N'oublions pas que ces phénomènes peuvent être vus de plus loin et être beaucoup plus
spectaculaires depuis un avion à haute altitude, et présenter des aspects très variés. La « lueur rouge en forme de saucisse » ayant précédé l'apparition
des trois petites boules, et d'une dimension apparente de 5 cm, fait plus penser à un tel phénomène qu'à Vénus, mais une aurore boréale aurait dans tous les cas
été plutôt vue au nord, alors que là il semble que c'était pratiquement plein sud... L'explication serait possible si la direction
avait été 90° à droite du cap suivi par les avions plutôt que 90° à gauche, ce qui n'est pas impossible puisque cette direction n'est mentionnée
que dans un article de la SFR paru six mois après l'observation et traduit du portugais...
Le fait est qu'à grande distance, ce qui est toujours le cas à la latitude du Portugal, on ne voit que la partie haute d'une aurore polaire, à une altitude
de 250 km et plus, et elle présente une couleur rouge (à une distance plus faible du phénomène la couleur principale est le vert), et elle se présente
comme un arc rougeâtre près de l'horizon...
Voici par exemple une photo d'aurore boréale prise récemment au Portugal, le 11 mai 2024 (on la voyait aussi en France) par Rodolfo Ferreira :
Ça évoque assez bien la description de la « saucisse rouge dentelée » vue par les pilotes, mais il reste donc le problème de la direction. Là encore,
tout serait beaucoup plus clair si on avait le rapport immédiat des pilotes pour l'armée de l'Air.
L'hypothèse d'une aurore polaire pourrait aussi expliquer le brusque mouvement du gros objet, qui a paru se rapprocher des avions au point de les forcer
à se disperser, puisque ces aurores peuvent présenter de brusques fluctuations... En l'occurrence, si l'aurore avait gagné une latitude plus faible,
elle aurait paru s'élever et se rapprocher des avions.
Notons qu'en direction du sud, il y avait la lune, aux trois quarts pleine, à un azimut de 167° et une hauteur angulaire de 33°... C'est à peu près
la direction mentionnée pour la « saucisse rouge » (azimut d'environ 155°) s'il n'y a pas eu d'erreur, et il se pourrait qu'elle ait éclairé
un nuage de forme un peu bizarre, mais on ne comprend pas trop la couleur rouge avec une lune haut dans le ciel.
Et on s'interroge aussi sur les quatre petites boules de lumières qui sont apparues à la fin de l'observation... Les enquêteurs se demandent s'il ne pouvait pas
s'agir d'une autre formation d'avions, espagnols puisqu'ils se trouvaient encore au-dessus de l'Espagne... On peut aussi penser à un météore qui se serait fragmenté,
ou encore à des fluctuations d'une aurore polaire.
On en est donc réduits à des conjectures sur la dernière phase de l'observation, mais ce qui paraît évident c'est que la première, au moins jusqu'à Portalegre
et ayant duré une trentaine de minutes, s'explique parfaitement par la présence de Vénus. Et on peut comprendre que les pilotes qui discutaient depuis une
demi-heure sur l'identité de cette étonnante lumière changeant d'intensité et de couleur, sans comprendre de quoi il s'agissait, aient pu ensuite être
très impressionnés par un autre phénomène qui ne les aurait pas fait autant réagir en d'autres circonstances.
Dans tous les cas, l'armée n'a pas mené d'enquête à ce sujet, se contentant de prendre la déposition de Lemos Ferreira, et c'est bien plus tard, en 1975,
que les enquêteurs du CTEC s'y sont intéressés et ont eu la communication du rapport de l'armée de l'Air.
Peut-être pourra-t-on mieux se représenter ce qui s'est passé si un jour ces « scientifiques » se décident à partager leurs informations concernant les
cas « déclassifiés » de l'armée de l'Air portugaise, mais ils ne semblent pas vraiment désireux de le faire !
L'observation de Castelo de Bode
On peut enfin se pencher sur la troisième observation « déclassifiée », celle qui a eu lieu au-dessus du barrage de Castelo de Bode.
Guerra en parle lui-même dans le livre de Leslie Kean :
Un autre incident s'était produit au Portugal avant le mien. Un collègue pilote de l'Air Force avait observé une partie d'un objet derrière des nuages
et qui semblait avoir deux ou trois fenêtres. Il avait perdu le contrôle de son avion Dornier 27; celui-ci avait commencé à tomber et il n'avait pu
reprendre le contrôle qu'au-dessus des arbres. Ses commentaires avaient été enregistrés par le contrôleur aérien qui pensait que c'était la fin. Je me
trouvais sur la base lorsqu'il a atterri et il en a immédiatement parlé avec quelques-uns d'entre nous, puis il a rédigé un rapport. Les ingénieurs ont
essayé de comprendre comment il avait perdu le contrôle. Plus tard, quelques ingénieurs extérieurs à l'Air Force se sont rendus au hangar où se trouvait
l'avion parmi beaucoup d'autres avions identiques. Ils ont été capables de localiser son avion à l'aide d'un appareil qui mesure les radiations; son
appareil présentait un taux de radiations élevé et cela ne pouvait être expliqué.
Peu après l'observation, le cas avait fait l'objet d'une enquête dans la revue Insólito n°36 de novembre/décembre 1978, et n°37 de janvier/mars 1979.
Ces revues sont introuvables sur Internet, mais il y a eu un résumé dans
un numéro de la même revue paru en 2005,
que nous avons traduit :
Le 17 juin 1977, incident avec un avion DO-27 au-dessus du barrage de Castelo de Bode,
près de Tomar.
Événement que l'on n'oublie jamais
RENCONTRE RAPPROCHÉE DE CASTELO DE BODE
L'un des cas les plus paradigmatiques connus au Portugal de rencontre rapprochée avec des objets volants non identifiés est ce qui est arrivé
à un pilote de l'armée de l'Air portugaise, près de Tomar.
« L'incident » s'est produit le 17 juin 1977 au-dessus du barrage de Castelo de Bode,
près de Tomar. En effet, José Francisco Rodrigues, alors âgé de 23 ans, Sergent de la Force Aérienne Portugaise appartenant à l'Escadron 31
de la Base Aérienne nº3, à Tancos, avec plus de 850 heures de vol, a participé à un événement qu'il n'oubliera jamais.
« Je choisissais dans quel nuage entrer » lorsqu'il aperçut quelque chose de sombre, de très sombre, au milieu d'un nuage,
qui contrastait avec le reste qui était blanchâtre; à ce moment-là, il devait être à la verticale de ce qui est considéré comme une sous-station du barrage.
Il a immédiatement pensé qu'il s'agissait d'un avion « cargo » effectuant aussi un « vol aux instruments » et que
« cette tache sombre » était le nez du radar, mais il s'est vite rendu compte que le nez de l'avion serait extrêmement petit
par rapport au « corps » qu'il voyait.
Il a commencé à tourner à gauche, tout en contactant la tour pour lui demander s'il y avait du « trafic » dans la zone. Informé négativement,
il a demandé à la société de contacter BATINA (radar) pour enquêter sur l'existence d'une activité aérienne non identifiée dans cette zone.
Informé négativement, il a continué à tourner vers la gauche jusqu'à ce qu'il ait parcouru 315º. C'est alors que l'objet est apparu à environ 6 mètres
à ses 11 heures. À cette hauteur, ce qui semblait être la moitié inférieure de ce « corps », qui mesurerait entre 12 et 15 mètres de long, était
clairement visible tandis que le reste était couvert de nuages, semblant stationnaire ou se déplaçant à vitesse réduite.
Il l'a observé pendant environ 3 secondes, ce qui lui a suffi pour constater qu'il était sombre, presque noir, avec des saillies qu'il supposait être des fenêtres
– peut-être trois, quatre ou cinq – de couleur blanc jaunâtre et « qui n'étaient pas transparentes ».
Le sergent José Francisco Rodrigues pense que l'objet est parti à grande vitesse, car brusquement il ne pouvait plus le voir. Selon le témoin,
en une fraction de seconde il y a eu plusieurs événements qui se sont produits presque simultanément : ainsi, en observant l'OVNI et après environ trois secondes
le DO-27 est entré en « perte » !
Selon ses mots, l'avion est entré dans « une vrille incontrôlable », ce qui signifie qu'il n'a plus vu le « phénomène ».
Le pilote pense que le « piqué » a très probablement été causée par une défaillance des courants d'air dans l'aile, car le moteur manifestait de fortes vibrations
qui ont provoqué la « perte de l'avion », complètement hors de ses caractéristiques. Le manque de portance du DORNIER était tel que le sergent Francisco déclara :
« Je pensais que je ne m'en sortirais pas cette fois-là. » Et il continue « ...J'ai activé les commandes afin de récupérer l'avion sans qu'il réagisse;
je suis même arrivé à l'activer, traversant les commandes pour tenter de récupérer, en avançant le manche de commande; cependant, l'avion a rapidement atteint 260,
puis 330 km/h. J'ai encore essayé de me remettre du piqué, ce que j'ai finalement réussi très près du sol. Je crois même que j'ai fini par toucher les arbres en bas;
à son tour, le Gyro (Gyroscope Directionnel Électrique) est devenu fou, puisque, quand j'ai récupéré, il présentait un déphasage de 180 degrés avec la boussole;
c'est-à-dire qu'après avoir récupéré, j'ai remarqué que je me dirigeais vers le nord et non vers le sud ».
Cette observation a fait l'objet d'un rapport préliminaire envoyé à l'État-Major général de l'armée de la Force Aérienne Portugaise.
Certaines personnes ont pu constater depuis le sol que l'avion faisait un bruit énorme, semblant tomber comme une « feuille morte ».
Le pilote José Francisco
Croquis de l'objet observé
Lorsque le pilote est revenu à la BA nº3, il a subi des examens médicaux, concluant qu'il était en parfaite santé, après avoir préparé un rapport sur ce qui s'était passé
à l'État-Major général de l'Armée de l'Air. Certains collègues du pilote ont même insinué que le sergent José Francisco avait vu le barrage de Castelo de Bode sens dessus-dessous.
Mais il rétorque : « Je ne suis pas fou ! Si j'avais volé à l'envers, je me serais enfoncé dans la tête les quatre vis qui dépassent du toit de l'avion. »
L'enquêteur, José Garrido, est le fondateur du CEAFI (Centro de Estudos Astronómicos e de Fenómenos Insólitos, Centre d'études astronomiques et des phénomènes insolites),
une association sur les ovnis et les mystères se réclamant du mouvement du réalisme fantastique. Ce groupe éditait la revue Insólito (dont le directeur était l'omniprésent
Joaquim Fernandes). Plus tard, le CEAFI est devenu le CNIFO et Insólito est devenu Anomalia, on retrouve toujours les mêmes personnes...
Le dessin de l'ovni était plus détaillé dans le numéro d'origine de la revue :
Et le reportage du National Geographic reproduit le dessin original du pilote dans le rapport de l'armée de l'Air :
José Garrido a aussi publié sur sa page les deux premières pages du rapport préliminaire de l'armée de l'Air, qu'il a obtenu :
Étant donné la définition très réduite c'est assez difficile à lire, surtout quand on ne connaît pas le portugais.
La première page n'est qu'une lettre de politesse adressée à José Garrido par le Chef de Cabinet de la Force Aérienne Portugaise qui lui a envoyé ce rapport.
La seconde est plus intéressante, j'ai donc tenté de la traduire et si ça n'est pas parfait je ne pense pas en avoir déformé le sens :
1. Outre le ?? référencé, un rapport préparé par le pilote impliqué dans l'événement est envoyé.
2. En ???, un contrôleur de service à la tour entend, sur la fréquence privée de ??, un cri pour lequel il ne trouve pas d'explication. Il suppose que ce cri a été émis
par le pilote concerné, lors de son observation d'un OVNI.
3. Après avoir pris contact avec le pilote, la tour l'a informé qu'au moment de l'incident, il n'y avait aucun écho radar avec aucune cible dans la zone où se trouvait l'avion.
4. Après l'atterrissage, le pilote a été envoyé en observation au service médical de la base, qui n'a rien trouvé d'anormal.
5. Le pilote en cause a 850 heures de vol, il a son brevet de pilote depuis 5 ans. C'est un bon professionnel sur lequel il n'y a rien à rapporter.
6. Une inspection approfondie de l'avion impliqué, DO-2T 3460, est en cours. Si, finalement, des anomalies sont détectées, elles seront immédiatement communiquées.
Ça ne nous apprend pas grand-chose : le contrôleur de la tour a entendu un cri à la radio lors de l'observation, le radar n'a rien repéré, le pilote a subi
un examen médical à son retour à la base qui n'a rien révélé d'anormal, c'est un bon professionnel sur lequel on n'a signalé aucun problème, et l'avion a été inspecté en profondeur
mais on n'a pas le résultat.
On se rappelle que Julio Guerra, le pilote d'une autre observation, indique 35 ans plus tard dans le livre de Kean que des ingénieurs avaient identifié l'avion concerné
au fait qu'il présentait un taux de radiations anormalement élevé, mais si le rapport avait indiqué cela l'enquêteur d'Insólito n'aurait pas manqué de le signaler...
Ce détail ressemble à une amélioration du cas, assez inévitable après quelque 35 ans, mais il serait intéressant de savoir si cette amélioration vient de Julio Guerra
ou du témoin direct José Francisco.
Le cas a lui aussi fait l'objet d'un documentaire dans la série Encontros imediatos
de la chaîne RTP2 en 2008. Je n'ai pas trouvé de traduction en anglais ou français et la traduction automatique de Youtube est assez catastrophique, je n'ai donc pas tout compris...
Peut-être que quelqu'un connaissant le portugais pourra nous éclairer.
Et enfin, le National Geographic a aussi fait un reportage sur ce cas en 2012, dans sa série les Ovnis envahissent l'Europe (la même qui a relaté le cas Guerra). On peut en trouver
la version française sur Daily Motion (à partir de 32'26"), nous en avons fait
la retranscription.
Résumons un peu cette observation à la lumière de toutes ces informations...
On apprend que le pilote est jeune (23 ans), et pas très expérimenté... 850 heures de vol, ça n'est pas une expérience énorme, et on nous dit aussi qu'il a
son brevet de pilote depuis cinq ans, il est étonnant qu'il n'ait fait que 850 heures de vol en cinq ans.
L'observation elle-même n'est pas très convaincante : l'ovni a été vu à deux reprises pendant seulement quelques secondes à chaque fois, après que le pilote eut pénétré dans un nuage,
et la description semble assez floue... « Une forme sombre qui contrastait avec le blanc d'un des nuages », d'après le reportage dans RTP2. L'objet lui-même était
d'après le pilote partiellement caché par les nuages alors qu'il était censé être à seulement quelques mètres de l'avion, ça ne semble pas très crédible :
ça n'est qu'à une certaine distance qu'un nuage peut paraître vraiment opaque. Il est donc manifeste que le pilote a largement sous-estimé la distance de l'objet.
Dans le reportage de National Geographic, un ingénieur radar et un météorologue pensent à un mirage causé par une inversion de température... Ça paraît un peu tiré par les cheveux,
et compte tenu des circonstances de l'observation, au milieu de nuages, il me semble plus simple de penser à une formation nuageuse de forme étrange : avec beaucoup de nuages
et un soleil très haut dans le ciel et en direction de l'objet (il était presque midi et l'avion se dirigeait vers le sud), il peut y avoir des effets assez surprenants.
On peut aussi penser à un ballon météorologique, embarquant trop peu d'instruments pour être repéré par les radars ou ayant perdu la nacelle portant les instruments.
Bref rien de bien enthousiasmant avec un observateur unique, et l'étrangeté du cas réside essentiellement dans les effets sur l'avion et ses instruments.
D'abord, le fait que l'avion ait brutalement perdu de l'altitude juste après l'observation, au point que le pilote a cru sa dernière heure venue. Mais il y a
des contradictions sur ce détail... Les divers reportages indiquent que le moteur est toujours resté en marche mais qu'il vibrait de façon impressionnante,
mais les deux pêcheurs qui ont assisté à l'incident (et qui n'ont vu aucun ovni) indiquent que le moteur s'est arrêté lorsque l'avion a commencé à piquer, et s'est remis en marche
lorsque le pilote a repris le contrôle.
L'autre perturbation importante supposément causée par l'objet est le dérèglement du compas magnétique. Le reportage de National Geographic indique que
« soudain, son compas commence à tourner frénétiquement », mais dans les autres rapports il est indiqué plus simplement qu'il indiquait une direction opposée à celle
du compas gyroscopique.
Dans la revue Insólito qui est la référence la plus fraîche dont on dispose, le pilote indique : « à son tour, le Gyro (Gyroscope Directionnel Électrique) est devenu fou,
puisque, quand j'ai récupéré, il présentait un déphasage de 180 degrés avec la boussole; c'est-à-dire qu'après avoir récupéré, j'ai remarqué que je me dirigeais vers le nord
et non vers le sud ».
C'est curieux qu'il pense que le gyroscope soit devenu fou, puisqu'en présence d'un champ magnétique intense c'est plutôt la boussole qui aurait été affectée. Un gyroscope, c'est
une masse en rotation qui n'est soumise à aucun couple de force, elle garde donc son cap quel que soit l'environnement.
Le même article indique : « Certains collègues du pilote ont même insinué que le sergent José Francisco avait vu le barrage de Castelo de Bode sens dessus-dessous ».
On peut se demander ce que cette idée serait censée expliquer : que l'avion ait volé à l'endroit ou à l'envers, cela ne devrait pas changer la direction indiquée
par le compas magnétique ou gyroscopique... Peut-être voulaient-ils plutôt expliquer la panne de moteur, puisque dans beaucoup d'avions l'alimentation en carburant est perdue
si l'avion vole à l'envers (nous ignorons ignore si c'est le cas avec le Dornier 27).
Une autre phrase du pilote dans le reportage de RTP2 donne à réfléchir :
À midi, à la verticale du barrage de Castelo de Bode, il n'y avait plus que quelques nuages et j'ai décidé de les traverser. Je n'aime pas les instruments.
Rodrigues n'aime pas les instruments, ça laisse entendre qu'il a plus tendance à se fier à ses propres perceptions qu'aux instruments, et c'est là une des erreurs
les plus fréquentes des pilotes, surtout peu expérimentés, responsable de bien des accidents... Le pilote n'aurait-il pas imaginé ces perturbations des instruments en constatant
qu'elles étaient incompatibles avec sa propre perception de ses mouvements, alors qu'il traversait des nuages et était perturbé par une observation étrange ?
Ce que l'on aimerait avoir, c'est donc le résultat de l'inspection de l'avion, aussi bien pour le moteur que pour les instruments... On a vu que l'enquêteur
José Garrido a donné sur son site la copie de la première page du rapport de l'armée de l'Air indiquant : « Une inspection approfondie de l'avion impliqué est en cours.
Si, finalement, des anomalies sont détectées, elles seront immédiatement communiquées. » On sait que les enquêteurs ont reçu la totalité du rapport de l'armée de l'Air,
pourquoi donc ne fournissent-ils pas plutôt les résultats de cette inspection ?
Et on sait que ce rapport contient aussi le témoignage immédiat du pilote, ça serait donc intéressant de le voir plutôt que ses déclarations un, dix ou trente ans
après les faits !
Là encore, ce témoignage est introuvable, mais par contre le reportage du National Geographic montre bien qu'il a été communiqué à Joaquim Fernandes du SPEC en 1999 :
Traduction :
Pour le Dr Joaquim Fernandes
Objet : RAPPORT DU SERGENT/PILOTE JOSÉ F. RODRIGUES
Réf : Votre lettre du 16 mars 1999
Son Excellence le Chef d'État-Major de la Force Aérienne me charge de vous remercier des souhaits formulés dans la lettre en référence et vous souhaite le meilleur
dans la poursuite des objectifs que se propose d'atteindre la Société que Votre Excelence dirige.
Son Excellence me charge en outre de vous envoyer le rapport demandé et de renouveler à Votre Excellence notre disponibilité pour collaborer à la SPEC
pour tout ce qui concerne la compétence et les capacités de l'armée de l'Air.
Enfin, dernier « effet électromagnétique » présumé de l'ovni, d'après les deux reportages télévisés de 2008 et 2012, le barrage hydroélectrique de Castelo de Bode
aurait subi une chute d'énergie considérable et inexpliquée pendant que l'avion de Francisco Rodrigues chutait en piqué. Mais on ne trouvait rien de tel
dans les récits plus immédiats de l'incident, et on ne nous dit pas sur quoi repose cette information : vient-elle d'un document de la centrale,
ou d'un simple témoignage d'un membre du personnel (recueilli quand ?) On ne nous dit pas non plus si une telle baisse d'énergie intempestive se produit quelquefois,
ni à quel point il y a une coïncidence horaire avec la chute de l'avion... Bref on ne sait rien sur cette nouvelle information extraordinaire...
En bref, comme pour les deux autres cas portugais « déclassifiés » par l'armée de l'Air portugaise, on aimerait que les membres du Spec/Ctec qui ne cessent de se présenter
comme les scientifiques ayant travaillé en étroite collaboration avec l'armée portugaise produisent publiquement une enquête vraiment scientifique,
basée sur des documents originaux, plutôt que des reportages journalistiques accumulant les affirmations tardives et non sourcées.